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3.2. Les apports des théories du management des connaissances sur l’innovation

3.2.2. Les apports d’Argyris

L’apprentissage organisationnel se trouve au carrefour de plusieurs champs disciplinaires :

la psychologie, la stratégie d’entreprise, la gestion des ressources humaines, les théories des

organisations, l’organisation industrielle, le management de la technologie, l’informatique,

etc. Plusieurs auteurs se sont intéressés au phénomène de l’apprentissage organisationnel et

ont établi des typologies des travaux portant sur ce thème.

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Les recherches portant sur l’apprentissage humain sont de longue date et constitue une

base aux recherches sur l’apprentissage organisationnel. Une grande partie des connaissances

des théories d’apprentissage individuel vient des études psychologiques du comportement

humain et s’attache à montrer que le changement de comportements est lié à la

répétition de certaines expériences dans certaines situations. Les behaviouristes ont développé

les premières théories de l’apprentissage en termes de modèle comportemental

Stimulus-Réponse. L’apprentissage est considéré comme le changement des probabilités de

comportement. Simultanément, avec le développement des théories d’apprentissage et de

comportement, des analyses expérimentales des mécanismes constituant l’apprentissage ont

été menées. L’apprentissage est perçu comme l’acquisition d’associations, de réflexes

conditionnés et de chaîne de Stimulus-Réponse. Ces premières recherches sur l’apprentissage

sont dominées par les théories de comportement en psychologie. Avec l’émergence de la

perspective du processus d’information dans la psychologie cognitive, l’accent mis sur la

résolution des problèmes apporte de nouvelles idées sur la conceptualisation de

l’apprentissage. Cette école de pensée base, par opposition, l’apprentissage individuel sur une

confrontation intellectuelle de l’individu avec son environnement. L’intérêt des chercheurs se

déplace ainsi de l’individu à l’interaction entre l’individu et son contexte. L’apprentissage est

analysé comme le changement des connaissances (states of knowledge), plutôt que dans le

changement de probabilités de réponse. La recherche s’est alors orientée vers l’étude des

structures de mémorisation, les processus d’information, l’organisation de la connaissance et

l’acquisition et la recherche d’information pour la résolution des problèmes et la modélisation

informatique ont pris de l’importance. Les structures cognitives se développent dans un

processus de confrontation, se basant sur les expériences, attentes et convictions

précédemment acquises. L’élément central de cette école psychologique est l’attention qui est

portée aux changements des comportements, aux possibilités d’action et aux transformations

de structures cognitives de l’individu (Bandura, 1979). Cette nouvelle pensée permet une

meilleure compréhension de l’émergence de nouvelles structures (Pautzke, 1989 ; 1996) et

forme un point de départ à la formulation d’un concept théorique de l’apprentissage

organisationnel.

Contrairement aux définitions psychologiques qui appréhendent l’apprentissage sur le

plan individuel, la théorie des systèmes ne base pas sa réflexion sur les processus individuels,

mais part plutôt du système, de l’organisation comme un tout. Dans cette acception,

l’apprentissage d’une organisation devient l’assouvissement des besoins collectifs. L’attention

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est avant tout portée sur l’organisation comme cadre de l’apprentissage individuel. Celle-ci

mène la plupart des auteurs de la pensée systémique concernés par l’apprentissage individuel

à mettre en évidence l’importance essentielle des relations d’interdépendance entre l’individu

et le système (Argyris et Shön, 1978 ; Morgan, 1986 ; Hedberg, 1981 ; Pautzke, 1989).

Koeing (1994) définit l’apprentissage organisationnel comme un phénomène collectif

d’acquisition et d’élaboration de connaissances qui, plus ou moins profondément, plus au

moins durablement, modifie la gestion des situations et les situations elles mêmes. La

dimension collective de l’organisation peut être activée d’un part à travers la circulation et la

diffusion des nouvelles connaissances et d’autre part à travers le développement des relations

entre les compétences préexistantes. En ce qui concerne la diffusion et la circulation des

nouvelles connaissances, l’impact de l’apprentissage croît avec le nombre et la diversité des

interprétations produits. Le développement des interprétations élargit l’éventail des

comportements possibles. L’impact de l’apprentissage augmente également en fonction du

nombre d’entités qui ont acquis des connaissances nouvelles et les jugent utiles ; et en

fonction du nombre d’entités qui comprennent de la même manière les diverses

interprétations produites. Le développement des relations entre les compétences préexistantes

