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La généralisation des attributions en propriété dans les sûretés réelles préférentielles spéciales

Dans le document La réalisation des sûretés réelles (Page 60-67)

Section 1. Le premier critère de l’option : l’attribution en propriété ou la vente

A. Les attributions en propriété dans les sûretés réelles préférentielles, un domaine d’application général

2. La généralisation des attributions en propriété dans les sûretés réelles préférentielles spéciales

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C.CARBONNEL, Le pacte commissoire en matière de sûretés réelles immobilières ou la réforme inachevée, JCP E, 2007, 1335 ; S. PERUS, Des aspects pratiques du pacte commissoire, RLDC. 2008, n°50, spéc. II ; F. MARTIN B. GÉRARD-GODARD, Le pacte commissoire, JCP N 2010, 1136, spéc. n°11

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P.DUPICHOT, La réforme du crédit immobilier, D. 2006, p. 1291

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P.DUPICHOT, La réforme du crédit immobilier, D. 2006, p. 1291 ; M.CABRILLAC,C.MOULY,S.CABRILLAC,P. PÉTEL, Droit des sûretés, Manuel, Litec, 9ème éd., 2010, spéc. n°921. Ces auteurs précisent qu’elles sont soumises au même régime.

La question des attributions en propriété dans les sûretés réelles spéciales fondées sur un droit de préférence implique d’articuler le droit commun et le droit spécial. Les sûretés réelles spéciales sont traitées de manière disparate. Certaines disposent d’un régime juridique complet, d’autres d’un régime juridique partiel. Il convient donc de distinguer différentes hypothèses.

32. Les cas d’admission expresse ou par renvoi des attributions en propriété. Lorsque le

régime juridique spécial vise expressément les attributions en propriété ou renvoient directement ou indirectement182 aux articles y afférant, les attributions en propriété sont admises comme des modes de réalisation de la sûreté spéciale183. C’est le cas par exemple du gage commercial184

, du gage de véhicule automobile185, du nantissement de matériel et d’outillage186

, du nantissement de créance187 ou encore du nantissement de titres188.

33. Les cas de prohibition expresse des attributions en propriété. Parfois, le régime juridique

spécial exclut l’attribution en propriété des modes de réalisation de la sûreté. Toutefois, il convient de distinguer plusieurs hypothèses. Lorsque les règles spéciales prohibent l’attribution judiciaire en propriété, l’attribution conventionnelle est a fortiori interdite189

. Il en va ainsi en matière de

182

Le gage de véhicule automobile et le gage commercial visent expressément les articles 2346 à 2348 du Code civil. En revanche, les dispositions relatives au nantissement de matériel et d’outillage ou au nantissement de titres financiers renvoient aux dispositions applicables au gage commercial qui renvoie lui-même au régime du gage de droit commun.

183

Dans ce sens, voir par exemple : S.HÉBERT, Le pacte commissoire après l’ordonnance du 23 mars 2006, D. 2007, Chron., p. 2052, spéc. n°10 ; S.PERUS, Des aspects pratiques du pacte commissoire, RLDCiv. 2008, n°50, spéc. II

184

L’article L521-3 du Code de commerce précise, après avoir énoncé que la réalisation peut avoir lieu par vente forcée, précise que « le créancier peut également demander l’attribution judiciaire du gage ou convenir de son

appropriation conformément aux articles 2346 à 2348 du Code civil ».

185

Article 2353 du Code civil « la réalisation du gage est soumise, quelle que soit la qualité du débiteur, aux règles

prévues aux articles 2346 à 2348 ».

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Article L. 525-14 du Code de commerce : « En cas de non-paiement à l’échéance, le créancier bénéficiaire du

privilège établi par le présent chapitre peut poursuivre la réalisation du bien qui en est grevé dans les conditions ²prévues à l’article L. 521-3. […] ». La suite de l’article précise les conditions spécifiques applicables à la vente.

