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Chapitre 4 : La place du territoire en économie : vers une économie de la proximité

2. De l’économie territoriale à l’économie de la proximité

2.3. Vers une démarche proximiste

Tandis que dans les années 1990 l’élargissement du marché commun européen déplace les problématiques de développement soit à l’échelon supranational soit à des niveaux localisés et amène de nouvelles questions sur les dynamiques régionales, la science régionale traverse une

218 Sur laquelle elle coécrit un article avec son mari Vincent Ostrom, ainsi qu’avec Charles M. Tiebout et Robert Warren. Cet

article est appelé “The Organization of Government in Metropolitan Areas : A Theoretical Inquiry”, publié en 1961 dans le

American Political Science Review, vol. 55, n°04, pp.831-842.

219 Traduit de l’anglais “role of institutions in promoting growth in developing and emerging economies has sparked renewed

interest in recent years”. Source: The East Asian Miracle: Economic Growth and Public Policy, émis par la Banque Mondiale en 1993. Cette dynamique a également été confirmé par le rapport The State in a Changing World, publié en 1997 et édité par Oxford University Press, New York.

220 En anglais dans le texte “More Instruments and Broader Goals: Moving towards the Post–Washington Consensus”

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crise d’identité. Elle « ne répond plus aux attentes d’une société ouverte au libéralisme, ce qui entraîne, dans un contexte de vive concurrence académique, la mise en cause et la fermeture de départements » (Bailly, 2009, p.4), dont celui, historique, de l’Université de Pennsylvanie, le 30 juin 1994. La même année, le numéro spécial de la revue Papers in Regional Science221 évoque cette crise. Les contributeurs à ce numéro défendent tantôt une démarche abstraite ou tantôt une « attention plus grande apportée aux problèmes concrets et aux politiques régionales » (Bailly, Derycke et Torre, 2012, p.6). Il s’agit d’une remise en cause épistémologique. De nombreux auteurs y soulignent la nécessité de s’orienter vers une approche plus pragmatique et entendent « réintroduire l’Humain », comme le proposait Torsten Hägerstrand, au centre d’une science régionale jugée trop « désincarnée » (Ibid.).Les enjeux de ce renouvellement ne sont pas seulement d’expliquer plus finement la réalité, mais de donner les moyens aux acteurs d’imposer une pluralité de perspectives face au rouleau compresseur de l’économie néolibérale. Il s’agit également de répondre aux enjeux politiques des analyses économiques en permettant leur appropriation par les acteurs de l’économie. Des passerelles se créent entre l’économie industrielle et l’économie spatiale autour des thèmes suivants : « organisation de la firme, réseaux de production ou d’innovation, externalités technologiques et économies de la proximité, concurrence des firmes et concurrence des territoires » (Rallet, Torre, 1995, p.3). Un des présupposés est que les « effets externes technologiques [circulent] par l’intermédiaire de relations hors marché » et « dans le cadre d’échanges formels et informels, d’essais et d’erreurs, de rétroactions » (Lecoq in Ibid., p.9). Ces échanges sont nécessairement basés sur des formes de proximités construites, diverses et évolutives, qui agissent comme des passerelles entre les acteurs et ont des effets rétroactifs les unes sur les autres. L’intérêt que la proximité soulève dépasse la simple question de l’organisation de la firme et la prise en compte de l’échelle locale ; ce n’est pas seulement une branche analysant un aspect spécifique de l’économie, mais une nouvelle focale pour concevoir celle-ci à plusieurs échelles. La configuration des relations de proximité devient une préoccupation croissante aussi bien dans le domaine de l’économie lucrative que de l’économie publique. Dans ce contexte, les structures de l’ESS, et en particulier celles de la nouvelle économie sociale (NES), ont une expertise toute particulière, car elles se développent par le bas et sont très intégrées au niveau territorial.

