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Deuxième prise en main de Vic : une dette

Bernat de Cabrera, ascension, grandeur et chute d’un conseiller

I. L’ascension au service d’un royaume (jusqu’aux années 1350) 1350)

1.3. Reconnaissance personnelle, militaire et patrimoniale

1.3.3. La prise de contrôle d’un territoire non sans résistance

1.3.3.3. Deuxième prise en main de Vic : une dette

Pierre IV promet à Bernat la cité de Vic et le comté d’Osona, à Cagliari, le 24 avril 1355167, non seulement pour le remercier des services rendus en Sardaigne en tant que précieux capitaine général, mais aussi pour ceux lors des soubresauts de l’Union, comme pour

163 JUNYENT, E., Juridiccions i privilegis de la ciutat de Vich, Vic, 1969, document 342, p. 199.

164 JUNYENT, E., Juridiccions…, op.cit., documents 345 et 347, p. 200.

165

CUVILLIER, J.-P., « La population catalane au XIVe siècle. Comportements sociaux et niveaux de vie d'après les actes privés », Mélanges de la Casa de Velázquez. 5, 1969. pp. 159-187.

http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/casa_0076-230X_1969_num_5_1_995

166

JUNYENT, E., Juridiccions…, op.cit., document 355, p. 202.

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ses fonctions assumées auprès du duc de Gérone. La promesse royale vaut aussi pour le fils et les successeurs de Bernat de Cabrera.

…concedemus et vobis seu dicto vicecomiti et vestris vel suis perpetuo ut comitibus Ausonie dabimus et donabimus pure simpliciter et irrevocabiliter pleno jure in feudum, tamen et juxta propriam naturam feudi totam partem nostram quam habemus et habere debemus et nobis pertinet et pertinere potest et debet quovis modo in Vici civitate pretacta et etiam infra limitationem unius leuce predicte limitande…168

Vic en fait donc entièrement partie169, Pierre IV prenant soin de le préciser et d’y adjoindre tout lieu fortifié ou non dans le périmètre d’une lieue. Une délimitation plus fine des contours sera faite par Pere Çacosta et Francesc Togores au nom de Pierre IV et par les délégués de Bernat de Cabrera. Dès le 20 novembre 1355, Pierre IV livre la cité de Vic à Bernat de Cabrera avec toute la juridiction, droits d’ost et de chevauchée pour deux années, et ordonne au viguier royal de quitter les lieux170.

Il reste que durant l’hiver 1355-56, Vic fait preuve d’une résistance acharnée. L’affaire paraît confuse ; la lecture des analyses de la documentation révèle sans contestation possible que les habitants ont peur de perdre les privilèges acquis. Toutefois, il est plus difficile d’éclaircir si cette opposition est liée à la constitution du duché de Gérone ou à celle du comté d’Osona (qui est compris dans le duché de Gérone). Jusqu’en mars 1356, les deux arguments semblent interférer ; un procès tranche que Jean de Gérone est libre de permuter une partie ou la totalité de Vic171. Les prohoms de la partie haute de Vic – partie Moncada – défendaient certes les privilèges concédés par le roi à la cité mais craignaient aussi Bernat de Cabrera, présenté comme un « ennemi mortel de la cité »172.

Le 17 février 1356, Pierre IV livre à son fils la cité de Vic et le lendemain nomme son oncle, Raymond Bérenger, comte d’Empuries, curateur du jeune duc173

, le remerciant ainsi d’une permutation qu’il a négociée avec doigté. Cet échange, officialisé le 26 février 1356174

, concerne Vic qui est donnée en fief à Bernat de Cabrera contre les villes de Vilafranca del Penedès et de l’Arboç, les châteaux d’Olèrdola et de Font-rubí, francs-alleux tenus par Bernat

168 XXXIV, p. 423.

169 Elle est citée avant même le comté d’Osona. Il faut dire qu’elle est la capitale de l’antique comté d’Ausone.

170

JUNYENT, E., Juridiccions… op.cit., documens 357, p. 203.

