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D — INSTALLATIONS ET SERVICES MULTINATIONAUX

Coopération internationale

D — INSTALLATIONS ET SERVICES MULTINATIONAUX

CONTEXTE GÉNÉRAL

3.21 Au fil des ans, les États se sont fourni mutuellement divers services tels que le contrôle de la circulation aérienne, les télécommunications et l’information météorologique. En ce qui concerne l’impu-tation de ces services, les États s’abstenaient généralement de se les facturer mutuellement, étant donné que le flux de services était essentiellement bilatéral et qu’il était généralement considéré comme équilibré.

Même s’il existait des déséquilibres, la tâche de déterminer la part des coûts à imputer à un État voisin était jugée disproportionnée par rapport aux coûts en cause. Au lieu de cela, l’État fournisseur concerné tenait généralement compte de ces coûts dans l’assiette des redevances d’installations et services de route ou des autres redevances analogues qu’il percevait auprès des usagers (les exploitants d’aéronefs) effectuant des vols dans l’espace aérien dont il était responsable.

3.22 Tel continue d’être l’usage général, mais l’évolution qui se produit sur le plan technique et l’ampleur des investissements nécessaires sont à l’origine d’un changement fondamental, comme en témoignent les besoins croissants d’installations et services multinationaux et l’intérêt que ceux-ci suscitent de plus en plus. La mise en œuvre de ces installations et services intervient lorsque certaines fonctions actuellement assurées par les États eux-mêmes peuvent être assurées de façon plus efficace et à moindre

3-10 Manuel sur l’économie des services de navigation aérienne coût par un organe multinational unique, exploité par un ou plusieurs États. En fait, dans certains cas, comme pour la mise en œuvre des systèmes de communications, navigation et surveillance et de gestion du trafic aérien (CNS/ATM), il se pourrait bien qu’une installation multinationale soit la seule solution possible. En ce qui concerne les installations et services multinationaux en général, il importe cependant d’éviter les doublons et le surcroît de redevances que les usagers auraient à supporter si un État participait à la fourniture d’un service multinational tout en assurant le même service au niveau national.

DÉFINITION ET EXEMPLES

3.23 Une installation ou un service multinational de navigation aérienne OACI peut être défini comme une installation ou un service inscrit dans un Plan régional de navigation aérienne OACI dans le but de servir à la navigation aérienne internationale dans un espace aérien s’étendant au-delà de celui dont un seul État fournit les services conformément au plan régional.

3.24 Les systèmes CNS/ATM ou des éléments de ces systèmes sont probablement les installations et services multinationaux les plus importants auxquels la communauté de l’aviation aura accès dans l’avenir immédiat. Cela vaut à la fois pour le potentiel de service des systèmes et pour les coûts. Les réseaux de microstations (VSAT) pour les communications voix et données sol-sol via satellites qui sont en exploitation ou en cours de mise en place en Afrique du Sud, en Amérique du Sud, dans les Caraïbes centrales et orientales ainsi qu’en Europe orientale en sont des exemples concrets. Un autre exemple est le Complément géostationnaire européen de navigation (EGNOS), qui est un système de renforcement satellitaire (SBAS) du GNSS qui assure l’intégrité et les corrections différentielles au moyen de satellites géostationnaires.

ASPECTS RELATIFS À L’ÉQUITÉ

3.25 Il importe que le partage des coûts d’une installation ou d’un service multinational ainsi que le recouvrement de ces coûts par des redevances d’usage soient équitables. En effet, l’exploitation d’une installation multinationale par un État pour assurer des services utilisés par deux ou plusieurs autres États, à un coût qui est de loin supérieur à celui que l’État exploitant devrait assumer pour répondre uniquement à ses besoins, risque de donner lieu à une certaine iniquité s’il n’existe pas un arrangement quelconque de partage des coûts. Cette iniquité peut se manifester à deux niveaux. D’abord, l’État qui fournit et exploite l’installation multinationale doit absorber des dépenses en immobilisations et des dépenses d’exploitation supérieures à ce qu’il aurait assumé pour répondre uniquement à ses besoins. Ensuite, si cet État veut recouvrer ses coûts en percevant des redevances d’usage, il demandera aux usagers de l’espace aérien relevant de sa juridiction de payer le coût de services qui ne leur serait pas imputé à juste titre. Ces usagers paieraient en fait des services fournis à un autre type de trafic par un autre État. Cela serait contraire au principe énoncé au paragraphe 40 de la Politique de l’OACI sur les redevances (Doc 9082), à savoir que les coûts des services de navigation aérienne devraient être répartis équitablement entre tous les usagers.