En effet, dans le contexte d’une situation économique de plus en plus complexe (mondialisation, intégration européenne, rôle des NTIC) et difficile (chômage, croissance

221 Notamment l’article «Regional Science in Crisis: A Plea for a more Open and Relevant approach» écrit par Bailly et

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ralentie) depuis les années 1970, les structures de la NES jouent un rôle important pour que les individus trouvent leur place dans leur environnement économique et se réapproprient leur espace de vie. Elles s’inscrivent également dans la gouvernance locale pour intégrer des logiques économiques plurielles au sein des institutions. Pour reprendre l’analyse de Gilly et Torre ; « l’action collective, localisée ou non, se trouve enchâssée dans des structures économiques et des institutions sociales, historiquement construites » par les acteurs qui peuvent également collectivement les transformer. Ces structures peuvent être publiques, privées, mais également appartenant à l’ESS. Les acteurs du tiers secteur « jouent [alors] un rôle de médiation-hybridation entre local et global et participent ainsi au processus d’articulation entre proximité géographique et proximité organisationnelle » (2000, p.23). L’ESS peut être à la fois considérée comme une émanation des intérêts de la société civile et comme une manifestation de la volonté de maitriser collectivement l’économie. Dans ce sens, son hétérogénéité est le témoin de la diversité des acteurs, de leurs intérêts et des cadres institutionnels dans lesquels ils s’inscrivent.

L’économie de la proximité, qui nait de ces dynamiques, est « au carrefour de l’économie spatiale et de l’économie industrielle » (Pecqueur, Zimmermann, 2004, p.15). Elle permet de suivre la démarche d’holisme faible adoptée dans cette thèse puisqu’elle permet d’étudier le rôle des institutions, mais aussi d’identifier les relations entre les structures et le rôle des individus. En effet, « l’approche d’agents situés que propose la théorie de la proximité maintient un point de départ résolument individualiste et microéconomique » donc, « l’émergence d’un ordre collectif doit être comprise comme […] le résultat des stratégies individuelles d’acteurs » (Pecqueur, Zimmermann in Parodi, 2005, p.27). Néanmoins, il est important de préciser que les acteurs étudiés dans ce travail sont principalement considérés pour le rôle qu’ils occupent au sein des organisations auxquelles ils appartiennent ; leurs actions sont l’aboutissement de négociations, de compromis et d’ajustements, certes réévalués de manière régulière, mais ayant déjà abouti à la constitution d’un ordre permettant à leur structure de fonctionner. Dans ce sens, l’opposition classique entre microéconomie et macroéconomie est mise de côté au profit d’une échelle méso-économique222 intermédiaire exprimée par le concept d’encastrement, aussi appelé embeddedness, des relations sociales dans des institutions s’appliquant à une plus vaste échelle (Granovetter, 1985).

Cette branche disciplinaire restitue les acteurs dans l’espace et le temps et permet de sortir les réflexions sur les processus de production de la simple problématique d’allocation de

222 À ce sujet, Ndiaye affirme que cette échelle se situe « au carrefour de la théorie régulationniste et de l’économie des

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ressources génériques. Elle émerge vraiment à partir de 1993 avec la publication d’un numéro spécial de la Revue d’Economie Régionale et Urbaine (RERU) intitulé « Économie de proximités »223. Ce numéro entérine la création d’un groupe de recherche « Dynamiques de proximité » dont le « postulat de base […] est de dissocier clairement la proximité dans l’espace physique (à l’échelle des activités humaines) d’autres formes de proximité, constituées par l’activité socio-économique, et a priori distinctes de la proximité physique »

(Bouba-Olga, Grossetti, 2008, p.311). Il s’agit davantage d’une démarche analytique que

