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damentales sur l’organisation de la recherche

1.4 Information et connaissance dans la th´ eorie de la firme

La th´eorie n´eoclassique consid`ere l’activit´e de R&D comme pos´ee a priori. Les technolo- gies ´etant d´efinies comme un ensemble de techniques exog`enes, les firmes r´eagissent de mani`ere m´ecanique `a leur environnement en se conformant aux r`egles du calcul marginal. Comme le souligne Nelson (1991) “the treatment of technological and organizational ‘in- novation’ [...] simply takes the given ’choice set’ and ‘maximizing over it’ presumptions

Chapitre 1 - Information et connaissance dans la th´eorie ´economique of standard neoclassical theory and applies them to ‘innovation’. That is, innovation is treated as basically like any other choice. Investment costs may need to be incurred before the new product or organizational design is ready to be employed, but in neoclassical theory this is true of other capital goods like a bridge or a machine” (p. 66). La contestation de l’hypoth`ese d’omniscience et d’incertitude probabilisable a permis un renouvellement des th´eories de la firme, qui se sont attach´ees `a entrer au sein de la boˆıte noire.

Au lieu d’´etablir un historique de l’´evolution des th´eories de la firme (cf. Coriat & Weinstein (1995)), nous pr´ef´erons partir des travaux de Fransman (1994), Cohendet & Llerena (1999) et Amesse et al. (2006) qui distinguent les diff´erentes th´eories de la firme sur la base de la diff´erence fondamentale qui s´epare analytiquement les concepts d’information et de connaissance. Deux types de firmes sont alors distingu´ees : la firme comme processeur d’informations et la firme comme processeur de connaissances. Plus particuli`erement, l’int´erˆet des travaux de Cohendet & Llerena (1999) et Amesse et al. (2006) r´eside dans le fait que les auteurs ne voient pas d’opposition conceptuelle, mais plutˆot une forme de compl´ementarit´e entre ces deux conceptions fondamentales de la firme.

1.4.1

La firme comme processeur d’informations

Les diff´erentes approches post-coasiennes de la firme, et notamment la th´eorie des ´equipes (Alchian & Demsetz 1972), celle de l’agence (Jensen & Meckling 1976) et celle des coˆuts de transaction (Williamson 1985) assimilent la connaissance `a de l’information. En raison de l’existence d’imperfections et d’asym´etries d’information, la firme est con¸cue comme une r´eponse aux d´efaillances de march´e. C’est donc une vision essentiellement contractuelle de la firme qui est propos´ee, l’ensemble de ces approches s’accordant sur un principe essentiel : si la firme se trouve en situation d’incertitude informationnelle, c’est par son portefeuille de contrats qu’elle peut atteindre une efficience ´economique substantielle. A travers la mise en place d’incitations appropri´ees, la firme permet dans un contexte d’incertitude de g´erer les conflits individuels et de canaliser les comportements opportu- nistes.

Cohendet & Llerena (1999) soulignent que ces diff´erentes approches adoptent une vi- sion d´efensive de la firme dans la mesure o`u les firmes sont plac´ees face `a un manque `a gagner qu’elles doivent, par divers arrangements contractuels, combler (Nesta 2001). La firme se situe dans un contexte d’allocation de ressources rares `a capacit´e donn´ee. C’est

1.4 Information et connaissance dans la th´eorie de la firme

une analyse marchande de la firme qui est donc propos´ee dans laquelle sont mis au se- cond plan les ph´enom`enes de production et d’apprentissage (Cohendet & Llerena 1999). Bien que la firme comme processeur d’informations accorde une place aux dimensions cognitives des individus par le biais de la rationalit´e limit´ee et du learning by doing, “les capacit´es cognitives des agents sont soit suppos´ees donn´ees, soit suppos´ees se d´eformer homoth´etiquement en fonction de l’information accumul´ee par les agents. Quant aux ph´enom`enes cumulatifs d’apprentissage, ils ne sont que des ph´enom`enes accessoires de la r´esolution de probl`emes informationnels” (ibid, p. 213). Cette prise en compte limit´ee des dimensions cognitives r´esulte du fait que la connaissance est assimil´ee `a un simple stock d’informations qui s’accroˆıt ou d´ecroˆıt.

