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87 Ces deux attitudes de pensée étaient symbolisées par

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deux graphismes.

Un graphisme fermé caractérisait l’esprit de construction intellec­ tuelle, un graphisme ouvert l'esprit d'observation.

Des exemples illustraient l'esprit pratique de la con­ naissance en Egypte, les efforts de rationalisation de la Grèce, l'esprit ouvert à toutes les perspectives durant la Renaissance. La coexistence des deux tendances aux 17e et 18e, l'aspect expéri­ mental au

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e s. et au 20e s., la coexistence définitive des deux attitudes, les multiples recherches de laboratoire dans tous les domaines nous ayant enfin conduits à reconnaître qu'il n'y a pas de cloison entre les différentes disciplines et que la connaissance est une imité.

Cet exposé devait être sommaire pour le palais de la Science, il en était par conséquent trop absolu. Il mettait admirablement en lumière les deux attitudes de l'homme mais son caractère volontai­ rement simplifié nous dissimulait que ces deux modes de pensée - étant le propre de l'humanité - ont toujours coexisté avec à cer­ tains moments ime nette dominance de l'un ou de l'autre.

Aujourd'hui, nous semblons avoir fait le point. Le bon sens élémentaire nous oblige - en présence des études contemporai­ nes - à constater l'existence indubitable de ces deux attitudes - également valables et également nécessaires - de l'homme en face de la connaissance.

Après avoir relevé tous les efforts des penseurs en des directions différentes et avant de chercher xm procédé susceptible d'initier les élèves au phénomène esthétique, ce même bon sens nous conduira tout naturellement à explorer les diverses disciplines qui viennent le colorer.

Comme le signale encore Monsieur le Professeur Decoster dans ses cours, la conçilémentarité des connaissances est la seule méthode qui nous permette d'approcher la vérité avec un minimum de risques d’erreurs.

C'est donc à l'apport des diverses disciplines que sera consacrée la deuxième partie de ce travail.

APPORT DES DIVERSES

I. - L1A_P_P_0_R_T_____D_1_S_____M_A_T_H_E_M_A_T_I_Q_y_E_S.

Le nombre, la géométrie, l'ordre et la mesure apparaissent dans tout domaine artistique. L'étude de leur rôle bien que très ancienne appelle de nouvelles recherches,

a) L'IDEE DE PROPORTION CHEZ LES GRECS DE L'ANTIQUITE.

Le Grec définit d'une façon rigoureuse toutes les notions de proportion, de mesure, de composition et de rythme qui font

toute forme abstraite comme un temple, ou réaliste comme une statue, régie par les lois du nombre. Selon cette esthétique, toutes les parties d'un ensemble se trouvent ordonnées entre elles, "propor­ tionnées" par tine commune mesure ce que nous appelons im rapport et que les Grecs dénommaient "canon" qui veut dire règle. Ce canon ou "module" est le principe de la forme, dont, par une suite de

rapports, se déduisent les composantes; ainsi la statue est contenue dans le "dactyle", ou largeur du doigt, le temple dans le dieunètre de la colonne.

Pour ce qui concerne la musique grecque, rappelons que les échelles musicales firent l'objet de Pythagore à Ptolémée de calculs minu­

tieux pour chacun de leurs inteirvalles et que les compositeurs ne s'éloignèrent jamais des modes fondajnentaux auxquels ils attribuaient des caractères respectifs: le dorien convenant à toute musique

sévère, le phrygien étant réservé au dithyrambe, au thrène et en général aux mélodies exécutées sur l'aulos,

+ + +

Cette idée de proportion se retrouve à toutes les époques de l'évolution des arts.

De nos jours, le module à l'échelle hixmaine régit les constmctions de Le Corbusier. L'esthétique comme science des proportions est l'objet d'une étude très détaillée de Ghika qui dépasse d'ailleurs le cadre d'une recherche stir la guidance esthétique.

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b) L«ART ET LES MATHEMATIQUES SELON PAUL MONTEL.

Après avoir rappelé cette idée de proportion exprimable en rapports étudiés que nous trouvons déjà chez les Grecs, effor­ çons-nous de poser le plus clairement possible le problème de l'art et des mathématiques» C’est une conférence que Pierre MONTEL fit en décembre 19^7 à la Société française d'Esthétique qui nous y aidera.

Selon l'auteur, les mathématiques sont unies à toute production artistique et à un triple point de vue:

- 1® les propriétés de la matière contraignent l'artiste à obéir aux lois naturelles, à celles de la pesanteur, de l'élasti­ cité, de la perspective. La nature des substances introduit ici la règle mathématique.

- 2° l'harmonie de la forme exige l'introduction de proportions, de rapports simples en dehors desquels la joie esthétique s'atténue et s'évanouit.

- 3° les mathématiques interviennent encore dans la détennination des dimensions propres de l'objet.

