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Financement des services de santé 1. L'actualité du problème

Morbidité ressentie

NIVEAU TERTIAIRE

B. LE NIVEAU SECONDAIRE 1. Le centre de santé de subdivision

4. Financement des services de santé 1. L'actualité du problème

Le mode de financement des services de santé consti-tue un élément essentiel de l'action sanitaire.

Dans les anciennes colonies françaises, il repose en-core, en règle générale, sur des principes qui étaient en vigueur avant les indépendances.

Divisés entre les deux pôles que constituaient l' assis-tance médicale indigène et les équipes mobiles d'hy-giène et de prophylaxie, les services de santé n'avaient qu'à utiliser au mieux les enveloppes financières qui leur étaient attribuées. On a certes assisté, depuis lors, à la disparition de la première de ces structures et à sa transformation en services de santé nationaux, mais les principes financiers de base sont restés identiques.

Même lorsque les formations sanitaires sont autorisées à tarifier leurs services, leurs recettes sont systémati-quement reversées au trésor public, qui les redistribue en partie sous forme de dotations budgétaires.

Secteur privilégié de l'aide extérieure, qui se veut humanitaire et désintéressée, la santé a bénéficié au cours des vingt dernières années d'une masse de dons, qui ont contribué à la multiplication des formations sanitaires fixes. Cependant, à la croissance des inves-tissements n'a nullement succédé celle des budgets de fonctionnement. Par ailleurs, l'augmentation du nom-bre des emplois dans le secteur de la santé n'a cessé d'alourdir les charges salariales qui, actuellement, engloutissent la plus grande part des budgets.

Le manque évident de crédits de fonctionnement non salariaux a pour conséquences:

- le délabrement des locaux et de l'équipement par manque de budget d'entretien;

- l'absence quasi totale de médicaments et de maté-riel consommable, obligeant le corps médical à ne travailler que sur ordonnances;

- la rareté ou l'abandon des tournées de supervision, et souvent:

- la démobilisation du personnel par insuffisance et irrégularité du versement des salaires.

Quant aux équipes dites mobiles, il y a bien longtemps qu'elles ont cessé de tourner, à moins qu'un finance-ment extérieur accordé dans le cadre d'un programme vertical (PEV, par exemple) ne les ait provisoirement renflouées.

Ces difficultés ne sont en fait liées ni à une fatalité résultant de la pauvreté des Etats ni à la mauvaise volonté de ceux qui en ont la charge, mais à

l'inadaptation totale du système actuel de financement.

Elles vont inéluctablement contraindre les gouverne-ments à mettre en place des systèmes aptes à s'inscrire dans une dynamique de développement.

4.2. Principes de financement dans le cadre d'une stratégie de type soins de santé primaires

Certains pays ont d'ores et déjà procédé à une réforme complète de financement des services de santé; dans le cadre de la stratégie des soins de santé primaires, l'idée générale est qu'il convient "d'obtenir une parti-cipation libre et éclairée de la communauté", des fa-milles et des individus, "qui les amènera à participer individuellement et collectivement, comme ils en ont le droit et le devoir, à la planification, à l'exécution et au contrôle des activités visant leur santé et le déve-loppement social connexe" (1). Les formes de la parti-cipation communautaire qu'il s'agit de mettre en oeu-vre sont multiples, mais il est clair qu'elle doit avoir des implications financières : tout ce qui, dans les systèmes actuels de financement, placerait la commu-nauté dans une position de dépendance à l'égard d'une organisation bureaucratique, doit être remplacé par des modalités reposant sur la participation de la commu-nauté et son contrôle.

Cette idée générale a déjà été prise en considération dans de multiples pays, régions ou circonscriptions médicales. Il n'existe certainement pas de solution universelle. Au contraire, chaque pays doit définir les modalités selon lesquelles il instaurera le droit et le devoir de la communauté à participer, en particulier en matière de financement, au contrôle des activités sani-taires. Toutefois, ces modalités seront nécessairement fondées sur un petit nombre de principes qu'il convient d'énoncer clairement :

- chaque niveau de la pyramide sanitaire doit dispo-ser d'une certaine autonomie financière : ce prin-cipe traduit exactement en droit administratif la décision de confier à une institution la responsabi-lité pleine et entière de la gestion de ses ressour-ces;

- chaque niveau de la pyramide sanitaire doit avoir la responsabilité de l'amortissement de ses immo-bilisations (c'est-à-dire les biens acquis sous forme d'investissement utilisable plusieurs années : bâti-ments et matériel); ce principe est le seul qui per-mette de rendre chaque niveau de la pyramide sa-nitaire responsable de la conservation et du bon usage de ces biens et capable de les remplacer en temps voulu;

