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CONNAISSANCE D'UNE SOCIETE

APPROCHE ETHNO-SOCIOLOGIQUE C. Pairault

B. CONNAISSANCE D'UNE SOCIETE

Distinguer, comme nous l'avons fait, facteurs médico-sanitaires et facteurs sociaux se justifie dans la mesure où ce procédé met en évidence leurs connexions. Tout organisme humain, individuel ou social, nourrit sa santé et ses maladies de l'environnement qui est le sien et ce milieu - dont s'alimente ou périt la vie - présente de nombreuses variations, aussi bien spatiales qu'his-toriques. C'est pourquoi nous avons d'abord insisté sur la complexité des facteurs en jeu, en même temps que sur l'impact divers des moyens mis en oeuvre.

Gardant à l'esprit cette analyse, précisons maintenant, à l'intention du ou de la responsable d'un secteur de santé rural, la manière dont il lui est possible de pren-dre en compte une véritable connaissance du milieu.

Ce ou cette responsable n'est probablement pas so-ciologue, ni économiste, ni démographe, ni linguiste, ni écologiste, ni hydraulicien, ni politologue : cela n'a pas d'importance si son attention demeure tournée vers un faisceau de réalités que d'autres peuvent l'aider à mieux cerner. L'essentiel est de maintenir et d'organi-ser une attention dont le défaut suffirait à compromet-tre toute efficacité médicale.

1. Etude des composantes d'un milieu villageois Il entre dans la condition humaine d'être solidaire d'une nature et d'une culture. En d'autres termes, l'homme évolue dans un milieu à la fois physique et social, que l'exercice d'une médecine communautaire se doit de pénétrer.

1.1. Données naturelles

1.1.1. L'espace

C'est la première donnée à considérer. Les Anciens y reconnaissaient la présence de quatre éléments : l'air, le feu, la terre et l'eau. Dans un mode de vie agraire -agricole ou pastorale - le contact avec ces quatre élé-ments est direct, puisqu'ils sont employés avec un minimum d'artificialité. C'est pourquoi les renseigne-ments d'ordre climatique, géologique et pédologique, hydrographique, pluviométrique apportent, de manière immédiate, une information de base sur les conditions de vie d'une communauté rurale.

Aucun espace ne va sans distance ni communications, plus ou moins aisées, avec les lieux environnants. Il est compréhensible qu'un centre de santé ou une ma-ternité installés au point A connaissent des taux de fréquentation inversement proportionnels à la distance qui sépare ce point des agglomérations d'où provient la clientèle. Une bonne connaissance des itinéraires habituels et de leur viabilité est certes préalable à l'efficacité d'une action sanitaire dans un secteur don-né.

Mais l'important ne consiste pas seulement à recueillir, sur l'espace villageois, les renseignements dont il vient d'être question. Il faut encore saisir objectivement, autant que faire se peut, comment tel espace est ap-préhendé et organisé par la société des sujets qui l'ha-bitent. On peut être sûr, en effet, qu'un groupe humain modèle la nature de son espace et que le modelage ainsi pratiqué porte un cachet culturel. D'où l'obliga-tion d'examiner sur le terrain ce qui se passe. Pareil examen de la nature nous engage déjà dans celui des coutumes locales.

Tout d'abord, le groupe villageois a conscience de posséder un espace déterminé. Ce terroir, qui entoure le village, comprend une multiplicité de lieux-dits bien identifiés par ses habitants. A ces lieux-dits, qu'il est possible de cartographier, correspond une série non moins déterminée de chefs de famille considérés comme les titulaires du sol; dans certains cas, c'est un seul notable qui détient l'autorité sur la terre et sa répartition. Dans tous les cas, une telle fonction est héréditaire; elle ne confère pas aux intéressés la pro-priété du terrain, mais plutôt le pouvoir de surveiller l'utilisation du sol: avec l'approbation de l'ayant droit, n'importe quel villageois (ou même hôte) peut tra-vailler pour son propre compte une portion de terre. Il est encore fréquent qu'un titulaire local - on dit sou-vent, en français, chef de terre - exerce en même temps le contrôle sur la section de rivière éventuelle-ment incluse dans son terrain, sur le gibier ou certains arbres qui peuvent y être abattus. Pas plus que les récoltes faites par d'autres ne lui appartiennent, les poissons pêchés ni les bêtes chassées ne lui revien-nent; mais, sur la circonscription qui est la sienne, les