est un mode d’apprentissage qui vise une meilleure articulation entre des acteurs habitués à

mobiliser de façon indépendante leurs connaissances. Koeing (1994) remarque qu’une bonne

partie des relations efficaces au sein des organisations sont de nature informelle. Les

mémoires individuelles, les systèmes d’archivage, les procédés d’exécution et les structures

sont les quatre catégories de lieux d’inscription de l’apprentissage. Pour Huber (1991),

l’apprentissage peut être qualifié d’organisationnel dès lors que l’acquisition d’un savoir

même strictement individuel modifie le comportement de l’entité. La mémorisation du savoir

dans l’organisation par l’intermédiaire de systèmes de savoir fixe certaines lignes d’actions

permettant l’orientation des décisions de l’entreprise. Ainsi, les comportements et actions

individuels deviennent un savoir reproductible pour toute l’organisation. Dans cette acception,

l’apprentissage organisationnel ne peut donc être lié à la sommation des apprentissages

individuels des membres d’une organisation. Cela s’explique par le fait que d’une part, il

existe des connaissances individuelles qui ne sont ni connues, ni mêmes exploitables par

l’organisation (Argyris et Shön, 1978 ; Hedberg, 1981), d’autre part, les organisations se

voient dans la possibilité de mémoriser certaines informations qui ne font pas partie des

systèmes cognitifs des membres de l’organisation (Argyris et Shön, 1978 ; Fiol et Lyles,

1985). La somme des connaissances d’une organisation est ainsi différente de la somme des

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connaissances individuelles des membres de cette organisation. L’apprentissage

organisationnel est ainsi une dimension spécifique à l’organisation et se différencie de

manière qualitative et quantitative des apprentissages individuels. Il est déclenché par les

individus et leurs interactions créant un tout autonome et avec des qualités et caractéristiques

propres. (Probst et Büchel, 1995).

Par opposition aux caractéristiques de l’apprentissage individuel, l’apprentissage

organisationnel est caractérisé par une rationalité et un cadre de référence collectif. Dans cette

perspective, ce ne sont pas uniquement les motifs, besoins et valeurs individuels qui sont de

première importance, mais bien plus les expériences collectives, les procédures de décision

communes, les normes générales, demandant des décisions majoritaires. L’apprentissage n’est

pas lié seulement à une adaptation ex-post de l’organisation à l’environnement, mais aussi le

résultat d’adaptations aux besoins, motivations, intérêts et valeurs collectifs des membres.

D’après les auteurs, une certaine forme de dialectique entre la divergence et la convergence

des significations que les membres de l’organisation donnent à leur savoir, est nécessaire à

l’acquisition et au partage de connaissances communes (Cohen et Levinthal, 1990). Ces

significations sont le résultat des formes de communication et d’expression. La difficulté

réside ainsi dans le maintien d’une certaine forme d’équilibre entre la diversité et le consensus

(Cohen et Levinthal, 1990). Pour Klimecki et al., (1994), cette transformation dépend des

trois facteurs suivants :

 Communication ;

 Transparence ;

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La représentation (Figure : 10) résume les différents facteurs nécessaires à la liaison des

deux formes d’apprentissage : individuel et organisationnel.

Source : Probst et Büchel, 1995

Figure 10 : Pont entre l’apprentissage individuel et l’apprentissage organisationnel

Shrivastava (1983) définit les systèmes d’apprentissage organisationnel comme les

moyens par lesquels l’organisation apprend. Les systèmes d’apprentissage sont des

mécanismes par lesquels l’apprentissage est perpétué et institutionnalisé dans les

organisations. Il distingue quatre perspectives complémentaires de l’apprentissage

organisationnel. Chacune des perspectives reflète une conceptualisation différente du

phénomène de l’approche organisationnelle qui est décrit en termes d’adaptation, de

développement des théories d’usage organisationnelles (assumption sharing), de gestion des

connaissances « action-résultat » (developing knowledge action-outcome), et de capitalisation

de l’expérience dans l’organisation (institutionalized experience).

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3.2.2.1. Nature de l’apprentissage organisationnel

L’apprentissage organisationnel est rendu nécessaire par la complexité de

l’environnement. De ce fait, les organisations efficaces sont celles dont les membres ont la

capacité d’apprendre à prévoir les changements dans l’environnement, à identifier l’influence

de ces changements, à chercher les stratégies adéquates pour y faire face, et à développer les

structures appropriées pour mettre en œuvre ces stratégies. Dans cette acception,

l’apprentissage organisationnel renvoie au processus d’identification des changements

organisationnels et des contextes organisationnels.