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Art 2365 alinéa 1 du Code civil prévoit « En cas de défaillance de son débiteur, le créancier nanti peut se faire

attribuer, par le juge ou dans les conditions prévues par la convention, la créance donnée en nantissement ainsi que tous les droits qui s’y attachent. »

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Art. L.211-20 V alinéa 2 du code monétaire et financier « Pour les instruments financiers autres que ceux

mentionnés à l'alinéa précédent, [autres que les liquidités, les titres cotées et les titres d’OPCVM dont la valeur de

rachat est publique] la réalisation du nantissement intervient conformément aux dispositions de l'article L. 521-3 du

Code de commerce. » ; Pour une interprétation dans le même sens voir : M.CABRILLAC,C.MOULY,S.CABRILLAC,P. PÉTEL, Droit des sûretés, Manuel, Litec, 9ème éd., 2010, spéc. n°796 ; Dans ce sens, mais sous l’empire du droit antérieur à propos de l’attribution judiciaire : C. LISANTI-KALCZYNSKI, Les sûretés conventionnelles sur meubles incorporels, préf. F. Pérochon, Bibliothèque du droit de l’entreprise, Litec, 2001, spéc. n°274. Ces solutions sont transposables à l’attribution conventionnelle

189

S.HÉBERT, Le pacte commissoire après l’ordonnance du 23 mars 2006, D. 2007, Chron., p. 2052, spéc. n°13 ; F.

MACORIG-VENIER, Le pacte commissoire (et les sûretés réelles mobilières), perspectives, RLDA, mars 2007,n°14 ; P.

DELEBECQUE, Le régime des hypothèques, JCPE 2006, I, 8; P.DUPICHOT, Le pouvoir des volontés individuelles en

droit des sûretés, préface M. Grimaldi, éd. Panthéon-Assas Paris II, 2005, spéc. nos 749 et 757 ; P. DUPICHOT, Le nantissement, un an après, ordonnance du 23 mars 2006 relative aux sûretés, bilan d’une année d’application, LPA, 27 mars 2008 n° 63, p. 27, spéc. n°39 ; voir contra :K.AGBA, La couverture en droit financier, Etude des financements

nantissement de fonds de commerce190 et, par renvoi aux règles du nantissement de fonds de commerce, des nantissements de fonds artisanaux191, agricoles192. Plusieurs justifications peuvent être avancées. D’abord, dans l’esprit de la loi de 1909, le créancier n’a pas vocation à devenir gestionnaire d’un fonds de commerce193. Toutefois, par l’effet de la vente forcée, il peut en devenir adjudicataire. Le créancier titulaire d’un nantissement sur le fonds se trouve privé, pour des raisons aujourd’hui dépassées, des bienfaits des attributions en propriété. Pour preuve, cette interdiction n’exclut pas l’attribution en propriété des éléments composant le fonds quand ils font l’objet d’une sûreté réelle spéciale et que le régime applicable ne s’y oppose pas. La situation est regrettable et il serait opportun de permettre au créancier titulaire d’un nantissement sur un fonds professionnel de pouvoir le réaliser par une attribution judiciaire en propriété194.

Mais la logique de l’interdiction légale de l’attribution judiciaire impose de retenir que dans l’hypothèse d’une telle prohibition, l’attribution conventionnelle est elle aussi interdite. En effet, si l’attribution opérée par un juge, soumise à son contrôle et à sa protection est interdite, l’attribution, dont le régime est régi par la convention des parties est a fortiori interdite195.

La question est plus délicate au sujet de l’attribution en propriété d’un fonds libéral nanti. Les textes demeurent silencieux et la jurisprudence n’a pas encore été saisie de la question. Deux solutions sont envisageables. Il est d’abord possible de considérer qu’en l’absence d’interdiction légale ou jurisprudentielle, l’attribution en propriété – judiciaire ou conventionnelle – est admise. Ensuite, parce que le fonds libéral est né de la jurisprudence selon le modèle du fonds de commerce, il est possible de considérer que l’attribution judiciaire et a fortiori l’attribution conventionnelle du fonds libéral nanti sont impossibles. Une telle interprétation, même si elle contribuerait à la cohérence du régime juridique des fonds, serait regrettable.

