• Aucun résultat trouvé

Le droit de propriété Les aspects idéologiques du droit de propriété Les aspects idéologiques du droit de propriété

Titre 2. L’autonomisation du droit public économique en France

C. Le droit de propriété Les aspects idéologiques du droit de propriété Les aspects idéologiques du droit de propriété

C’est la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen qui fait du droit de propriété un droit inviolable et sacré. Dans l’article 2 la propriété figure parmi les droits naturels et imprescriptibles de l’homme, l’article 17 dispose : « La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la condition d'une juste et préalable indemnité ».

A l’origine, le droit de propriété était d’inspiration individualiste, purement libérale. C’est pour cela qu’il devait accompagner le principe de liberté du commerce et de l’industrie. Mais le

255 Stirn Bernard, op. cit., pp.105-106

256 Stirn Bernard, op. cit., p.103

droit de propriété n’est pas absolu, la législation ultérieure a insisté dès le début du XIXe siècle sur les limites de ce droit.

Il faut remarquer ici l’influence socialiste257. « Au début du XXe siècle, sous l’égide des idées solidaristes et socialistes l’accent fut mis sur la fonction sociale du droit de propriété. Cette conception culminera dans le Préambule de la Constitution de 1946 qui adopte dans son alinéa 9 le principe de la nationalisation des entreprises présentant le caractère d’un service public national ou d’un monopole de fait »258. « Alors que la signification originaire du droit de propriété était purement individualiste (la propriété étant alors conçue comme le support matériel des libertés individuelles), l’évolution ultérieure du droit de propriété a conduit à consacrer la fonction sociale et collective de ce droit »259.

Les événements en Russie des années 90 prouvent aussi que le caractère absolu de la propriété ne peut pas longtemps exister, il lui est arrivé d’être absolu seulement à la période révolutionnaire (à vrai dire, tous, même l’État souhaitent utiliser la propriété). Dans les années 2000 le business russe accepte la Charte sociale.

« Le droit de propriété constitue le principal régulateur des politiques successives de nationalisation et de privatisation »260. Le Conseil d’Etat considère ce droit, qui « a pour corollaire la liberté de disposer d’un bien », comme une liberté fondamentale relevant de la procédure du référé-liberté (CE, 2 juil. 2003, Société Outremer Finance Ltd).

Il existe des limitations législatives ou réglementaires du droit de propriété. « La propriété du sol qui devrait entraîner celle du sous-sol, n’exclut pas, depuis 1810, le droit pour l’Etat de la désignation du concessionnaire chargé de l’exploitation des ressources minières »261. La protection due au droit de propriété consiste pour l’essentiel en une juste et préalable indemnité qui doit être prononcée par le juge judiciaire.

La valeur constitutionnelle du droit de propriété

Le Conseil constitutionnel proclame « que les principes même énoncés par la Déclaration des droits de l’Homme ont pleine valeur constitutionnelle tant en ce qui concerne le caractère fondamental du droit de propriété dont la conservation constitue l’un des buts de la société politique et qui est mis au même rang que la liberté, la sûreté et la résistance à l’oppression, qu’en ce qui concerne les garanties données aux titulaires de ce droit et les prérogatives de la puissance publique » (CC, 16 janvier 1982).

257 Voir: Colin Fréderic, op. cit., p.133

258 Hubrecht Hubert-Gérard, op. cit., p.94

259 Hubrecht Hubert-Gérard, op. cit., p.96

260 Hubrecht Hubert-Gérard, op. cit., pp.100-118

261 Orsoni Gilbert, op. cit., p.55

La décision de 1982 est capitale car « elle trace les frontières entre intervention publique et économie de marché au profit de cette dernière. Le Conseil constitutionnel a pris soin d’expliquer que la France était certes une République sociale mais pas une République socialiste dans la mesure où le peuple français avait rejeté le referendum du 5 mai 1946 qui lui proposait d’autres principes que les principes libéraux »262.

La jurisprudence constitutionnelle limite la protection de la propriété aux seules privations, et ne protège pas les simples dépossessions, les simples atteintes au droit de propriété, qui peuvent ne s’accompagner d’aucune indemnité (servitudes d’urbanisme) et dont la protection peut relever du juge administratif (CC, 13 déc. 1985, Amendement Tour Eiffel).

D’autre part, « le Conseil constitutionnel a reconnu une portée négative, en considérant que l’exercice du droit de disposer librement de son patrimoine implique le droit de ne pas devenir propriétaire contre son gré (CC, Décision 98-403 DC du 20 juillet 1998) »263.

« La jurisprudence du Conseil constitutionnel constitue avant tout un compromis habile entre les bases historiques de ce droit et les évolutions postérieures ce qui explique que les garanties issues de l’article 17 de la DDHC demeurent somme toute limitées »264.

La propriété publique

Les titulaires du droit de propriété sont avant tout des particuliers, car la conception individualiste du droit de propriété était essentiellement liée à l’homme et au citoyen. Mais il existe aussi les personnes morales, donc les titulaires peuvent être des personnes physiques et morales, y compris les personnes publiques, dont l’Etat.

Le Conseil constitutionnel a jugé que la protection des patrimoines publics « trouve… un fondement dans les dispositions de la Déclaration des droits de l’homme de 1789 relatives au droit de propriété et à la protection qui lui est due ; que cette protection ne concerne pas seulement la propriété privée des particuliers mais aussi, à un titre égal, la propriété de l’Etat et des autres personnes publiques » (CC, 25-26 juin 1986). Ainsi « le droit de propriété, affirmé d’abord au profit des particuliers contre l’Etat, se trouve aujourd’hui également défendu contre les particuliers au profit de l’Etat »265.

Sur le plan comparatif il faut remarquer qu’en Russie il s’agit du principe constitutionnel de la protection égale de tous les formes de propriété (l’art.8 : Dans la Fédération de Russie, la propriété privée, d’Etat, municipale et les autres formes de propriété sont également reconnues et protégées).

262 Hubrecht Hubert-Gérard, op. cit., p.97

263 Moulin Richard, Brunet Pierre, op. cit., p.112

264 Hubrecht Hubert-Gérard, op. cit., p.99

265 Delvolvé Pierre, op. cit., p.132

D. Les autres principes du droit public économique

Outline

Documents relatifs