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´ electrodynamique quantique en circuit

5.4 R´ egime de couplage ultrafort

Il vaut la peine ´egalement de mentionner que plusieurs qubits peuvent ˆetre coupl´es au mˆeme r´esonateur. Avec des qubits fabriqu´es `a proximit´e des noeuds du mode propre auquel ils sont le plus fortement coupl´es, l’hamiltonien du syst`eme s’´ecrit simplement

H =Hr+

N

X

j=1

hHqb(j)+Hint(j)i, (5.27)

o`u l’hamiltonien d’interaction Hint(j) est calcul´e par projection d’op´erateurs sur le sous-espace de chaque qubit. Des portes logiques `a deux qubits peuvent ˆetre g´en´er´ees de la mˆeme mani`ere que pour l’architecture `a ´EDQ en circuit bas´ee sur les qubits de charge [79].

Ind´ependamment de mon ´etude th´eorique sur le couplage dipolaire magn´etique en EDQ en circuit, une ´´ equipe du NEC au Japon a d´emontr´e le r´egime de couplage fort entre un r´esonateur et un qubit de flux par couplage direct [52]. Comme on peut le voir `a la Fig. 5.6, des anti-croisements sont observ´es dans le spectre d’excitation du circuit lorsque le qubit et le premier mode du r´esonateur entrent en r´esonance. L’interaction dipolaire magn´etique au point de d´eg´en´erescence du qubit (o`uω01/2π = 2.4 GHz, donc loin de la r´esonance) est estim´ee `ag/2π ≈120 MHz. Cette exp´erience d´emontre la faisabilit´e d’une architecture `a ´electrodynamique quantique en circuit bas´ee sur un couplage magn´etique avec des qubits de flux.

De mani`ere tout `a fait identique `a l’architecture bas´ee sur le couplage dipolaire ´ elec-trique avec des transmons, les harmoniques sup´erieures pr´esentes dans le mod`ele de Rabi multimode `a l’´Eq. (5.26) sont n´ecessaires pour obtenir les bonnes quantit´es dispersives induites par le r´esonateur sur les qubits. Comme on a fait allusion `a la section §3.4 et depuis l’expression de gφ,m(ij) `a l’´Eq. (5.22), ici c’est la d´ependance naturelle en ω−1/2m des fluctuations de courant du r´esonateur qui procure le comportement en gmωm−1/2 du couplage lumi`ere-mati`ere et la convergence des s´eries dispersives.

5.4 R´ egime de couplage ultrafort

L’utilisation d’une jonction Josephson dans la constriction peut r´esulter en une am-plitude de couplage avec le qubit de flux beaucoup plus forte. Comme il a ´et´e discut´e au chapitre §4 sur les r´esonateurs non lin´eaires et tel qu’illustr´e `a la Fig. 5.7, la jonction ouvre un gap ∆um dans le mode du r´esonateur qui peut devenir tr`es important.

-0.05 0 0.05

-1 0 1

-1 0 1

0

-0.1 0.1

Figure 5.7: Premier mode d’un r´esonateur non lin´eaire. Premier mode pour un r´ eso-nateur non homog`ene en niobium (ligne pointill´ee noire) et d’un r´esonateur en aluminium avec un jonction Josephson d’´energie EJ/h = 6000 GHz plac´ee au centre (ligne pleine bleue). Les param`etres des r´esonateurs sont donn´es au Tableau 5.1. L’encadr´e montre un agrandissement du mode `a proximit´e de la jonction. La grande inductance Josephson procure une variation abrupte du champ de flux dans le r´esonateur et procure un plus fort couplage avec un qubit de flux connect´e de part et d’autre.

Suivant l’analyse des modes propres d’un r´esonateur avec jonction int´egr´ee de la section § 4.1, on obtient l’amplitude du flux induit dans la boucle du qubit hψˆ1(xq)i = ψ1rms∆um et du couplage dipolaire magn´etique gφ,1(01), en fonction de l’´energie Josephson EJ,r de la jonction du r´esonateur. Ces r´esultats sont trac´es `a la Fig. 5.8. Pour une ´energie Josephson relativement grandeEJ,r/h≥1000 GHz, le flux capt´e par le qubit est si grand que le couplage atteint facilement g(01)φ,1 /2π ∼1000 MHz et au-del`a. Pour des param`etres r´ealistes, ceci signifie que le couplage peut ais´ement repr´esenter de 10 `a 100% de la fr´equence du qubit avant que l’effet Kerr du r´esonateur commence `a ˆetre important.