1.4.2

La firme comme processeur de connaissances

D`es lors que l’on dissocie l’information de la connaissance, l’analyse de la firme se trouve modifi´ee. La firme comme processeur de connaissances accorde une place pr´epond´erante aux capacit´es cognitives des individus. Ce sont ici les processus de renouvellement des comp´etences qui sont privil´egi´es en investissant les modalit´es de cr´eation et d’utilisation des bases de connaissances de la firme. La firme comme processeur de connaissances est le r´esultat de travaux nombreux et vari´es dont les origines se trouvent dans diverses approches th´eoriques : la th´eorie ´evolutionniste (Nelson & Winter 1982, Dosi 1982, Teece 1988), la science des organisations (March & Simon 1993), l’´economie industrielle (Alchian 1950, Penrose 1959, Richardson 1972), l’histoire industrielle (Chandler 1962, 1990), le management strat´egique (Prahalad & Hamel 1990). Le but commun de ces divers courants th´eoriques est “de construire une th´eorie de la firme qui redonne la priorit´e `a la mani`ere dont est organis´ee la production” (Cohendet & Llerena 1999, p. 213). Aussi, ces ap- proches s’accordent-elles sur une hypoth`ese commune : l’attribut essentiel de la firme est constitu´e par ses comp´etences et ses capacit´es organisationnelles (ibid ).

Les comp´etences et les capacit´es organisationnelles d´eterminent ce que la firme est capable de faire d’un point de vue satisfaisant au sens de Simon.“Les comp´etences cor- respondent `a un ensemble de routines, de savoir-faire diff´erenci´es et d’actifs compl´emen- taires qui traduisent “l’efficacit´e des proc´edures de r´esolution que la firme se pose” (Guil- hon 1994)” (Cohendet & Llerena 1999, p. 213). Nelson & Winter (2002) les d´efinissent ainsi : “organizational routine are the organizational analogue of individual skill ” (p. 30). Les routines organisationnelles sont les lieux de m´emorisation des savoirs et des savoir-faire

Chapitre 1 - Information et connaissance dans la th´eorie ´economique des firmes qui sont d´evelopp´es dans le cadre d’une activit´e quotidienne par des processus d’apprentissage divers. Les routines (de nature essentiellement tacite) sont aux firmes ce que les g`enes sont aux organismes vivants : elles se transmettent au cours du temps. Plus particuli`erement, deux types de routines sont consid´er´ees : les routines statiques ou d’exploitation qui sont les proc´edures standard d’exploitation permettant de g´erer les activit´es quotidiennes de la firme; et les routines dynamiques (Teece et al. 1997) qui re- groupent les proc´edures d’am´elioration des routines existantes tant au niveau d´ecisionnel qu’aux niveaux organisationnel et technologique (Nesta 2001).

Ainsi, les acteurs ne sont pas de parfaits maximisateurs, mais fonctionnent selon des routines qui leur permettent de r´epondre au changement de leur environnement. L’ensemble de ces routines d´etermine les comp´etences de base (Teece 1988) ou encore les comp´etences organisationnelles de base (Nelson 1991) de la firme. Ces comp´etences de base sont ce que la firme sait bien faire (Nelson 1991). La firme mobilisera ses ressources cognitives autour des ses comp´etences de base, i.e. sur les activit´es constitutives de ces comp´etences. La “firme est con¸cue comme le lieu d’agencement, de construction, de s´election et d’entretien des comp´etences. Cette conception suppose de privil´egier l’acquisition, la production et la distribution des connaissances indispensables au main- tien des comp´etences” (Cohendet & Llerena 1999, p. 214).

De la distinction entre information et connaissance peuvent ˆetre identifi´es deux prin- cipes pour la th´eorie de la firme : le principe d’allocation des ressources pour la firme comme processeur d’informations et le principe de cr´eation de ressources pour la firme comme processeur de connaissances. Le principe d’allocation des ressources s’inscrit dans une approche transactionnelle de la firme, qui constitue une alternative aux d´efaillances de march´e en raison de l’existence d’asym´etries informationnelles. Le principe de cr´eation des ressources s’inscrit dans une approche cognitive de la firme dans laquelle on s’int´eresse `a la coordination des diff´erentes ressources et comp´etences, mettant l’accent sur le rˆole des processus d’apprentissage au sein de la firme. Davantage qu’une substituabilit´e de ces deux visions de la firme, Cohendet & Llerena (1999, 2005) et Amesse et al. (2006) en soulignent la compl´ementarit´e. Selon ces auteurs, l’´evolution des diff´erentes th´eories de la firme permet de proposer une approche fond´ee sur les comp´etences au sein de laquelle peuvent cohabiter les aspects transactionnels et les aspects cognitifs dans ce qu’ils qualifient de “vision duale de la firme”, ceci dans le cadre de l’´economie de la connaissance.

1.4 Information et connaissance dans la th´eorie de la firme

1.4.3

La compl´ementarit´e des deux visions de la firme : une