190

Art. L. 142-1 alinéa 2 « le nantissement de fonds de commerce ne donne pas au créancier gagiste le droit de se faire

attribuer le fonds en paiement jusqu’à due concurrence »

191

Article 22 alinéa 1 de la loi n°96-603 du 5 juillet 1996 relative au développement et à la promotion du commerce et de l’artisanat « le fonds exploité dans l’exercice de l’une des activités professionnelles visées au I de l’article 19, par

une personne physique ou morale qui n’a pas la qualité de commerçant, peut faire l’objet de nantissement dans les conditions et sous les formalités prévues par la loi du 17 mars 1909 relative à la vente et au nantissement du fonds de commerce. »

192

Article L. 311-3 alinéa 2 du code rural et de la pêche maritime : « Ce fonds, qui présente un caractère civil, peut

faire l'objet d'un nantissement dans les conditions et selon les formalités prévues par les chapitres II et III du titre IV du livre Ier du Code de commerce. » Notons que le renvoi comporte une coquille. En effet, il manque la référence au titre

III. L’article renvoie aux chapitre II et III, du titre III, du Livre I du Code de commerce.

193

L.AYNÈS, P.CROCQ, Les sûretés, la publicité foncière, Defrénois, 2011, spéc. n°514. Cet argument développé à

propos de l’attribution judiciaire peut aisément être transposé en matière d’attribution conventionnelle, les deux mécanismes relevant de la même idée.

194

Dans ce sens, voir F. PÉROCHON, note sous Cass. Com. 7 juil. 2009, Rev. Proc. Coll. 2010, comm ; 66 ; M.

DUEDRA, Les sûretés conventionnelles sur les fonds professionnels : Essai d’une comparaison, Th. Toulouse, 2012, n°430 ;

195

F.MACORIG-VENIER, Le pacte commissoire (et les sûretés réelles mobilières), perspectives, RLDA, mars 2007, n°14

En revanche, la prohibition légale du pacte commissoire ne prive pas le créancier de sa faculté de demander l’attribution judiciaire. Il en va ainsi en matière de nantissement de stocks du Code de commerce196. Cette règle semble être justifiée par des raisons factuelles comme la périssabilité des denrées gagées, l’inopportunité pour le créancier de devenir propriétaire automatiquement et systématiquement du bien. La règle est également justifiée par une raison juridique car, dans une certaine mesure, l’individualisation nécessaire du bien rend difficile la mise en œuvre automatique de l’attribution. En effet, avant que le transfert de propriété ait lieu, il convient d’identifier les biens transférés.

Toutefois, depuis un arrêt du 19 février 2013197, la chambre commerciale de la Cour de cassation a rendu le gage de stocks du Code de commerce impératif lorsque l’une des parties est un établissement de crédit et que l’objet du gage porte sur des stocks et tout autre bien visé par l’article L. 527-3 du Code de commerce. Dans cette espèce, pour bénéficier de l’attribution conventionnelle en propriété, les parties avaient stipulé qu’elles soumettaient le gage aux dispositions de l’article 2333 du Code civil. En somme, les parties optaient pour le gage de droit commun. La Cour d’appel avait validé ce montage interprétant le verbe « pouvoir » employé dans l’article L. 527-3 comme la faculté de se soumettre aux dispositions du gage de stocks du Code de commerce198. La Cour de cassation casse et annule l’arrêt au visa des deux articles. Elle se conforme également à la volonté du législateur qui, en édictant simultanément les deux textes précités par l’ordonnance du 23 mars 2006, avait marqué sa volonté de créer un régime spécial pour le gage de stocks. Les juges font ici application de l’adage specialia generalibus derogant.

Il est ainsi possible de déduire de la position de la haute juridiction que lorsque la sûreté réelle spéciale dispose d’un régime général complet, il convient de l’appliquer. Mais lorsque ce régime

196

Art. L. 527-2 du Code de commerce : « Est réputée non écrite toute clause prévoyant que le créancier devient

propriétaire des stocks en cas de non-paiement de la dette exigible par le débiteur. » et l’article L527-10 : « en cas de non-paiement de la créance exigible, le créancier peut poursuivre la réalisation du gage dans les conditions prévues aux art 2346 et 2347 du Code civil. »

197

Cass. Com, 19 févr. 2013, pourvoi n° 11-21.763, FS-P+B+R+I ; Gaz Pal. 28 mars 2013, n°87, p. 9, note M.