De façon générale, l’apprentissage organisationnel concerne le changement des

connaissances et peut toucher les formes de connaissances et leurs contenus. Le niveau de

connaissance transformée nous permet de qualifier la nature de l’apprentissage. Les auteurs

distinguent entre trois niveaux d’apprentissages distincts :

 L’apprentissage par adaptation ;

 L’apprentissage constructif ;

 L’apprentissage de processus.

3.2.2.1.1. L’apprentissage par adaptation

Les interactions entre les membres de l’organisation et l’environnement interne et

externe génèrent continuellement des nouvelles informations, éliminent celles anciennes et

conduisent à une redéfinition de la réalité. Ces interactions modifient constamment les

schémas établis et contribuent à une réorientation de ces derniers (Hedberg, 1981). Selon

Cyert et March (1963) ce processus peut être appréhendé comme étant « des mesures

prospectrices adaptées, des règles d’attention ainsi que des objectifs et attentes modifiées »

(cité par Probst et Büchel, 1995). D’après les auteurs, l’adaptation se produit au niveau

collectif de l’organisation et cet apprentissage peut être qualifié comme un apprentissage par

adaptation car il renvoie à une adaptation au contexte de l’organisation dans la mesure où les

membres mettent à jour les facteurs nuisibles de l’environnement organisationnel,

développent et mettent en œuvre des stratégies appropriées à ces dangers. Ce type

d’apprentissage correspond à une forme d’adaptation efficace face au changement de

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l’environnement. Pour Argyris et Shön, cet apprentissage est une réaction de la part de

l’organisation vis-à-vis des transformations du contexte externe et interne. Les écarts réalisés

dans les théories quotidiennes sont corrigés en vue de les concilier avec les normes en

vigueur. Dans cette acception, les auteurs parlent de « Single-loop learning » qui correspond à

l’apprentissage de premier ordre caractérisé par une régulation des procédures du système

basée sur les normes sous-jacentes de ce même système (Argyris et Schön, 1978). Les écarts

entre les résultats concrets et les objectifs forment le catalyseur de l’apprentissage. Ils sont

corrigés par rapport aux normes existantes par une adaptation de différentes procédures et un

réajustement des objectifs fixés par l’organisation.

Cette adaptation renforce les théories d’action en vigueur (Argyris et Schön, 1978). Il s’agit

ainsi d’une adaptation qui ne remet point en cause les normes et les valeurs caractéristiques de

l’organisation et reste axée sur les objectifs fixés par cette dernière.

3.2.2.1.2. L’apprentissage reconstructif

Outre les formes d’apprentissage par adaptation, on trouve des processus cognitifs plus

complexes. La complexité renvoie au fait que les rapports entre l’organisation et

l’environnement provoquent souvent plus qu’à une simple adaptation. Il s’agit d’un

apprentissage reconstructif qui nécessite une volonté commune d’acceptation des conflits.

Dans cette acceptation, les normes et les valeurs fortes et ancrées influencent les décisions des

membres de l’organisation et redéfinissent de nouvelles priorités qui peuvent parvenir, si c’est

nécessaire, à une restructuration des valeurs dominantes de l’organisation. La transformation

des structures et du répertoire des comportements peut engendrer ainsi une évolution dans le

cadre de référence de l’organisation (Argyris et Schön, 1978).

La remise en cause des normes et valeurs de l’organisation donne lieu à des nouvelles théories

d’action reflétant les nouveaux fondements de l’institution. Quelque soit la nature de

l’apprentissage organisationnel, les résultats de ces changements sont considérés comme une

amélioration des connaissances seulement si ces résultats sont acceptés et jugés utiles par les

membres de l’organisation. Comme l’apprentissage organisationnel est focalisé sur les

besoins, les motivations, les intérêts et les valeurs du réseau interactif, seuls les systèmes

cognitifs capables de déclencher un apprentissage organisationnel respectant les besoins, les

motivations et les valeurs collectives du passé, du présent et de l’avenir peuvent être

considérés comme fonctionnels c’est-à-dire utiles et acceptés. Dans cette acception,

l’apprentissage reconstructif n’est pas une simple adaptation proactive vis-à-vis des

changements de l’environnement, ni un développement de nouvelles connaissances

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permettant l’adaptation à ces changements, mais une transformation des intérêts propres à

l’organisation. Il concerne la modification des normes et des valeurs des membres face aux

nouveaux objectifs de l’organisation dans la mesure où il renvoie à une remise en question du

cadre de référence institutionnel qui nécessite une plateforme de confrontation des hypothèses

de base de l’organisation et permet la révision des objectifs de celle-ci. Dans cette

perspective, les auteurs qualifient ce type d’apprentissage de « double-loop learning »

(Argyris et Schön, 1978). Ainsi, la remise en cause des théories d’action donne lieu à une

révision des objectifs de base de l’organisation.

