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B. Economie du sport professionnel

6. L’évolution du modèle de financement du sport professionnel en Europe

6.6. Les externalités du sport professionnel

La valeur d’un spectacle sportif est généralement mesurée par le consentement à payer des spectateurs (directs et indirects), ce qui est censé traduire l’utilité sociale engendrée par ce bien (Bourg & Gouguet, 2005). Les auteurs remarquent toutefois que cette manière de procéder (i.e., en se limitant à la seule valeur marchande du spectacle sportif) ne tient pas compte des externalités liées au spectacle sportif dont la valeur réelle est finalement biaisée. Pour Bourg et Gouguet (2006), une externalité se définit comme : « l’impact des actions d’un individu sur le bien-être d’autrui sans que cet impact soit pris en considération par le marché. Si cet impact est négatif, on parle d’externalité négative ou de déséconomie externe ; si l’impact est positif, d’externalité positive ou d’économie externe » (p. 60). La production et la consommation d’un spectacle sportif produisent donc des externalités, positives et négatives, qu’il faut internaliser pour déterminer la valeur totale de ce bien et donc la réelle utilité sociale nette ainsi générée. Il est cependant très difficile d’évaluer et d’internaliser les effets externes liées au spectacle sportif et donc de mesurer la valeur économique réelle de celui-ci (Andreff & Nys, 2002 ; Bourg & Gouguet, 2005, 2006). Dans le cadre de ce travail doctoral, nous ne prendrons pas position sur ce sujet qui est encore très controversé. Il nous semble

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Le pire scénario étant que certains clubs moins solides financièrement tentent quand même de les concurrencer sur ce créneau et s’endettent de manière irrémédiable provoquant leur dépôt de bilan.

199 Au niveau de la France, on peut par exemple citer l’affaire « Valenciennes-Olympique de Marseille » en 1993 qui a valu huit mois de prison à Bernard Tapie.

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125 toutefois important de mentionner dans cette partie la typologie des externalités positives et négatives dressée par Bourg et Gouguet (2005) afin d’avoir un panorama plus complet du sport professionnel et de son économie.

6.6.1. Les externalités positives du sport professionnel.

Le sport professionnel génère deux principaux types d’externalités positives : du lien social et de la dynamique territoriale.

Si le lien social créé par le sport professionnel est variable en fonction de plusieurs facteurs (e.g., ampleur de l’événement, discipline sportive concernée, localisation), Bourg et Gouguet (2005) avance que, globalement, celui-ci améliore la cohésion sociale, voire produit de la reconnaissance sociale. Pour les auteurs, le sport « peut constituer un facteur d’accélération de mutation en matière d’intégration sociale » car il est « porteur de valeurs universelles (respect d’autrui, respect de l’adversaire quelles que soient sa race, sa religion…) qui, grâce aux médias, peuvent être diffusées à grande échelle et acquérir force d’exemple » (p. 97).

Concernant la dynamique territoriale, les auteurs avancent que les externalités se traduisent par des conséquences sociales positives découlant de l’impact économique du sport professionnel (e.g., diminution des tensions liées au chômage, de la drogue ou de la délinquance), mais aussi par l’amélioration de l’image du territoire concerné, que ce soit au niveau économique ou social, ce qui est bénéfique pour son attractivité.

6.6.2. Les externalités négatives du sport professionnel.

Selon Bourg et Gouguet (2005), les externalités négatives du spectacle sportif touchent les mêmes secteurs que les externalités positives, à savoir les relations sociales et la dynamique territoriale.

En ce qui concerne le lien social, les externalités négatives se traduisent par des comportements de violence (e.g., le hooliganisme). Pour les auteurs, cette violence est révélatrice d’un rejet des différentes formes de contrôle social et/ou du rejet d’autrui : « au lieu d’être l’expression de l’identification d’une communauté à une équipe, le spectacle sportif devient au contraire le prétexte pour faire valoir, de façon violente, sa différence ou son mal de vivre par rapport à la société dominante ou à d’autres supporters » (pp. 97-98). Les externalités négatives liées à la cohésion sociale prennent également la forme d’une perte de

126 crédibilité due aux dérives inhérentes au sport de haut-niveau (e.g., dopage, tricheries). Ces comportements déviants participent à remettre en question l’image du sport et des valeurs qu’il souhaite véhiculer (e.g., Attali, 2004), notamment quand les médias s’en emparent.

Au niveau de la dynamique territoriale, Bourg et Gouguet (2005) observent que les externalités négatives du sport professionnel se matérialisent de trois manières. Tout d’abord,

il existe des « effets d’évictions »201 dus aux craintes de saturation du territoire concerné lors

d’une épreuve sportive : des visiteurs vont reporter – voire annuler – leur voyage pour éviter d’être confrontés à la surpopulation ponctuelle (et ses éventuels débordements) générée par cet événement. Ensuite, dans le cas des événements sportifs internationaux ponctuels tels que les Jeux Olympiques, il arrive que les territoires s’endettent lourdement sans obtenir le retour sur investissement escompté en terme de développement économique. L’échelonnement de la dette ainsi contractée s’étale sur de nombreuses années et son remboursement se fait au détriment de nouveaux investissements. Enfin, toujours à propos des événements sportifs internationaux ponctuels, Bourg et Gouguet (2005) mentionnent la nécessité de prendre en compte les « risques de dualisation spatiale » qui feraient suite aux restructurations urbaines réalisées pour accueillir ces compétitions. A titre d’illustration, les auteurs prennent l’exemple des Jeux Olympiques de Barcelone (1992) qui ont entraîné la disparition d’un quartier populaire, dans le but de construire le village olympique, et provoqué le relogement des personnes concernées dans des quartiers très excentrés.

201 Nous parlions au début de ce paragraphe des difficultés de mesurer et d’internaliser certaines externalités. Les « effets d’évictions » sont notamment une des variables les plus difficiles – et pourtant nécessaires – à prendre en compte dans la mesure de l’impact économique d’un spectacle sportif.

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