• Aucun résultat trouvé

Les comp´ etences organisationnelles relatives ` a l’int´ egra tion technologique

approche duale fond´ ee sur les comp´ etences

2.3 La dimension verticale des connaissances : se cond volet de l’int´ egration technologique

2.3.2 Les comp´ etences organisationnelles relatives ` a l’int´ egra tion technologique

La mise en ´evidence des capacit´es organisationnelles comme sources de performance des firmes a conduit certains auteurs `a s’int´eresser plus particuli`erement aux capacit´es relati- ves `a l’int´egration des connaissances. La connaissance s’acquiert par des processus sou- vent longs et coˆuteux en raison du caract`ere tacite de la connaissance et des capacit´es cognitives limit´ees des individus. Aussi, les firmes qui font face `a de nouvelles opportu- nit´es technologiques doivent-elles ˆetre en mesure d’identifier, d’acqu´erir et d’int´egrer ces connaissances. Ceci est d’autant plus vrai dans les industries de haute technologie dans lesquelles l’innovation repose sur les progr`es de la science effectu´es en dehors des fronti`eres de la firme. Cela suppose que la firme soit capable de cr´eer des comp´etences qui lui per- mettent de comprendre l’environnement technologique dans lequel elle ´evolue de fa¸con `a les combiner `a sa base de connaissance existante. Dans le cadre des industries de haute technologie, trois types de capacit´es organisationnelles nous semblent pertinentes au re- gard de la probl´ematique de l’int´egration des connaissances : les capacit´es d’int´egration mises en ´evidence par Iansiti & Clark (1994), les capacit´es scientifiques d´evelopp´ees par Arora & Gambardella (1994b) et les comp´etences architecturales mises en ´evidence par Henderson & Clark (1990).

2.3.2.1 Les capacit´es d’int´egration

Reconnaissant l’importance des capacit´es dynamiques, Iansiti & Clark (1994) s’int´eressent plus pr´ecis´ement aux processus qui permettent aux firmes de construire et de renou- veler leurs capacit´es organisationnelles. Les auteurs se concentrent ainsi sur les processus de d´eveloppement de produits dans des industries caract´eris´ees par un environnement complexe et incertain8. L’apport des auteurs r´eside dans l’identification des capacit´es

d’int´egration comme la capacit´e des firmes `a renouveler leurs connaissances sur la base de leurs connaissances pass´ees. Les capacit´es d’int´egration sont d´efinies de la mani`ere suivante : “the essence of integration is the generation, fusion and accumulation of know- ledge: the capacity to merge new knowledge about the impact of possibilities with deep accumulated knowledge of the complex existing capability base of the organization” (Iansiti

8Les travaux de Iansiti & Clark (1994) portent sur l’industrie automobile avec l’´etude du cas Nissan,

Chapitre 2 - Les principes d’int´egration des connaissances & Clark 1994, p. 602). Les capacit´es d’int´egration reposent d’une part sur la connaissance (principale source des capacit´es organisationnelles) et d’autre part dans les processus de r´esolution de probl`emes (moteur du renouvellement de ces capacit´es organisationnelles). Les auteurs d´ecrivent les capacit´es dynamiques comme ce qui relie la capacit´e des firmes `a agir sur l’´evolution de leurs savoirs et savoir-faire `a travers les processus de r´esolution de probl`emes. Les activit´es de r´esolution de probl`emes men´ees par les ´equipes manag´eriales doivent permettre aux firmes de r´epondre de mani`ere r´eactive aux changements externes `a travers une r´eorganisation de leurs capacit´es de base. Dans le cas contraire, les firmes risquent que leurs capacit´es de base deviennent obsol`etes.

Iansiti & Clark (1994) distinguent deux types de capacit´es d’int´egration : les capacit´es d’int´egration internes et les capacit´es d’int´egration externes. Les premi`eres rel`event de la capacit´e des firmes `a g´erer en interne les changements n´ecessaires `a la r´eorganisation des capacit´es organisationnelles. Ces changements s’effectuent dans le renouvellement des comp´etences, des syst`emes techniques et manag´eriaux, dans la coordination et la commu- nication entre les diff´erents d´epartements de la firme en d´eterminant la ligne strat´egique `a suivre quant aux enjeux `a venir. Les secondes rel`event de la capacit´e des firmes `a tenir compte des changements externes que ce soit du point de vue des march´es et des consommateurs ou de l’introduction de nouvelles technologies9. L’importance de la mise

en ´evidence des capacit´es internes et externes r´eside dans ce que l’ensemble des capacit´es organisationnelles de la firme forme un syst`eme complexe, chacune des capacit´es ´etant inter-connect´ee les unes aux autres car “les capacit´es ne peuvent fonctionner de mani`ere isol´ee, elles doivent s’accorder au contexte plus large de l’organisation” (Iansiti & Clark 1994, p. 565).

