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En quête de sens

2.4. Engendrement biologique, engendrement spirituel

2.4.2. En quête de sens

2.4.1.2. Une occasion de dire sa reconnaissance  

   Devenir parents est une occasion, à un moment donné de la vie, de naître aussi à

soi-même et à Dieu et de pouvoir Lui dire sa reconnaissance pour une vie nouvelle.

Comme la mise au monde biologique, la naissance spirituelle suscite douleurs, bouleversements physiques et psychiques, remises en question, lâcher prise et nouvelle place à trouver dans un nouveau noyau familial et social. « Si être parent va (…) au-delà de la seule fécondité biologique, celle-ci en reste l’archétype, dont la symbolique permet de comprendre toutes les autres formes de fécondité. »235 Lorsqu’un enfant naît, des parents naissent. La naissance est un passage, qu’elle soit biologique ou spirituelle.

La parentalité est donc, comme nous l’avons vu, autant une aventure biologique, ancrée dans le temps et l’espace, que spirituelle, trouvant sa source et sa fin en Dieu, faisant naître le parent à lui-même, s’il en est conscient et s’il y consent. « (…) nul, s’il ne naît d’eau et d’Esprit, ne peut entrer dans le Royaume de Dieu. Ce qui est né de la chair est chair, et ce qui est né de l’Esprit est Esprit. Ne t’étonne pas si je t’ai dit : Il vous faut naître d’en haut. Le vent souffle où il veut, et tu entends sa voix; mais tu ne sais ni d’où il vient, ni où il va. Ainsi en est-il de quiconque est né de l’Esprit. »236

2.4.2. En quête de sens 2.4.2.1. Quelle spiritualité ?  

  Beaucoup de personnes traversent la vie sans se poser de questions, jusqu’à ce qu’un événement difficile les bouscule et les oblige à dévier de la trajectoire imaginée. De même, beaucoup de personnes se disant croyantes se contentent de croire sans s’interroger, sans que leur foi ne soit mise à l’épreuve. Dans les deux cas, en l’absence de réflexion,

                                                                                                               

235 Marie-Christine Bernard, Etre parent. Une aventure humaine et spirituelle, p. 11

236 Jn 3, 5b-8

d’interrogations et de remises en cause, la vie et son lot d’épreuves peut alors devenir totalement absurde.

Notre époque vit l’éclatement des religions, ces dernières n’ont plus la place qu’elles avaient dans l’espace public et force est de constater qu’oser se dire croyant et pratiquer sa religion, c’est nager à contre-courant. Paradoxalement, les courants dits spiritualistes, descendants de la métaphysique platonicienne, n’ont jamais été autant en vogue que de nos jours. Du New Age à la psychanalyse, en passant par les mouvements sectaires, l’astrologie, la méditation en pleine conscience, la superstition et la palette de coachings, de développement personnel et de médecines dites parallèles, sans oublier le monde virtuel constitué des réseaux « sociaux », l’humain du XXIe s. ne sait plus où puiser dans des pratiques allant des plus sérieuses aux plus loufoques, pour essayer de retrouver un ancrage dans ce monde qui lui échappe.

Lorsque survient l’épreuve, il est parfois difficile de trouver du sens à ce que l’on vit. C’est-à-dire de voir dans quelle mesure ce qui est vécu en vaut la peine. Souvent d’ailleurs on ne le voit qu’ultérieurement. Sur le moment, on est comme dans le tambour d’une machine à laver sur mode essorage : on n’entend rien, on ne voit rien, on se contente de tourner… Le besoin de sens existe depuis que l’humain pense et réfléchit, essaie de comprendre et s’interroge. Ne pas chercher de sens revient à ne pas penser, comme un animal.

Autrefois, la foi était un repère solide, la prière un refuge et une aide notoires.

Aujourd’hui, le « spirituel » englobe diverses pratiques qui déploient de multiples méthodes pour accéder au même but : une unification avec soi-même, avec les autres et parfois avec le Tout-Autre que tous ne nomment pas Dieu. Pneuma en grec, dont l’équivalent latin est spiritus, c’est le souffle. Le souffle, c’est ce qui donne vie, ce qui permet de respirer, ce qui permet d’avancer, ce qui donne du goût, ce qui éclaire, ce qui déplace, ce qui décoiffe, ce qui bouscule… C’est « cet espace en soi, espace non codé où chaque individu s’interroge sur le sens de sa vie, de sa présence au monde, de ce qui le fait vivre, du fondement à partir duquel il s’oriente. »237

                                                                                                               

237 Inge Ganzevoort, « Pourquoi, pour qui les soignants appellent-ils un aumônier ? », « Besoins spirituels : rencontres et expériences », dans Hubert Auque et Claude Levain, Rencontres à l’hôpital. L’aumônerie en question, Genève, Labor et Fides, 2001, p. 63.

