• Aucun résultat trouvé

3.1. Partage de connaissances : Conceptualisation et domaines d’application

3.1.1. Définition des concepts

Dans l’objectif de cerner le concept de partage des connaissances, nous remarquons que

trois expressions prédominent et peuvent être utilisées de manière interchangeable. Dans la

littérature les locutions : « transfert de connaissances », « échange des connaissances »,

« diffusion des connaissances » et « partage de connaissances » font référence à la même

notion. Toutefois, malgré leurs points communs, ces expressions peuvent dégager des

divergences selon les perspectives et les objectifs étudiés. Ces divergences peuvent concerner

aussi leurs domaines d’application.

D’une manière générale, la notion de partage des connaissances peut être appréhendée grâce à

deux volets qui sont en interaction. Si le premier volet fait référence à la mise au point des

100

connaissances, le deuxième volet renvoie à la circulation de ces connaissances entre les

différents acteurs impliqués.

3.1.1.1. Transfert des connaissances

En partant de son origine étymologique, le substantif « transfert » est tiré du verbe

« transférer » lequel est composé du préfixe « trans », mot latin signifiant « de l’autre côté ou

au-delà », et du radical « ferre », verbe latin voulant dire « porter ». Ainsi, « tarnsférer »

signifie « porter de l’autre côté » ou « porter au-delà ». Il peut concerner les connaissances,

les personnes, les biens, etc. En sciences juridiques, la notion de transfert se réfère à la

transmission d’un bien ou d’un droit entre les personnes. Du point de vue économique, elle

renvoie plutôt aux déplacements des ressources quelles soient de nature financières, humaines

ou matérielles d’un secteur à un autre. En sciences de gestion, le transfert est le « mécanisme

par lequel des connaissances construites pouvant conduire à l’adoption de nouveaux

comportements individuels et organisationnels » (Roy et al., 1995). Il s’agit donc d’un

processus par lequel des connaissances mises au point sont transmises aux utilisateurs. Le

transfert peut se référer aussi aux produits et implique leur transformation. De façon générale,

il consiste à une traduction des savoirs en un langage accessible et en outils utilisables dans

des situations réelles. Au niveau de l’entreprise, le transfert des connaissances permet

d’éclairer la prise de décision, de mettre en place des nouvelles politiques de travail, de

changer des comportements individuels ou organisationnels, résoudre des situations

problématiques, etc. (Amara et al., 2004). Cela est possible par exemple lorsqu’un travailleur

prend part à un programme de formation et « réussit à appliquer dans son travail les

connaissances et les compétences qu’il a acquises » (Taylor, 1997). Ainsi, Baldwin et Ford

(1988) définissent le transfert comme étant « la généralisation à la situation du travail de

connaissances, compétences et attitudes acquises durant une formation ».

Malgré son caractère formel, le transfert puisqu’il concerne le stock des savoirs,

connaissances et compétences résultant des pratiques et des interactions au sein de

l’organisation, peut également s’opérer sur une base informelle grâce aux réseaux sociaux de

travail (Argote et Ingram, 2000 ; Lahti et al., 2002). Dans cette acception, l’espace du travail,

les interactions entre les différents acteurs, les équipements disponibles ainsi que les normes

et les valeurs de l’entreprise, représentent des sources de transfert des connaissances et des

compétences. Le transfert peut aussi concerner les apprentissages dans la mesure où il « met

en jeu des processus et mécanismes psychologiques concernant la mémorisation, la

101

compréhension (voire l’appréhension), l’assimilation et l’exploitation de l’acquis » (Orléron,

1971). Vu sous cet angle, le transfert renvoie « au mécanisme cognitif qui consiste à utiliser

dans une tâche cible une connaissance construite ou une compétence développée dans une

tâche source»» (Tardif, 1999). Il s’agit donc de transformations des connaissances acquises

entre deux situations différentes : celle de l’apprentissage qui représente la source, et celle

correspondant à la mise en œuvre des connaissances qui est la cible. Dans cette acception,

l’objet du transfert porte sur les mécanismes par lesquels des connaissances apprises

antérieurement peuvent être mobilisées pour résoudre un problème affronté dans un contexte

nouveau. Le transfert peut également avoir comme objet « le transfert à l’industrie des

résultats de la recherche universitaire dans le but de commercialiser de nouveaux produits et

services » (CST, 2005). Il s’agit donc du transfert d’un « produit » (savoir) ou de

connaissances et de compétences (savoir-faire) en vue de leur application dans les lieux du

travail (Argabright, 1999). Dans une autre perspective et en mettant l’accent sur la

valorisation et l’innovation, la notion de transfert peut être définie comme étant le résultat «

de la synergie entre les chercheurs qui développent des connaissances et des technologies

(Technology Push) et les utilisateurs qui devront transformer ces connaissances en produits

et procédés commercialisables (Market Pull), en politiques ou en règlements » (FQRNT,

2005).

