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Des copies de Registres Secrets (fol 115-138)

Conclusion provisoire au sujet des registres 24 et 25

2.3. Le volume 26 : une création de Prosper de Bofarull

2.3.5. Des copies de Registres Secrets (fol 115-138)

Le titre est donné au folio 115 r : Sigue luego, bajo el titulo Secretorum Regestrum

una colleccion de cartas que transcribimos a continuacion. Le verso est blanc. L’ensemble de

ces copies est soigneusement réalisé, de multiples mains et nous retrouvons notamment celle, fort travaillée, qui a œuvré des folios 1 à 4. Nous pouvons discerner quatre ensembles. C’est peut-être en les étudiant que nous aurons réponse à la question qui pour nous est centrale : pourquoi et quand ces écrits ont-ils été inclus dans le dossier ?

2.3.5.1. Deux copies témoignant d’une vague d’enquêtes (fol. 116-117)

Nous avons d’abord copies de deux actes, en latin, datés de Barcelone. Le 16 mai 1364, à la demande de Pierre IV et d’Éléonore, l’infant Jean ordonne à Johan Berenguer de Rajadell, viguier de Gérone, à Guillem de Vineolis et à Pere Cantoni, juristes de Gérone, d’enquêter avec son procureur fiscal Guillem Bayer sur les crimes graves qu’aurait commis

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Bernat Margarit, fidelis consiliarius et expansor noster320. L’écriture change pour l’acte par lequel, le 31 décembre 1364, il ordonne d’arrêter Constance, épouse de Francesc Formosa, notaire de Barcelone, inculpée de crimes graves321.

Serait-ce l’indication d’une vague d’arrestations liée à la mise à jour d’un complot dirigé soit contre le roi et son royaume, soit contre la famille Cabrera ?

Le verso du folio 117 est vierge, mais l’acte a été recopié entièrement. Après ces trois copies, l’écriture change pour présenter la suite.

2.3.5.2. Bernat de Cabrera, un homme à torturer et à exécuter (fol. 118-133)

Deux écritures alternent pour nous présenter cette série de copies de lettres s’échelonnant du 8 au 26 juillet 1364 et enregistrées par Bertran de Pinós, protonotaire de duc de Gérone.

À Saragosse, le 13 juillet 1364, le Primogenit fait ouvrir et ordonne d’enregistrer diverses lettres closes apportées par Paschasius dez Puitg, messager de la reine, de la part de celle-ci et de Berenguer d’Abella, majordome du duc322. Il s’agit d’abord d’une lettre d’Éléonore à son fils aîné, en date de Barcelone le 8 juillet 1364, dans laquelle elle annonce que le roi veut faire exécuter Bernat de Cabrera ; elle ordonne de le faire à Saragosse ou ailleurs en Aragon, après avoir essayé de savoir par torture ou autrement (en altra manera) si Ramon Alemany de Cervelló et Berenguer de Pau sont compromis323. Berenguer d’Abella informe le duc, le 12 juillet 1364, qu’il va prendre livraison de Bernat de Cabrera à Almudévar et que, dès la nuit suivante, il recevra le fils de Juan Ramírez d’Arellano en otage à Huesca pour garantir l’échange. Il demande, si justice n’est pas faite à Huesca, que le duc lui envoie une escorte de dix hommes324. Il lui communique deux lettres reçues de la reine et du roi, elles aussi recopiées :

-Le 8 juillet 1364, depuis Barcelone, Éléonore a écrit à Berenguer d’Abella pour l’informer qu’elle a reçu des consignes du roi par l’entremise de Berenguer Carbonell et, qu’en conformité avec celles-ci, elle donne l’ordre de rompre les accords conclus entre Pierre IV et le roi de Navarre, mais de respecter les négociations entre Arellano et Abella, en payant toutes les sommes dues au Navarrais à la remise de Cabrera. Elle exige de faire mettre ce dernier à mort publiquement après avoir su la vérité par torture

320 XXXIV, p. 236-239. 321 XXXIV, p. 239-240. 322XXXIV, p. 240-242. 323 XXXIV, p. 242-243. 324 XXXIV, p. 243-244.

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ou autrement, et ce par le Primogenit, car Berenguer d’Abella n’a pas juridiction en Aragon325.

-Le 28 juin, depuis Llíria, Pierre IV indique à Abella que si le roi de Navarre souhaite que Bernat de Cabrera soit mis à mort incontinent, lui-même souhaite qu’il meure convaincu que sa mort est juste326. Ce courrier a été ouvert et lu par la reine qui le cite dans sa lettre du 8 juillet.

Le dossier se clôt avec deux lettres écrites le 8 juillet 1364. Dans la première, la reine demande à Thomas de Marça, majordome du duc, de « lever tout obstacle à ces affaires »327.

Dans la seconde, Jacme Dezfar, chancelier du duc écrit à ce dernier depuis Barcelone pour lui donner des nouvelles qui viennent d’arriver du pays valencien : le roi a pris Llíria, Johan Alfons de Xérica a restitué à Pierre IV tous les châteaux qu’il tenait de lui, le vicomte de Cardona et Olf de Proxida ont remporté une victoire à Almenara. Désormais le roi assiège Murviedro. Il évoque les courriers du roi et de la reine pour qu’on leur obéisse328

.