produits de la terre, de l'eau et de l'air (4) ne sont pas exploités à son insu: on lui en offre régulièrement les prémices. Il faut donc constater non seulement l'étroite liaison d'une société rurale à son espace vital, mais le fait que cette liaison traditionnelle est communautaire:

il n'y a pas de propriété privée, mais usages privés d'une propriété commune.

A l'inverse, dans d'autres pays du Tiers Monde, en Amérique latine par exemple, le régime foncier inique imposé par une faible minorité de gros propriétaires à la masse des paysans reste l'obstacle majeur à la parti-cipation, au développement et à la santé des popula-tions (5).

Passant ensuite du terroir [lieux d'agriculture, de chasse et de pêche (6) à l'agglomération proprement dite (lieu planté de maisons), quiconque veut cerner la réalité est invité à découvrir, là aussi, comment l'as-pect strictement physique du village révèle une orga-nisation sociale. Qu'il s'agisse de vie quotidienne ou d'actes majeurs de l'existence (naissance, initiation, alliance matrimoniale, mort), l'espace ambiant est utilisé non seulement comme support de toute activité, mais comme un langage dans lequel s'accordent à communiquer les membres d'une même communauté.

Autrement dit, tout espace habité est affecté d'une valeur symbolique.

Par exemple, certains villages distinguent des quar-tiers qui ont leur nom propre, puis, au sein de ces quartiers, des places où devisent les hommes qui se reposent ou font un travail artisanal et des places où se tiennent les femmes pour piler le grain et papoter.

Pour chaque unité familiale, les demeures ne se dispo-sent pas n'importe comment les unes par rapport aux autres; de manière générale, l'aménagement de l'es-pace est subordonné aux liens de parenté. Quant à l'organisation intérieure des maisons, elle se conforme souvent à un modèle admis par l'ensemble de la so-ciété. Ainsi, dans les maisons rondes de tel village, le demi-cercle de gauche, en entrant, correspond au domaine de la femme: c'est là qu'elle entrepose l'eau et les provisions, c'est là que dorment les enfants; le demi-cercle de droite est réservé à l'homme et au sommeil de l'homme et de la femme. L'orientation de la porte de la maison, celle des dormeurs équivalent à

(4) Nous retrouvons ici trois des quatre éléments évo-qués. Le quatrième, le feu, prend une valeur spé-ciale quand il est exploité par un forgeron ou par une potière.

(5) Participation et Santé. OMS, Genève, 1975, pp. 33-57.

(6) Dans le cas des éleveurs, les indications ci-dessus sont à transposer, mais l'espace du nomadisme ou des transhumances n'est pas moins organisé, dans ses parcours et dans ses haltes, que celui des séden-taires.

des habitudes qui comptent, de même que les lieux où se prennent les repas (et la composition des groupes de convives qui s'y rassemblent) disent aussi quelque chose de la structure sociale.