Celui-ci n'est réellement beau que s'il demeure à l'échelle hiimaine. Si ses dimensions deviennent trop grandes, l'harmonie et la beauté se transfonnent en une expression de force et de puissance puis disparaissent. Si l'objet devient trop petit, elles s'effacent peu à peu dans la finesse, la grâce et la mièvrerie.

Une des conditions de la valeur esthétique réside dans le rapport entre les dimensions des objets et celles du corps

humain: ce rapport devant être compris entre certaines limites. Le mérite de MONTEL est de se borner très scientifiquement à dépister divers points d'adéquation des fonnules et de la beauté sans prétendre que toute oeuvre peut être envisagée voire prévue mathématiquement.

c) A PROPOS DE LA SECTION D'OR.

Cette prudence de MONTEL à éviter d'entacher d'un certain mysticisme l'assimilation de l'oeuvre à la mathématique évoque tout

nattirellement en nous le problème âprement discuté de la Section d'or.

Un nombre que l'on rencontre fréquemment dans les propor­ tions des oeuvres d'art et qui depuis l'Ecole de Pythagore a traversé les siècles est le nombre d'or ou section dorée dont la valeur est à peu près égale à 1,6. Certains prétendent le retrouver dans le plan et l'élévation des temples et des églises, dans la composition des tableaux et des vitraux, dans les proportions du corps humain, dans la Grande Pyramide de Giseh, dans le Parthénon, dans l'architecture romane et gothique, etc...

En fait, la géométrie ne fut jamais envisagée comme une fin mais comme moyen. Les mathématiciens ont défini la section d'or: le rapport de la diagonale au côté du carré mais après avoir été ins­ pirés par des constructions empiriques. La Section d'Or fut de tout temps pratiquée par d'humbles artisans, ignorant la géométrie, dans la fabrication d'objets usuels, maçonneries, tables, armoires, cof­ fres. On la retrouve dans la mesure des châssis de tableaux sous le nom de "format marine" ou "format paysage".

Sans vouloir prendre une positions que je me sens incapa­ ble de défendre en connaissance de cause, je crois néanmoins pou­ voir admettre que la section d'or n'est jamais la seule mesure

géométrique à laquelle se soumettent les artistes, qui - selon André LHOTE - se référeraient plus fidèlement à des "constantes".

Quoi qu'il en soit, le seul fait vraiment indéniable est que toute manifestation du lyrisme plastique est assujettie aux nécessités de la mesure.

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___§_?_§__ §_T_-è_î_ï_§_î_ï_â_y_E_s.

UTILISATION DES TECHNIQUES STATISTIQUES DANS LA RECHERCHE D'UNE INITIATION ESTHETIQUE.

L'aspect pédagogique de la recherche que nous poursuivons reste dans bien des cas sxir le plan de perfectionnement des méthodes et des procédés sans réaliser un contrôle expérimental vraiment valable.

Lorsque dans le cadre de ma classe j*ai tenté ce que j'appelle une "expérience", il s'est généralement agi d'une tentative dont mon enthousiasme et mes efforts personnels momentanément décuplés mas­ quaient l'efficacité réelle du procédé rendant les comparaisons difficiles.

En fait, il ne faut pas négliger les techniques modernes de la sta­ tistique qui tout en apportant des solutions acceptables aux diffi­ cultés matérielles favorisent les efforts tentés pour promouvoir une pédagogie véritablement scientifique et en grande partie

expérimentale.

La statistique intervient dans les domaines les plus di­ vers. Elle ne s'appuie pas toujours sur des faits nombreux, mais sait, par une analyse subtile tirer parti d'un petit nombre de don­ nées judicieusement choisies. Le progrès, en matière statistique s'est réalisé grâce à deux impulsions complémentaires: les mathéma­ ticiens fournissent des outils, de plus en plus précis aux statis­ ticiens et ces derniers, cessant de s'intéresser aux seules questions démographiques et économiques pour étendre le champ de leurs études à tous les domaines où le hasard est présumé jouer un rôle posent de nouveaux problèmes aux mathématiciens et suscitent des solutions nouvelles.

Au point d'évolution actuelle des méthodes statistiques, on peut dire que celles-ci ne se limitent plus à l'exploitation des données très nombreuses qui apparaissent dans les dénombrements démographiques, économiques ou sociologiques, mais qu'elles ont étendu leur champ d'application à toutes les recherches dans les­ quelles le grand nombre et l'enchevêtrement des facteurs de variation

exigent une technique d'interprétation basée sur la connaissance des "lois du hasard" c'est à ce titre qu'on peut même, citer la psychologie : appliquée : le comportement des individus par la métho­ de des tests, le sondage de l'opinion publique.

Certains cherchetirs n'hésitent pas à s'aider de la méthode statis­ tique dans l'étude des phénomènes qui sont en apparence tout à fait étrangers aux mesures, comme l'évolution des grands coureints de la pensée ou des formes littéraires.