Dans un environnement incertain, la firme doit ˆetre r´eceptive aux informations et connaissances produites hors de ses fronti`eres et ´evaluer les diff´erentes options possibles `a mˆeme de s’inscrire dans la ligne strat´egique pr´ealablement ´etablie. La firme doit alors en son sein ˆetre capable d’apporter les changements n´ecessaires qui lui permettront d’int´egrer ces informations et connaissances nouvelles de fa¸con `a atteindre le niveau de performance d´esir´e. Les auteurs pr´ecisent que “capabilities will not affect the realm of possible actions

9Les auteurs distinguent plus pr´ecis´ement deux types de capacit´es d’int´egration externes : les capacit´es

d’int´egration relatives aux consommateurs et les capacit´es d’int´egration relatives aux technologies. Les capacit´es d’int´egration relevant de la consommation identifie la capacit´e de la firme `a lier les informations et les connaissances sur les pr´ef´erences futures des consommateurs et leurs utilisations des produits aux processus de d´eveloppement et d’ing´enierie. Les capacit´es d’int´egration relatives aux technologies d´eterminent la capacit´e de la firme `a lier les technologies mobilis´ees par la firme aux nouvelles technologies qui ´emergent `a la fois au sein de la firme et hors de ses fronti`eres.

2.3 La dimension verticale des connaissances : second volet de l’int´egration technologique unless they are integrated into the existing organization” (p. 565). Afin de survivre et de rester comp´etitive, la firme doit ˆetre en mesure de cr´eer des capacit´es organisationnelles de fa¸con `a r´esoudre des probl`emes li´es aux incertitudes sur l’´evolution des technologies et des march´es, tout en ´etant capable de les int´egrer aux savoirs et savoir-faire pr´ealablement existants. Par cons´equent, les capacit´es d’int´egration sont g´en´eratrices de connaissances nouvelles. Sur la base d’une ´etude portant sur la performance de l’industrie automobile et de l’industrie des TIC `a travers les variables de d´elai, de qualit´e des produits et de productivit´e, les auteurs montrent qu’il existe une relation positive entre les capacit´es d’int´egration internes et externes de la firme et leurs performances. En int´egrant des connaissances nouvelles `a leurs bases de connaissances, les firmes cr´eent les conditions leur permettant de disposer d’un avantage concurrentiel sur leurs march´es respectifs.

L’analyse de Iansiti & Clark (1994) permet de mettre en ´evidence que la survie de la firme ne peut se r´eduire aux processus de coordination et de communication entre les diff´erentes unit´es de la firme quant `a l’acquisition et la transmission des nouvelles informations. Une firme ne peut ˆetre performante que si elle est capable de puiser dans ces nouvelles informations acquises pour s´electionner et construire de nouveaux concepts permettant la r´esolution de probl`emes. Les capacit´es d’int´egration sont ainsi la source et le moteur de connaissances nouvelles transformant les capacit´es organisationnelles de la firme, afin que celle-ci puisse r´epondre de mani`ere efficiente aux changements de son environnement.

2.3.2.2 Les capacit´es `a ´evaluer et utiliser la connaissance

En s’int´eressant aux strat´egies de collaborations dans l’industrie pharmaceutique, Arora & Gambardella (1994b) s’interrogent sur la capacit´e des firmes `a b´en´eficier des sources externes de connaissances au regard des propri´et´es de leurs bases de connaissances. Les strat´egies de collaboration sont analys´ees du point de vue des grandes entreprises pharma- ceutiques qui doivent choisir parmi diff´erents projets de recherche men´ees par les petites entreprises sp´ecialis´ees dans les biotechnologies et les universit´es. Ce choix est effectu´e par l’unit´e de recherche de la firme qui constitue le lieu privil´egi´e de l’assimilation des connaissances externes. S’inscrivant dans la lign´ee des travaux de Cohen & Levinthal (1989) et Rosenberg (1990), les auteurs soulignent l’importance de la R&D interne afin que la firme puisse comprendre et assimiler les connaissances produites en dehors de ses fronti`eres. Toutefois, les auteurs soulignent les limites de ces analyses `a tenir compte de la complexit´e de la connaissance de mˆeme que des diverses formes d’acquisition de

Chapitre 2 - Les principes d’int´egration des connaissances connaissances externes. C’est pourquoi les auteurs proposent de distinguer deux types de capacit´es fond´ees sur les connaissances de la firme : la capacit´e `a ´evaluer la connaissance externe et la capacit´e `a utiliser la connaissance externe.

