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Linguistique darwinienne 1

2.1. Ethologie darwinienne Vs. Ethologie darwiniste

2.1.1. Diachronie darwinienne

Identifier les différentes strates de la pensée transformiste de Darwin réclame une délimitation radicale et plus ou moins arbitraire. Le premier des trois moments que nous souhaitons souligner est peut-être, de prime abord, le plus simple à circonscrire mais également le plus volatile. Le plus aisé à délimiter puisqu’il jouit d’un commencement, le début de l’écriture des Transmutation Notebooks en juillet 1837, et d’une fin, l’élaboration de la sélection naturelle à travers la lecture de Malthus (1766-1834) en septembre 1838, apparemment faciles à identifier. Le plus indéterminé car n’ayant donné lieu à aucune publication, il est également le plus sujet à l’assimilation par la théorie suivant le retournement darwinien au sujet de la variation31. Se focaliser sur l’approche éthologique de Darwin permet toutefois de rendre compte d’une première version de son transformisme32 dans laquelle le comportement est source de modification, d’adaptation parfaite avec les conditions extérieures, réduites à l’inorganique, à l’inanimé et ne prenant donc pas en considération les interactions intraspécifiques et interspécifiques33. C’est cette focalisation sur la superposition parfaite entre l’histoire de l’individu et de son espèce et l’histoire des conditions inorganiques/inanimées, ne prenant pas en considération les relations entre les espèces, chaque variation pouvant être étudiée de manière isolée, qui nous permet de qualifier cette approche, selon la terminologie saussurienne, de diachronique.

L’étude du premier transformisme darwinien exige une bonne utilisation des manuscrits.

Une première étape consiste à sélectionner les écrits à analyser. Ceci ne peut être effectué, d’une part, que sur la base du travail de datation notamment réalisé par Barrett et al.34 et, d’autre part, à partir d’une lecture de fond des manuscrits. Ainsi, la datation établie par Barrett et al. disqualifie une bonne partie du cahier A, ainsi que l’intégralité des cahiers E, N et de celui communément appelé Torn apart notebook. La lecture de fond, quant à elle, supprime tout intérêt au Red notebook (tenu après le retour du Beagle) ainsi qu’au cahier A (consacré à la géologie) mais rétablit une pertinence certaine des cahiers E et N. En effet, il n’y a pas de réel moment malthusien35, analogue à un eurêka de la sélection naturelle, et les entrées suivant la lecture de L’essai sur le principe de population (1798) n’empêchent pas le premier transformisme de subsister. Au corpus constitué des cahiers B, C, D, E, M, N, du Torn apart

31Gruber (1974) : 103, 106, 156-159.

32 Des subdivisions peuvent encore être faites au sein même de ce que nous avons identifié comme le premier transformisme darwinien. Cf. Richards (1987) : 85-90.

33Gruber(1974) : 103-104, 127-149 ;Richards (1987) : 85-98 ; Ospovat (1995 [1981]) : 39-59.

34Barrett et al. (2008 [1987])

35Gruber (1974) : 165-174 ; Ruse (1999) : 174-176 ; Hodge & Kohn (1985), "The Immediate Origins of Natural Selection" : 186 ; Tort (2010a [2005]) : 17-22.

notebook et des Old and useless notes, peuvent également être ajoutés des manuscrits plus tardifs dont la composition talonne l’écriture et la publication de L’origine des espèces. Le style cognitif de Darwin explique la pertinence de sources bien au-delà des limites strictes, bien que discutables, de sa première théorie transformiste. Le naturaliste est conservateur36 et, une fois une idée proprement développée, ce dernier s’efforce de l’intégrer, moyennant ou non quelques modifications, aux théories lui succédant.