Si Argyris et Schön (1978) postulent qu’une mise à jour complète et une analyse poussée sont

nécessaires pour déclencher un apprentissage reconstructif, Hedberg quant à lui (1981), pense

que ce sont plutôt les processus liés à des phases de désapprentissage qui sont à l’origine de

cette forme poussée d’apprentissage.

3.2.2.1.3. L’apprentissage de processus

D’une manière générale, la plupart des auteurs concernés par les phénomènes

d’apprentissage organisationnel s’accordent sur les difficultés relatives aux processus de

transformation des cartes cognitives. Les auteurs parlent de « reframing » (Hedberg, 1981 ;

Watzlawick, 1988 ; Argyris, 1990). Selon ces auteurs, les organisations érigent

inconsciemment des processus de défense appelées des routines de défense « Defensive

routines » en vue de protéger les procédures habituelles de résolution des problèmes. Ces

routines défensives rendent la découverte des erreurs commises par les individus, groupes, ou

organisations difficile dans la mesure où ces découvertes sont considérées embarrassantes

voire dangereuses (Argyris, 1990). Cela est du au fait que les transformations provoquent

dans la plupart des cas des incertitudes et des zones d’ombres. Celles-ci déclenchent le

développement des règles fondamentales qui oblitèrent certaines erreurs. A un niveau élevé de

l’apprentissage organisationnel correspondant à un changement des cadres de référence, les

processus d’apprentissage et de reconstruction des valeurs et normes sont évalués par la

collectivité et ce, selon des critères d’utilité et d’acceptation du changement. Ainsi, le

rapprochement entre les valeurs des différents membres collectifs ou groupes déclenche un

apprentissage de second degré. Dans cette acception, l’importance et la signification des

changements sont assimilées et comprises par l’organisation et ses membres. La difficulté

réside dans la concrétisation et la réalisation de ces changements provoquée par les routines

défensives. Afin d’éviter une intervention à ce niveau d’apprentissage généralement vouée à

l’échec, l’organisation procède à une mise à jour des processus qui organisent cette forme

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d’apprentissage à savoir : l’apprentissage par adaptation et l’apprentissage reconstructif et de

montrer aux membres les problèmes liés à ces formes d’apprentissage. Ce processus

d’apprentissage de l’apprentissage correspond au degré le plus élevé des formes

d’apprentissage dans la mesure où il ne correspond pas uniquement à l’augmentation ou la

transformation des connaissances, mais facilite et permet cette augmentation et cette

transformation. Au cœur de l’apprentissage de processus se trouvent ainsi les processus même

d’apprentissage. Cette forme d’apprentissage, l’apprentissage de processus ou par réflexion

sociale, englobe tous les phénomènes de transformation du stock de connaissances et de

changements des marques du contexte d’actions (Bateson, 1981). Dans cette acception,

l’apprentissage de l’apprentissage est le résultat des expériences faites avec les formes

d’apprentissage par adaptation et de transformation. L’élément central à ce niveau

d’apprentissage réside dans l’amélioration des capacités d’apprentissage qui deviennent

l’objet même de l’apprentissage. La reconnaissance des principes, permettant dans des

situations similaires de déclencher un apprentissage, autorise une restructuration complète des

normes et des comportements. Cette capacité de réflexion, grâce à l’apprentissage de

l’apprentissage, permet une anticipation des conflits, une évaluation des conséquences de ces

conflits et la mise en place des mesures de correction nécessaire. Elle conduit non seulement à

une optimisation du contexte d’action de l’organisation, mais aussi à un gain maximal dans le

cadre d’une coopération entre les différents acteurs.

3.2.2.2. Contextes propices à l’amélioration des processus d’apprentissage

3.2.2.2.1. Développements stratégiques comme processus d’apprentissage

Comme le montre Peter Drucker (1980), nous sommes confrontés à un environnement

toujours plus complexe, des cycles de vie de produits de plus en plus courts, des nouvelles

technologies et des marchés plus dynamiques et interdépendants. Cette forte complexité et

cette dynamique rendent les pronostics plus incertains. Le contexte stratégique devrait

permettre aux organisations d’agir de façon plus prospective et d’améliorer leur flexibilité.

