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DIPLÔMÉS EN VOIE D’INSERTION PROFESSIONNELLE : L’AGENCE COMME TREMPLIN

rôle de l’agence dans l’accès au marché du travail

2. DIPLÔMÉS EN VOIE D’INSERTION PROFESSIONNELLE : L’AGENCE COMME TREMPLIN

En leur offrant une première expérience de travail dans leur domaine, les agences permettent aux jeunes diplômés d’acquérir des compétences pratiques en lien avec leurs qualifications et de bonifier du même coup leur CV afin de rendre leur candidature plus attrayante auprès des employeurs. En servant ainsi de tremplin pour lancer leur carrière, le travail en agence apparait comme un outil d’insertion professionnelle. C’est d’ailleurs en ces termes que deux jeunes rencontrés dans le cadre de l’étude décrivent leur passage en agence. Ces derniers avaient complété leurs études universitaires et étaient en voie d’insertion sur le marché du travail.

2 Par souci de confidentialité, les répondants dont les parcours servent d’exemples dans ce chapitre sont désignés au

53 2.1 Caractéristiques du groupe

Leur parcours scolaire, tantôt linéaire, tantôt ponctué d’une interruption de courte durée ou d’un changement de programme s’inscrit dans la continuité de celui des jeunes du premier groupe ; l’obtention du diplôme marquant l’aboutissement de plusieurs années d’études pour ces jeunes qui en sont maintenant à commencer leur vie professionnelle.

À leur sortie de l’université, ils cumulent peu d’expérience dans leur domaine ce qui n’est pas sans complexifier leur recherche d’emploi. À l’exception d’un stage réalisé dans le cadre de leurs études, ils n’ont jusque-là occupé que des emplois étudiants sans lien avec leur formation. Par l’entremise d’une agence de placement, ils accèdent à une première expérience professionnelle.

2.2 Expérience de travail en agence

Ces jeunes procèdent de leur propre initiative à leur inscription dans les agences. À la recherche d’une opportunité d’emploi dans leur domaine, ils savent qu’elles peuvent les aider dans leurs démarches. Loin de pourvoir un seul type d’emplois, les agences cherchent à recruter des candidats pour des postes exigeant des niveaux variés de compétence, d’expérience et de scolarité. C’est en consultant les offres en ligne qu’un des répondants arrive à cette constatation et décide de s’inscrire. Pour l’autre, l’inscription constitue davantage un passage obligé afin de décrocher un emploi dans le secteur d’activités convoité.

« R : J’ai fait quelques foires à l’emploi. Mais celle qui m’a embauché, c’était un coup de chance sur Internet, un soir où j’ai magasiné plusieurs agences et j’ai trouvé celle- là. Je ne la connaissais pas avant.

Q : OK. Donc tu ne regardais pas les emplois, tu regardais les agences sur Internet. R : Disons que je regardais les agences qui étaient reliées avec l’entreprise X surtout. Il y en a une couple. Ce qui fait que, c’est ça. Je me suis retrouvé avec celle-là. » (H1U14)

Les emplois obtenus par le biais des agences ne correspondent pas parfaitement à leur niveau d’études, mais ça importe peu pour ces jeunes diplômés qui cherchent avant tout à acquérir de l’expérience pratique dans leur domaine et à lancer leur carrière professionnelle. À leurs yeux, il constitue ainsi un tremplin pour intégrer le marché du travail et progresser vers de meilleurs emplois.

« Ça a été le premier pas vers des postes plus importants par la suite, là, qui s’en viennent. » (H1U14)

« Eh bien [le rôle de l’agence], c’est vraiment de nous ouvrir une porte sur un domaine qui est vraiment difficile à atteindre. Nous donner une opportunité qu’un employeur ne nous donnerait pas. C’est sûr que moi, je vois plein de points négatifs

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pour l’agence, mais sincèrement les agences je pense qu’elles nous donnent la possibilité d’aller chercher une expertise qu’on ne pourrait pas aller chercher parce que dans notre domaine, ils nous disent qu’il faut trois à cinq ans d’expérience, mais ils ne sont pas prêts à nous donner la chance de faire notre expérience. Ça fait que ça nous donne cette chance-là. » (F1U17)

Mais leur passage en agence n’est pas sans difficulté. Ils dénoncent entre autres la précarité de leurs conditions de travail (salaire, avantages sociaux, heures de travail) qui rend impossible la poursuite de projets personnels tels que l’achat d’une première maison. C’est pourquoi l’objectif de ces jeunes est de quitter au plus vite leur statut de salarié d’agence et de stabiliser leur situation professionnelle.