3.26 Il convient d’ajouter que tout État partageant les coûts d’exploitation d’une installation ou d’un service multinational de navigation aérienne peut inclure les coûts pertinents dans l’assiette des redevances, comme les redevances de services de navigation aérienne, qu’il perçoit auprès des utilisateurs finals de ces services, à savoir les exploitants d’aéronefs. Le droit de tout État contractant de procéder de la sorte est confirmé dans l’article 15 de la Convention de Chicago, et la politique à l’appui est énoncée dans la Politique de l’OACI sur les redevances, Doc 9082.

Chapitre 3. Coopération internationale 3-11 INCIDENCES POUR LES ÉTATS ET LES ORGANES

DE PLANIFICATION TECHNIQUE DE L’OACI

3.27 À cause des incidences à prévoir sur le plan financier et sur le plan de la gestion, on peut s’attendre à ce que l’approche adoptée par les organes de planification technique à l’égard de la mise en œuvre éventuelle d’installations et services multinationaux soit différente de celle qui s’applique aux instal-lations ou services à mettre en œuvre par un seul État. Pour ces derniers, les organes de planification technique s’attachent essentiellement aux aspects techniques des installations et services que l’État en cause doit mettre en œuvre pour s’acquitter de ses obligations dans le cadre du Plan régional de navigation aérienne considéré, afin de desservir le trafic international dans l’espace aérien dont il est seul responsable.

Pour autant que ces installations ou services répondent aux normes internationales établies, les aspects relatifs à leur financement et à leur gestion restent une question interne pour cet État.

3.28 Une approche différente est nécessaire dans le cas des installations multinationales car la raison essentielle de leur réalisation est de permettre à plusieurs États de fournir les services dont chacun a accepté la responsabilité dans le cadre du Plan régional d’une façon plus rentable que chacun d’eux ne pourrait le faire de son côté. Il faut donc s’attendre à ce que les États concernés tiennent à évaluer, au moins grosso modo, les aspects financiers de ces installations avant de convenir de les intégrer dans le Plan régional et de s’engager à les utiliser.

3.29 Les groupes de planification technique devront donc examiner les incidences financières fondamentales dès le stade de leurs délibérations où il semble que la meilleure solution d’un problème, voire la seule, exige que soit recommandée la réalisation d’une installation ou d’un service multinational.

Laisser de côté les incidences financières fondamentales jusqu’au moment où ces groupes auraient mis la dernière main à leurs recommandations pourrait entraîner des retards, si un ou plusieurs États appelés à participer à l’exploitation de l’installation multinationale considérée élevaient des objections (par exemple, à leur participation financière). De tels retards dans la mise en œuvre des solutions techniques pendant que l’on recherche de nouvelles solutions financières acceptables pour tous les États intéressés, risqueraient de compromettre la sécurité ou l’efficacité dans la région concernée.

ÉLÉMENTS INDICATIFS

3.30 À l’origine, c’est le Groupe européen de planification de la navigation aérienne (GEPNA) qui a élaboré et approuvé en 1986 des orientations générales pour la réalisation et la mise à disposition d’une installation ou d’un service multinational de navigation aérienne OACI, orientations qui ont ensuite été intégrées dans l’introduction du Plan régional de navigation aérienne de la Région Europe. Le Conseil a approuvé en 1995 l’insertion d’orientations sur les installations et services multinationaux dans l’introduction de tous les plans régionaux de navigation aérienne. La raison en était que ces orientations étaient jugées particulièrement utiles dans le contexte de la mise en œuvre de divers éléments des systèmes CNS/ATM.