Le caractère conservateur de la pensée de Darwin ne doit pas dispenser d’une certaine prudence face aux manuscrits. Ces derniers ne possèdent pas tous un statut équivalent. Ainsi, les Transmutation notebooks ne sont que des notes personnelles non destinées à la publication. Si un certain ordre a été mis par Darwin, quelques pages ayant été arrachées et certaines considérations sur, pour reprendre les termes du naturaliste, la métaphysique, la morale et l’expression étant conciliées à part dans les cahiers M et N, ces notes de recherches ne sont en aucun cas destinées à la publication. En revanche, le Sketch de 1842, et surtout l’Essay de 184437 ainsi que les chapitres rassemblés sous le titre de Sélection naturelle38 sont non seulement parfaitement intelligibles puisque constitués de phrases généralement complètes et souvent dénuées d’abréviations, mais possèdent également une organisation bien plus rigoureuse, les deux derniers étant préparés pour une publication. L’étude des Transmutation notebooks se révèle donc délicate et propice aux interprétations les plus variées et contradictoires. L’approche privilégiée dans notre étude est celle d’une lecture des notes personnelles du naturaliste sujette à la confirmation de ce que l’on peut considérer comme la pensée publique de Darwin, contenue soit dans les manuscrits destinés à la publication, soit dans les œuvres effectivement publiées de son vivant. Une telle méthode disqualifie l’hypothèse, ou du moins l’importance, d’une pensée darwinienne secrète, pouvant notamment être motivée par les aveux matérialistes39 et déterministes disséminés dans plusieurs carnets mais absents des œuvres publiées ou préparées pour la publication. Or, c’est précisément en privilégiant une approche à travers l’éthologie de Darwin que l’abandon des

36Richards (1987) : 82-83.

37Le Sketch et l’Essay ont été publiés en 1909 par le fils de Darwin, Francis, sous le titre The Foundation of the Origin of Species. Il faut souligner que l’Essay a été écrit dans l’optique d’une publication qui surviendrait au cas où Darwin mourrait prématurément.

38 Ce manuscrit, édité par Stauffer en 1975, se compose de onze chapitres écrits entre mai 1856 et juin 1858, avant que Darwin n’entreprenne la rédaction de L’origine des espèces afin de ne pas voir échapper la paternité de la théorie de la sélection naturelle sur le point d’être divulguée par Alfred Russel Wallace, ce dernier ayant découvert une théorie similaire à celle de Darwin lors d’un accès de fièvre dans l’archipel malais. Les onze chapitres constituent donc l’ébauche d’un grand livre sur les espèces que Darwin n’achèvera jamais. En revanche, de nombreux passages seront repris dans les différentes œuvres du naturaliste. Cf. F. Darwin (1887) : Life and Letters of Charles Darwin : II 67-114; Stauffer (1975), Natural Selection : 1-24.

39Gruber (1974) : 14.

considérations matérialistes et déterministes se justifie au sein même de la théorie du naturaliste, sans devoir pour cela évoquer quelque tabou victorien.

La délimitation du corpus relatif au premier transformisme darwinien est donc moins aisée qu’il n’y paraît tandis que le problème d’une détermination théorique claire de ce dernier est confirmé par le statut des écrits dans lesquels il se développe. En outre, des considérations sur la psychologie, sur le style cognitif de Darwin s’invitent et détournent d’une approche purement théorique. De manière générale, la focalisation sur un aspect de la théorie darwinienne, confirmé par sa reprise dans les œuvres publiées, représente un point d’accès à l’interprétation des manuscrits et un retour à une perspective purement théorique. Plus particulièrement, les considérations sur le comportement traversent de part en part toutes les œuvres de Darwin et revêtent différentes caractéristiques au fil de l’évolution de la pensée du naturaliste. Si une emphase sur l’éthologie darwinienne n’épuise pas la totalité des perspectives du naturaliste, elle permet toutefois de mettre en évidence les grandes strates de sa pensée qui s’organise bien plus dans les œuvres publiées, ou destinées à la publication, que dans les Transmutation notebooks dans lesquels une certaine simultanéité confuse est de mise.

L’introduction du comportement peut se lire au cœur des premières considérations transformistes de Darwin insistant sur l’importance de la reproduction sexuelle :

We see <living beings>. the young of living beings, become permanently changed or subject to variety, according «to» circumstance, – seeds of plants sown in rich soil, many kinds, are produced, though new individuals produced by buds are constant, hence we see generation here seems a means to vary. or adaptation. – Again we <believe> «know» in course of generations even mind & instinct becomes influenced. –

child of savage not civilized man. – birds rendered wild <through> generations, acquires ideas ditto. V.