Initialement, la firme doit choisir entre diff´erents projets de recherche, chacun ´emettant un signal qui est jug´e par l’unit´e de recherche de la firme. Le choix du projet repose alors sur un processus en deux ´etapes. Dans un premier temps, la firme doit rassembler di- verses informations sur les diff´erentes options d’acquisition externes de connaissances. Cette premi`ere phase d’´evaluation repose sur la capacit´e scientifique de la firme. Les auteurs proposent une mesure de la capacit´e scientifique d´efinie par le nombre de publi- cations par employ´e. Cette mesure d´etermine les comp´etences de la firme `a s´electionner les bons projets de recherche. Si la capacit´e scientifique de la firme est importante, alors son choix se portera sur des projets aux rendements sup´erieurs `a ceux qu’elle choisirait dans le cas inverse. Une fois les projets s´electionn´es, une seconde ´etape consiste `a les exploiter et repose sur la capacit´e des firmes `a utiliser ces connaissances. Cette capacit´e `a utiliser les connaissances r´eside dans la capacit´e technologique de la firme d´efinie selon deux mesures : le nombre de brevets d´epos´es par la firme et le ratio de la R&D sur le chiffre d’affaires.

Les auteurs proposent une mod´elisation distinguant les projets de recherche men´es conjointement avec les petites entreprises sp´ecialis´ees dans les biotechnologies et les pro- jets de recherche men´es avec les universit´es. Les r´esultats de leurs ´etudes ´econom´etriques montrent que la capacit´e scientifique est positivement corr´el´ee aux projets de recherche men´es en collaboration avec les Universit´es, tandis que la capacit´e technologique est posi- tivement corr´el´ee aux accords de recherche men´es avec les petites entreprises sp´ecialis´ees dans les biotechnologies. Leurs ´etudes montrent de plus une relation positive entre les deux capacit´es mesur´ees. L’int´erˆet des travaux de Arora & Gambardella (1994b) est d’avoir soulign´e la diversit´e des formes d’acquisition des savoirs externes dont les objec- tifs varient au regard du partenaire consid´er´e. L’identification des capacit´es scientifiques et technologiques propres aux firmes permet de donner une description de leurs bases de connaissances. Ces deux capacit´es sont essentielles quant aux b´en´efices que les firmes peu- vent retirer de leurs collaborations avec diff´erents partenaires. La capacit´e scientifique, en favorisant une meilleure ´evaluation des projets de recherche pertinents, permet de main- tenir et d’orienter les comp´etences de la firme, alors que la capacit´e technologique permet d’utiliser les connaissances dans le processus d’innovation appliqu´e `a la firme.

2.3 La dimension verticale des connaissances : second volet de l’int´egration technologique 2.3.2.3 Les comp´etences architecturales

S’inscrivant dans la lign´ee des travaux de Diericks & Cool (1989), Nelson (1991), les au- teurs s’int´eressent aux capacit´es de R&D comme sources essentielles de la construction des comp´etences donnant lieu `a des avantages concurrentiels dans les industries bas´ees sur la science et la technologie10. Dans ce but, les auteurs cherchent `a expliquer la propension

des firmes `a innover (mesur´ee par l’introduction de brevets en Europe, aux ´Etats-Unis et au Japon) comme fonction de leurs comp´etences organisationnelles. Henderson & Cock- burn (1994) distinguent deux types de comp´etences organisationnelles : les comp´etences architecturales (architectural competencies) et les comp´etences sp´ecialis´ees (component competencies).

Les comp´etences sp´ecialis´ees sont mises en œuvre dans le cadre des activit´es d’expertise de la firme. Elles constituent les capacit´es et les connaissances locales mobilis´ees dans la r´esolution des probl`emes quotidiens de la firme. Ces comp´etences sont sp´ecifiques `a la firme qui acquiert, `a travers l’exp´erience, des connaissances largement tacites qui constituent des modes de fonctionnement uniques de r´esolution de probl`emes difficile- ment codifiables. Les comp´etences sp´ecialis´ees sont mesur´ees par le nombre de brevets d´epos´es faisant l’hypoth`ese d’un taux d’obsolescence de 20% de la connaissance. Les comp´etences architecturales d´efinissent la capacit´e des firmes `a utiliser ces comp´etences sp´ecialis´ees. Les comp´etences architecturales constituent donc les comp´etences qui per- mettent d’int´egrer les comp´etences sp´ecialis´ees de mani`ere efficiente et de d´evelopper de nouvelles comp´etences sp´ecialis´ees lorsque celles-ci sont requises dans le cadre d’un projet de recherche. Tenant compte de l’environnement externe de la firme et de la n´ecessit´e d’identifier les opportunit´es technologiques qui ´emergent hors des fronti`eres de la firme, Henderson & Cockburn (1994) distinguent plus particuli`erement les comp´etences architecturales qui permettent de maintenir et d’encourager le flux de connaissances pro- duites hors des fronti`eres de la firme et d’ˆetre capable de les int´egrer au sein de la firme. Les auteurs construisent ainsi quatre mesures de nature qualitative permettant de ca- ract´eriser les comp´etences architecturales : les modalit´es d’allocation de ressources par programmes (variable DICTATOR), l’importance des ´echanges avec la communaut´e sci-

