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De l’enquˆ ete de 1971 aux enquˆ etes Fecond 2010-2013 : une centralit´ e progressive de la pilule dans les pra-

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la contraception : des politiques publiques ` a l’appui de la diffusion des contraceptifs m´ edicau

2.1.3 De l’enquˆ ete de 1971 aux enquˆ etes Fecond 2010-2013 : une centralit´ e progressive de la pilule dans les pra-

tiques.

La premi`ere grande enquˆete d´emographique sur les pratiques contraceptives, l’enquˆete sur la r´egulation des naissances de l’Insee et de l’Ined, n’est r´ealis´ee qu’en 197124, soit assez tardivement par rapport `a l’apparition sur le march´e des premi`eres

mol´ecules œstro-progestatives, ou mˆeme par rapport `a la loi Neuwirth25. Toutefois,

grˆace au travail du d´emographe Henri Leridon et de ses coll`egues entre 1971 et 2000, puis de Nathalie Bajos et ses coll`egues entre 2000 et 2013, on dispose de donn´ees sur les pratiques contraceptives recueillies de mani`ere r´eguli`ere (entre cinq et dix ans d’intervalle), et comparables d’une enquˆete `a l’autre. Cela permet, des ann´ees 1970 aux ann´ees 2010, de d´ecrire trois ph´enom`enes importants dans l’´evolution des pratiques contraceptives : premi`erement, le fait que la diffusion de la contraception en France est pass´ee par sa m´edicalisation ; en second lieu, la centralit´e progressive de la pilule contraceptive, et dans une moindre mesure du DIU, dans les pratiques contraceptives, renvoyant `a la mise en place historiquement situ´ee de la norme contraceptive fran¸caise ; enfin, le fait que cette norme contraceptive semble plus particuli`erement concerner certaines g´en´erations de femmes, ce que r´ev`ele l’analyse des effets d’ˆage, de g´en´eration, et de p´eriode qui affectent l’´evolution des pratiques entre 1970 et 2010.

Diffusion et m´edicalisation de la contraception

Les diff´erentes enquˆetes sur la contraception en France (voir encadr´e 2.2) montrent la diffusion relativement rapide des techniques contraceptives en France `

a partir des ann´ees 197026. Cette diffusion passe notamment par la m´edicalisation de la contraception (figure 2.2). On observe ainsi qu’entre 1970 et 2010, le nombre de femmes expos´ees au risque de grossesse et n’utilisant aucune m´ethode diminue

24. L’enquˆete du docteur Pierre Simon, r´ealis´ee en 1970, sur les comportements sexuels des Fran¸cais·e·s est la premi`ere grande enquˆete de ce type en France. Elle comporte des questions sur la contraception, mais n’interroge pas la pratique contraceptive au moment de l’enquˆete, ce qui ne permet pas les comparaisons avec les autres enquˆetes sur la contraception, contrairement `

a cette enquˆete de 1971.

25. Le traitement et la mise en forme des donn´ees de cette section ont grandement b´en´efici´e du travail et des comp´etences de la chercheuse Mireille Le Guen. Qu’elle en soit remerci´ee chaleureusement.

26. Certaines enquˆetes, dont celle de 1978, comportent des questions sur l’utilisation r´etrospec- tive de m´ethodes contraceptive `a la fin des ann´ees 1960, ce qui permet `a Toulemon et Leridon (1991) d’estimer des taux de recours aux m´ethodes `a partir de 1968.

Figure 2.2 – Diffusion et m´edicalisation de la contraception en France (1968-2013)

Champ : Femmes de 18 `a 44 ans n’´etant ni st´eriles, ni enceintes, ayant des rapports sexuels et ne cherchant pas `a concevoir.

Sources : estimations `a partir de Leridon et Toulemon (1991), de l’enquˆete Mondiale de F´econdit´e-1978, de l’enquˆete R´egulation des naissances-1988, de l’enquˆete Situation familiale et emploi-1994, de l’enquˆete CoCon-2000 et des enquˆetes Fecond-2010 et 2013.

largement avec le temps27. Cette augmentation du recours contraceptif se fait principalement par la diffusion des m´ethodes m´edicales de contraception (pilule et DIU, puis, `a partir de 2000, implant, patch, et anneau vaginal), puisqu’`a la fin des ann´ees 1980 et jusqu’en 2010, pr`es de 80 % des femmes concern´ees par la contraception utilisent une m´ethode m´edicale. De fait, la diffusion de ces m´ethodes m´edicales est progressivement venue remplacer l’utilisation du retrait (un tiers des couples l’utilisait en 1968), ou l’absence de recours `a une m´ethode contraceptive. La forte m´edicalisation de la contraception ´etudi´ee par les d´emographes H. Leridon et L. Toulemon au seuil des ann´ees 1990 (Toulemon et Leridon, 1991) semble s’ˆetre p´erennis´ee dans les d´ecennies suivantes (Leridon et al., 2002), mˆeme si elle tend `a ˆ

etre questionn´ee `a partir de 2010.