d’une théorie. Elle s’inscrit dans la lignée des travaux du GREMI développant et nourrissant à l’époque le concept de Milieux Innovateurs (Aydalot et Maillat in Bouba-Olga, Coris, Carrincazeaux, 2008, p.2) et s’attache à rendre compte des différentes dynamiques en œuvre dans les processus de coordination locaux entre acteurs. L’intérêt n’est pas seulement porté aux critères de performance classiques, mais à tout le processus de construction et de gouvernance du tissu productif, à l’« économie politique » et « à l’enracinement spatial des phénomènes économiques » (Torre, Rallet, 1995, p.5). Les aspects sociaux et les institutions sont particulièrement pris en compte et encadrent la proximité organisée, alors que jusque-là ces problématiques restaient relativement éclatées entre les différents courants disciplinaires, tandis que l’économie géographique de Krugman, qui dominait alors la recherche territoriale, se contentait d’une analyse marshallienne de l’atmosphère industrielle (Benko, Lipietz, 2000). Les thématiques de l’économie de la proximité renouvellent l’étude territoriale en suivant les transformations socio-économiques. Bouba-Olga, Coris et Carrincazeaux, font un bilan des centres d’intérêts les plus actuels224. Le sujet des NTIC et de l’innovation territoriale sont au cœur des préoccupations (2008, p.4). Depuis la deuxième partie des années 1990, celles-ci ont largement transformé l’organisation des réseaux de proximité et le fonctionnement des organisations en abolissant certaines contraintes de distance par l’apparition d’outils en ligne. En effet, la dématérialisation de certains moyens de production, la mobilité et le renouvellement des activités permettent aux acteurs de l’économie lucrative, mais également de l’ESS de renouveler leur action. Les problématiques sociales et environnementales sont dès le départ très relayées via les nouveaux outils de communication, ce qui permet à l’action locale de mieux se situer dans l’économie globale. C’est particulièrement important dans le cadre d’une ouverture du dialogue « entre l’économie de la proximité et l’économie internationale » (Ibid.). Les espaces de proximité ne sont plus seulement des ressources pour l’économie lucrative, elles permettent également de mettre en lumière, dans le cadre de

223 RERU, n°3, « aménagement du territoire et environnement », présenté par C. Lacour et S. Puissant, paru en 1993. 224 Sans toutefois prétendre être exhaustifs.

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mouvements militants construits par le bas, les externalités négatives de l’économie néolibérale et constituent de nouvelles arènes pour l’affrontement idéologique entre économie orthodoxe et initiatives subversives. Les questions de l’environnement et du développement durable sont particulièrement centrales dans cette configuration, et la focale est mise sur les espaces urbains et périurbains (Ibid. p.5).

L’économie de la proximité n’est cependant pas un champ théorique parfaitement uni ; il existe deux courants au sein de la discipline. D’une part, un courant interactionniste, auquel on peut rattacher des auteurs qui se sont intéressés à la proximité en faisant souvent le lien avec la sociologie comme Olivier Bouba-Olga, Michel Grossetti ou Alain Degenne. D’autre part, un courant institutionnaliste, auquel on peut rattacher des auteurs comme Damien Talbot, Vincent Descombes ou Bernard Pecqueur.

Le premier courant « n’aborde pas explicitement la dimension institutionnelle de la proximité » (Talbot, Kirat, 2005, p.10) et n’aborde la proximité que selon deux approches : d’une part, la proximité géographique et, d’autre part, la proximité organisée, construite par les acteurs, que l’on peut également qualifier de relationnelle. En effet, pour l’approche interactionniste il « n’existerait qu’une forme de proximité relationnelle, la proximité organisée désignant « la capacité qu’offre une organisation de faire interagir ses membres » (Rallet et Torre, 2005 in Bouba-Olga, Coris, Carrincazeaux, 2008, p.5 ». Enfin, au sein de la proximité organisée, elle ne met pas la focale sur les effets auto-renforçant des institutions ainsi que sur leurs effets rétroactifs sur les autres formes de proximités. Ces particularités ont mené à écarter ce courant et à plutôt s’orienter vers le courant institutionnaliste, puisque la centralité des valeurs et des normes semble vitale dans l’étude de la capacité de subversion des organisations alternatives et celle de la résilience du modèle dominant.

Le second courant, institutionnaliste, « décline [quant à lui] la proximité relationnelle selon deux dimensions, institutionnelle et organisationnelle »225 (Ibid.) Pour reprendre les mots de Torre, aucune forme de proximité ne précède l’autre ; « l’espace ne constitue que l’une des deux variables fondatrices, [et] n’est pas antérieur ou primordial aux relations économiques et sociales » (Torre, 2009, p.64). Ce courant donne une place importante à la proximité géographique, qu’il considère comme construite. Il ne la limite pas à un ensemble de caractéristiques topographiques prédéterminées et aléatoirement distribuées. Au contraire, la proximité géographique est fortement influencée par l’activité humaine qui modèle les paysages et transforme les notions de distance par la création et l’organisation de canaux de

