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77 Les formes transfigurent les aptitudes et les mouvements de l'esprit

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plus encore qu'elles ne les spécialisent. Elles en ont reçu non le pli, mais l'accent. Elles sont plus ou moins intellect, imagination, mémoire, sensibilité, instinct, caractère; elles sont plus ou moins vigueur musculaire, épaisseur ou fluidité du sang. Mais elles

opèrent sur ces données comme des éducatrices, elles ne leur laissent pas un seul instant de repos. Elles pèsent de tout un poids qui

n'est pas vain, puisque c'est celui des matières de l'art; elles installent dans la pensée une étendue qui n'est pas quelconque puis­ que c'est un espace consenti ou voulu,

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, Les_Formes dans le temps.

Quelle est la place de la forme dans le temps et comment s'y comporte-t-elle?

Parler de la vie des formes, c'est évoquer nécessairement l'idée de succession.

Pour Focillon, le problème de la forme dans le temps est double: C'est d'abord un problème d'ordre interne: quelle est la position de l'oeuvre dans le développement formel?

Un problème externe: quel est le rapport de ce développement avec les autres aspects de l'activité.

Dans le rapport du développement stylistique et du déve­ loppement historique, nous devons faire tine place à l'influence exercée par les milieux naturels et par les milieux sociaux sixr la vie des fonnes. L'art est fortement attaché à la terre, soumis à la commande, fidèle à ttn programme - Il est géographique, psycho­ logique et sociologique.

Que penser de la Vie des Formes?

C'est bien l'un des plus grands livres de l'Esthétique française,

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) Au cours de ces pages étincelantes, Focillon jette des thèmes morphologiques dont nous poTxrrons tirer profit lorsqu'il s'agi­ ra l'élaborer un cours d'initiation esthétique. Il ouvre des voies multiples à qui veut apprendre à voir.

2) Un autre grand mérite de Focillon dans ce sujet difficile toujours exposé au vague des jugements de valeur et des inter­ prétations glissantes est d'insister sur le fait que l'obser­ vation des phénomènes d'ordre technique non seulement nous garantit tme certaine objectivité contrôlable mais encore nous porte au coeur des problèmes en les pesant pour nous dans les mêmes termes et sous le même angle que pour l'arbitre. C'est

là l'intérêt fondamental que présente 1'"histoire" de l'oeuvre avant l'exécution définitive, l'analyse des premières pensées, des esquisses, des croquis antérieurs à la statue et au tableau 3) Repérons pour terminer une idée dont nous pourrons faire notre

profit: Focillon insiste sur la multiplicité des facteurs qui s'oppose à la rigueur du déterminisme et qui, le morcelant en actions et réactions innombrables, provoque de toutes parts des fissures et des désaccords.

Pour Focillon, l'artiste, dans ces mondes imaginaires est à la fois, un géomètre, un psychologue, un physicien, un chimiste un mécanicien, un historien.

VI. - U_N___E_S_S_A^I____D_E____R_E^N_0_V_A_^^ _______D_E_______L_A

M_E_T_H_0_D^E____E_N___^E_S_T^H^E_T_I_g_U^E.

R. BAYER.

Il m'a fallu lire et relire les Essais sur la Méthode en Esthétique de Raymond Bayer poiir arriver à suivre le tissu serré d'une pensée qui se déroule sous une forme extrêmement concentrée. Après avoir affirmé que "l'art est de l'ordre de la valeur et n'est pas de l'ordre de l'être", qu'"hypnotiser", voilà le moyen de

tout art", l'auteur montre les apports des diverses contributions à la méthodologie esthétique. Il passe en revue l'esthétique physi­ que de Fechner, puis l'esthétique psychologique et enfin la socio- esthétique de Charles Lalo.

beau est un réalisme opératoire. Bayer nous donne 3 avertissements méthodologiques liés au réalisme opératoire et que nous pouvons considérer comme le coeur de l'essai intitulé: "De la Méthode en Esthétique".

1) Re.jeter toute esthétique mentale où l'imaginaire se substitue à l'exploré, où les lacunes et les insuffisances de l'oeil sont comblées par des variations de l'esprit.

Il faut, dit Bayer, que je m'enferme dans l'oeuvre avec elle, devant elle et que j'oublie, face à l'objet, l'univers de mes pensées".

Se garder de l'esthétique mentale, c'est exorciser tous les "fan­ tômes" de l'oeuvre et la simplement"voir".

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) Ne se poser, en esthétique que les problèmes qui se posent. L'artiste ne pose ses problèmes vraiment, ses vrais problèmes, qu'au moment de l'objet et dans l'objet.

3

) L'objet de l'art est chose visible, ne commenter que ce qu'on voit.

Dans l'oeuvre d'art toute idée devient trace. L'oeuvre d'art est lin objet du monde qui a sa définition deins l'espace et prend ses coordonnées du temps. Elle est une combinaison d'aspects et une concrétion; sa réalité est précisément dans son apparence.

Par ces

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avertissements - Bayer tout axé sur la notion d'objectivité - nous met en garde contre les digressions vides et inutiles qui foisonnent dans l'esthétique contemporaine.

Cette notion d'objectivité fera d'ailleurs l'objet du dernier essai: "Esthétique et Objectivité".

"Deux obstacles se dressent aux portes d'une science du Beau: le subjectif et le qualitatif"

Eliminer le facteur personnel qualitatif en faveur du quantitatif est le fondement de l'esprit scientifique. Or toute esthétique devrait être une science mais de la qualité, une discipline du jugement de goût mais surgie d'entre les estimations subjectives. Voilà un paradoxe de base.

La Méthode se heurte partout à une triple résistance:

1®) l'irréductibilité des goûts: l'expérience esthétique trahit "l'indice propre d'un idiosyncrasie avec ses sensibilités

uniques et ses refus particuliers".

Elle est par essence le miroir d'un tempérament, c'est dire qu'elle n'est point "universalisable".

2°) l'indicible des intuitions; authentique, l'expérience esthéti­ que ne prend de valeur que par sa vertu intuitive et donc indi­ cible; mais le seul discursif est de l'ordre de la preuve; l'expérience esthétique n'est point "vérifiable"»

3°) l'hétérogénéité qualitative; or l'homogène seul est rationnel et susceptible d'être conçu. L'expérience esthétique, au sens exact, n'est point "pensable".

BAYER indique comment dominer cette triple résistance en nous retranchant derrière le phénomène vocabulaire.

Fixer une catégorie esthétique (cette oeuvre est baroque, classique, etc.) c'est redresser le faisceau des impressions subjectives dans l'universel. C'est partir des qualités et c'est aboutir aux notions. C'est là tin terrain de départ restreint mais consistant".

Ainsi la première règle de la méthode sera qu'il faut détacher le jugement esthétique à l'influence de la personne, et le détacher du juge dès que de lui-même il se détache; c'est-à-dire dès que, tombé dans l'univers du langage, il s'exprime.

Ce mot, notre tinique outil de départ, doit être d'une précision rigotireuse.

Les juges les plus précis, selon Bayer, sont ceux de la critique d'art, elle est le laboratoire des notions esthétiques;

elle impose la référence à des maîtres incontestés;

elle circonscrit ses recherches à des époques claires où la notion est inçérieuse et se fait dominatrice sur les

esprits; l'étude de la notion se restreint aux cas non douteux;

elle livre le purisme d'un langage dans la rigueur impecca­ ble du vocabulaire.

L'analyse psychique par introspection fait discriminer tout au plus des "Stemmungen"; l'art, avec ses références histori­ ques donne à la notion, des éclairages mais c'est dans l'orientation

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