Pour des jonctions plus petites avec EJ,r/h < 100 GHz, la non-lin´earit´e du r´esonateur devient non n´egligeable avec K11/2π > 1 MHz et permet d’atteindre des amplitudes de couplages excessivement importantes de quelques unit´es deω01.

5.4.1 Battre la constante de structure fine

Dans cette section, on tente de comprendre l’origine de ces fortes amplitudes de cou-plages et leurs implications dans notre compr´ehension du syst`eme qubit-r´esonateur. En effet, il est tr`es surprenant que de telles amplitudes de couplages soient physiquement possibles avec ces circuits alors que j’ai montr´e au pr´ec´edent chapitre que le couplage aux

§5.4. R´egime de couplage ultrafort 157

0.01 0.1 1

1 10 100

0.01 0.1 1 10

10 100 1000 10000

0 1 2 3 4

10 100 1000 10000

a)

b)

Figure 5.8: Couplage dipolaire magn´etique d’un r´esonateur non-lin´eaire avec un qubit de flux. a) Flux induit ψ1rms∆u1 et couplage dipolaire magn´etique r´esultant g(01)φ,1 en fonction de l’´energie JosephsonEJ,rde la jonction int´egr´ee au centre de l’´electrode centrale d’un r´esonateur. b) Fr´equence du premier modeω1 et amplitude de l’effet Kerr K11 du r´esonateur non lin´eaire. Grˆace `a la jonction Josephson du r´esonateur, le couplage magn´etique direct peut atteindre plusieurs unit´es de la fr´equence du qubit. Les param`etres du r´esonateur sont : 2`= 12 mm, Z0= 50 Ω etω01/2π= 5 GHz. Les param`etres du qubits sont ceux de la r´ef´erence [36].

fluctuations de courant avec un transmon int´egr´e au bout du r´esonateur ´etait naturelle-ment limit´e par la constante de structure fine.

Afin de mieux comprendre le ph´enom`ene, il est instructif d’´ecrire le couplage dipolaire magn´etique en unit´es de la fr´equence du qubit ω01. Depuis l’´Eq. (5.22), le ratio g/ω01 l’amplitude des fluctuations de flux du r´esonateur telles que capt´ees par le qubit. En terme de l’imp´edance du vide Zvac = 1/0c≈377 Ω et de la constante de structure fine α=Zvac/(2RK), l’amplitude des fluctuations de flux s’´ecrit

Tout comme un transmon au bout de la ligne, le couplage aux fluctuations de courant est limit´e `a de petites fractions de quantum de flux par la constante de structure fine α ≈ 1/137 alors que Zm < Zvac. Grˆace `a l’inclusion de la jonction Josephson dans le r´esonateur, les fluctuations du flux du r´esonateur peuvent ˆetre amplifi´ees par un facteur 100 et permet de compenser, en partie, la petitesse de la constante de structure fine.

L’autre contribution significative `a l’amplitude exceptionnelle du couplage dipolaire magn´etique provient du ratio de participation de l’inductance de boucle βEJ/~ω01 des qubits de flux. Rappelons que la jonctionβEJ d´etermine la hauteur de la barri`ere tunnel formant le double-puits de potentiel du qubit. Ainsi, l’effet tunnel entre les ´etats macro-scopiques de courant procure une d´ependance exponentielle de la fr´equence de transition ω01 vis-`a-vis le ratio EJ/EC selon ω01∝Exphq4β(1 + 2β)EJ/ECi [116]. De cette ma-ni`ere, le qubit de flux respecte un ratio βEJ/(~ω01) 1 dans la limite o`u EJ/EC 1.