« C’est sûr que c’est très positif dans la mesure où ils m’ont permis d’avancer rapidement, d’avoir des postes rapidement. Mais c’est négatif parce que c’est très précaire. On peut rentrer de vacances et ne pas avoir de mandat. Le chômage n’est pas permis. Pas avant une certaine période en tout cas. Et c’est ça, on est un peu coincé parfois. Il faut faire ses preuves trois fois plus que dans les emplois stables dans les compagnies. » (H1U14)

Pour un des répondants, l’objectif avait été atteint. Au moment de l’entrevue, celui-ci venait d’accepter un poste permanent dans l’entreprise cliente où il avait été affecté et envisageait d’y faire carrière. Julie, quant à elle, était toujours au service d’une agence et à la recherche active d’un autre emploi. Son parcours illustre bien les avantages et les inconvénients du travail en agence pour les jeunes diplômés.

2.3 Profil type (Audrey)

Après ses études secondaires, Audrey entreprend une formation collégiale en design de mode qu’elle complète en trois ans. Elle sait toutefois qu’elle ne veut pas travailler dans ce domaine. C’est pourquoi elle rencontre une conseillère en orientation. Avec son aide, elle découvre son intérêt pour les sciences sociales et décide de s’inscrire à l’université dans un baccalauréat en orientation. Elle complète deux sessions d’études dans ce programme puis se voit dans l’obligation de faire un certificat afin d’augmenter sa moyenne. Elle réintègre le baccalauréat et obtient son diplôme au printemps 2011, après cinq années d’études universitaires.

Étudiante, Audrey occupe des emplois à temps partiel et à temps plein l’été. Elle travaille ainsi comme vendeuse dans une boutique avant de réaliser un stage à l’hiver 2011. Une fois diplômée, elle se met activement à la recherche d’un emploi en ressources humaines. La concurrence est grande puisque les candidats pour ces emplois proviennent de plusieurs disciplines : relations industrielles, sciences de l’orientation, administration. De plus, les entreprises exigent des postulants un minimum de trois années d’expérience. C’est par l’entremise d’une agence qu’elle obtient un premier emploi dans ce domaine, un poste de technicienne en ressources humaines. Bien qu’il ne

55 corresponde pas tout à fait à son niveau d’études, elle croit fermement qu’il lui servira de tremplin pour trouver un emploi à la hauteur de ses attentes. Mais Audrey hésite maintenant à postuler auprès des agences. Celles-ci lui ont ouvert les portes d’une profession en ressources humaines, mais elle déplore les conditions dans lesquelles elle travaille actuellement. Non seulement bénéficie- t-elle d’un faible niveau de salaire, mais elle n’a pas d’avantages sociaux ni aucune garantie d’heures. Or, Audrey se trouve à un stade où elle souhaiterait aller de l’avant avec des projets de vie qui se trouvent reportés en raison de sa situation.

« J’ai vingt-huit ans, mon chum et moi on veut une maison, on veut des enfants... Ce n’est pas le genre de travail qui va me donner la possibilité d’aller m’acheter une maison. Ça fait que c’est ça : la paie, les conditions de travail, pas d’assurances. Je ne suis pas assurée de faire mes trente-cinq heures par semaine. Je peux être coupée en tout temps. C’est très instable là, c’est stressant pour ça. La « job » n’est pas stressante, mais les conditions de la « job » sont stressantes. » (F1U17)

C’est pourquoi elle poursuit à ce jour ses recherches dans l’espoir de trouver un emploi lui permettant de réaliser pleinement ses aspirations professionnelles et personnelles.

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