- chaque niveau de la pyramide sanitaire doit exe r-cer sa responsabilité en établissant, pour chaque exercice écoulé, un compte d'exploitation, et pour chaque exercice nouveau, un compte d'exploitation prévisionnel, où apparaissent toutes les recettes et

(1) OMS. Formulation de stratégies en vue de l'instauration de la santé pour tous d'ici l'an 2000 : principes directeurs et questions essen-tielles. Document du Conseil Exécutif, Genève, 1979, p. 17.

toutes les charges : ces documents sont la base de toutes les décisions concernant la gestion des ser-vices;

- chaque niveau de la pyramide sanitaire doit res-pecter la séparation des fonctions d'ordonnateur (celui qui a la responsabilité de décider l'engage-ment des dépenses) et de comptable (celui qui a la responsabilité d'exécuter et d'enregistrer toutes les dépenses et toutes les recettes); cela permet de contrôler que l'utilisation des ressources est conforme aux décisions des organes de gestion et aux règles en vigueur.

Ces principes impliquent un système de gestion dans lequel la décision et la responsabilité sont dévolues à chaque niveau de la pyramide; ce système s'oppose évidemment à celui, actuellement en vigueur, dans lequel les divers niveaux de la pyramide sanitaire n'ont aucune responsabilité dans les décisions qui les concernent, ces décisions étant toutes prises à un ni-veau supérieur et s'imposant sous la forme de règles bureaucratiques à respecter strictement.

Ces principes n'interdisent pas du tout que les niveaux supérieurs de la pyramide sanitaire puissent inciter les échelons périphériques à réaliser certaines activités dans des conditions clairement définies. Au contraire, ils permettent au ministère de la santé, à ses directions nationale et régionales, à l'aide extérieure, d'intervenir de façon plus efficace pour promouvoir la réalisation de leurs objectifs sans déposséder les communautés de leur propre responsabilité. Ces interventions prendront en effet la forme générale de subventions contractuel-les, dont le principe a été illustré plus haut.

4.3. Modalités de gestion des financements Chaque élément de la pyramide sanitaire définit, comme on l'a vu plus haut, son programme d'activité en tenant compte du plan élaboré pour une période donnée à l'échelon supérieur, plan qui sera assorti des adaptations faites au niveau local. Mais la réalisation de ces programmes dépend entièrement de l'échelon considéré.

Les programmes se traduisent par des dépenses prévi-sibles et par des recettes provenant à la fois de res-sources de la vente de servies, de dotations budgétai-res non affectées à une activité particulière et de sub-ventions spécifiques garanties par contrat. L'autono-mie financière implique que chaque échelon du sys-tème de santé : a) prévoie très exactement quels moyens, et notamment quelles dépenses, il consacrera à chaque programme; b) quelles recettes permettront de couvrir ses dépenses; c) qu’il exécute le pro-gramme ainsi défini sous sa responsabilité; d) qu’il rende compte des résultats effectivement obtenus à l'échelon supérieur; e) qu’il puisse être mis en cause et éventuellement sanctionné s'il n'a pas réalisé les activités qu'il s'était engagé à mener à bien.

Le conseil de gestion, évoqué précédemment, assume les responsabilités découlant de l'autonomie financière en évaluant et en approuvant les prévisions budgétai-res et en en contrôlant l'exécution. Il est budgétai-responsable devant la communauté dont il est issu et devant les autorités de tutelle.

4.3.1. Le compte d'exploitation prévisionnel

Le compte d'exploitation prévisionnel est l'instrument de base de la gestion des financements. Il doit être établi au niveau de chaque unité disposant de l'auto-nomie financière. Il permet de présenter recettes et dépenses et d'en définir l'équilibre.

Les dépenses peuvent comporter plusieurs rubriques : - salaire du personnel non rémunéré par l'Etat;

- amortissement des investissements;

- entretien des installations (bâtiment, mobilier, équipement biomédical ...);

- frais de fonctionnement (électricité, eau, papeterie ...);

- frais de déplacement, y compris l'amortissement et l'entretien des véhicules;

- frais de formation du personnel;

- achat de médicaments et autres produits consom-mables.

Les recettes peuvent faire état :

- des recettes propres de l'établissement (tarification forfaitaire ...);

- des bénéfices réalisés sur les ventes de produits pharmaceutiques;

- des dotations budgétaires;

- de subventions;

- de dons;

- etc.