Zoonomia. –

There may be unknown difficulty with full grown individual «with fixed organization» thus being modified, – therefore generation to adapt & alter the race to changing world. – (Darwin in Barrett et al.

(2008 [1987]) : B, 3-4, 171, nous soulignons)

Si une certaine primauté est accordée à l’action de la reproduction sexuelle dans le cadre de l’adaptation et des transformations en résultant, il ne faut pas conclure au recours par Darwin à une forme de Deus ex sexuale40. La reproduction sexuelle permet avant tout la possibilité d’une malléabilité de la progéniture soumise à un processus de maturation duquel l’individu adulte est exclu41. D’une part, l’influence des conditions inorganiques semble pouvoir être

40 Kohn (1980), "Theories to Work By : Rejected Theories, Reproduction and Darwin’s Path to Natural Selection" : 67-170 ; Kohn & Hodge (1985) : 185-206 ; Richards (1987) :124-126.

41 L’exclusion totale de l’individu adulte peut être discutée si l’on considère d’une part l’influence des conditions inorganiques/inanimées sur ses organes reproducteurs, phénomène bien présent dans L’origine des

directe : « Unknown causes of change. Volcanic isld. – Electricity »42. Bien que non clairement identifiées, les causes de la variation sont indéniablement inorganiques, ou du moins inanimées, et revêtent une couleur nettement lamarckienne43. D’autre part, le comportement comme cause d’adaptation est avancé à travers la reconnaissance d’une influence indirecte des conditions inorganiques/inanimées : « Instinct goes before structure »44. L’introduction du comportement comme cause d’adaptation et donc de transformation représente une allégeance à la théorie de l’hérédité des caractères acquis45 :

All the discussion <after> about affinity & how one order first becomes developed & then another – (according as parent types are present) must follow after there is proof of the non creation of animals. – then argument May be. – subterranean lakes, hot spring &c &c inhabited therefore mud wood be inhabited, then how is this effected by – for instance, fish being excessively abundant & tempting the Jaguar to use its feet much in swimming,

& every developement giving greater vigour to the parent so tending to produce effect on offspring – but

WHOLE race of that species must take to that particular habit. – All structures either direct effect of habit, or hereditary «& combined» effect of habit. – perhaps in process of change. – Are any men born with any peculiarity. or any race of plants–Lamarck’s willing absurd, not applicable to plant (Darwin in Barrett et al.

(2008 [1987]) : C, 62-63, 258-259, nous soulignons)

Il est possible de comparer point par point la compréhension darwinienne de la théorie de l’hérédité des caractères acquis avec sa première exposition lamarckienne dans la Philosophie zoologique46 :

PREMIERE LOI

Dans tout animal qui n’a point dépassé le terme de ses développements, l’emploi plus fréquent et soutenu d’un organe quelconque, fortifie peu à peu cet organe, le développe, l’agrandit, et lui donne une puissance proportionnée à la durée de cet emploi ; tandis que le défaut constant d’usage de tel organe, l’affaiblit insensiblement, le détériore, diminue progressivement ses facultés, et finit par le faire disparaître.

DEUXIEME LOI

Tout ce que la nature a fait acquérir ou perdre aux individus par l’influence des circonstances où leur race se trouve depuis longtemps exposée, et, par conséquent, par l’influence de l’emploi prédominant de tel organe, ou par celle d’un défaut constant d’usage de telle partie ; elle le conserve, par la génération aux nouveaux individus qui en proviennent, pourvu que les changements acquis soient communs aux deux sexes, ou à ceux qui ont produit ces nouveaux individus. (Lamarck (1994 [1809]) : 216-217)

Tout d’abord, la malléabilité est une condition sine qua non d’une transformation de la structure. L’importance de la reproduction sexuelle, garantissant une progéniture flexible physiologiquement puisque se développant à travers un processus de maturation, est dès lors

espèces, et d’autre part la possibilité d’acquisition tardive d’habitudes certes plus difficilement transmissibles puisque moins intégrées par l’organisme.

42Darwin in Barrett et al. (2008 [1987]) : B, 18, 175.

43Richards (1987) : 87.

44Darwin in Barrett et al. (2008 [1987]) : C, 51, 255 ; cf. Burkhardt Jr. (1985) : 335-336

45Pour une discussion générale sur l’hérédité des caractères acquis, cf. Delsol (1998), L’hérédité des caractères acquis.