27. Ces enquˆetes sont focalis´ees uniquement sur les femmes, `a l’exception de l’enquˆete de 1978 qui compare les r´eponses de femmes et celles de leur conjoint, et de l’enquˆete de 2010 qui interroge un ´echantillon d’hommes et de femmes – recrut´e·e·s ind´ependamment – sur leurs pratiques contraceptives.

Encadr´e 2.2 – Les enquˆetes nationales sur la contraception (repris de Leridon 1991, puis compl´et´e)

• 1971, Enquˆete sur la r´egulation des Naissances, Ined-Insee : il s’agit de la premi`ere enquˆete par questionnaire sur le sujet, aupr`es de 2 890 femmes non c´elibataires ˆag´ees de moins de 47 ans (m´ethode des quotas), consacr´ee principalement aux comportements des couples juste apr`es leur mariage. Cette enquˆete n’apporte pas d’information pr´ecise sur les pratiques de contraception dites « traditionnelles ». Le questionnaire d´ecrivait principalement la contraception comme une pratique m´edicale. Cette enquˆete portant sur une population de femmes en union, les donn´ees ne sont pas directement comparables avec les donn´ees des enquˆetes ult´erieures. • 1978, Enquˆete Mondiale de F´econdit´e, Ined-Insee : 3011 femmes ˆag´ees de 20 ans `a 44 ans, de tous ´etats matrimoniaux, ont ´et´e interrog´ees. L’ensemble des m´ethodes de contraception ´etait d´ecrit par les enquˆetrices, m´ethodes m´edicales et non m´edicales, avec rappel sur l’usage de « pr´ecautions pendant les rapports » pour r´ecup´erer les femmes ne d´eclarant utiliser aucune m´ethode mais utilisant le retrait avec leur partenaire.

• 1988, Enquˆete Mondiale de F´econdit´e, Ined-Insee : 3188 femmes ˆag´ees de 18 `a 49 ans ont ´et´e interrog´ees. L’enquˆete employait la mˆeme d´efinition de la contraception qu’en 1978, et collectait ´egalement des informations sur l’histoire contraceptive et conceptive.

• 1994, Enquˆete sur les situations familiales et l’emploi (ESFE), Ined- Insee : environ 5000 entretiens (2944 aupr`es de femmes et 1926 aupr`es d’hommes) ont ´et´e r´ealis´es `a l’issue de l’enquˆete annuelle sur l’emploi, permettant de constituer un ´echantillon repr´esentatif de l’ensemble des hommes et des femmes ˆag´es de 20 `

a 49 ans (et des enfants de moins de 18 ans). Les r´esultats de cette enquˆete sont comparables aux enquˆetes de 1978 et 1988.

• 2000, Enquˆete Cocon (« Cohortes sur la contraception ») : r´ealis´ee par l’Inserm, en association avec l’Ined, cette enquˆete interrogeait une cohorte de 2863 femmes entre 18 et 44 ans au moment du d´ebut de l’enquˆete, suivies de 2000 `a 2004. • 2010, Enquˆete F´econd 2010, Inserm-Ined : pr´esentant un ´echantillon al´ea- toire de 5275 femmes de 15 `a 49 ans et de 3373 hommes du mˆeme ˆage, cette enquˆete portait sur les pratiques contraceptives depuis l’entr´ee dans la sexualit´e, les ´echecs de contraception, les grossesses pr´evues et non pr´evues, le recours `a l’avortement et les dysfonctions sexuelles. Un volet de l’enquˆete aupr`es d’un ´echantillon al´eatoire de 1011 m´edecins permettait d’interroger les pratiques de prescriptions et les repr´esentations des professionnel·le·s en mati`ere de sant´e sexuelle et reproductive.

• 2013, Enquˆete F´econd 2013, Inserm-Ined : 4453 femmes et 1587 hommes de 15-49 ans ont ´et´e interrog´e·e·s, afin d’analyser l’impact de la crise m´ediatique de la pilule sur les pratiques et les repr´esentations de la contraception, et notamment des contraceptifs oraux.