171 JUNYENT, E., Juridiccions… op.cit., document 374, p. 206 (20 février 1356).

172 JUNYENT, E., Juridiccions… op.cit., document 362 p.204 (14 janvier 1356).

173

XXXIV, p. 430-435.

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de Cabrera depuis le 18 janvier 1356 pour une dette que le roi avait contractée auprès de lui lors de la campagne de Sardaigne175.

Le jeune Bernat de Cabrera 176 est investi le 1er mars 1356 du comté d’Osona. Le 5 mars, le procureur de Bernat de Cabrera vient prendre livraison de la cité mais c’est une véritable rébellion qu’il rencontre, si active que Pierre IV s’en mêle. À la fin du mois de mars 1356, quand Bernat de Cabrera va prendre possession de la partie royale de Vic, il ne trouve qu’une minorité des prohoms pour lui prêter serment, l’autre s’étant absentée. Le 1er

avril 1356, depuis Saragosse, Pierre autorise le comte d’Osona à procéder contre eux et cela provoque une résistance armée. Le 5 avril 1356, le roi demande au viguier de Manresa, Ramon de Planella de réunir ses gens du Bagès afin de marcher contre Vic. De son côté, le comte d’Osona réunit ses troupes ainsi que des mercenaires castillans pour assiéger la ville177

. Les rebelles semblent trouver des soutiens au moins passifs ; ainsi, le conseil de Manresa refuse d’envoyer une armée contre Vic.

Les oppositions se multiplient donc furieusement. Elles sont aussi le fait de l’évêque Ramon de Bellera qui clame que la promesse royale faite en 1315 est trahie. En effet, en 1315 l’évêque Berenguer de Guàrdia avait transféré son domaine (partie basse) au roi Jacques II qui lui avait promis de ne jamais désunir la seigneurie de Vic de la Couronne et du comté de Barcelone. Ramon réclame que la partie concédée doit alors revenir à l’évêque. Le 29 avril 1359, Pierre IV intervient directement auprès d’Avignon178

. Les choses vont si loin que l’évêque est chassé de son évêché et son temporel, dont Vic, le château de Brull et Torroella, lui est confisqué179.

Un témoin le 28 août 1365 confirme que l’empoignade fut rude, ceux de Vic qui avaient fortifié la cité furent assiégés par des troupes royales comportant des Castillans et des Catalans …Vic finit par se soumettre180. Il est à noter que difficilement tombée sous la domination de Bernat de Cabrera père et fils, la cité résiste ensuite pour revenir dans le giron royal en 1364…

175

MIQUEL I LÓPEZ, J., RUBIÓ MANUEL, D., « La recuperació del patrimoni reial: El cas de la vegueria de Vilafranca del Penedès (1384) », Miscel.lània penedesenca, 1994, XVIII, p. 209-231.C’est un prêt que Bernat de Cabrera n’a pu financer seulement grâce à sa victoire de 1353, nous y reviendrons.

176 PLADEVALL I FONT, A., El comtat d’Osona a mig segle XIV, Origen i extension del comtat d’Osona creat

pel rei Pere III a favour de Bernat III de Cabrera el Ir marc de 1356, Barcelone, 1972. 177

JUNYENT, E., Juridiccions…, op.cit., documents 373 et 379 p.206-207.

178 XXXIV, p. 467-468.

179 JUNYENT, E., Juridiccions…, op.cit., documents 361, 363, 364 et 372 p.203-206.

180

Cúria Fumada Vich, Man. Pere de Mas, C. 1365, s.f. avec date 28 août 1365. Cité par PLADEVALL I FONT, A., El comtat d’Osona… , op. cit,. n.15 p. 19.

169

Vic constitue donc un territoire important pour Bernat de Cabrera et sa famille (un héritier est né en 1352). La cité contrôle la route qui relie Barcelone à Ripoll – l’antique Via

ceretania – ; elle doit être prospère car il y a un quartier juif au cœur de la ville, elle draine les

richesses d’une plaine prospère.