46 Pour une discussion de l’hérédité des caractères acquis chez Lamarck, cf. Gayon (2006), "L’hérédité des caractères acquis" : 105-164.

renforcée. En outre, la transmission d’habitudes acquises n’est possible qu’à travers une reproduction que l’on peut qualifier de générale. Non seulement les géniteurs doivent être modifiés structurellement de manière semblable, mais la race entière doit présenter les mêmes transformations pour qu’une nouvelle variété de l’espèce apparaisse. Ainsi, usage et défaut d’usage et hérédité des caractères acquis représentent deux moments distincts de la transformation des espèces. La structure peut être modifiée individuellement à travers la loi d’usage et de défaut d’usage tandis qu’elle doit l’être collectivement, par l’hérédité des caractères acquis, pour réellement donner naissance à une nouvelle variété. Or, l’aspect collectif, dans le premier transformisme darwinien, découle de la transformation individuelle.

En effet, l’acquisition de toute habitude est tributaire de l’influence des conditions inorganiques/inanimées auxquelles une adaptation parfaite est suggérée. Le rejet de la volonté lamarckienne en est l’illustration. S’il est indéniable que Darwin n’a pas compris la théorie du naturaliste français, il est moins aisé de reconstruire avec certitude son interprétation erronée, qui semble d’ailleurs fluctuante et hésitante47. De manière générale, il est possible d’affirmer que l’erreur de Darwin consiste simplement à intégrer la volonté dans la théorie lamarckienne de l’hérédité des caractères acquis. Or, Lamarck n’accorde la volonté qu’aux animaux supérieurs et ces derniers n’en sont pas moins déterminés par les conditions inorganiques à travers une théorie des fluides unifiant le matérialisme du naturaliste français48. Plus précisément, il semble que Darwin pense que Lamarck reconnait, à travers la volonté, un souhait conscient de l’animal à acquérir de nouvelles structures. La volonté ne serait ainsi pas seulement la cause de l’action mais également sa détermination en vue d’une fin précise, à savoir le développement d’une structure utile. Les considérations sur le statut de la volonté préoccupent Darwin et constituent un point d’accès à l’accomplissement diachronique de son transformisme. A la lecture de Kirby (1759-1850), Darwin s’interroge : « Can the word willing be used without consciousness, for it is not evident, what animals have consciousness. »49 Plus loin, le naturaliste admet une certaine impuissance : « The meaning of Words must be made out. Reason, Will, Consciousness »50. Ainsi, le transformisme diachronique le plus pur fait l’économie de la volonté qui flirte dangereusement, pour Darwin, avec la conscience et une détermination de l’action par connaissance et anticipation de sa fin.

47Richards (1987) : 86-90, 92-94.

48 Lamarck (1994 [1809]) : 118-130, 206-238, 307-318, 334-377, 459-640 ; Id. (1830), Système analytique des connaissances positives de l’homme : 149-362 ; Jordanova (1981) "La psychologie naturaliste et le "problème des niveaux’ :" : La notion du sentiment intérieur chez Lamarck" : 69-80 ; Corsi (2001), Lamarck, Genèse et enjeux du transformisme.

49Darwin in Barrett et al. (2008 [1987]) : Old & Useless Notes, 35, 612

50Ibid. : Old & Useless Notes, 36, 613

La comparaison avec les plantes est tout à fait éclairante51. L’hérédité des caractères acquis du transformisme diachronique darwinien se joue à travers l’acquisition et la transmission d’habitudes purement physiques, corporelles, végétatives :

I suspect some valuable analogies might be drawn between habitual actions of plants «when exciting cause is absent» & memory of animals. – (surely in plants movements effects of irritability, though means injection of fluid different from contraction of fibre) – it is most remarkable habitual actions in plants, it allows of any degree in lowest animals – habitual action, in intestines subject to sympathetic nerves– (Darwin in Barrett et al. (2008 [1987]) : C, 241e-242e, 315)