Enfin, dans les sociétés agraires, la relation fonda-mentale entre un terroir et ses habitants est souvent signifiée par le recours cultuel à des divinités locales, êtres surnaturels qui peuplent et régentent les lieux familiers. Ainsi, un bosquet d'arbres considéré comme sacré ne l'est pas parce que des rites plus ou moins secrets s'y pratiquent en certaines occasions. C'est le contraire: pareils rites ont lieu (= ont ce lieu) parce que l'endroit est consacré par la présence d'un génie ou d'un groupe de génies qui ont établi là leur résidence de prédilection. De manière très répandue, servent de repaires aux génies un arbre de la brousse ou de la forêt, une termitière, une mare, un coin de rivière ou de lac, un trou profond dans le sol, une excavation rocheuse, le sommet ou l'ensemble d'une colline, la lagune ou la mer riveraine du terroir. Les puissances de ces lieux sont honorées par les hommes dans la mesure où la liaison de l'homme à son espace (et à ses cohabitants) demeure essentielle, jusqu'après la mort physique: ici enterrés, les défunts ne désertent pas purement et simplement la vie de chez eux ni ne s'ab-sentent de la propriété de leur terre.

1.1.2. Le temps

Dans la langue française, le mot temps résume une ambiguïté réelle. Le temps naturel (weather), celui du jour clair et de l'obscurité, de la sécheresse et des pluies, double, en effet, le temps culturel (time) des heures et des minutes. Au sud du Sahara, pendules et montres figurent comme des outils récents qui n'ont pas encore supplanté dans les villages l'horloge natu-relle des saisons, des lunes, du soleil, des étoiles.

Nombreuses sont les langues où il n'existe qu'un mot pour signifier lune et mois, un mot pour soleil et jour. Ainsi, comme dans le cas de l'espace, l'examen du temps nous invite aussitôt à saisir comment des ryth-mes naturels sont eux-mêryth-mes supports et langage de rythmes sociaux. Cela revient à dire que les calen-driers et horaires traditionnels diffèrent en substance de tous les systèmes déterminés par la mesure artifi-cielle du temps. Ou, si l'on préfère: les sociétés agrai-res accordent le cycle de leurs activités à celui de la nature, au lieu de les régler sur la mécanique des chro-nomètres.

Un premier ensemble de données, importantes à con-naître, concerne la manière dont la communauté villa-geoise marque son temps (7). En comput

(7) C'est à dessein que le terme marquer est ici préféré à diviser. Un programme moderne d'action se divise en tranches successives; mais le cycle des activités agraires se compose plutôt de temps forts et de temps faibles, tout comme le rythme d'une danse.

que, un calendrier réparti sur les mois lunaires néces-site des réajustements annuels que certains peuples astronomes se sont plu à calculer. Dans les sociétés sud-sahariennes, le réajustement se fait empirique-ment, à partir des activités qui s'opèrent aux époques convenables. Les Nuer, peuple agro-pastoral du Sou-dan, appellent kur un mois qui se situe en novembre-décembre. C'est la période à laquelle on se met à construire des barrages pour la pêche, en même temps qu'on commence à quitter le village pour établir les premiers camps où les bovins trouveront pâture durant la saison sèche (Evans-Pritchard, 1940). Pour les Nuer, ce n'est pas parce que kur a commencé qu'on va se livrer à ces activités, mais c'est plutôt quand on peut se livrer à ces activités qu'on sait le mois de kur immi-nent ou déjà entamé. Autrement dit, les tâches suivent moins un calendrier objectif qu'elles ne le signalent au fur et à mesure de leur mise en oeuvre.

Il vaut la peine de relever la liste des mots qui nom-ment les saisons, les mois de l'année, les phases de la lune, les heures du jour et de pénétrer la signification de ces mots. Les heures du jour, par exemple, s'éva-luent couramment d'après la position du soleil. Il est cependant notable au moins dans certains groupes -que telles positions assez rapprochées sont nommé-ment distinguées les unes des autres : celles-ci corres-pondent aux moments de la journée où les activités se différencient les unes des autres. Pour les moments creux (ainsi, toute la première partie de l'après-midi), la distinction des positions solaires n'est pas aussi raffinée.