MIGNOT ; Gaz. Pal. 20 mars 2013, n°79-80, p. 22 obs. M.-P. Dumont-Lefrand ; RTDCiv. 2013, p. 418, obs. P.CROCQ ;

D. 2013. Chron. 1172, note H.GUILLOU; RLDC. 2013/103, no5047, note C.GIJSBERS, RLDAff. 2013, n°82, p. 30 obs

J.CLAVEL-THORAVAL ; BJE. mai 2013, p 149, note N.BORGA ; LPA 17 juin 2013, n°120, p. 19, note N.BORGA ;

RDBF mars 2013, p. 53, obs. D.LEGEAIS ; Banque mai 2013, n°760, p. 86 obs. J.-L.GUILLOT ; JCP E 2013, n°21, p. 39, obs. N.MATHEY ; JCP G 2013, n°11, p. 541, obs. A.CERLES ; JCP G 2013, n°19, p ; 930, obs.N.MARTIAL -BRAZ ; LPA 29 mai 2013, n°107, p. 7, note L. ANDREU,J.-F. QUIEVY ; LPA 26 avril 2013, n)84, p. 16, obs. S.

CALME ; RTDF 2013, n°2, p. 54, note D.TEYSSIER ; L. D’AVOUT,F.DANOS, Collisions de régimes juridiques en matière de sûretés réelles, Dr. et Patr. 2013, n°227 ; V.LASBORDES-DE VIRVILLE, L'avenir incertain du gage de stocks du code de commerce après l'arrêt du 19 février 203 : à propos de l'interdiction d'une soumission conventionnelle au gage du code civil, Rev. proc. coll. 2013. Etude 20

198

CA Paris, pôle 5, ch. 8, 3 mai 2011, RG 10/13656, RDBF. sept.-oct. 2011, p. 38 s., obs. A.CERLES, RTDCiv. 2011, p. 785, note P.CROCQ.

général exclut l’attribution en propriété, il est impossible de recourir à la sûreté de droit commun pour contourner l’interdiction.

Néanmoins, il convient de noter que, malgré la position de la Cour de cassation, la Cour d’appel de Paris résiste199. La question du choix du gage de droit commun en lieu et place du gage de stocks du code de commerce devrait donc prochainement faire l’objet d’un arrêt de l’Assemblée plénière de la Cour de cassation.

34. L’absence de disposition légale. La question de la validité des attributions en propriété est

plus débattue lorsque le régime spécial ne prévoit pas d’interdiction. Cette absence d’interdiction ne conduit pas ipso facto à admettre la validité des attributions en propriété et il est nécessaire d’opérer des distinctions.

Lorsque le régime spécial est complet, le caractère subsidiaire du droit commun « est

nécessairement plus ténu »200. Pour certains auteurs, il convient d’appliquer le régime juridique spécial sur le fondement de l’adage « specialia generalibus derogant »201. Si l’attribution en propriété n’est pas prévue par des textes spéciaux, elle est alors écartée. La jurisprudence ne s’est pas prononcée sur ce point. L’arrêt de la Cour de cassation du 19 mars 2013202

, ne peut pas servir d’appui à cette interprétation car il porte sur l’option pour une sûreté et non sur le régime applicable à la réalisation de cette dernière. Pour notre part, dans le silence des règles spéciales, et à défaut d’interdiction des attributions en propriété judiciaires ou conventionnelles, nous estimons que le créancier peut réaliser sa sûreté par cette voie203.

199

CA Paris, pôle 5, ch. 9, 27 févr. 2014, n° 13/03840, D. 2014. 924, obs. C.GIJSBERS ; RLDC juill-août 2014. 38, obs. J.CLAVEL-THORAVAL ; JCP 2014. Doctr. 635, obs. P.DELEBECQUE ; Gaz. Pal. 4-5 juin 2014, p. 20, obs.

M.-P.DUMONT-LEFRAND ; Banque et Droit mai-juin 2014. 58, obs. N.RONTCHEVSKY. Voir aussi Y.BECKERS, Quel gage pour les établissements de crédit ? Gage de droit commun sans dépossession ou gage de stocks ?, RDBF. 2014. p. 111

200

P.DUPICHOT, Le nantissement, un an après, ordonnance du 23 mars 2006 relative aux sûretés, bilan d’une année d’application, LPA, 27 mars 2008 n° 63, p. 27, spéc. n°38

201

L.AYNÈS, Le gage de meubles corporels, in Réforme du droit des sûretés, RLDA. juillet 2006, p.7

202

Cass. Com, 19 févr. 2013, pourvoi n° 11-21.763, FS-P+B+R+I ; Gaz Pal. 28 mars 2013, n°87, p. 9, note M.