Les éléments rassemblés dans le compte d'exploitation prévisionnel permettent au comité de gestion de pren-dre les décisions nécessaires pour réaliser les activités prévues, tout en équilibrant les dépenses et les recet-tes. Si ce compte laisse apparaître un déficit prévi-sionnel, le comité de gestion devra par exemple : - soumettre son compte d'exploitation prévisionnel à

l'autorité de tutelle à l'appui d'une demande de subvention complémentaire;

- relever la tarification des prestations sanitaires pour augmenter les ressources propres;

- instaurer une tarification de certaines prestations jusqu'alors gratuites;

- faire appel à une aide extérieure pour couvrir tout ou partie du déficit prévisionnel;

- en dernier recours, si toutes ces possibilités n'ont pas permis de supprimer le déficit, réduire certai-nes des activités prévues au programme.

En aucun cas, le comité de gestion ne devrait diminuer les charges qui permettent de maintenir en état de

fonctionner les installations du service (amortissement et entretien) car, alors, la qualité des services diminue-ra inéluctablement et les ressources propres dispadiminue-raî- disparaî-tront.

L'amortissement des investissements est d'une impor-tance décisive dans cette perspective. Les prévisions d'amortissement, à inscrire à la rubrique dépenses du compte d'exploitation, sont mises en réserve dans un fonds d'investissement. Elles doivent permettre le remplacement des équipements lorsque leur degré d'usure les rend inutilisables.

Seront considérés comme des investissements : - toute construction immobilière (bâtiments

d'hospi-talisation, bloc opératoire ...) et tout aménagement complémentaire;

- tout équipement mobilier ou technique supplémen-taire.

C'est ainsi que l'acquisition d'un appareil de radiologie doit être considérée comme un investissement, dont l'amortissement pourra se faire à partir de la tarifica-tion des services.

Les dons portant sur des investissements devront éga-lement être amortis. Ils permettront ainsi une augmen-tation du fonds d'investissement.

4.3.2. Le compte d'exploitation de l'exercice clos Ce compte d'exploitation établi en fin d'exercice per-met de faire le point de la gestion effective des finan-cements. Il est l'instrument grâce auquel le comité de gestion contrôle les conditions dans lesquelles ses prévisions et ses décisions ont été réalisées; il conduit à repérer les difficultés qui se sont présentées et à préparer les nouvelles décisions qui s'imposent. Ses résultats doivent être comparés à ceux d'un bilan des activités réalisées : un déficit n'aura pas la même si-gnification selon qu'il proviendra d'un développement plus important qu'il n'était prévu de certaines activités ou, au contraire, de réalisations très inférieures à celles qui avaient été programmées. Dans tous les cas cepen-dant, une adaptation du niveau d'activité aux recettes disponibles devra être obtenue.

Si, en fin d'exercice, le solde s'avère positif, il devra figurer comme recette supplémentaire dans le compte d'exploitation de l'année suivante, mais ne devra en aucun cas être détourné vers une autre formation sani-taire : c'est la communauté locale qui doit bénéficier des fruits de sa bonne gestion.

Si le solde s'avère négatif, des mesures de rééquili-brage devront être prises pour l'exercice suivant.

Une planification à moyen terme permettra de situer l'évolution des déficits prévisionnels du compte d'ex-ploitation au cours des années à venir : leur améliora-tion progressive constituera un élément incitatif auprès des autorités de tutelle et des bailleurs de fonds.

4.4. Les sources de financement

Le respect du principe d'autonomie financière, qui permet à la communauté d'exercer effectivement son contrôle sur les actions de santé, appelle une nouvelle définition des modalités d'octroi des diverses sources de financement. En effet, les modalités employées le plus couramment au sein des systèmes de santé actuels ne tiennent pas compte de la responsabilité de la communauté dans la planification, la programmation, l'exécution et le contrôle des activités à mener. Une conception nouvelle doit être mise en oeuvre, tant en ce qui concerne les subventions que l'aide extérieure sous toutes ses formes. Cette même conception conduit à s'intéresser aussi à de nouvelles sources de financement, par exemple celles que pourrait fournir un système mutualiste.

4.4.1. Les subventions

Elles doivent être réparties en trois catégories selon leurs modalités d'octroi.

Les dotations ordinaires, qui ont été budgétisées au niveau national, régional ou local et qui correspondent aux frais de fonctionnement, achats de médicaments, frais de déplacement ...