Dajis ces différents domaines, à la phase initiale purement descrip­ tive, succède la recherche des lois statistiques, qui sont les seules que l'on puisse connaître lorsque l'expérimentation propre­ ment dite est impossible; le dernier stade est celui de la prévision.

Je me limiterai à rappeler ici les quelques exemples adaptés à mon sujet,de l'aide apportée par les analyses mathémati­ ques de la statistique dans l'étude des résultats et dans l'expéri­ mentation, et que j'ai signalés dans le chapitre consacré à l'esthé­

tique psychométrique. Il est évident que la pédagogie ne se réduit pas à des analyses mathématiques.

Ces méthodes peuvent paraître inutiles à certains. C'est cependant là un moyen d'introduire un contrôle expérimental des

recherches effectuées. Si le travail quotidien de l'éducateur relève en grande partie de l'art, celui du chercheur doit être l'applica­ tion d'une méthode objective exigente.

Mais ces recherches très longues demandent une collaboration étroite entre les centres, peu nombreux encore, et dans ce sens, une fois de plus, la pédagogie expérimentale ne pourra se développer que par un travail d'équipe.

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III.- a_p_p_o_r_t___d_e____l_a___s_o_c_i_o_l .

Les sciences sociales coopèrent à l’étude du sentiment esthétique et à la connaissance des oeuvres d'art.

Elles étudient le phénomène de la mode qui pose le problème de l'imitation et montre que le beau semble lié à un sentiment collec­ tif capable de varier. Elles aident à voir les oeuvres comme des témoins d'une culture. Elles nous révèlent le statut et les fonc­ tions de l'art et des artistes variant selon le temps et les lieux, compte tenu des facteurs religieux, géographique, historique et technique.

A. LE PUBLIC.

A la contemplation psychologique correspond la notion sociale de FOULE, de collectivité, c'est-à-dire de public. Ce pu­ blic entre en contact avec la réalité artistique. Il obéit d'abord aux lois de la foule ou des assemblées. Il crée son propre être physique et psychologique, impressionnable, difficile à capter. Il semble qu'il n'y ait pas à proprement parlé un seul, mais plu­ sieurs publics: lectures en petit comité, répétitions générales, présentations au jury, vernissages constituent autant de publics différents,

Mais, il ne faudrait pas croire à la passivité absolue du public. D'abord, il ne s'est généralement pas trouvé par hasard en présence de l'oeuvre; il s'est assemblé en état d'attente et même d'appéti- tion. Non toujours directement par amour de l'art: ce peut être par sociabilité générale.

Le public n'est d'ailleurs pas nécessairement sincère dans son admiration pour l'oeuvre: l'assistance réunie à un vernissage, à un opéra ou à une représentation peut chercher avant tout l'occa­ sion de manifestations plus mondaines qu'esthétiques, Cependant si distrait ou si snob que soit le public, il subit toujours un peu la discipline de l'art.

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B. IMITATION - SNOBIS^IE.

Le problème de la sincérité du public, de l'imitation, du snobisme est de la première importance. Il m'a paru très bien posé par Monsieur le Professeur Jean LAMEERE dans un article qu'il publia en 1938 dans la Revue de l'Institut de Sociologie et dont je relève les idées essentielles.

Dans une remarque préliminaire, l'auteur montre la néces­ sité pour étudier le phénomène de la mode dans l'art, de préciser les limites de ce qui relève de l'activité esthétique et de ce qui relève d'autres activités. Ces limites, nous les touchons du doigt lorsque Monsieur LAMEERE évoque le double processus de la formation de ce qu'on appelle le goût d'une société, d'une époque, d'un groupe social.

Prenant comme exemple la vogue de certains cafés littéraires pari­ siens, l'auteur prouve:

1° qu'un établissement devient à la mode quand pour l'une ou l'autre raison, il a été fréquenté par des artistes en renom qui accordent alors une certaine valeur à l'établissement. 2° que les mondains adoptent cette valeur sans se prononcer sur

l'objet évalué lui-même. Ils n'obéissent plus au même mobile que les premiers.

Un second exemple, celui de la mode de la toilette féminine illus­ tre ensuite cette démonstration.

Il y a dans la mode des caractères généraux qui se retrouvent sous la diversité des modes particulières. C’est à l'intérieur de ce cadre général que joue la diversité. Mais pour quelles raisons se modifie le cadre?

- 1° Il y a - d'abord - un facteur économique: le souci de la vente est tm mobile puissant qui - s'il explique le changement pro­ posé par les couturiers - n'explique pas la direction du chan­ gement .

-

Les formes inventées doivent - dans une certaine mesure - plai­ re non pas à tout le monde mais à quelques personnes qui

donnent le ton. Parfois la réputation seule d'un artiste suffit à rallier les suffrages.

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