Quant à l'équivalent de la semaine, des solutions va-riées se présentent, selon les traditions locales. Dans certains cas, le cycle hebdomadaire se formule par simple référence au jour vécu (comme on dirait, en français: avant-avant-hier, avant-hier, hier, aujour-d'hui, demain, après-demain, après-après-demain);

dans d'autres, la semaine existe avec sept jours expli-citement désignés; dans d'autres, elle devient une série de six jours ou de cinq. Citons le cas des Koulango (ethnie habitant le Nord-Est ivoirien), chez qui on a relevé le fonctionnement juxtaposé d'une semaine coutumière de six jours et de la semaine proprement dite (= sept jours) empruntée à un groupe voisin :

"Actuellement encore, le cycle des six jours se déroule parallèlement à la semaine. Pour les activités impor-tées, travail salarié, école, etc., les Koulango suivent le rythme hebdomadaire. Tandis que, pour les travaux agricoles, ils respectent les obligations attachées aux six jours du cycle originel. Si, par exemple, la tradi-tion ou bien le prêtre de la terre a reconnu qu'un cer-tain champ est lié à l'un des génies dont tel jour porte le nom, aucun travail n'aura lieu sur ledit champ ce jour-là." (8). En pareille conjoncture - qui n'est pas unique -, lequel des deux computs paraîtra mieux

(8) Communication de S. Galli, se référant à des don-nées recueillies par A. Bianco en 1973.

indiqué pour scander le rythme éventuel d'une anima-tion sanitaire ? Convenons que, pour essayer de bien répondre, dans la pratique, à ce type de question, il faut au moins avoir eu l'idée qu'elle pouvait se poser.

Un deuxième ensemble de données sollicite corrélati-vement l'attention. Après avoir décelé la forme qu'une société confère à son temps, il s'agit d'en inventorier le contenu.

Un certain nombre de services, tâches, activités ou besognes (9) mobilisent le temps d'une société rurale.

Ils ponctuent les heures du jour et les saisons de l'an-née (tabl. 1.I); ils s'harmonisent aux catégories biolo-giques d'âge (enfant/âge adulte) et de sexe (mascu-lin/féminin). Ainsi, hommes et femmes vaquent régu-lièrement à des tâches distinctes et complémentaires.

Celles des femmes semblent plus accablantes, du fait qu'elles se poursuivent sur un rythme particulièrement court : chaque journée comporte plusieurs corvées d'eau, le soin des enfants, l'alimentation du feu, la préparation de la nourriture, etc. Plus que les femmes, les hommes s'accordent du temps paisible à l'ombre, mais eux-mêmes accomplissent, sur rythme saison-nier, des besognes qui ne vont pas sans rude effort.

Dans les occupations quotidiennes entrent le temps du repas et celui du sommeil, actes sur lesquels toute enquête un peu approfondie ne peut manquer d'ap-porter beaucoup à un médecin, non seulement en ma-tière de diététique et d'hygiène traditionnelles, mais pour ce qui concerne les dimensions psychosociales d'une communauté villageoise : tout repas est com-merce familial (solidaire du comcom-merce sexuel) et le sommeil est le temps des songes, dont l'importance communément admise traduit une attitude caractéristi-que envers autrui et le monde.

D'autres occupations s'insèrent, à intervalles prévus ou non, dans le rythme des activités habituelles. Ce sont, par exemple, les déplacements réguliers vers un mar-ché voisin, ou bien les séances de palabre nécessaires à l'apaisement d'un conflit, ou bien les fêtes qui ma r-quent l'époque des premières récoltes, le temps d'un mariage, une période de cérémonies funéraires ... Au travers de ces manifestations, paroles et gestes témo i-gnent des liens familiaux et familiers qui ne cessent de tisser un réseau communautaire.

