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La déjudiciarisation des procédures d’exécution et des procédures d’insolvabilité

Dans le document La réalisation des sûretés réelles (Page 84-87)

Section 2. Le second critère de l’option : la réalisation amiable ou la réalisation forcée

B. Les deux phases de la déjudiciarisation des modes de réalisation

1. La déjudiciarisation des procédures d’exécution et des procédures d’insolvabilité

59. Les deux étapes de la déjudiciarisation des procédures civiles d’exécution. La

déjudiciarisation des procédures civiles d’exécution s’est effectuée en deux phases. Le législateur, par la loi du 9 juillet 1991, a déjudiciarisé les voies d’exécution mobilières. Toutefois, le droit français disposait de précédents dans le droit local applicable à l’Alsace et la Moselle. Depuis 1924, celui-ci prévoit qu’il appartient au notaire de mener la procédure d’exécution forcée sur les immeubles après autorisation du juge d’exécution301 et l’administration forcée des immeubles302. Cette dernière procédure est une « sorte d’antichrèse forcée [qui] permet au créancier de priver son

débiteur, de l’administration et de la jouissance de son immeuble pour se payer sur les revenus procurés par celui-ci ».

60. La déjudiciarisation des procédures civiles d’exécution mobilières. En matière

mobilière, le droit commercial comportait déjà un mode de réalisation déjudiciarisé. En effet, la réalisation du gage n’est pas soumise aux procédures civiles d’exécution. Le créancier, même s’il n’est pas titulaire d’un titre exécutoire, peut procéder à la vente forcée du bien, selon une procédure

301

P. JULIEN, G. TAORMINA, Voies d’exécution et procédures de distribution, LGDJ manuel, 2ème éd. 2010, spéc. nos705 et s.

302

Voir notamment P.JULIEN,G.TAORMINA, Voies d’exécution et procédures de distribution, LGDJ manuel, 2ème éd. 2010, spéc. n°729

d’adjudication judiciaire, après signification303

demeurée infructueuse pendant au moins huit jours304.

En 1991, le législateur a maintenu l’exigence d’un titre exécutoire mais a modifié considérablement l’architecture des procédures. Le rôle du juge a été modifié. D’organe clé des voies d’exécution, il en est devenu le contrôleur et n’est plus saisi qu’en cas de contestation. Les voies d’exécution mobilière reposent sur les huissiers de justice qui procèdent aux saisies et aux organes chargés des ventes tels que les commissaires-priseurs ou les notaires305.

De plus, des phases amiables de procédures ont été créées. Ainsi, en matière de saisie-vente, le débiteur saisi dispose d’un mois, à compter de la notification de l'acte de saisie, pour trouver un acquéreur à son bien306. Cette phase amiable est obligatoire. S’il ne trouve pas acquéreur, le bien sera vendu aux enchères publiques par un organe chargé de la vente. La procédure de vente forcée mobilière est donc entièrement déjudiciarisée. Toutefois, le débiteur n’est pas totalement maître de ses choix, il doit rendre compte des différentes propositions reçues à l’huissier qui en informe les créanciers saisissants et les créanciers opposants. Le juge connaît seulement des contestations. De même, la distribution du prix de vente est en principe amiable. Le créancier saisissant prépare l’ordre des paiements. Le juge n’intervient qu’en cas d’opposition de l’un des créanciers et d’échec de la phase de conciliation.

61. La déjudiciarisation dans les procédures d’insolvabilité. Dans le droit de l’insolvabilité,

le besoin de réforme et de renforcement des procédures amiables s’est également fait sentir. Les procédures de surendettement des particuliers sont en principe des procédures négociées sous le haut patronnat de la Banque de France. Le droit des procédures collectives a vu se développer307 et se renforcer les procédures amiables de traitement des difficultés sous la forme du mandat ad hoc et de la conciliation.