L’instinct est défini par Darwin comme étant une mémoire inconsciente52. Or, cette dernière est issue d’actions habituelles purement physiques analogues aux habitudes des plantes, dépourvues de toute forme de volonté excepté le phénomène local d’irritabilité, et déterminées par l’extériorité, par les conditions inorganiques/inanimées. Ainsi, l’hérédité des caractères acquis comme processus de transformation des structures introduit l’étude d’un comportement animal tributaire des différents systèmes composants l’organisme. Aussi bien le système circulatoire, digestif ou encore nerveux, d’ailleurs architectonique, sont les garants de l’expression par l’action d’une malléabilité nécessaire à l’adaptation parfaite à des circonstances changeantes, l’adéquation entre structure et extériorité pouvant être transmise par hérédité de ces dernières et par instinctivation, c’est-à-dire par transmission des systèmes transformés. L’importance des habitudes physiques ne se limite dès lors pas seulement à la modification de structures complexes mais est également étendue, à travers le phénomène d’instinctivation, aux comportements complexes permettant une plus grande stabilité des structures non-mentales. En effet, la possibilité d’un développement de comportements complexes face aux changements de conditions permet de transférer la pression adaptative des structures non-mentales à celles responsables de l’action. C’est d’ailleurs ce versant du transformisme diachronique qui sera le plus longtemps conservé en tant que tel par Darwin puisqu’il est possible d’en retrouver une expression intacte jusque dans la Sélection naturelle :

Let us now consider how the more remarkable migrations could possibly have originated. Take the case of a bird being driven, each year, by cold or want of food, slowly to travel southward, as is the case with some birds; & in time we may well believe that this compulsory travelling would become an instinctive passion, as with the sheep of Spain. Now during the long course of ages, let valleys become converted into estuaries,

& these into wider & wider arms of the sea, & still I can/57/well believe that the impulse which leads the pinioned goose to scramble northward, would lead our bird over the trackless waters; & that by the aid of

51 Si Darwin hésite au départ à reconnaître une continuité entre habitude/instinct animal et habitude/instinct végétal, il finit par se rattacher à cette théorie développée par Kirby. Cf. Darwin in Barrett et al. (2008 [1987]) : Old and useless notes 36, 613, N 12-13, 566-567, N 48, 576 ; Id. in F. Darwin (1909) : 17 ; Darwin (1875), The Movement and Habits of Climbing Plants : 306 ; Id. (1880), The Power of Movements in Plants : 571 ; Richards (1987) : 142 n68.

52Darwin in Barrett et al. (2008 [1987]) : M 7, 521 ; Richards (1987) : 94-96.

the unknown power by which many animals (& savage men) can retain a true course, it would safely cross the sea now covering the submerged path of its ancient land journey./

57 v 2/I do not venture to suppose that the line of navigation of birds always marks the line of formerly continuous land. It is, possible, that a bird accidentally blown to a distant land or island, after staying some time

& breeding there, might be induced by its innate instinct to fly away, & again to return there in the breeding season. But I know of no facts to countenance this idea; & I have been much struck in the case of oceanic islands, lying at no excessive distance from the main‐land, but which for reasons to be given in a future chapter, I do not believe have ever been joined to the mainland, with the fact that they seem most rarely to have any migratory Birds. Mr. E. V. Harcourt who has written on the birds of Madeira informs me that there are none at Madeira: so I am informed by Mr. Carew Hunt it is in the Azores; though he thinks that perhaps the Quail which migrate from island to island may leave the archipelago.1 /

1 ['Canaries none C. de Verdes' added in pencil.]

57 v 1/In the Falkland Islands as far as I can find out no land‐bird is migratory. From inquiries which I have made there is no migratory bird in Mauritius or Bourbon: Colenso asserts (Tasmanian Journal vol. 2. p 227) that a cuckoo, Cuculus lucidus is migratory, remaining only 3 or 4 months in New Zealand; but New Zealand is so large an island that it may easily migrate to the south & remain then quite unknown to the natives of the North.

Faroe, situated about 180 miles from the North of Scotland, has several migratory Birds (Graba Tagebuch 1830.

p. 205) & Iceland seem to be the strongest exception to the apparent rule; but it lies only [ ] miles from the line of 100 fathoms./

<I will give one case of Migration which seemed to me at first to offer especial difficulty. It is asserted that in

<I will give one case of Migration which seemed to me at first to offer especial difficulty. It is asserted that in