Ces orientations figurent donc maintenant aussi dans les plans régionaux des Régions Moyen-Orient, Afrique-Océan Indien, Caraïbes et Amérique du Sud ainsi qu’Asie et Pacifique. (Dans les plans régionaux des Régions Caraïbes et Amérique du Sud, Asie et Pacifique ainsi que dans le Plan régional révisé de la Région Europe, ces orientations figurent maintenant dans le Volume II, FASID.)

3.31 Les orientations données dans les divers plans régionaux de navigation aérienne sont similaires. Elles comportent une introduction, une définition de ce qui est considéré comme une installation ou un service multinational, des renseignements concernant l’élaboration et le traitement d’une proposition d’installation ou de service multinational et, enfin, des éléments détaillés sur les aspects financiers et de gestion et sur les autres aspects contractuels qu’il convient de prendre normalement en considération dans le contexte de l’exploitation d’une installation ou d’un service multinational éventuel, notamment les

3-12 Manuel sur l’économie des services de navigation aérienne dispositions de base qu’il faudrait envisager d’inclure dans un accord entre les États participant à l’établissement et à l’exploitation d’une installation ou d’un service multinational. On consultera l’Appen-dice 2 du présent manuel pour avoir une description complète de ces lignes directrices particulières, Toutefois, les parties pertinentes traitant des questions relatives à l’accord et donnant un aperçu des dispositions de base sont reproduites dans les paragraphes ci-après.

ACCORD

3.32 La participation des États à la fourniture d’une installation ou d’un service multinational est basée sur l’hypothèse que tout État ayant donné son appui et son accord à la mise en œuvre de l’installation ou du service et en faisant usage, doit également supporter sa part des coûts qu’il entraîne.

Cela fait, les États participants devraient formaliser dans un accord les conditions auxquelles l’installation ou le service multinational doit être fourni. Un but essentiel de l’accord doit être d’assurer un partage équitable des coûts entre les États participants.

3.33 Un accord couvrant l’élaboration, la mise en œuvre, l’exploitation et l’entretien d’une installation ou d’un service multinational peut prendre l’aspect soit d’un traité international formel, soit d’un

« accord administratif ». Les deux comportent une obligation internationale, mais le traité requiert la signature du chef de l’État ou du gouvernement et nécessite également la ratification ou l’approbation de l’Assemblée législative nationale, processus d’ordinaire assez long. Par contre, un « accord administratif » se situe à un niveau moins élevé qu’un traité en ce qui concerne les formalités et les procédures ; il peut être signé par un ministre, par le directeur de l’aviation civile ou une autre personne autorisée, et il peut éventuellement être conclu par un échange de lettres ou de notes.

3.34 Il est recommandé de préférer la forme d’un accord administratif plutôt que d’un traité formel parce que cela permettra à l’accord d’entrer en vigueur dans un délai minimal et permettra également une plus grande souplesse de modification ultérieure. Il faut admettre, cependant, que dans certains États, les circonstances constitutionnelles ou légales peuvent nécessiter l’approbation de l’Assemblée législative pour que l’État accepte les obligations d’ordre financier, particulièrement si elles sont importantes et/ou s’éten-dent au-delà d’une certaine période de temps. L’approbation de l’Assemblée législative peut également être une condition nécessaire à la fourniture proprement dite des services. Quelle que soit la forme utilisée, les accords doivent être structurés de manière à permettre facilement l’incorporation des amendements ultérieurs que les développements pourraient nécessiter. À cette fin, les textes des détails qui ont le plus de chance de nécessiter des modifications et qui ne mettent pas en cause les spécifications de base de l’accord devraient être relégués dans des annexes ou des appendices.