L’introduction des procédures amiables a également touché les ventes de biens dans les procédures judiciaires. En effet, le liquidateur, après l’autorisation donnée par ordonnance du juge commissaire, peut vendre l’immeuble, de gré à gré ou par adjudication amiable au lieu de le liquider par adjudication judiciaire. Quant au meuble, il peut être vendu de gré à gré308 ou par adjudication judiciaire. Dans la procédure de liquidation judiciaire simplifiée, la déjudiciarisation est plus poussée. Le liquidateur peut vendre de gré à gré les biens déterminés par le tribunal ou son

303

A l’inverse la matière commerciale, une simple lettre recommandée avec accusé de réception ne suffit pas. Cass. Civ., 3 févr. 1937 ; DP 1937, 165.

304

Artcicle L. 642-18 du Code de commerce

305

Sauf pour la saisie des rémunérations du travail car elle produit un effet attributif immédiat.

306

Article R. 221-30 du Code des procédures civiles d’exécution

307

Il existait auparavant une procédure de règlement amiable et de mandat ad hoc.

308

président. Aucune autorisation du juge commissaire n’est requise. Le liquidateur dispose alors de trois mois pour procéder à cette vente309.

En matière immobilière, la loi articule les procédures de saisie immobilière et les procédures collectives. Le juge commissaire ordonne la vente par adjudication judiciaire mais c’est le juge de l’exécution qui y procède. En effet, les dispositions relatives à la saisie immobilière s’appliquent, à l’exception des règles relatives à l’audience d’orientation310

, à la fixation du prix et à sa consignation311. Il en ressort que les règles de la saisie immobilière s’imposent comme le droit commun de la vente forcée de l’immeuble.

Notons qu’en matière de procédure collective, la revendication des biens impose également le respect d’une phase amiable. Une fois que la demande en revendication ou en restitution est déposée, l'administrateur avec l'accord du débiteur ou à défaut le débiteur après accord du mandataire judiciaire a un mois pour acquiescer à la demande en revendication ou en restitution d'un bien312. En cas de succès, le juge n’intervient pas et le bien est restitué à son propriétaire.

62. La vente par le débiteur dans la saisie immobilière. En matière de saisie et de vente

forcée immobilière, le législateur de 2006 a maintenu le caractère judiciaire des procédures de vente sur saisie immobilière mais lors de l’audience d’orientation, le débiteur peut demander à vendre son bien313. Cette vente ne rend pas la procédure amiable car contrairement aux procédures mobilières, elle ne constitue pas un droit pour le débiteur. Le JEX autorise le débiteur à procéder à cette vente, dont il fixe les conditions et notamment le prix minimum. Le débiteur dispose d’un délai de quatre mois pour vendre l’immeuble. Ce délai peut éventuellement être allongé de trois mois pour procéder à rédaction de l’acte authentique. Toutefois, sa liberté est plus restreinte qu’en matière mobilière car c’est le juge de l’exécution qui fixe les conditions de délai. S’il échoue, le bien est vendu par adjudication à la barre du tribunal.

En revanche, comme en matière de distribution du prix de vente d’un meuble, la distribution du prix de l’immeuble a en principe lieu à l’amiable. Le juge n’intervient que pour régler les contestations subsistantes après une tentative de conciliation.

309

Voir notamment sur ce point : C. SAINT-ALARY-HOUIN, Droit des Entreprises en difficulté , Montchrestien, Domat Droit privé, 8ème éd.. 2013, spéc. n°1340

310

H.CROZE,C.CROZE, Procédures collectives : conséquences procédurales de l’ordonnance du 18 décembre 2008 et de son décret d’application, Procédures, avril 2009, n°4, étude n°3

311

Article L.642-18 alinéa 1 du Code de commerce : « Les ventes d'immeubles ont lieu conformément aux articles 2204

à 2212 du Code civil, à l'exception des articles 2206 et 2211, sous réserve que ces dispositions ne soient pas contraires à celles du présent code. Le juge-commissaire fixe la mise à prix et les conditions essentielles de la vente. »

312

Article L. 624-17 du Code de commerce

313

Articles 50 et suivants du D n°2006-936 du 27 juillet 2006 devenus l’article R. 153-1 et les articles R. 131-1 et suivants du Code des procédures civiles d’exécution

Le phénomène de déjudiciarisation des procédures servant à la réalisation des biens grevés de sûretés réelles s’est couplé avec la création de modes de réalisation totalement amiables y compris en matière immobilière.

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