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Evolution de l’offre et de la clientèle des établissements sociaux destinés

1. L’enquête ES et ses apports à la description de l’accueil d’une population

1.1. Evolution de l’offre et de la clientèle des établissements sociaux destinés

En matière d’offre et de clientèle accueillies, les enquêtes ES ont fait l’objet d’analyses régulières publiées par la DREES (administration responsable de ces enquêtes) et fréquemment rédigées par les responsables des enquêtes. Ainsi l’évolution de l’offre entre 1995 et 2006 a été traitée par Y. Makdessi avec la collaboration d’A. Mainguéné. Ces deux auteurs ont également exploité les enquêtes de 2010. Compte tenu de leur bonne connaissance des fichiers de base et des conditions de leur usage, nous n’avons pas réalisé d’exploitations complémentaires sur ces dimensions historiques.

Ces auteurs ont mis en évidence l’augmentation du nombre de places dévolues aux personnes atteintes de troubles psychiques graves au cours des dix ou quinze dernières années, que ce soit en matière de places en établissements ou en services. L’accroissement est très marqué dans ce dernier type de lieu lorsque l’on analyse la population accueillie au travers du prisme des pathologies. Ainsi, en ESAT, la part des places occupées par des personnes identifiées comme présentant des psychoses (d’apparition précoce ou après l’adolescence), des troubles du spectre autistique et d’autres troubles envahissants du développement est passée de 21,1 % en 2001 à 23,4 % en 2010 ; ce qui représente une augmentation d’environ 8300 places. Au sein de ce groupe, ce sont les personnes atteintes de psychoses s’étant déclarées postérieurement à l’adolescence qui ont connu la plus forte croissance. Au sein des foyers occupationnels et foyers de vie, la croissance du nombre de places occupées par ce type de population est également marquée puisqu’elle est d’environ 7000 places, correspondant à une augmentation de trois points (environ 33 % en 2001 et 36 % en 2010). Pour ce qui est de l’usage des places de services (SAVS et SAMSAH), l’augmentation attestée sur une période plus courte (de 2006 à 2010) est plus marquée en effectif qu’en proportion, puisque le nombre de places utilisées par ces publics est d’environ 4500 alors que leur proportion varie à peine (de 22 à 23,2 %). L’augmentation concerne également les places dévolues aux personnes victimes de traumatismes crâniens ou lésions cérébrales acquises (plus 1,7 points et 2200 places). Les auteurs

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soulignent la part importante des adultes (toutes pathologies confondues) hébergés en famille (23 % pour les personnes recourant aux SAMSAH) et celle des personnes sans activité professionnelle ou en accueil médico-social en journée (26,2 % lorsque les personnes sont suivies par un SAVS et près de 60 % lorsque les personnes sont suivies par un SAMSAH).

Ces informations recueillies en termes de maladies ne sauraient être considérées comme attestant de l’ensemble des personnes présentant des troubles psychiatriques graves et persistants. En effet, afin de ne pas alourdir le travail de recueil des données, une liste de sept pathologies seulement a été proposée aux établissements et services ; toutes les autres pathologies devaient figurer sous la rubrique « autre pathologie », à moins qu’elle ne soit inconnue. Aussi les autres pathologies psychiatriques, de même que les associations de pathologies complexes peuvent ne pas avoir été mentionnées dans ces rubriques, même si l’une d’entre elles figure dans les rubriques mentionnées plus haut.

L’analyse des résultats en termes de déficiences (le questionnaire demandait l’identification d’une déficience principale et, éventuellement, d’une déficience associée), témoigne d’une moindre homogénéité des évolutions, sans que nous soyons en mesure d’estimer si ces fluctuations et leurs divergences correspondent à des évolutions de tableaux cliniques dans le temps ou à des divergences d’enregistrement d’une structure à l’autre ou dans le temps. Ainsi, par exemple, alors que la part des personnes avec l’une des trois pathologies psychiatriques que nous avons signalées est restée quasiment stable en ESAT entre 2001 et 2010, la part des déficiences du psychisme a augmenté de 7 points et la part des déficiences intellectuelles a diminué d’environ autant. Faut-il lire dans cette évolution, une réalité des préoccupations gestionnaires qui pousserait les ESAT à accueillir préférentiellement des personnes dont les facultés intellectuelles ne sont pas, ou guère, atteintes ? Une influence de la diffusion du terme « handicap psychique » qui tendrait à rendre plus aisée la désignation de la déficience du psychisme comme déficience principale ? Une évolution des agréments des établissements qui favorise plus fréquemment l’enregistrement des déficiences du psychisme, les directeurs ayant peut-être tendance à privilégier les descriptions correspondant le mieux aux règles d’agrément de leur clientèle ?

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Enfin, la surreprésentation des hommes parmi les personnes pour lesquelles la déficience du psychisme est identifiée comme leur déficience principale est attestée en SAVS et en SAMSAH en 2006 comme en 2010 (Mordier 2013).

Pour compléter ces éléments nous avons procédé à quelques exploitations du fichier de l’enquête ES 2010 destinées à éclairer spécifiquement les liens entre hôpital psychiatrique et accueil dans des structures (établissements ou services) médico- sociales pour adultes. Nous avons traité les données de l’enquête ES 2010, celles portant sur la population présente au 31 décembre 2014 n’étant pas encore disponibles au moment où nous rédigeons ce travail.

Pour différentes raisons, les enquêtes ES ne peuvent fournir que des éléments de cadrage parcellaires sur l’accueil des personnes présentant des troubles psychiques. Parmi les contraintes qui pèsent sur l’exploitation des données dans le domaine qui nous concerne, les principales sont les suivantes :

- L’information sur la clientèle est recueillie dans différents « volets » de l’enquête sans moyen d’identification des personnes enquêtées d’un volet à l’autre. Ainsi l’information sur les « incapacités » des personnes présentes ne peut être croisée avec l’information sur les activités effectuées en journée dans tel ou tel type de structure. Si cela ne porte pas préjudice à l’analyse de la clientèle de l’un ou l’autre type de structures, cela entrave toute possibilité d’analyse plus fine de la situation des personnes et pose un problème d’éventuel double compte lorsqu’il s’agit de personnes fréquentant deux types de structures. Dès lors qu’une catégorie de personnes, quel que soit le critère qui permettrait de l’identifier, a plus que d’autres simultanément recours à plusieurs services, cela peut fausser la représentation de la part de ces personnes dans l’ensemble des établissements et services du champ.

- Aucun élément ne permet de prendre en compte les prises en charge simultanées en institution et en services, notamment pour les personnes qui bénéficieraient d’un accompagnement par un service tout en travaillant en ESAT. Ce parcours à la fois institutionnel et « inclusif » est probablement de plus en plus fréquent compte tenu de la part croissante de personnes accompagnées par des SAVS ou

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des SAMSAH et de la diminution de la part des personnes travaillant en ESAT et vivant en foyer d’hébergement.

- Si l’objectif de disposer de quelques éléments de parcours a été introduit depuis 2010, son atteinte est entravée, par l’importance des non-réponses d’une part, par le fait que l’information n’est disponible que pour le lieu qui précède immédiatement l’entrée dans la structure ou qui suit immédiatement la sortie de celle-ci, d’autre part. Or les informations qualitatives sur les trajectoires des personnes témoignent souvent de périodes d’attente, plus ou moins longues, dont la prise en compte est nécessaire, mais non suffisante pour témoigner de la ligne générale du parcours de la personne.

1.2. Places occupées en 2010 par les personnes présentant des troubles du