3.3.1. A la maternité Sainte-Félicité à Paris : Les Petites Soeurs des Maternités Catholiques
Cette congrégation religieuse a pour vocation d’être au service de la vie naissante.
Ces religieuses répondent concrètement à cet appel par les vœux d'obéissance, de chasteté et de pauvreté, vécus en communauté fraternelle, selon une règle de vie reconnue et approuvée par l'Eglise catholique. J’ai rencontré deux Petites Sœurs en novembre 2014 à la Maternité Sainte-Félicité, dans le XVe arrondissement de Paris. Elles m’ont parlé de l’histoire de leur congrégation et des tâches qui leur sont dévolues au sein de l’établissement médical.
3.3.1.1. Origines
A la suite de la naissance de son enfant handicapé, Louis Lantelme, un industriel en soierie à Jallieu, entend également les confidences de ses ouvrières maltraitées par leur mari durant leur grossesse. Il décide donc d’élaborer un projet de maternité centré sur l’accueil des mères travaillant dans ces usines, où on serait particulièrement attentif à leur sécurité affective et physique et où leur enfant serait accueilli dans les meilleures conditions possibles.
« En 1920, il demande à sa fille, Marie-Louise, de faire des études de sage-femme à Lyon. Elle obtient brillamment son diplôme et se perfectionne dans une grande maternité du Creusot, durant huit années. Cependant, depuis de nombreuses années Marie-Louise a entendu l'appel du Seigneur et s'oriente vers une Congrégation missionnaire. Elle se prépare à partir aux Indes. Elle est déjà inscrite dans la branche missionnaire des Filles de Saint François de Sales. Ainsi est-ce un véritable dilemme pour elle lorsqu'en 1928 son père lui demande avec insistance de revenir à Jallieu ouvrir une maternité ! »298 C’est alors qu’avec le soutien de Mgr Caillot, plusieurs jeunes filles répondant à la même vocation rejoignent Marie-Louise pour son « projet » !
« Le 2 février 1930, Monseigneur Caillot vient inaugurer la maternité. Il la bénit et définit son esprit et son but : "Rendre la maternité non seulement désirable, mais
298 Historique à lire en entier sur le site internet des Maternités Catholiques : http://www.maternites-catholiques.org/141-histoire-de-famille.html et : http://www.maternites-catholiques.org/142-la-congregation.html
pratiquement possible, non seulement souhaitable, mais acceptable. C'est-à-dire qu'il faut entourer la maternité aujourd'hui, en même temps que de soins prophylactiques appropriés et d'attentions prévenantes, empressées, désintéressées, aussi et surtout d'une ambiance morale, d'une atmosphère religieuse qui lui rende aux yeux de tous et des mères elles-mêmes le respect, la dignité..." Ce jour-là est née l'oeuvre sociale : la Maternité Catholique pour la défense de la vie humaine dès sa conception, de l'amour, du mariage, de la famille.
(…) le 21 novembre 1982, le Pape Jean-Paul II accorde à la Congrégation la reconnaissance de droit pontifical. »299
3.3.1.2. Vocation
Les Petites Sœurs des Maternités Catholiques sont appelées à témoigner de la vie et de l’espérance que porte en lui chaque être humain, ancré en Christ. Non seulement religieuses consacrées à Dieu, elles exercent souvent aussi un travail de soignantes (infirmière, puéricultrice, sage-femme, médecin…). Cette double vocation a pour richesse de prendre en compte la mère, le père, les parents, dans leur globalité, d’un point de vue non seulement médical, mais aussi spirituel. Et Dieu sait si c’est important quand on s’apprête à (ou qu’on vient de) mettre un enfant au monde !
Appelées à être signe de l’amour du Père et de sa tendresse dès le premier instant de la conception de l’enfant, les Petites Sœurs assurent une présence quotidienne auprès des mères et de leur enfant, dans les soins physiques et spirituels. Elles sont conscientes de la grandeur du tout petit dans le sein de sa mère, émerveillées par le projet d’amour de Dieu pour l’être qu’Il a créé à son image et dont la dignité ne tient pas à l’âge, aux capacités physiques et/ou mentales, à la situation sociale, mais à l’humanité. Elles soulignent l’importance de la prière personnelle et communautaire, source de la miséricorde de Dieu. Chacune et chacun peut y puiser pour que ceux que ces religieuses accueillent et accompagnent puissent à leur tour se sentir aimés de Dieu et répondre à cet amour par la foi.