3.1.1.2. Echange des connaissances

L’origine du mot « échange » est économique et renvoie à l’acte de troquer, donner

une chose en contrepartie d’une autre. Ce terme a été ensuite utilisé en sciences juridiques

pour désigner la concession mutuelle de droits. Enfin, la notion d’échange a été appréhendée

par les sciences sociales et fait référence à la circulation d’informations établies de façon

réciproque. L’échange des connaissances est un « effort coopératif des chercheurs et des

décideurs visant à résoudre des problèmes grâce à des activités de transfert et d’échange »

(FCRSS, 2005). Grâce à cette interaction, les acteurs peuvent développer leurs savoirs dans le

cadre de la planification, de la production, de la diffusion et de l’application des

connaissances qu’elles soient nouvelles ou existantes à la prise de décision.

3.1.1.3. Diffusion des connaissances

A l’origine, le terme « diffusion » est un mot latin « diffusium » et désigne « l’action

de répandre ». Diffuser veut dire répandre dans toutes les directions ou propager une

nouvelle, ou assurer la distribution. Pour le domaine des connaissances, ce terme renvoie au

102

processus par lequel celles-ci sont communiquées à travers des canaux divers, sur une période

de temps, parmi les membres d’un système social (Roy et al., 1995). La notion de diffusion

des connaissances s’inspire de la théorie de la diffusion développée par Rogers (1995).

3.1.1.4. Partage des connaissances

La notion de « Partage » telle qu’elle a été définie dans le dictionnaire Larousse

Français, fait référence à « Action de diviser une chose en portions, en parties » ou encore

«Action de partager, de diviser en parts; résultat de cette action; manière de partager ». Le

terme « partage » est caractérisé par la nature imprécise et le caractère flou de ses frontières

sémantiques. Quand on s’arrête sur la définition grammaticale du mot partage, on constate

qu’elle est double. Premièrement, elle signifie division, fractionnement, séparation, répartition

etc. des mots signifiant l’éclatement d’un tout. C’est tout ce qui touche, entre autre,

au domaine matériel et qui est souvent source de conflits familiaux et sociaux. La seconde

partie de la définition du partage, contrairement, signifie, avoir en commun, partager un avis,

des valeurs, une tradition, un savoir-faire etc. En Droit, par exemple, le partage est défini

comme étant une « opération qui met fin à une indivision, en substituant aux droits indivis sur

l'ensemble des biens une pluralité de droits privatifs sur des biens déterminés » (Jur. 1981).

Une autre définition attribuée au partage revoie au fait d'avoir part à quelque chose avec

quelqu'un. Partage du pouvoir, des responsabilités. D’un point de vue idéologique, c’est le

partage des biens et des ressources intellectuelles de tout un chacun, pour un vrai

développement et que l’on retrouve dans divers groupes « communautaires ». C’est l’entraide

morale et sociale. On peut dire que c’est pour cela que les humains se regroupent, parce que

chacun a besoin des autres, pour satisfaire ses besoins fondamentaux. En sciences sociales, le

partage des connaissances se réfère à « une approche systématique pour obtenir, rassembler

et partager les connaissances tacites pour en faire des connaissances explicites. C’est ainsi

un processus qui facilite le fait que des individus et/ou des organismes accèdent à des

informations essentielles, jusqu’ici détenues par une seule personne ou un petit groupe de

personnes, en vue de leur utilisation » (Goverment of Alberta, cité par Graham et al., 2006).

Le partage est considéré comme « un processus social » (Rynes et al., 2001). Dans cette

acception, la notion le partage des connaissances réfère implicitement aux relations

bidirectionnelles entre les individus producteurs et ceux utilisateurs de connaissances. Cet

acte implique l’existence de liens de coopération et de collaboration entre deux parties, deux

cultures ou deux communautés.

103

Le partage des connaissances se réfère à un à « un processus par lequel une unité (individu,

groupe, département, division) est affectée par l’expérience d’une autre » (Argote et al.,

2003). Il s’agit donc d’un processus complexe, qui revêt deux volets : le premier correspond à

la diffusion des règles du jeu, le second à la transmission ou la création d’un savoir qui

s’intègre dans l’unité réceptrice.