1.1.3. Les objets naturels

La relation d'un groupe avec la nature qu'il habite s'exprime encore dans la désignation et l'usage des objets naturels environnants. Insistons en particulier sur les objets vivants, animaux et végétaux : les uns et

(9) Le mot travaux est évité, car son étymologie impli-que une connotation assez étrangère aux traditions rurales africaines. Sur l'émergence du travail et du loisir modernes, voir paragraphe A.3.2.1.

les autres ressortissent partout à une taxinomie, que tous - y compris les enfants - connaissent de façon surprenante.

Or, il est impossible à un responsable de la santé de savoir ce qui se passe à la cuisine, ou de donner un avis pertinent en matière d'alimentation, s'il ne connaît pas lui-même un certain nombre d'herbes, d'arbres, d'espèces utilisés par les ménagères. Il en va de même pour l'étude d'une pharmacopée locale, dont certaines ressources valent qu'on y prenne garde.

D'une manière générale, les objets naturels servent de matière première à des opérations techniques ou ri-tuelles, à des symbolisations mythiques. Dans les récits qu'on peut recueillir, dans les contes, dans cer-taines croyances ou pratiques populaires, animaux et végétaux ont souvent leur place. Raison de plus pour inventorier les termes qui les désignent et pour com-prendre le détail de ces termes quand ils équivalent à des mots composés. Exemple: chez les Bwa du Sud-Est malien, Asparagus africanus s'appelle zozo pèrè, c'est-à-dire piège à souris; ils utilisent en effet cette plante dans leurs maisons, sur les poutres du plafond, aux encoignures et en haut des fourches de soutien, pour empêcher les souris de courir ou de rentrer.

Tableau 1.I: Cycle annuel chez les Nuer du Soudan

Source: Evans-Pritchard E.E., The Nuer. New-York - Oxford, Oxford University Press, 1940. 8ème éd., 1976.

Traduction française: Les Nuer, Gallimard, rééd. 1978, p. 97

1.2. Les relations sociales

Ce qui vient d'être dit des données naturelles ne pou-vait se borner à une inspection matérielle du milieu physique où vit une communauté déterminée. A pro-pos de l'espace, du temps et des objets naturels, nous avons montré comment l'animal dénaturé qui s'appelle homme construit son existence sociale avec les maté-riaux dont il dispose. La relation de l'homme à la na-ture donne son assise à un style de relations sociales qu'il faut maintenant essayer de discerner.

1.2.1. Le village

Moins que jamais les villages ou les agglomérations d'aujourd'hui ne sont des isolats. Ils s'insèrent dans des réseaux administratifs nationaux dont la densité varie selon les Etats. La fonction et l'utilité du réseau sont, en tout cas, perçues de façon diverse selon les lieux, les temps et les personnes. D'où l'importance, pour le

médecin d'un secteur, de connaître le type de rapports qu'y entretiennent habituellement villageois et fonc-tionnaires. Il est sûr qu'un responsable de la santé travaillera d'autant plus efficacement que ses initiati-ves recevront l'aval de l'administration locale (celui de l'administration centrale étant, à l'évidence, indispen-sable). Mais, dans certains cas, un appui officiel trop évident peut devenir tellement encombrant ou imp o-pulaire qu'il irait à l'encontre des efforts visant une prise en charge communautaire. Dans beaucoup de pays, par exemple, les agriculteurs doivent verser à l'administration un impôt annuel de capitation (taxes sur les personnes, le bétail, les véhicules, etc.); la collecte se fait par village, sous la responsabilité du chef administratif local. On imagine le souci des chefs de famille lorsqu'il s'agit pour eux de réunir les som-mes exigibles. La moindre ombre de collusion entre les collecteurs d'impôts et l'entreprise d'une équipe médicale serait catastrophique pour celle-ci ...

JUIL AOUT SEPT OCT NOV DEC JANV FEV

JUIN

MAI MARS AVRIL

Pluies Saison sèche

Crues Décrues

Agriculture

Préparation des jardins pour les premières semailles de mil et de maïs

Préparation des jardins pour les semailles de mil

Récolte

du maïs Récolte premierdu

mil

Feux de brousse