MIGNOT ; Gaz. Pal. 20 mars 2013, n°79-80, p. 22 obs. M.-P. Dumont-Lefrand ; RTDCiv. 2013, p. 418, obs. P.CROCQ ;

D. 2013. Chron. 1172, note H.GUILLOU; RLDC. 2013/103, no5047, note C.GIJSBERS, RLDAff. 2013, n°82, p. 30 obs

J.CLAVEL-THORAVAL ; BJE. mai 2013, p 149, note N.BORGA ; LPA 17 juin 2013, n°120, p. 19, note N.BORGA ;

RDBF mars 2013, p. 53, obs. D.LEGEAIS ; Banque mai 2013, n°760, p. 86 obs. J.-L.GUILLOT ; JCP E 2013, n°21, p. 39, obs. N.MATHEY ; JCP G 2013, n°11, p. 541, obs. A.CERLES ; JCP G 2013, n°19, p ; 930, obs.N.MARTIAL -BRAZ ; LEDEN 10 mars 2013 n° 3, P. 1, obs. F.-X.LUCAS ; LPA 29 mai 2013, n°107, p. 7, note L.ANDREU,J.-F. QUIEVY ; LPA 26 avril 2013, n)84, p. 16, obs. S.CALME ; RTDF 2013, n°2, p. 54, note D.TEYSSIER ; L. D’AVOUT,F. DANOS, Collisions de régimes juridiques en matière de sûretés réelles, Dr. et Patr. 2013, n°227

203

Voir dans ce sens, à propos de l’attribution judiciaire, P. NEVEU, L’attribution judiciaire du gage : une arme absolue ?, La revue banque, nov. 1985, p. 1030, spéc. p. 1031

35. Des règles de réalisation spéciales et lacunaires. Lorsque la sûreté réelle spéciale dispose

de règles de réalisation incomplètes, le droit commun va compléter ces lacunes. Il joue alors pleinement son rôle subsidiaire204 et les attributions conventionnelles et judiciaires en propriété doivent être admises205. Il en va ainsi, par exemple, en matière de nantissement de compte d’instruments financiers, la loi visant « les attributions »206

mais n’en précisant pas la nature. Au regard du rôle supplétif du droit commun, il convient d’admettre que ces attributions, selon le choix du créancier207,peuvent être judiciaires208 ou conventionnelles209. Il en va de même en matière de nantissement de parts de sociétés civiles. En effet, la loi prévoit des règles particulières quant à la réalisation par la vente210 mais aucune à propos de la réalisation par attribution en propriété. Que le nantissement de parts sociales soit analysé en un nantissement de créance211 ou en un nantissement d’autres biens incorporels212

, les attributions en propriété semblent devoir être admises. Néanmoins, le respect des règles d’agrément213

s’impose214.

204

Sur le caractère subsidiaire du droit commun voir notamment : J.-L.THIREAU, Droit commun, in Dictionnaire de la

culture juridique, dir. D. Alland, S. Rials, Puf quadriges, 2003

205

S. HÉBERT, Le pacte commissoire après l’ordonnance du 23 mars 2006, D. 2007, Chron., p. 2052, n°13. Sous l’empire du droit antérieur, madame C. Lisanti-Kalczynski, avait démontré qu’à défaut de disposition contraire le droit commun du gage devait s’appliquer aux sûretés réelles conventionnelles sur meubles incorporels. C. LISANTI -KALCZYNSKI, Les sûretés conventionnelles sur meubles incorporels, préf. F. Pérochon, Bibliothèque du droit de l’entreprise, Litec, 2001

206

L’article D.211-12 du code monétaire et financier prévoit les modalités de réalisation du nantissement. Il dispose que

« […] La réalisation du nantissement de ce compte prévue aux IV et V de l'article L. 211-20 intervient :[…]

2° Pour les titres financiers, français ou étrangers admis aux négociations sur un marché réglementé que le titulaire du compte nanti ou, à défaut, le créancier nanti a désignés, par vente sur un marché réglementé ou attribution en

propriété de la quantité déterminée par le créancier nanti. Cette quantité est établie, par le créancier nanti, sur la base

du dernier cours de clôture disponible sur un marché réglementé ;

