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118. Le champ d’application organique de la décision implicite d’acceptation est fondé sur

la relation qu’entretiennent l’administration et l’administré. Même si ces deux protagonistes sont définis à l’article L. 100-3 du code des relations entre le public et l’administration, la disposition demeure bien trop générale pour réellement permettre d’identifier les contours du champ d’application organique de la décision.

119. Il s’est donc agi d’identifier, à partir de l’article L. 100-3 du Code, les entités incluses

dans la notion d’Administration et les personnes physiques et morales susceptibles de s’incarner dans la figure du demandeur. L’énumération organique des entités, à laquelle procède l’article L. 100-3, a dû être dépassée par l’étude de leur fonction. En effet, seuls les organes qui réalisent la fonction administrative sont soumis au nouveau principe du « silence vaut accord ». Un tel critère conduit à l’exclusion de toute demande adressée à un organisme n’assumant pas une mission de service public administratif. Il permet, en revanche, d’inclure dans la notion d’Administration les demandes adressées à des administrations juridictionnelles, ce que n’aurait pas autorisé une approche exclusivement organique.

Si elle bénéficie d’une acceptation plus large, la notion de demandeur connait également certaines limites. Pensé comme un instrument de rééquilibrage de la relation de l’administré à l’administration, le principe du silence positif est inapplicable aux demandes formées par des administrations. Ici encore, une approche fonctionnelle de l’administration aboutit à l’exclusion des personnes privées dans l’exercice de leurs missions administratives. En outre, les demandes des agents de l’administration ne peuvent donner lieu à une décision implicite d’acceptation. Cette restriction, interprétée extensivement, aboutit dans les faits à retrancher du champ d’application du silence positif une quantité importante de demandes.

Il ressort de cet examen que les définitions de l’Administration et de l’administré livrées par le Code créent plus de difficultés que de solutions et complexifient indéniablement la lecture du champ d’application organique de la réforme de 2013.

CHAPITRE 2 LE CHAMP D’APPLICATION MATÉRIEL

120. Le principe selon lequel le « silence de l’administration vaut accord » est un principe

« fermé »356. La décision implicite d’acceptation ne naît qu’à la condition que la demande présente certaines caractéristiques : il s’agit du champ d’application matériel du principe.

Pourtant, à la lecture du Code, ce champ d’application ne se dessine que par contraste : aucune disposition n’est consacrée à sa délimitation directe. En revanche, l’article L. 231-4 du code des relations entre le public et l’administration énumère cinq hypothèses pour lesquelles le silence gardé de l’administration vaut rejet357. Certaines exclusions portent sur l’objet de la demande, d’autres sur ses attributs, certaines résultent enfin de l’incompatibilité d’une potentielle décision implicite d’acceptation avec des principes supérieurs. Une définition positive du champ d’application matériel de la décision implicite d’acceptation peut être élaborée à partir de ces exceptions. En effet, les exceptions aux exceptions de l’article L. 231- 4 du Code constituent les situations dans lesquelles le principe du « silence vaut accord » s’applique358.

121. Bien qu’indispensable, une telle démarche témoigne des limites de la réforme de

2013 : l’application du principe récemment consacré ne peut être appréhendée qu’au moyen de l’étude des situations pour lesquelles le principe est justement inapplicable. Le paradoxe de la réforme s’illustre ici. La consécration de la règle du « silence vaut accord » constitue une révolution symbolique d’ampleur. Pourtant, dès la première étape de sa mise en œuvre, au stade de la délimitation de son application, le nouveau principe n’est jamais conçu sans référence à l’ancienne règle du « silence vaut rejet ».

356 La formule fait écho à l’article de S. BRACONNIER, P. CASSIA, P. GONOD, J. PETIT, B. PLESSIX et B. SEILLER, « Le silence de l’Administration vaudra acceptation. Big bang ou trou noir juridique ? », JCP G, n° 51, 2013, 1324 : « Il crée enfin un inquiétant oxymoron juridique : poser une règle comme un principe et entendre en préciser strictement le champ d’application contrevient à un axiome fondamental de la logique juridique. Un principe est une norme “ouverte”, destinée à régir tous les cas, imaginables ou non, ne rentrant pas dans les éventuelles exceptions aménagées ».

357 Disposition codifiée de l’article 21-I al. 3, points 1, 2, 3 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000, dans sa version résultant de la loi n° 2013-1005 du 12 novembre 2013.

Dans cette entreprise de délimitation, le recensement des procédures, réalisé par le Gouvernement, est d’un secours limité. Aucune liste des exceptions législatives n’a été publiée et seule la liste des procédures pour lesquelles le « silence vaut accord » a fait l’objet d’une communication gouvernementale. Il s’agit donc de procéder, à l’aide des documents ministériels internes359 et des listes Légifrance, à un nouvel inventaire des procédures concernées.

122. Le champ d’application matériel de la décision implicite d’acceptation a ainsi été

défini. Pour que le silence de l’administration vaille accord, la demande de l’administré doit être fondée juridiquement (Section 1.). Elle doit, en outre, donner lieu à une décision administrative individuelle ne présentant ni le caractère d’une réclamation ni un caractère financier (Section 2.).

359 Ces documents de travail recensent l’ensemble des procédures existantes, dont les exceptions législatives. Ils ont ensuite donné lieu, dans une version amputée des exceptions législatives, aux listes officielles Légifrance. Certains de ces documents ont été communiqués par le secrétariat général du Gouvernement.

Section 1. Une demande juridiquement fondée

123. La décision implicite d’acceptation ne peut naître que si la demande a pour finalité de

déclencher une prise de décision de la part de l’administration (§ 1). Si cette condition n’est pas remplie, le silence de l’administration ne peut aboutir à la formation d’aucune décision implicite. La demande formulée doit ensuite s’insérer dans une « procédure prévue par un texte législatif ou réglementaire »360. Dans le cas contraire, l’exception législative s’applique en donnant naissance à une décision implicite de rejet (§ 2).

§ 1. Une demande d’adoption d’une décision par l’administration

124. En formulant sa demande, l’administré souhaite une prise de décision de la part de

l’administration (A./). L’absence de demande de prise de décision ne permet d’attribuer aucune signification juridique au silence de l’administration (B./).

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