225 Bien que les travaux de Perroux (1950) distinguent au sein de ces trois principes « une proximité physique et une

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circulation. Elle est la conséquence de la manière dont les acteurs perçoivent l’espace dans lequel ils vivent (distances physiques et symboliques vues via le prisme des institutions) et les différentes activités qu’ils mènent et qui transforment les ressources naturelles et le paysage. La proximité institutionnelle est, quant à elle, l’expression de « singularités (individuelles, structurelles…) qui sont à l’origine de l’émergence de sens au plan collectif » (Pecqueur, Zimmermann, 2004, p. 20). Elle est définie par Kirat et Lung comme « l’adhésion d’agents à un même espace commun de représentations, de règles d’actions et de modèles de pensée » (in Bouba-Olga, Coris et Carrincazeaux 2008, p.5). L’étude de la proximité permet d’extrapoler des dynamiques agrégées226 qui donnent une identité particulière à un territoire. Dans le cas des structures étudiées ici, il est cependant nécessaire de rentrer dans une analyse très fine des institutions. Pour ne pas laisser de côté certaines logiques, il faut adopter une grille de lecture non seulement des motivations économiques reconnues par le système dominant, et qui ont été abordées plus tôt dans la partie décrivant les logiques néolibérales, mais la totalité des logiques qui peuvent justifier l’action. C’est de cette seule manière qu’il est possible de saisir la pluralité des initiatives au sein de l’ESS et d’évaluer leur capacité à proposer des institutions alternatives au système qu’elles souhaitent réformer ou même parfois abolir.

L’élaboration d’une grille de lecture permettant de donner du sens aux différentes institutions et de qualifier leur degré d’isomorphisme ou d’hétéromorphisme avec le système dominant a donc été nécessaire. Pour ce faire, la position adoptée dans ce travail de recherche est de rattacher l’étude de la proximité institutionnelle à des éléments théoriques développés par l’économie des conventions, comme les registres de justifications, qui peuvent expliquer les choix effectués au sein de certaines structures ou certaines formes d’investissements les engageant sur des sentiers de dépendance à certains modes de coordination. La proximité organisationnelle est, quant à elle, le résultat de mode de coordination, un « espace de définition des pratiques et des stratégies des agents à l’intérieur d’un ensemble de règles porté par les institutions » (Ibid.).

En résumé, la présentation historique de l’évolution de l’analyse territoriale a permis de montrer comment celle-ci a suivi les mêmes bouleversements sociaux qui ont affecté l’ESS. Durant la première phase de développement du capitalisme, les dynamiques territoriales ont été ignorées par les courants classiques et néoclassiques de l’économie, centrés sur des

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modélisations abstraites basées sur l’équilibre marchand. Mais dès la première partie du XXe siècle, elles bénéficient d’un regain d’intérêt, ce qui peut s’expliquer par le développement de systèmes industriels et urbains de plus en plus complexes et gigantesques. Dans ce second âge du capitalisme, « la foi [est] mise dans la rationalité et la planification à long terme » (Boltanski et Chiapello 1999, p.56), ce qui maintient l’analyse des tissus productifs assujettie à des logiques de productivité et de profitabilité et n’inclue que peu des facteurs « humains ». Cependant, les précurseurs de l’analyse spatiale vont influencer le monde de la recherche jusqu’à la consolidation de l’économie géographique puis de l’économie régionale en tant que disciplines faisant partie des sciences économiques. À partir des années 1970, la rupture du consensus économique, les diverses crises et le durcissement du libéralisme vont provoquer l’émergence de nouveaux questionnements et une critique de l’orthodoxie, ce qui fait écho aux changements qui ont lieu au sein de l’ESS à la même époque. L’économie géographique rompt progressivement avec l’idée que l’espace n’est qu’un facteur parmi d’autres dans la localisation des activités et introduit des méthodes de recherche et d’analyse hétérodoxes. L’accent est notamment mis sur l’étude empirique et l’opposition aux logiques constituant alors l’orthodoxie économique ; la réduction des individus à une rationalité utilitariste, la déconsidération de certains cadres institutionnels régulateurs et la célébration de toute forme de libéralisation. Elle connaîtra cependant une crise durant les années 1990, qui aboutira finalement à son renouveau, avec l’émergence d’outils pluridisciplinaires, de nouveaux sujets d’étude et le renforcement de courants centrés sur le local et l’étude de la proximité. À la même époque, l’ESS initie des modes organisationnels précurseurs basés sur le local, comme les circuits courts en agriculture, les SEL, les jardins collectifs, la finance éthique, etc. qui se développent alors que la globalisation s’accélère.