Centralit´e des m´ethodes m´edicales dans les pratiques

H. Leridon revient, dans son ouvrage majeur reprenant les conclusions des enquˆetes des d´ecennies 1970 et 1980, sur la diffusion de la pilule contraceptive. Au d´ebut de la d´ecennie, la pilule contraceptive commence `a ˆetre diffus´ee, bien qu’encore en marge de la loi. Les œstro-progestatifs, d’abord utilis´es puis prescrits comme « inhibiteurs de l’ovulation », c’est-`a-dire comme un m´edicament permet- tant de soigner certaines pathologies en supprimant les r`egles, afin de « r´eguler le cycle » (les hormones de synth`ese œstro-progestatives sont prescrites d`es les ann´ees 1940 comme traitement contre la st´erilit´e), seraient, au moment du vote de la loi Neuwirth en 1967, d´ej`a largement consomm´es `a des fins contraceptives par pr`es « d’un demi-million de Fran¸caises [qui] l’utilisent r´eguli`erement » (Leridon, 1987, p. 46). Il poursuit en montrant que la pilule contraceptive a connu une phase de diffusion rapide entre 1970 et 1976, pour laisser ensuite place `a une faible croissance jusqu’en 1985.

Si l’on prolonge ces analyses grˆace aux donn´ees des enquˆetes les plus r´ecentes (figure 2.3), on voit que la pilule contraceptive devient centrale dans les pratiques d`es la fin des ann´ees 1970, et qu’elle connaˆıt augmentation r´eguli`ere de son utilisation au cours des ann´ees 1980 et 1990, jusqu’`a atteindre 57 % d’utilisatrices parmi les femmes concern´ees par la contraception28 en 2000, le recours `a la pilule ´etant

encore plus important si l’on consid`ere uniquement les femmes de moins de 35 ans (Leridon et al., 2002). Malgr´e la baisse de son utilisation entre 2000 et 2013, (Bajos et al., 2014; Rahib et al., 2017; Le Guen et al., 2017) la pilule reste le premier moyen contraceptif utilis´e en France, assez largement devant les autres m´ethodes.

Dans le mˆeme temps, on voit que la diffusion du DIU survient quelques ann´ees apr`es celle de la pilule (du fait de sa r´egulation et de sa mise `a disposition plus tardives), mais que cette diffusion s’acc´el`ere jusqu’`a la fin des ann´ees 1980. Fait int´eressant, H. Leridon pr´edit dans son article de 1991 la stagnation `a venir du recours `a la pilule et l’acc´el´eration du recours au DIU : or, c’est justement le contraire que l’on observe dans la d´ecennie 1990. C’est tr`es largement la pilule qui s’impose comme la principale m´ethode utilis´ee. Les autres m´ethodes restent tr`es marginalement employ´ees, hormis le DIU, mais celui-ci voit son utilisation d´ecroˆıtre entre 1988 et 2010 (Leridon et al., 2002; Bajos et al., 2012). `A noter ´

egalement, la l´eg`ere augmentation du recours au pr´eservatif, dont la diffusion dans la d´ecennie 1990 est `a resituer dans le contexte de l’´epid´emie de VIH-sida et de la multiplication des campagnes de pr´evention, particuli`erement `a destination de celles et ceux qui d´ebutent leur vie sexuelle (Paicheler, 2002).

Figure 2.3 – ´Evolution du recours contraceptif en France (1968-2013)

Champ : Femmes de 18 `a 44 ans n’´etant ni st´eriles, ni enceintes, ayant des rapports h´et´erosexuels et ne cherchant pas `a concevoir.

Sources : estimations `a partir de Leridon et Toulemon (1991), de l’enquˆete Mondiale de F´econdit´e-1978, de l’enquˆete R´egulation des naissances-1988, de l’enquˆete Situation familiale et emploi-1994, de l’enquˆete CoCon-2000 et des enquˆetes Fecond-2010 et 2013.

Au-del`a de l’augmentation de la couverture contraceptive, H. Leridon note ´

egalement que l’utilisation des m´ethodes ´evolue : si les contraceptifs oraux ont d’abord pu ˆetre utilis´es comme une contraception d’arrˆet (voir Leridon 1987, chapitre 3), c’est-`a-dire pour ne plus avoir d’enfant, ils tendent `a la fin des ann´ees 1970 `a ˆetre utilis´es comme une contraception d’espacement (entre deux naissances, pour ´echelonner les grossesses). C’est progressivement le DIU qui remplit ce rˆole de contraception d’arrˆet, et ceci notamment en l’absence de diffusion de la st´erilisation masculine et f´eminine en France (Giami et Leridon, 2000). H. Leridon et L. Toulemon notent ainsi, aux diff´erentes dates d’enquˆetes, la r´eticence des m´edecins fran¸cais·es `a prescrire le DIU `a des femmes nullipares, ou parfois, primipares, ce qui explique qu’il soit principalement utilis´e par des femmes au-del`a de 30 ans et au-del`a du deuxi`eme enfant.

