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HISTORIQUE DE LA TRAITE ATLANTIQUE

L’ENTREPRISE COLONIALE

1.4. Traite – Esclavage

1.4.1. LA TRAITE – TENTATIVE DE DEFINITION

1.4.1.1. HISTORIQUE DE LA TRAITE ATLANTIQUE

C’est dans la première moitié du XVe siècle que débute la traite atlantique, lorsque des Portugais ramènent dans leur pays les premiers esclaves noirs. Cette pratique, qui consiste à conquérir des terres africaines et à réduire des noirs en servitude perpétuelle, en les expropriant, autorisée en 1452 par le Pape Nicolas V au roi Alphonse V du Portugal a été interdite successivement par les papes Pie II dès 1462, Paul III en 1537, Urbain VIII en 1639 et Benoît XIV en 1741.

Pour ce qui concerne les conditions dans lesquelles la traite portugaise a été pratiquée, Alain Roman (Alain Roman, 2001 p. 20) observe : « En cherchant une liaison directe avec les Indes, les Portugais explorèrent progressivement les côtes africaines et virent rapidement l’intérêt de déplacer des Noirs. Après le premier enlèvement de Noirs en 1441 par Antao Gonçalves, on passa très rapidement à un système d’échange de marchandises contre des êtres humains pour assurer les besoins domestiques au Portugal, exploiter les mines d’or d’El Mina sur la côte africaine ou assurer la colonisation agricole des îles de l’Atlantique oriental (Sào Tomé, Madère, îles du Cap-Vert, etc.) Mais pendant un demi-siècle ces déplacements de captifs ne concernèrent que des quantités limitées sur un espace restreint. »

Bien que les Espagnols ne fassent pas partie du peloton de tête des pratiquants de la traite, ils figurent en bonne place au panthéon de ses pionniers. Il est curieux que l’on présente Bartolomé de Las Casas comme une figure historique de la lutte pour les droits de l’homme. En effet, lorsque Christophe Colomb débarque en Amérique, pour le compte de la couronne ibérique qui avait financé son expédition, ses compagnons, en prenant possession des terres indiennes, ont très vite soumis à de

rudes travaux les populations indigènes et les ont décimées en près de trente ans.

C’est d’ailleurs pour les protéger que Bartolomé de Las Casas encourage la traite des esclaves africains considérés comme plus robustes et plus résistants à la dureté des travaux qui permettaient aux Espagnols d’exploiter les richesses du Nouveau Monde.

Le verdict, tout à fait heureux, que rend la papauté en faveur des Indiens et de Las Casas dans le débat qui oppose ce dernier au philosophe Sepulveda sur la question de savoir, entre autres, si les Indiens d'Amérique appartiennent-ils à l'humanité ? dans ce que l’on appelle La Controverse de Valladolid, tombe comme un encouragement en faveur de la traite africaine. S’il faut en croire Serge Daget cité par Alain Roman (Alain Roman, 2001, p. 21) : « dès 1510, 751 colons de Saint-Domingue (les encomenderos) disposaient de plus de 22 000 Amérindiens. La forte mortalité consécutive au travail forcé et au développement d’épidémies amena l’intervention de Bartolomé de Las Casas. En défendant la cause indienne, il apportait la caution de la religion à la traite des Noirs, jugés plus résistants et peut-être moins humains. Mais le gouvernement espagnol n’avait pas attendu pour autoriser dès 1510 l’emploi de captifs africains dans les mines américaines. » Quant à Alain Roman (Alain Roman, ibidem), il observe en ce qui concerne la traite des Noirs par les Espagnols « Mais il fallut attendre le milieu du XVIIe pour que le développement de la consommation du sucre en Europe entraîne une accélération de la traite négrière. Bien adaptée aux terres tropicales mais très exigeante en hommes pour sa culture et sa transformation, la canne à sucre dispose alors d’un vaste marché à niveau de vie élevé. Pour assurer une production abondante au moindre coût, il fallait une force de travail nombreuse, résistante et si possible peu onéreuse : un appel massif aux captifs africains devenait nécessaire. L’Européen, inventeur et organisateur du système, disposait de tous les atouts : la bienveillance de la religion, l’encouragement de la politique, les moyens de transport, la force militaire et les consommateurs. »

La présence française, comparée à celle des Espagnols et des Portugais, est tardivement attestée, de manière officielle dans la pratique de la traite. En effet, pendant une période relativement longue, des marins français ont collaboré avec les Espagnols dans le domaine du transport de ceux qui allaient remplacer les Indiens décimés par leurs conquérants. Des aventuriers ont croisé dans la mer des Caraïbes, dès la fin du XVIe siècle, surtout en tant que flibustiers, très peu en tant que boucaniers. Pour ce concerne cette période, selon M. Philippe Barray, des capitaines havrais auraient ainsi reconnu les Petites Antilles quelques années avant 1600. Il n’établit pas qu’ils aient installé des établissements permanents avec prise officielle de possession et organisation, même embryonnaire, d’une mise en valeur continue et méthodique, présentant enfin tous les caractères d’une véritable entreprise coloniale (Gaston Martin, 1948, p. 6).

Il faut attendre 1625 pour que l’occupation française soit officialisée dans les Caraïbes et se transforme en une entreprise coloniale institutionnalisée.

Deux catégories de Français se retrouvent dans cette aventure coloniale. Une première catégorie constituée de ces écumeurs des mers qui vont se sédentariser, bon gré malgré. Transformés en chasseurs, en planteurs, ils apprécient rapidement les avantages économiques que peut leur procurer leur nouvelle existence. Une seconde catégorie composée de « marins en rupture de bord, de fils de famille désargentés et reniés des leurs, désœuvrés sans ressources qu’appelle l’aventure, ces premiers colons louent à quelque entrepreneur d’exploitation, un « marchand d’hommes » leur liberté et leur effort, par un véritable contrat d’esclavage à terme, à l’ordinaire pour trois ans. En raison de la vie nomade que mènent les indigènes, les premiers occupants se considèrent comme les propriétaires légitimes des terres qu’ils mettent

en valeur. Selon eux, possession vaut titre. Cependant, les bras européens se révèlent très tôt insuffisants.

C’est dans ce contexte que la France va se tourner vers l’Afrique pour s’approvisionner en main d’œuvre servile afin de pallier la carence des colons et leur incapacité à rentabiliser de manière optimale leurs nouvelles exploitations.