3.35 Il est, en outre, recommandé que dans la mesure du possible un seul accord général (traité ou accord administratif) soit adopté qui couvre tous les aspects de l’installation ou du service concerné à travers toutes ses phases. Cela peut ne pas être toujours possible. Dans certaines circonstances, il peut s’avérer nécessaire ou préférable d’avoir plusieurs accords (de type traité ou accord administratif) qui diffèrent par leur portée et leur contenu. Le but doit alors être de couvrir autant d’aspects que possible dans l’accord administratif et de limiter l’usage du traité aux aspects pour lesquels cette forme d’accord est essentielle pour les États concernés. Ceci étant admis, un accord peut, par exemple, couvrir les démarches — y compris le préfinancement — à accomplir par les États qui endossent la responsabilité de porter l’installation ou le service jusqu’au stade opérationnel, tandis qu’un autre accord sera à conclure entre tous les États (y compris le premier groupe d’États déjà mentionné) qui utiliseront ou bénéficieront de l’installation ou du service une fois qu’il sera devenu opérationnel. Dans de telles circonstances, le premier accord sera important puisque le premier groupe d’États devra assurer le financement sur ses propres ressources afin de permettre la mise en œuvre de l’installation ou du service, étant donné qu’aucune rentrée de redevances d’usagers (exploitants d’aéronefs) n’aura lieu avant que l’installation ou le service ne devienne opérationnel.

Chapitre 3. Coopération internationale 3-13 3.36 Une autre approche possible, si les circonstances l’exigent, serait que tous les États participants concluent un accord couvrant, en termes généraux, leur engagement à participer à la fourniture de l’installation ou du service multinational, quitte à élaborer ensuite un accord séparé couvrant tous les aspects relatifs au financement et à l’exploitation de l’installation ou du service multinational.

DISPOSITIONS DE BASE

3.37 Les diverses dispositions de base qui doivent normalement figurer dans un accord sur la mise à disposition et le fonctionnement d’une installation ou d’un service multinational sont les suivantes : objectif de l’accord ; obligations des États parties à l’accord ; définition et description de l’installation ou du service ; réalisation et exploitation de l’installation ou du service ; personnalité juridique ; responsabilité légale ; aspects relatifs à la gestion (organes de direction et modalités de décision, organisation, personnel et consultation) ; aspects financiers (détermination des coûts, partage des coûts, établissement du budget, compétence pour approuver le budget, contrôle financier) ; fiscalité ; procédures de règlement des différends ; adhésion aux accords, dénonciation, amendement et résiliation.

3.38 En ce qui concerne la disposition relative à la réalisation et à l’exploitation de l’installation ou du service, il convient d’ajouter que l’accord doit préciser la portée territoriale et qui réalisera et exploitera l’installation ou le service concerné : un seul État, deux États ou davantage, une organisation internationale existante, une agence nationale ou internationale existante, ou une nouvelle agence à créer expressément dans ce but. La décision de savoir qui fournira l’installation ou le service peut être influencée, en particulier, par l’importance des investissements et des coûts annuels à prévoir en conséquence du choix, ainsi que par la mesure dans laquelle les fournisseurs possibles (un ou des États participants, une organisation ou une agence internationale) sont déjà engagés dans les activités dont il s’agit.

VALEUR DES LIGNES DIRECTRICES

3.39 Il importe de préciser que les lignes directrices qui sont reproduites dans l’Appendice 2 sous le titre « Aspects financiers, de gestion et autres aspects contractuels » ne constituent pas un projet d’accord ni de clauses types, étant donné que les conditions propres à la planification, à la mise en œuvre et à l’exploitation des installations et services multinationaux peuvent varier considérablement. Cependant, on ajoutera que cette partie des lignes directrices a été minutieusement examinée par des juristes de l’OACI et d’ailleurs, qui ont tous conclu qu’il n’existe aucun obstacle juridique insurmontable à la mise en œuvre d’installations et services multinationaux de navigation aérienne correspondant à la définition énoncée dans les lignes directrices.