Effets d’ˆage, de g´en´eration, et de p´eriode dans le recours aux m´ethodes On peut se demander comment les pratiques ´evoluent au prisme des effets de p´eriode, d’ˆage et de g´en´eration. La diffusion de la pilule en France s’est-elle faite de mani`ere homog`ene, dans toutes les classes d’ˆage, avec l’arriv´ee de ces produits et leur l´egalisation ? Ou peut-on observer au contraire des effets de g´en´eration, o`u les plus jeunes g´en´erations adoptent cette m´ethode contraceptive tandis que les plus anciennes conservent leurs pratiques pr´ealables ? La figure 2.4 pr´esente l’´evolution du recours `a la pilule, au DIU, aux pr´eservatifs (masculins et f´eminins) et au retrait, par g´en´eration de naissance29. Ces donn´ees confirment l’existence d’un effet d’ˆage dans le recours `a certaines m´ethodes. En effet, quelle que soit la g´en´eration, le recours `a la pilule diminue avec l’ˆage (effet d’ˆage n´egatif), le recours au DIU augmente avec l’ˆage (effet d’ˆage positif), le recours au pr´eservatif est relativement stable avec l’ˆage (sauf pour certaines g´en´erations sp´ecifiques), de mˆeme que le recours au retrait.

On observe ´egalement des effets de g´en´eration dans le recours `a la pilule, au pr´eservatif et au retrait. En effet, les g´en´erations n´ees entre 1953 et 1992 (G5 `a G12 sur notre sch´ema) utilisent la pilule de mani`ere beaucoup plus massive que les g´en´erations pr´ec´edentes (n´ees entre 1933 et 1947). Notamment, `a ˆage ´egal, les g´en´erations n´ees entre 1963 et 1982 (G7 `a G10) utilisent davantage les pilules que les autres g´en´erations, puisque plus des trois quarts d’entre elles ont recours `a ce contraceptif lorsqu’elles ont environ 20-25 ans, contre 60 % ou moins dans les autres g´en´erations. `A l’inverse, les g´en´erations n´ees apr`es 1983 (G11 `a G13), `a ˆage ´

egal, recourrent beaucoup moins `a la pilule que les quatre g´en´erations pr´ec´edentes. Concernant le DIU, on n’observe pas d’effet de g´en´eration aussi net que pour la pilule : on voit que le taux d’utilisation du DIU est similaire entre g´en´erations `a partir d’un certain ˆage (autour de 30 % d’utilisatrices apr`es 35-40 ans).

Le pr´eservatif pr´esente des effets de g´en´eration int´eressants, qui sont `a mettre en lien avec la survenue de l’´epid´emie de VIH-sida dans les ann´ees 1980, et le d´eploiement de nombreuses campagnes de pr´evention en population g´en´erale `a partir de 1989. Ainsi, les g´en´erations n´ees apr`es 1973 (G9 `a G13), qui d´ebutent donc leur vie sexuelle au moment o`u l’´epid´emie est tr`es m´ediatis´ee, ont beaucoup plus recours au pr´eservatif d`es leurs premi`eres relations que les g´en´erations pr´ec´edentes (environ 20-25 % de ces g´en´erations l’utilisent autour de 15-20 ans)30. `A l’inverse,

29. Nous avons d´ecoup´e des g´en´erations de naissance par tranches de cinq ann´ees, `a partir des dates de naissance d´eclar´ees par les femmes dans chaque enquˆete. Il ne s’agit donc pas d’un suivi de cohortes effectives, mais de cohortes fictives, en faisant l’approximation que des femmes de diff´erentes enquˆetes mais n´ees la mˆeme ann´ee appartiennent `a une mˆeme « g´en´eration ».

30. Cl´ementine Rossier et al. (2004) montre par ailleurs que l’on passe entre 1985 et 1995 de 10 % d’utilisation du pr´eservatif au premier rapport sexuel `a environ 90 %.

les g´en´erations n´ees avant 1968 ont peu recours `a cette m´ethode, et ce malgr´e la survenue de l’´epid´emie. N’´etant pas socialis´ees `a utiliser le pr´eservatif au cours de leurs rapports, ces g´en´erations ne connaissent pas « l’effet p´eriode » que connait la g´en´eration n´ee entre 1968 et 1972, qui d´emarre sa vie sexuelle sans recourir au pr´eservatif mais dont le recours augmente soudainement avec la survenue de l’´epid´emie31.