Pour les pr´esentes simulations num´eriques o`u β = 0.8 et EJ/EC = 35, on trouve que βEJ/(~ω01)≈50 = 4.3/√

α, compensant largement les effets n´efastes de la constante de structure fine.

En permettant l’amplification des fluctuations du flux du r´esonateur et un l’effet tun-nel macroscopique dans les circuit supraconducteurs, les jonctions Josephson permettent de contourner les limitations impos´ees sur l’interaction lumi`ere-mati`ere par les constantes universelles de la nature.

§5.4. R´egime de couplage ultrafort 159

0.01 0.1 1 10 100

10 100 1000 10000

Figure 5.9: R´egime de couplage ultrafort pour les harmoniques sup´erieures d’un r´esonateur non lin´eairePour un r´esonateur non-lin´eaire ayant une jonction Josephson d’´ ener-gie EJ,r int´egr´ee au centre, l’amplitude du couplage dipolaire magn´etique gφ,m(01) peut ais´ement atteindre la fr´equence du modeωm mˆeme pour les harmoniques sup´erieures du r´esonateur.

5.4.2 Changement de paradigme

Les cons´equences d’un couplage lumi`ere-mati`ere sont profondes alors qu’on commence

`

a s’´eloigner significativement de la physique Jaynes-Cummings habituelle. Pr´ec´edemment, on a montr´e que l’hamiltonien du syst`eme ´etait de la forme de l’hamiltonien de Rabi multimode `a l’´Eq. (5.26). Lorsque le ratio gm01 n’est plus n´egligeable, l’approximation s´eculaire n’est plus valide et les termes contre-rotatifs ∝ amσ++amσ commencent `a contribuer de mani`ere significative. Ce r´egime de couplage est dit ultrafort.

Un des premiers effets du bris de l’approximation s´eculaire est la contribution Bloch-SiegertδBS au d´ecalage de Lamb `a l’´Eq. (3.49) du qubit dans le r´egime dispersif

δBS =X

m

g2m

ωm+ω01. (5.30)

Lorsque δBS > κ, γ, le d´ecalage de Bloch-Siegert peut ˆetre observ´e directement dans le spectre du qubit comme la d´eviation des fr´equences propres Rabi du syst`eme par rapport au spectre Jaynes-Cummings. ´Egalement, des transitions entre des ´etats de nombre de quantas diff´erents pourraient ˆetre observ´ees alors qu’elles sont admises en dehors du cadre de l’approximation s´eculaire.

A mesure que le couplage devient dominant face aux autres ´` energies du syst`eme, il y a formation d’un syst`eme mol´eculaire qubit-champ passablement plus riche et complexe. En

consid´erant un seul mode du r´esonateur, ce circuit est en fait une impl´ementation `a l’´etat solide du mod`ele de Jahn-TellerEβ [123] qui, grˆace au couplage dipolaire magn´etique, m`ene ´eventuellement `a une transition de phase superradiante [124,125]. Dans ce cas, l’´etat fondamental du syst`eme qubit-r´esonateur est un ´etat enchevˆetr´e correspondant `a un oscillateur d´eplac´e par une quantit´e d´ependante de l’´etat du qubit et o`u l’oscillateur poss`ede un nombre fini de quanta d’excitation [126,127].

Comme on peut le constater `a la Fig. 5.9, l’approximation `a un mode du r´esonateur peut cependant s’av´erer rapidement inad´equate alors que le ratio gφ,m(01)m & 1 mˆeme pour les harmoniques plus ´elev´ees. Le qubit de flux et le r´esonateur coplanaire, dans son ensemble, forment un circuit quantique hybride alors que l’interaction magn´etique constitue l’´echelle d’´energie dominante. Il serait alors n´ecessaire d’effectuer le calcul d´ e-taill´e des ´etats propres quantiques du syst`eme hybride pour en connaˆıtre leur nature et pour ainsi d´eterminer comment le r´esultat net diff`ere des deux parties individuelles. En particulier, il serait int´eressant de connaˆıtre la sensibilit´e de ces ´etats quantiques face aux diff´erentes sources de bruit de d´ephasage pour savoir s’il peut constituer un qubit robuste pour effectuer du calcul quantique.