10Les travaux de Henderson & Cockburn (1994) font suite `a une ´etude pr´ealable mais publi´ee plus

tard (Henderson & Cockburn 1996) de l’impact des ´economies d’´echelle et de champs sur la productivit´e de la recherche dans l’industrie pharmaceutique. Les r´esultats de cette ´etude avaient r´ev´el´e un effet firme particuli`erement important sur la productivit´e de la recherche pharmaceutique, de mˆeme qu’une diff´erenciation soutenue de la structure des portefeuilles de projets de recherche entre les firmes. Aussi, ces r´esultats ont-ils men´e les auteurs `a s’interroger plus particuli`erement sur la nature d’un effet firme et le rˆole des comp´etences comme mesure de l’idiosyncrasie des firmes.

Chapitre 2 - Les principes d’int´egration des connaissances entifique (variable PROPUB), la pr´esence d’une organisation matricielle de la recherche (variable CROSS) et la gestion centrale des programmes de recherches (variable GLOBAL)11.

Les r´egressions montrent qu’il existe une corr´elation positive entre le nombre de brevets d´epos´es et les comp´etences sp´ecialis´ees et architecturales de la firme. Les r´esultats des tests indiquent que l’introduction des variables de comp´etences am´eliore la qualit´e de la r´egression effectu´ee d’environ 30% de la variance constat´ee. Les comp´etences sp´ecialis´ees jouent statistiquement un rˆole plus important que les comp´etences architecturales. Toute- fois, la contribution sp´ecifique de chacune des comp´etences est difficile `a isoler l’une de l’autre, ce qui laisse un flou consid´erable dans l’interpr´etation des r´esultats. Les com- posantes des comp´etences architecturales n’ont pas toutes le mˆeme signe. Alors que la variable PROPUB a un effet positif dans toutes les r´egressions, la variable DICTATOR contribue de mani`ere n´egative `a la productivit´e de la recherche. Les r´esultats toutefois corroborent l’id´ee que les comp´etences organisationnelles jouent de mani`ere positive sur la productivit´e de la recherche et que ces comp´etences mesurent l’idiosyncrasie des firmes. La distinction entre comp´etences sp´ecialis´ees et comp´etences architecturales permet de r´ev´eler que l’organisation des connaissances est une des conditions de la r´eussite des firmes `a mˆeme de r´ev´eler l’h´et´erog´en´eit´e de leurs performances.

Que ce soit sous l’angle des capacit´es d’int´egration, des capacit´es `a ´evaluer ou utiliser les connaissances, ou encore des comp´etences sp´ecialis´ees et architecturales, l’ensemble de ces analyses souligne l’importance des capacit´es organisationnelles comme source des avantages comp´etitifs d’une firme. L’organisation des comp´etences des firmes rel`eve d’un apprentissage organisationnel dont les sources et les formes peuvent ˆetre multiples et qui conditionne les choix technologiques des firmes au regard de leurs savoirs et savoir-faire accumul´es. L’identification de chacune de ces capacit´es organisationnelles a en commun de mettre en ´evidence que les processus d’int´egration des connaissances sont un facteur d´eterminant de la comp´etitivit´e des firmes dans un environnement complexe et incer- tain. L’acquisition des connaissances n’est pas suffisante si la firme n’est pas en mesure de les assimiler `a son stock de connaissances pass´ees, d’o`u l’importance des processus d’int´egration des connaissances qui permettent d’articuler l’ensemble des connaissances et comp´etences de la firme. Dans ce contexte, nous identifions une capacit´e organisation- nelle additionnelle relative `a la nature des connaissances. En effet, comme nous l’avons

11Chacune de ces mesures est construite sur la base d’entretiens avec les firmes ´etudi´ees (10 grandes

firmes pharmaceutiques de nationalit´e am´ericaine ou europ´eenne), dont les r´eponses sont class´ees sur une ´echelle qualitative de Likert allant de 1 `a 5.

2.3 La dimension verticale des connaissances : second volet de l’int´egration technologique soulign´e pr´ec´edemment dans ce chapitre, les connaissances sont h´et´erog`enes par nature, les connaissances fondamentales ayant une port´ee plus large que les connaissances ap- pliqu´ees, ce qui impacte selon nous l’articulation des connaissances au sein de la firme et par la mˆeme sa performance. Ainsi, la prise en compte de la dimension verticale de la connaissance constitue une composante essentielle des processus d’int´egration des connaissances et plus largement des strat´egies technologiques des firmes.

2.3.3

Les connaissances fondamentales comme comp´etence or-

ganisationnelle dans le processus d’int´egration technologi-