Figure 2.4 – ´Evolution du recours contraceptif en France, par g´en´eration (ann´ee de naissance)

Champ : Femmes de 18 `a 44 ans n’´etant ni st´eriles, ni enceintes, ayant des rapports sexuels et ne cherchant pas `a concevoir.

Sources : estimations `a partir de Leridon et Toulemon (1991), de l’enquˆete Mondiale de F´econdit´e-1978, de l’enquˆete R´egulation des naissances-1988, de l’enquˆete Situation familiale et emploi-1994, de l’enquˆete CoCon-2000 et des enquˆetes Fecond-2010 et 2013.

Enfin, le recours au retrait pr´esente des effets de g´en´eration assez nets : il diminue au fil des g´en´erations, les g´en´erations n´ees avant 1942 (G1 et G2), qui n’ont vu apparaˆıtre les m´ethodes m´edicales de contraception que tardivement dans

31. N. Bajos et M. Bozon mettent en ´evidence cette diff´erence de socialisation au port du pr´eservatif, en montrant que les femmes qui ont d´ebut´e leur vie sexuelle et affective avant la survenue de l’´epid´emie, qui connaissent une rupture conjugale tardive, sont celles qui ont le moins recours au pr´eservatif lorsqu’elles ont de nouveaux partenaires (Bajos et Bozon, 2008).

leur vie contraceptive, sont plus de 25 % `a utiliser cette m´ethode. Les g´en´erations n´ees entre 1943 et 1957 (G3 `a G5) semblent pour partie d´ebuter leur vie sexuelle avec cette m´ethode, assez rapidement remplac´ee par la pilule ou le DIU.

La question du recours aux diff´erentes m´ethodes en fonction de l’ˆage permet de mettre en ´evidence la « norme contraceptive » identifi´ee par N. Bajos et M. Ferrand, `

a savoir le recours au pr´eservatif en d´ebut de vie sexuelle, puis `a la pilule d`es que les individus entrent dans une relation stable, et enfin par l’usage du DIU une fois que le nombre d’enfants souhait´es est atteint (Bajos et Ferrand, 2004). Ainsi, l’utilisation de la pilule augmente entre 15 et 35 ans, puis d´ecroˆıt au profit du DIU, consid´er´e comme une contraception d’arrˆet, plutˆot que comme une contraception d’espacement. Le DIU, finalement assez populaire en France puisqu’une femme sur cinq concern´ee par la contraception l’utilise, n’est ainsi pas consid´er´e comme une alternative directe `a la pilule, mais comme son substitut, une fois que les femmes d´epassent un certain ˆage et que la pilule leur est moins recommand´ee, du fait de l’augmentation du risque d’accident cardiovasculaire (Kay, 1984). Une hi´erarchie existe donc bien entre ces deux m´ethodes, ce que nous chercherons `a analyser dans les chapitres 3, 4, et 5. L’analyse en termes de g´en´erations permet, elle, de situer historiquement l’´emergence de la norme contraceptive fran¸caise, en montrant que ce mod`ele, qui concerne principalement les g´en´erations n´ees entre 1965 et 1990, s’est mis en place `a la fin des ann´ees 1980, et commence `a ˆetre remis en cause pour les g´en´erations n´ees apr`es 1990.

Cette section aura finalement permis de montrer la mise en place progressive d’une centralit´e de la pilule contraceptive – et dans une certaine mesure, du DIU – dans les pratiques contraceptives, entre les ann´ees 1970 et 2000. Cette m´edicalisation de la contraception est soutenue par l’´evolution du cadre l´egal, mais ´egalement par les politiques de diffusion de la contraception et par le remboursement, en priorit´e, de ces deux m´ethodes contraceptives. Au cours des ann´ees 1980-90 se met en place la norme contraceptive fran¸caise qui accorde un rˆole central `a la pilule et fait du DIU une contraception d’arrˆet, substitut aux m´ethodes d´efinitives de contraception. Cette centralit´e de la pilule dans les pratiques trouve un fort ´

echo dans la sph`ere m´ediatique. Comme le montre la section suivante, la pilule est progressivement constitu´ee dans l’espace m´ediatique comme une ´evidence lorsque l’on parle de contraception, r´ev´elant un biais pilulocentrique qui accorde une place moindre aux autres m´ethodes dans les discours sur la contraception.

2.2

Le pilulocentrisme dans les m´edias, une ´evi-

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