Les allocations contractuelles qui sont liées à l'exis-tence de programmes nationaux ou supranationaux. La réalisation d'un PEV, d'un programme de lutte contre les maladies diarrhéiques, la lèpre ou la tuberculose, peut être confiée à l'ensemble des responsables sani-taires de la périphérie sous forme de contrat.

Aux structures nationales revient la définition du ca-hier des charges et le contrôle de son application, tandis que la périphérie fait état des besoins financiers supplémentaires qui lui permettront de mener à bien sa mission.

Ainsi, le budget national n'aura-t-il à financer que le coût excédentaire lié à la réalisation du projet, tandis que la périphérie bénéficiera de nouvelles subventions qui contribueront à faciliter le fonctionnement du service.

C'est ainsi, à titre d'exemple, qu'un médecin-chef de district pourrait recevoir à sa demande :

- 9 000 000 FCFA pour assurer la vaccination com-plète de 12 000 enfants, à raison de 750 F par en-fant totalement vacciné au niveau du district;

- 55 000 FCFA pour assurer le dépistage de 110 tuberculeux et 100 000 pour assurer la guérison bactériologique de 50 tuberculeux, à raison de 500 F par tuberculeux dépisté et 2 000 F par tubercu-leux guéri (médicaments exclus).

Les subventions exceptionnelles, qui sont accordées par l'Etat, un organisme privé ou une aide extérieure, à des zones devant bénéficier d'un soutien particulier.

Par exemple, dans telle zone sahélienne, en fin

d'hi-vernage, une subvention exceptionnelle peut s'imposer pour assurer la poursuite des actions de santé, malgré la diminution temporaire du pouvoir d'achat de la population. Faute d'une telle aide, le système de santé local risquerait de ne plus être à même de remplir ses fonctions. Plus généralement, une répartition des sub-ventions selon la situation économique de chaque zone pourra permettre de compenser des aléas climati-ques ou les conséquences d'événements imprévisibles affectant la santé. Dans tous les cas, les modalités d'octroi de ces subventions ne doivent pas diminuer la responsabilité de la communauté en confinant la popu-lation dans un statut d'assisté.

4.4.2. L'aide financière extérieure

Dans la même perspective, l'aide fïnancière extérieure devrait être limitée aux modalités suivantes :

- contribution à l'investissement, soit sous forme de dons, soit sous forme de prêts, mais à la condition stricte que la communauté concernée, consultée sur l'importance de l'investissement prévu et sur le coût d'amortissement qui en résulterait, ait libre-ment décidé qu'elle assurerait cet amortisselibre-ment;

cette condition est le seul moyen d'associer effec-tivement la communauté à une décision importante qui la concerne, en engageant sa responsabilité dans les conséquences financières qui en découle-ront;

- contribution à l'équilibre du compte d'exploitation, pour aider à la réalisation de programmes décidés par la communauté, mais irréalisables avec ses seules ressources habituelles et à la condition stricte que ce concours ne dépossède pas la com-munauté de sa responsabilité dans l'exécution des programmes.

Le respect de ces conditions est affaire de jugement dans chaque cas particulier, mais il faudra à tout prix éviter que l'aide extérieure ne se substitue à la volonté d'autosuffisance financière des communautés.

4.4.3. Perspective d'avenir: la mutualité

Les concepts participatifs de l'action sanitaire débou-chent directement sur ce type de structure qui a fait ses preuves dans de nombreux pays occidentaux.

Le principe mutualiste consiste à lever des cotisations sur tous les adhérents, éventuellement à proportion de leur niveau de revenu, pour leur garantir, dans certai-nes conditions, la prise en charge de tout ou partie des dépenses occasionnées par un événement particulier, la maladie notamment. La mutualité pourrait se déve-lopper pour prendre en charge, par exemple, certaines dépenses pharmaceutiques, ou bien les traitements hospitaliers. Il existe d'ailleurs déjà de petites mutuel-les dans divers pays africains. Ces expériences de-vraient être encouragées, car elles peuvent concourir au développement des actions de santé, en établissant

une répartition plus équitable des charges entre les finances publiques et les revenus privés, les premières se consacrant à certaines activités d'intérêt général ou particulièrement coûteuses et laissant à la solidarité entre familles le soin de financer les prestations qui sont à leur portée.

Outre son aspect financier qui, par un système de cotisations permet de répartir la charge des risques coûteux, la mutuelle a pour avantage de renforcer le contrôle des populations sur les services qui doivent répondre à certains de leurs problèmes.