3° Pour les parts ou actions d'organisme de placement collectif au sens du 3 du II de l'article L. 211-1, que le titulaire du compte nanti ou, à défaut, le créancier nanti a désignées, par présentation au rachat ou attribution en propriété de la quantité qu'il détermine. Cette quantité est établie, par le créancier nanti, sur la base de la dernière valorisation disponible desdites parts ou actions. […] »

207

C.LISANTI-KALCZYNSKI, Les sûretés conventionnelles sur meubles incorporels, préf. F. Pérochon, Bibliothèque du droit de l’entreprise, Litec, 2001, spéc. n°283

208

Contra voir L.AYNÈS et P.CROCQ, Les sûretés, la publicité foncière, Defrénois, 2010, spéc. n°540. Ces auteurs

considèrent que l’attribution judiciaire est injustifiée car il n’existe aucun risque de sous-évaluation des biens.

209

Dans ce sens S.PERUS, Des aspects pratiques du pacte commissoire, RLDC. 2008, n°50, spéc. II

210

En effet, au regard des articles1867 du Code civil, la société dispose, en cas de vente d’une sorte de faculté de substitution et peut racheter les parts et diminuer son capital.

211

Voir par exemple : L.AYNÈS et P.CROCQ, Les sûretés, la publicité foncière, Defrénois, 2010, spéc. nos 525 et s.

212

Voir par exemple : P. DIDIER,P.DIDIER, Droit commercial, t.2 Les sociétés commerciales, Corpus Droit Privé, Economica, 2011, spéc. n°261 ; voir aussi M. GERMAIN, Traité de droit commercial, t.1 vol.2, Les sociétés

commerciales, 19ème éd. 2009, spéc. n° 1084 ; M.CABRILLAC,C.MOULY,S.CABRILLAC,P.PÉTEL, Droit des sûretés, Manuel, Litec, 9ème éd., 2010, spéc. n°791 ; F.JACOB, Le nantissement des parts sociales, in Sûretés mobilières : du nouveau, Dr. et Patr. juil-août 2007, n°161, p. 68.

213

P.DIDIER,P.DIDIER, Droit commercial, t.2 Les sociétés commerciales, Corpus droit privé, Economica, 2011, spéc. n°264 ; P. LE CANNU, B. DONDÉRO, Droit des sociétés, Domat, Droit privé, Montchrestien, 3ème éd. 2009, spéc. n°1396 ; C. LISANTI-KALCZYNSKI, Les sûretés conventionnelles sur meubles incorporels, préf. F. Pérochon, Bibliothèque du droit de l’entreprise, Litec, 2001, spéc. n° 273. M.COZIAN,A.VIANDIER,F.DEBOISSY, Droit des

sociétés, Litec, Manuel, 27ème éd 2014, spéc. n°1137. L’agrément est facilité dans la mesure où si la société consent au nantissement, cet agrément emporte agrément du cessionnaire et même de l’attributaire (le créancier).

214

36. L’absence totale de règles spéciales de réalisation. Enfin, lorsque la sûreté réelle spéciale

n’est pas soumise à des règles spéciales prévoyant sa réalisation, le droit commun s’y substitue et il convient d’admettre les attributions en propriété comme modes de réalisation. Il en va ainsi en matière de nantissement de droits d’exploitation de logiciels215, de brevet d’invention216

, de marques217, ou de dessins et modèles218. Il faut admettre, comme l’avait fait une partie de la doctrine avant la réforme à propos de l’attribution judiciaire219

, la validité des attributions en propriété220.

37. La question délicate de l’attribution en propriété dans le nantissement judiciaire. La

question du régime de réalisation applicable au nantissement judiciaire répond à une autre logique. En effet, le régime applicable doit être identique à celui du nantissement conventionnel. Par exemple, si le nantissement judiciaire porte sur un fonds de commerce, le régime du nantissement de fonds de commerce s’applique et l’attribution en propriété nous semble exclue. En revanche, si le nantissement porte sur du matériel et de l’outillage, l’attribution en propriété devrait être possible.

Nous avons essayé de montrer que les attributions conventionnelles et judicaires en propriété ont été généralisées par la réforme du droit des sûretés à l’ensemble des sûretés réelles conventionnelles fondées sur un droit de préférence. Elles appartiennent au droit commun de la réalisation de ces sûretés réelles. Par la loi du 31 janvier 2009, le législateur a consacré ce mécanisme d’attribution en propriété aux fiducie-sûretés.

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