Sont ensuite recopiées deux lettres reçues par Thomas de Marça. Berenguer d’Abella lui écrit le 12 juillet 1364 pour lui demander de penser aux instruments de torture et à quelqu’un qui sache s’en servir329

, et de les envoyer avec les 10 hommes à cheval qui accompagneront le duc quand il viendra à Huesca, ou Almudévar. Jacme Dezfar écrit le 8 juillet à Thomas de Marça et lui demande d’informer l’archevêque de Saragosse du contenu de la précédente lettre qu’il a écrite au duc330

.

À la suite de ces lettres, sans doute entre le 13 et le 14 juillet, le duc a convoqué son conseil, où siègent Thomas de Marça, son majordome, Jacme de Monell vice-chancelier, Domingo Cerdán, justicia d’Aragon, Domingo López García, merino de Saragosse, pour délibérer sur les lettres reçues331. Le conseil décide de faire promptement exécuter les ordres, de dépêcher une escorte à Berenguer d’Abella qui doit prendre livraison de Bernat de Cabrera à Novales, et, pour plus de sécurité, que l’on fasse venir Cabrera à Saragosse pour lui infliger « l’ultime supplice »332. Vingt cavaliers sont envoyés à Novales sous les ordres de l’alcayde de Vallderoures (Valderobres ?), Guillem Pere.

325 XXXIV, p. 244-246.

326 que muyra, confiant de sa consciencia que justa es la sua mort, XXXIV, p.246-247.

327 desembargar los affers, XXXIV, p.247.

328 XXXIV, p. 248-249. 329XXXIV, p. 249-250. 330 XXXIV, p. 250. 331 XXXIV, p. 250-251. 332 XXXIV, p. 252-253.

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Le 16 juillet 1364, Bernat de Cabrera, entre sous bonne escorte à Saragosse, au bruit des timbales, pour être enfermé au palais archiépiscopal où loge aussi le duc333. Le lendemain, le conseil ducal se réunit à nouveau pour examiner « une à une et mot à mot » les lettres précédemment recopiées et les faits rapportés par Berenguer d’Abella qui est alors présent. Les discussions sont âpres. Les lettres du roi et de la reine se fondent sur la conscientia du roi de Navarre, parce que celui-ci, le noble Juan Ramírez d’Arellano et un secrétaire au nom du roi, ont instamment demandé la mort de Bernat de Cabrera, disant et assurant, entre autres choses, que cela avait été convenu entre, d’une part, Juan Ramírez d’Arellano et ledit secrétaire, messagers de Navarre, et, d’autre part, Berenguer d’Abella au nom de Pierre IV, à Ejea. On avait alors négocié que Bernat de Cabrera, détenu alors par Charles de Navarre, serait remis au roi d’Aragon et qu’on le mettrait à mort et qu’il ne s’évaderait pas. Et maintenant, alors que le noble Bernat de Cabrera a été remis au roi, les Navarrais, demandent qu’on n’exécute pas le captif avant qu’une entrevue n’ait eu lieu entre les rois de Navarre et d’Aragon. Le conseil dit au duc de Gérone de consulter la reine avant toute prise de décision334. Le verso du folio 126 est laissé vierge et deux lettres suivent, sans changement d’écriture. La lettre rédigée le 18 juillet rend fidèlement compte des changements d’exigence des Navarrais. Le duc y joint une courte lettre pour confier à sa mère que son conseil est divisé sur la nécessité de torturer Bernat de Cabrera335 car, s’il n’avoue pas, cela serait au préjudice de la royauté.

Ces lettres n’avaient pas été encore expédiées qu’Éléonore envoie une multitude de missives depuis Barcelone. Chacune est précédée d’une lettre en minuscule (« a », « b », « c »). Le 15 juillet, elle réitère sa demande de faire exécuter Bernat de Cabrera, conformément à ce que le roi a demandé336, et de le faire avouer « de gré ou de force ». Après lecture, le conseil du duc de Gérone persiste à attendre. Le même jour, le 18 juillet, Jean reçoit une seconde lettre de la reine datée du 15 juillet qui annonce la contre-offensive du roi dans le royaume de Valence, l’informe des conclusions des Corts, et ordonne de savoir la vérité sur Alemany de Cervelló et Berenguer de Pau, dès qu’on lui aura livré Bernat de Cabrera337. Le 19, sont apportées deux lettres338 datées du 17 dans lesquelles Éléonore, avant de partir rejoindre son royal époux à Tortosa, réitère l’ordre d’exécuter le vieux conseiller, en public ou

333 XXXIV, p. 253.

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XXXIV, p. 253-256.

335 XXXIV, p. 256-260.

336 Per grat o per forsa , XXXIV, p.261.

337 XXXIV, p. 260-262.

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en cachette, car il pourrait y avoir gran perill. Parallèlement, Éléonore écrit des courriers qui vont dans le même sens à Thomas de Marça339.

Le 23 juillet 1364, arrive une autre lettre de la reine envoyée depuis Barcelone le 19 juillet 1364. Elle a appris que Berenguer d’Abella allait arriver avec Bernat de Cabrera dans un jour ou deux ; elle affirme qu’il ne faut pas tenir compte des nouvelles demandes du roi de Navarre, mais faire torturer et exécuter Cabrera le plus rapidement possible. De même, elle écrit à Thomas de Marça pour obtenir ce qu’elle demande à son fils340.

Le 25 juillet 1364, le duc reçoit à Saragosse deux lettres du roi, rédigées le 22,