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A./ La détermination de la portée de la réforme du « silence vaut accord » 35 La réforme de 2013 inversant le sens du silence administratif a entraîné une refonte

du régime juridique des autorisations administratives. D’un simple point de vue comptable, les données chiffrées officielles révèlent que plus de 1500 procédures administratives relèvent désormais du principe du « silence vaut accord »136. Pourtant, le recensement, nécessaire, de l’ensemble des autorisations administratives existantes atteste du maintien d’un grand nombre de procédures pour lesquelles le silence vaut rejet.

36. Cette étude se propose tout d’abord de déterminer le champ d’application réel du nouveau principe du « silence vaut accord ». À cette fin, l’ensemble des procédures administratives doivent être compilées, recensées et analysées. Il s’agit d’identifier les procédures auxquelles le nouveau principe s’applique, celles auxquelles il est applicable, mais avec un délai dérogatoire, et celles exclues du domaine du « silence vaut accord ».

37. Le silence de l’administration a d’ores et déjà fait l’objet de plusieurs travaux universitaires, toutefois ces recherches ont été réalisées avant la réforme de 2013137. Si elles

136 Le chiffre correspond au recensement de l’ensemble des procédures administratives soumises au « silence vaut accord », accessible sur Légifrance. Selon le Gouvernement, 1200 procédures sur les 3600 existantes sont désormais soumises au nouveau principe : CONSEIL DES MINISTRES, 22 octobre 2014, op. cit. Sans réellement faire l’objet de débat, ces chiffres sont repris par le Parlement : SÉNAT, Rapport d’information du Sénat sur le bilan d’application de la loi du 12 novembre 2013 habilitant le Gouvernement à simplifier les relations entre l’administration et les citoyens, H. Portelli, J.-P. Sueur, 15 juil. 2015, p. 19 ; ASSEMBLÉE NATIONALE, Proposition de loi n° 3730 relative à l’effectivité et à l’efficacité du principe du « silence de l’administration vaut accord », présentée par L. Tardy et autres, 10 mai 2016.

137 La doctrine a d’abord envisagé la décision implicite de rejet en tant que mécanisme permettant d’obtenir la décision préalable nécessaire à l’exercice d’un recours devant le juge : J. LABAYLE, La décision préalable, condition de formation du contentieux administratif, éd. A. Rousseau, 1907 ; J. PARRICAL de CHAMMARD, Le recours contre le déni de l’administration. Étude de l’article 7 du décret du 2 novembre 1864 et de l’article 3 de la loi du 17 juillet 1900, op. cit. ; P. MINDU, La règle de la décision administrative préalable, op. cit. Certains travaux ont ensuite traité de façon indifférente la décision implicite de rejet et d’acceptation : J. LAVEISSIÈRE, Le silence de l’administration, op. cit. ; A BOUGASSAS, Le régime juridique de la décision administrative implicite en droit français (éléments de comparaison avec le droit algérien), op. cit. ; C. FAIVRE, La décision implicite de l’administration en droit public français, op. cit. ; S. ROUX, Le silence de l’administration : Décisions implicites de rejet ou d’acceptation, op. cit. À l’inverse, certaines études sont dédiées à la décision implicite d’acceptation : M. PAUTI, « Les décisions implicites d’acceptation et la jurisprudence

permettent donc de comprendre la technique fictive de la décision implicite ainsi que les enjeux du silence positif, elles ne peuvent servir de fondement au recensement des procédures proposé.

38. En revanche, la décision implicite d’acceptation a fait l’objet de trois études postérieures à la réforme du 12 novembre 2013.

La première a été adoptée, le 30 janvier 2014, par l’assemblée générale du Conseil d’État. Il s’agit d’un « vade-mecum juridique » au profit des administrations, réalisé à la demande du Premier ministre afin que « le Conseil d’État l’éclaire sur les critères et la délimitation du périmètre ainsi exclu du champ du nouveau principe du “silence valant accord” »138. Elle trahit le manque de préparation d’une réforme dont le Gouvernement souhaite connaître l’étendue, alors même qu’il en est, par le biais d’un amendement déposé un mois avant la sollicitation de l’étude139, l’instigateur. Le rapport du Conseil d’État comble l’absence d’étude d’impact sur cet amendement, la réalisation d’une telle étude ne s’imposant qu’aux projets de loi initiaux140. De manière plus fondamentale, l’étude apporte d’utiles précisions sur l’interprétation que pourrait faire la Haute juridiction administrative du périmètre de la réforme.

La deuxième étude est l’ouvrage de S. Roux consacré aux décisions implicites de rejet et d’acceptation publié en avril 2016141. L’objectif est de présenter, sous un angle pratique, les conséquences de la réforme du 12 novembre 2013. Les décisions implicites sont également recensées, sous l’angle de la saisine par voie électronique.

administrative », op. cit. ; P. BOUFFARD et J.-F. THÉRY, « Étude sur les autorisations tacites », op. cit. ; M. MONNIER, Les décisions implicites d’acceptation de l’administration, op. cit. ; P. CASSIA, « La décision implicite en droit administratif français », op. cit.

138 CE, « L’application du nouveau principe silence de l’administration vaut acceptation », op. cit., pp. 7 et 91. 139 Amendement n° 3 déposé par le Gouvernement le 13 juillet 2013 à l’occasion de l’examen du projet de loi habilitant le Gouvernement à simplifier les relations entre l’administration et les citoyens, présenté au Sénat le 13 juin 2013.

140 D’où la proposition de B.-L. Combrade d’actualiser l’étude d’impact après chaque lecture du projet de loi devant chacune des chambres, ce qui permettrait d’inclure dans l’étude d’impact les amendements adoptés : B.- L. COMBRADE, L’obligation d’étude d’impact des projets de loi, op. cit., pp. 365-366.

Enfin, la réforme a fait l’objet d’un rapport, commandé par le Premier ministre aux inspections générales des finances, de l’administration et des affaires sociales142. Réalisé en février 2017, le rapport n’a pas été officiellement publié143. Si l’analyse ne porte que sur les administrations de l’État, les rapporteurs ont toutefois procédé à l’examen des contours des différentes exceptions et des limites opérationnelles de la réforme de 2013. À ce titre, ils proposent un certain nombre de recommandations pour améliorer le mécanisme de la décision implicite d’acceptation.

39. Ces trois travaux constituent une base de travail indispensable pour identifier le champ d’application de la décision implicite d’acceptation et de ses exclusions. Toutefois, aucun ne permet d’évaluer avec précision le nombre de nouvelles procédures concernées par le principe ni l’impact de la réforme sur le processus d’instruction des demandes.

40. Une recherche sur la décision implicite d’acceptation ne saurait se limiter à l’étude des critères d’identification de cette demande, ni à vérifier la pertinence de la liste officielle des autorisations administratives. Il convient, au-delà, de déterminer la raison d’être de ce mécanisme rénové, reposant sur la négation de la volonté réelle de l’administration. Il a ainsi été fait le choix d’aborder la décision implicite d’acceptation pour ce qu’elle est : un mécanisme de traitement des demandes adressées à l’administration reposant sur la négation de sa volonté ; mais aussi pour ce qu’elle incarne : une relation de l’administré à l’administration repensée par la réduction du temps administratif.

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