2.4.2.2. Les différents socles de l’accompagnement spirituel  

  Pour les chrétiens, le fondement à partir duquel s’oriente leur quête de sens, c’est le Christ. L’apôtre Paul le dit : « Pour moi, vivre, c’est le Christ. »238 « Je peux tout en Celui qui me rend fort. »239 L’accompagnement de toute quête spirituelle chrétienne trouve son ancrage dans le Christ. Cela suppose, pour l’accompagnant, de s’être laissé rencontrer par Dieu dans sa faiblesse, et pour l’accompagné, de consentir à se laisser chercher par ce Dieu là, au cœur même de ses difficultés et de son dépouillement parfois extrême lorsqu’il est vécu dans la détresse d’une maladie corporelle ou psychique. « Ma grâce te suffit ; ma puissance s’accomplit dans la faiblesse »240, dit le Christ.

Les agnostiques et les athées ne se réclament pas du Christ, mais ils peuvent néanmoins être mus par une quête spirituelle et existentielle. « Les hommes se sont souvent interrogés sur le néant. Celui d’après la mort, d’abord ; celui d’avant le monde, ensuite. Est-ce le même ? Qui le sait ? Et surtout, dans un cas comme dans l’autre : est-ce vraiment un néant ? N’y a-t-il vraiment rien dans ce que nous appelons le néant ? Il n’est pas exclu qu’il y ait quelque chose. Il est certain que rien n’est sûr. »241 Jean d’Ormesson questionne la question des origines et du sens de la vie en abordant le néant. Il évoque prudemment l’éventualité d’une force créatrice cachée « partout », que certains appellent Dieu.

Chaque personne ressent à sa manière le besoin de trouver du sens à sa vie, de combler le néant, de se demander pourquoi il y a quelque chose plutôt que rien. Plusieurs options sont possibles. D’une part, on peut concevoir sa vie d’un point de vue principalement terrestre, immanent, en considérant qu’il n’y a rien avant la naissance et rien non plus après la mort. Entre ces deux moments non choisis, on va essayer de vivre au mieux avec soi-même et avec les autres, dans une société matérialiste et consumériste, tout en défendant des causes (écologiques, politiques, sociales, économiques, culturelles, etc.) selon ses intérêts ou ses préoccupations.

D’autre part, tout en s’intéressant à l’actualité et aux préoccupations contemporaines, on peut également percevoir sa vie comme un don de Dieu ou consentir à faire partie, en tant qu’êtres humains, d’un grand tout, être amené à croire à une « force supérieure » qu’on ne sait pas comment nommer. On va alors chercher à rencontrer ce                                                                                                                

238 Ph 1, 21.

239 Ph 4, 13.

240 2Co 12, 9.

241 Jean d’Ormesson, Comme un chant d’espérance, Paris, Gallimard, Coll. « Folio », 2014, p. 18-19.

donateur, ce créateur de toute vie, conscient de la valeur du don reçu. On considère que la vie provient d’un Amour inconditionnel et vers lequel elle retourne après la mort qui n’est qu’un passage vers une Vie plus pleine et plus accomplie. Entre deux, on va aussi essayer de vivre au mieux avec soi-même et avec les autres, en laissant une place à Dieu dans son pèlerinage sur la Terre. « La vérité est que sur l’avant-notre-monde comme sur l’après-notre-mort nous ne savons rien. Nous pouvons croire. Nous pouvons rêver. Nous pouvons espérer. Nous ne pouvons pas savoir. »242

La déchristianisation de l’Occident a laissé place à un grand vide spirituel qu’essaient de combler tous ces mouvements parallèles susmentionnés (New Age, astrologie, etc.). Chez certaines personnes particulièrement fragiles et influençables, ils peuvent faire plus de dégâts que de bien. Aujourd’hui, on est chrétien par choix, et non plus par héritage. Mais pour connaître le Christ et le reconnaître comme Fils de Dieu et Libérateur243, il faut en avoir entendu parler ! Lorsqu’une personne n’a jamais entendu parler du Christ, ni de Dieu et pour qui le langage religieux n’évoque rien, on peut simplement lui parler de l’Amour inconditionnel qui dépasse tout lien humain. Le mot

« amour » est plus significatif pour tout le monde et demeure explicitement évangélique244. Dans les étapes que toute vie connaît, les heureuses et les tristes, voire les cataclysmiques, il y a l’opportunité de saisir en quoi cette vie-là, cette épreuve-là, vaut la peine d’être vécue, comporte du sens, parfois caché très profondément sous les décombres du tremblement de terre. Mettre un enfant au monde ne déroge pas à ce constat.

 

2.4.3. Le bouleversement provoqué par l’arrivée d’un enfant