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Définition des concepts : Différence et similitude

1- Définition des concepts

1.4 Définition des concepts : Différence et similitude

1.4.1 Considérations générales sur les différences

La différence n'est souvent pas pensée en tant que concept plutôt que comme une évidence chez de nombreuses personnes et parmi elles de nombreux scientifiques comme par exemple Geary : « There is no longer any question whether men and women differ in patterns of cognitive abilities or in aspects of brain organization; today scientists are focused on the origin, magnitude, and practical importance of these differences. » (Geary, 2010 : 345). D'ailleurs l'entièreté de l'ouvrage de Geary s'efforce de faire le point sur toutes les différences possibles entre les êtres humains, du moins en ce qui concerne la biologie et la psychologie, faisant ensuite des liens avec les comportements qui selon lui en découlent.

De façon plus générale, ce qui est blanc n'est pas noir et inversement, chacun peut percevoir les différences, mais toutes n'ont pas le même intérêt. La différence en tant que concept n'offre même pas un intérêt pour les auteurs qui ont dirigé le

Dictionnaire de l'ethnologie et de l'anthropologie (Bonte et al., 2004). Il n'y a aucune

entrée pour le concept de différence et ce qu'il représente.

Bien sûr l'idée de différence peut s'appliquer à tout ce qui nous entoure dans la vie quotidienne et qui a tout de même des points en commun, comme, par exemple : les légumes qui sont différents des fruits, l'hiver qui est différent de l'été, le cinéma qui est différent des livres. On peut aussi dire que l'hiver est différent du cinéma, mais, malgré que ceci soit vrai, cette comparaison est somme toute inutile parce qu'évidente et qu'il n'existe entre eux pas de points communs. Donc toutes les différences ne soulèvent pas les passions et ne sont pas remises en question.

Cependant, il est intéressant de se demander si toutes les catégories qui sont si courantes à nos yeux ne sont pas objet d'interprétation, d'ajustement ou de controverse. Par exemple dans notre contrée nordique, nous avons une idée claire de ce sont l'été et l'hiver. L'été est la saison chaude. Les plantes poussent et les êtres humains cherchent de l'ombre ou un endroit pour se baigner lorsqu'ils ne sont pas au travail. L'hiver est la saison froide. Les plantes sont au repos, la neige couvre le sol et les gens s'emmitouflent chaudement pour se prémunir du froid. La différence est flagrante et il serait surprenant que quelqu'un remette en question la

différence entre les deux saisons. Cependant, en Australie, l'hiver est la saison chaude et l'été la saison froide et dans certains autres pays il n'y a pas quatre saisons et on sépare l'année en saison sèche et mousson ou encore d'autres divisions en fonction de la réalité locale. Ainsi, le calendrier républicain, imposé en France en 1792 (Référence), qui comportait par exemple les mois de Pluviôse (période des pluies) et Fructidor (période des fruits) (Référence), n'aurait pu être imposé universellement, puisqu'il n'était représentatif que d'une réalité locale, et ce même si la Révolution française avait des prétentions à l'universalité.

D'autres catégories ne sont pas reliées à des réalités locales et peuvent tout de même porter à confusion ou à interprétation.

Par exemple les tomates sont-elles des fruits ou des légumes ? En fait, elles sont les deux, le tout dépendant du point de vue où l'on se place. D'un point de vue botanique ce sont des fruits, d'un point de vue culinaire, ce sont des légumes. (Référence)

Les différences semblent donc être assujetties aux catégories auxquelles elles font références, et surtout aux notions qui les définissent, afin de classer, d'opposer ou de séparer.

1.4.2 Considérations générales sur les similitudes

Il est très difficile d'aborder la notion de similitude parce qu'elle disparaît bien souvent sous le sceau de la normalité. Il est, en effet, possible de se demander quel est l'intérêt de se pencher sur le semblable, puisque théoriquement, chacun des semblables est interchangeable puisqu'ils possèdent tous les mêmes qualités qui en font des semblables.

En réalité ce n'est pas sur le semblable qu'il faut se pencher, mais plutôt bien sur la notion de similitude, car ce qui identifie les semblables, ce sont leurs similitudes alors que ce qui sépare les différents sont justement leurs différences.