En tant que courant de l’économie régionale, l’économie de la proximité s’attache tout particulièrement à exprimer cette tension entre le local et l’économie mondialisée. Elle met la focale sur les interactions et les formes de proximités organisées entre acteurs, dévoilant ainsi les mécanismes de construction spatiale au-delà de la simple composante physique. Puisqu’elle s’intéresse à des facteurs sociologiques ou politiques, l’histoire, les institutions et les usages sociaux deviennent des variables clés de l’investigation économique. C’est cette possibilité d’analyser les logiques économiques alternatives qui a motivé le choix d’en faire le cadre théorique principal de cette thèse. Comme le courant institutionnaliste de l’économie de la proximité s’intéresse surtout à l’articulation entre les facteurs géographiques et la place des valeurs et des normes dans la construction d’environnements productifs et de projets, il peut s’adapter à l’étude des objets hétérodoxes sélectionnés. En effet, il permet d’aller encore plus

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loin dans l’analyse fine de la proximité institutionnelle en empruntant des concepts à d’autres disciplines, comme l’économie des conventions.

Cependant, malgré les possibilités qu’offrent ses outils théoriques, ce courant économique s’intéresse encore assez peu aux structures de l’ESS. Pour mériter d’être inclues dans ses analyses, celles-ci semblent devoir apporter leur soutien aux tissus économiques classiques ou se comparer à eux, ce qui correspond à la dynamique des PTCE, véritables SPL sociaux et solidaires. Le chapitre suivant présente la place que le tiers secteur occupe traditionnellement au sein des multiples objets étudiés par l’économie géographique et, plus spécifiquement, l’économie de la proximité. Il permet notamment de montrer quelles organisations de l’ESS commencent à attirer l’attention de ce courant d’analyse économique et quelles organisations en sont exclues. Il présente également les raisons de ce vide dans la recherche qui concerne principalement les réseaux les plus alternatifs de l’ESS.

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Chapitre 5 : Objets d’étude de la proximité – vers une économie plurielle

Les outils analytiques de l’économie de la proximité sont utilisés pour étudier la territorialisation des systèmes productifs. Héritiers de la notion de districts industriels développée par Marshall, ces systèmes connaissent aujourd’hui diverses déclinaisons : SPL, pôles de compétitivité, milieux innovateurs, technopôles, etc. Ils expriment à la fois l’ambition de certains acteurs de « structurer la société locale » en profitant des externalités positives créées par des phénomènes d’agglomération créés par les villes (Lapèze, 2007, p.13) et une « extension souvent planétaire, de grandes organisations nées de la production de masse » (Guillaume, 2008, p.306). Ce chapitre permet de survoler les significations précises et les contextes de développement de ces différents tissus productifs qui ont posé les standards de l’analyse territoriale. Ceux-ci suscitent aujourd’hui un grand intérêt pour leur capacité à attirer les investissements infrastructurels, à contribuer à la diffusion de progrès technologiques, à augmenter la compétitivité, à créer des bassins d’emplois, etc. Ils représentent un espoir de développement endogène et de résilience face aux difficultés économiques et, de ce fait, ils soulèvent des problématiques relevant de la décision politique et de la gouvernance. Cela attire clairement l’attention des pouvoirs publics à l’échelle locale, nationale et même supranationale227 et certains acteurs de la société civile voient un intérêt à créer des partenariats avec les différents types de SPL. Cependant, pour les organisations alternatives, les objectifs non-économiques ou relevant de logiques de solidarité et de réciprocité peuvent rentrer en contradiction avec les objectifs classiques de profitabilité, de croissance et de création d’emplois qui prévalent pour les acteurs lucratifs. Or, les secteurs publics et lucratifs ont un poids prépondérant dans la gouvernance de la plus grande partie des

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