La vocation de ces religieuses s’inscrit dans l’adoration et la contemplation du Père, dans la louange ; elles sont appelées à demeurer dans son amour, Lui pour qui n’existe aucun enfant non désiré. Cette dernière affirmation est fondamentale pour tout accompagnement de personnes n’ayant pas été voulues par leurs parents ou ayant le
299 Id.
sentiment de ne pas l’avoir été. Le Dieu biblique a aimé chacun dès sa conception300. Dieu appelle (vocat, en latin) chacune de ses créatures, Il a une pensée, une idée pour chacun d’entre nous avant même sa naissance. Cette « proto-pensée » sur chaque individu ne réduit pas celui-ci à ce qu’il est, fait, était, faisait, sera ou fera. Tout est toujours possible : Dieu a encore des projets pour chacun ! Quel soulagement dans tous les moments de la vie, en particulier les plus difficiles ou les plus anxiogènes comme peuvent parfois l’être une grossesse ou une naissance quelque peu compliquée.
C’est dans cette optique-là que les Petites Sœurs de la Maternité Sainte-Félicité à Paris 301 proposent un parcours d’accompagnement spirituel à la naissance. Cet établissement appartient à la Congrégation des Petites Sœurs des Maternités Catholiques et est géré par une Association. Une petite vidéo de quelques minutes sur Internet donne une idée des tâches de ces religieuses. On peut la visionner en suivant ce lien : https://www.youtube.com/watch?v=uNi58uw1g-g.
3.3.2. Le parcours de préparation spirituelle à la naissance
Plusieurs parcours de préparation spirituelle à la naissance existent en France dans des cliniques privées. J’ai choisi de présenter celui des Petites Soeurs de la Maternité Sainte-Félicité.
3.3.2.1. Déroulement des soirées
Tout être humain venant au monde trouve d’abord sa source en Dieu. La grossesse et la naissance d’un enfant représentent un bouleversement pour les futurs parents et engendrent souvent un questionnement existentiel : d’où venons-nous, comment devenir parents, quels vont être les nouveaux rapports avec nos propres parents qui deviennent grands-parents, quel nouvel équilibre trouver dans la vie quotidienne, etc. De grandes questions à aborder ensemble sous le regard de Dieu.
Les Petites Sœurs de la Maternité Sainte-Félicité à Paris, en lien avec la Pastorale Familiale du Diocèse de Paris, proposent un cheminement sur quatre soirées autour de quatre grands thèmes : « attendre un enfant, c'est déjà l'accueillir », « vivre et célébrer la
300 Cf. en particulier Jr 1,5 ; Os 11,9.
301 Deux autres maternités appartenant à cette congrégation religieuse existent en France : la Clinique Saint Vincent de Paul à Bourgoin-Jallieu (cf. http://www.clinique-bourgoin.com/maternite/index.html#3,0;0) et l’Etoile Maternité Catholique de Provence à Aix-en-Provence (cf. http://www.maternite-etoile.com/).
naissance », « parler de ce qui inquiète, oser la confiance » et « nous rentrons à la maison : nouvelle étape de notre vie de couple ». Les Petites Sœurs qui animent les soirées proposent une ou deux questions auxquelles les couples réfléchissent en petits groupes puis en « séance plénière ». Une personne prend des notes pour garder une trace de ces échanges et permettre aux futurs parents une progression dans leur cheminement au fil des rencontres. Un couple « témoin » ayant effectué le parcours antérieurement y assiste et répond aux éventuelles questions des futurs parents. Chaque soirée se termine par un temps de prière avec la communauté des Petites Sœurs.
Il n’y a pas de « profil type » des futurs parents qui participent à ces rencontres.