Le développement stratégique renvoie à un processus d’apprentissage permettant d’orienter

les activités quotidiennes sur les besoins futurs (Lessing, 1991). Dans cette acception, la

planification stratégique est un processus d’interrogation et d’apprentissage ayant pour

finalités de découvrir les opportunités à venir qui pourraient s’offrir à une organisation. Cette

approche demande une interrogation stratégique à tous les niveaux de l’entreprise en

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procédant par double flux « Top-down et Bottom-up ». Les flux d’informations ascendantes et

descendantes permettent une intégration d’une vision globale du marché, des évolutions

socio-économiques et la prise en compte des besoins clients. Ce double flux d’informations

suppose qu’une équipe de membres de l’organisation doit être mise en place au moment de

l’élaboration de la stratégie. La planification stratégique représente en soi un processus

d’apprentissage pour les individus impliqués dans le développement de nouvelles stratégies.

La participation des membres de l’organisation est la base de l’apprentissage et favorise un

cadre propice pour des réflexions productives sur l’avenir de l’organisation.

La littérature traitant des outils stratégiques est très riche et comprend un large éventail de

méthodes et aides à la décision. Elle a pour objectif la recherche de positions stratégiques sur

les différents marchés, l’analyse de la concurrence, etc. Parmi ces instruments stratégiques, on

peut citer à titre d’exemples les matrices de positionnement, les analyses du marché, la

méthode des scénarios, le controlling stratégique, etc. Notre objectif n’est cependant pas

d’exposer de manière exhaustive ces différents instruments. Nous nous intéressons à l’utilité

de certains instruments favorisant la mise en place de contextes propices à l’apprentissage.

Nous examinons ainsi l’impact de quelque uns de ces outils sur le développement des

capacités cognitives organisationnelles. Nous avons retenu trois instruments parmi la panoplie

des différents instruments stratégiques en vue de mettre en évidence l’importance de leur

impact sur les capacités d’apprentissage de l’organisation. Il s’agit de la technique des

scénarios (Ulrich, 1989), les jeux d’entreprises (Senge, 1991 ; Döner, 1987) et le controlling

stratégique (Pümpin et Geilinger, 1988).

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(Probst et Büchel, 1995)

Figure 11 : le développement stratégique comme processus d’apprentissage

3.2.2.2.1.1. Les jeux d’entreprises

C’est en faisant des expériences que les individus apprennent le mieux. Lorsqu’un

individu répare son vélo par exemple, il « reconnaît » les conséquences de ses actions et

apprend. Grâce à ce processus d’apprentissage l’individu reçoit presque immédiatement des

informations retour sur les actions qu’il vient d’entreprendre. Ainsi, ses différents actes se

fondent sur le principe de correction d’erreurs qui facilite l’apprentissage par adaptation.

L’apprentissage se base dans ce cas sur de brèves boucles de données « feed-back » qui

informent rapidement l’individu sur l’efficacité de ses actes. Cette forme d’apprentissage est

caractérisée par un rapprochement temporel et spatial de l’action et la correction (Senge,

1990 ; 1991 ; Senge et Sternman, 1992). Dans la même perspective, des scénarios à petite

échelle permettent au manager d’apprendre à partir de cas réels. La spécificité de cette

méthode est le rapprochement temporel et spatial entre l’action prise et les conséquences

réelles de ces actions ce qui permet d’apprendre en un court laps de temps. D’ailleurs, ce

phénomène n’est pas vraiment récent puisqu’on le retrouve dans le principe des jouets pour

enfants. En effet, grâce à des jouets comme les poupées, les modèles réduits et les jouets de

construction, etc., les enfants se préparent aux interactions futures en développant un sens

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pour les objets dans l’espace. Les différentes expériences que les enfants font dans le monde

des jouets les aides à développer des principes d’action et des schémas qui seront par la suite

étendus à la réalité quotidienne. Dans cette acception, les connaissances se fondent sur des

observations, des expériences et sur les conclusions qu’ils en tirent (Senge, 1991b).

Cependant, l’apprentissage par objets n’est pas réservé aux enfants. Au sein des organisations,

les membres font appel à des modèles réduits pour apprendre. Une palette d’exercices est

mise en place tels que les jeux de rôles, le travail d’équipe, la gestion de projet, etc., pour