Il convient donc de différencier, différence de similitudes afin de pouvoir classer les uns comme semblables, les autres comme différents.

Si la chose est simplement exprimée, elle est beaucoup plus difficilement appliquée, comme l'exemple des tomates présenté au point précédent qui montre que selon certains critères, on peut être classé comme semblable et selon d'autres critères on peut être classé comme différent. Le tout est alors de savoir, sur quoi on se base pour établir les critères et la justification du choix de critères, et parfois, les

buts poursuivis quand on invoque cette justification, car ils peuvent parfois, sous le sceau de l'évidence, être en réalité des préjugés inavoués.

C'est cette possibilité qui donne toute sa complexité à la notion de similitude tout comme à celle de différence. On en vient en effet à pouvoir considérer que le semblable peut en réalité être un différent et vice versa, selon les critères retenus pour l'analyse.

1.4.3 Les catégories

Quels que soient les cultures ou les groupes humains, on classifie ce qui existe dans notre environnement.

« La tendance actuelle des études sur le comportement des organismes vivants est de considérer que classer les éléments de l'environnement est un aspect fondamental de leurs qualités adaptatives. L'homme le fait de manière spécifique dans le cadre de pratiques techniques et symboliques, d'une part par une mise en ordre de l'ensemble des objets de l'environnement et l'attribution de termes d'appellation. D'autre part par une catégorisation d'éléments appartenant à des domaines différents, en établissant entre eux des corrélations de type analogique, symbolique et métaphorique. » (Friedberg dans Bonte et al., op. cit. : 153)

Il semble donc naturel à l'être humain d'établir des catégories qui différencient les éléments présents dans l'environnement. D'après Friedberg c'est une opération de « mise en ordre » et « d'appellation » suivie d'une opération de « catégorisation ». L'étape de catégorisation étant celle qui fait intervenir divers éléments d'ordre intellectuel et/ou culturel.

L'auteure fait plus loin la distinction entre la classification effectuée par les scientifiques et la classification effectuée par les non-scientifiques. Elle en dit :

« La différence fondamentale entre les classifications populaires et la classification scientifique est que cette dernière correspond à une volonté délibérée d'instituer un ordre, alors que les premières sont le reflet d'opérations rarement explicitées et qui sont exécutées au fur et à mesure des besoins. » (Ibid. : 154)

Il s'agit bien sûr là d'une comparaison qui ne diminue en rien le fait que les êtres humains cherchent à faire des catégories en dépit du fait que celles-ci soient parfois plus ou moins obscures pour ceux qui les étudient et qui ont établi une logique en fonction de laquelle ils cherchent à les comprendre ou les interpréter. Cette logique même étant parfois l'obstacle pouvant mener à la compréhension de la catégorie dans le contexte où elle est présente.

C'est donc par le biais de la création de catégorie que l'être humain se place en juge afin de discriminer ce qui fait partie de la catégorie de ce qui n'en fait pas partie, et ce, sur la base de critères qui peuvent lui paraître évidents, mais qui peuvent laisser déconcerté quelqu'un ne partageant pas les mêmes connaissances empiriques de la vie.

C'est à propos de cette compréhension de la nature des catégories d'autres cultures par les professionnels de l'étude de l'Autre que Friedberg dit : « […] l'ethnologue ne dispose souvent, pour […] saisir [le phénomène classificatoire] que du seul système d'appellation. » (Ibid.). La logique des Uns n'étant pas toujours la logique des Autres, certaines catégories chez les premiers peuvent ne pas être des catégories chez les seconds ou les catégories étroitement séparées chez les premiers peuvent se trouver tout à fait éclatées dans le système de classification des seconds ou même se trouver mêlées à d'autres catégories qui rendent la compréhension difficile pour qui n'est pas connaissant de ce système.

Conclusion :

Même s'il est possible de différencier et d'opposer comme différent à peu près tout ce qui nous entoure, il semblerait que la différence à laquelle on accorde de l'importance est celle qui peut être remise en question, celle-ci menant à un questionnement sur la légitimité des catégories en cause.

Dans un tel contexte, il semble alors très difficile d'établir une frontière solide entre similitude et différence. On pourrait même en arriver à penser que similitudes et différences sont une seule et même chose.

2- Cadre théorique