Souvent ce sont des croyants engagés, mais pas forcément. Surtout, ils ne veulent pas résumer la grossesse à une succession de rendez-vous médicaux et à une nouvelle organisation du quotidien après la naissance de leur enfant, mais désirent plutôt se recentrer sur l’essentiel. A la fin du séjour hospitalier après l’accouchement, les parents peuvent participer à une prière d’action de grâce pour leur nouveau-né à la chapelle de la maternité, en présence de la Congrégation des Petites Soeurs et des frères et sœurs aînés s’il y en a. Une manière de remercier Dieu pour le don de la vie et de Lui confier leur enfant.
3.3.2.2. « Lettre à un nouveau-né »
Les Petites Sœurs disposent de textes de réflexion et d’une bibliographie avec des ouvrages en lien avec la grossesse à l’intention des futurs et jeunes parents. Voici la très belle « Lettre à un nouveau né », écrite par Petite Soeur Marie Amélie, sage-femme, et publiée dans l'hebdomadaire Pèlerin du jeudi 24 décembre 2009. Un texte très facile à aborder pour qui n’est pas théologien que je trouve tout à fait à sa place ici pour illustrer avec des mots simples ce que représente un nouveau-né du point de vue de la foi et de la spiritualité. Il se passe de commentaires et décrit aussi très justement la vocation – d’être aux côtés de la vie naissante – de ces Petites Sœurs, appelées aussi à aider et à accompagner les jeunes parents dans leur nouvelle tâche.
« Bonjour "Merveille",
Comment ne pas t'appeler "Merveille" ? Toi si petit et pourtant si grand déjà ! Petit être plein de vie, plein de promesses ! Quelle joie de partager l'émerveillement de tes parents découvrant ton visage, après ces longs mois de patience.
Ton regard étonné nous interroge et nous invite à voir à travers toi l'infiniment grand de Dieu qui donne la vie et qui a donné à tes parents de partager ce projet créateur.
C'est Lui qui t'a tissé dans le sein de ta maman, comme le dit le psalmiste (Ps 139). Il te connaissait quand tu grandissais dans le secret. "Un enfant, c'est l'héritage du Seigneur", dit-il encore (Ps 127). Dieu t'a confié à tes parents. De leur amour, Il a fait jaillir ta petite vie.
Te voilà au grand jour, "Merveille" ! Ta présence invite au recueillement devant le grand mystère de la Vie. Dans nos maternités, trois joyeux coups de cloche ont annoncé ton arrivée dans notre monde. C'est notre "faire-part" de Petites Soeurs, un appel à la prière, à l'action de grâces. Penchés sur ton berceau, après le brouhaha des félicitations et des conseils avisés, peu à peu, tous, petits et grands, se taisent et te contemplent... Instant de silence, de paix...
C'est le temps de Noël. Jésus, le Prince de la Paix, est venu habiter notre terre. Il s'est fait tout petit dans les bras de Marie, comme toi aujourd'hui dans ceux de ta maman.
En te voyant blotti sur son coeur, sous le regard attendri et vigilant de ton papa, c'est un peu de la crèche de Noël que tu me permets de contempler.
Merci d'être là, de me donner à chaque instant une raison de m'émerveiller, de croire en la beauté de la vie dans un monde qui semble la rejeter. Il suffit d'un sourire, d'un échange de regards, d'un sommeil abandonné ou même de t'entendre appeler... Tant d'instants qui font vibrer la vie !
Devant toi, je réalise la responsabilité qui est la nôtre, celle de tes parents d'abord, mais aussi celle de tous ceux que tu croiseras sur les routes de la vie. Saurons-nous te permettre de devenir adulte dans un monde d'amour et de paix ? Tu es "demain" qui nous est confié aujourd'hui. Tu pourras compter sur l'amour inconditionnel de ton papa et de ta maman. Ils sont ton plus beau cadeau, comme tu es le leur. Vous allez faire route ensemble, et Jésus, qui est le Chemin, la Vérité et la Vie, veillera sur vous.
Joyeux et saint Noël à toi. Je t'embrasse avec tendresse et respect.
Belle vie à toi ! »302
302 http://www.maternites-catholiques.org/253-lettre-a-un-nouveau-ne.html