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DÉFINIR LE MÉTIER DE CONSERVATEUR

Les principales conventions basées sur les espèces

DÉFINIR LE MÉTIER DE CONSERVATEUR

Ibrahima DIOP, Amadou BA,

Seydina Issa SYLLAet Patrick TRIPLET

Le conservateur constitue l’élément prédominant d’une aire protégée. Selon sa capacité de persuasion vis-à-vis de son personnel et des populations locales, sa sensibilité à tel ou tel aspect de l’écologie des milieux, il influe plus ou moins fortement sur le site. Certains conservateurs peuvent se montrer excellents sur un type de site et très moyens, voire inadaptés sur d’autres sites. Il appartient aux structures administratives de savoir mettre un conservateur (et de le laisser ou de le déplacer) sur le site où il est le plus à même d’apporter une contribution significative.

Être conservateur d’une aire protégée n’est pas une fin en soi, ni un moyen de se valoriser et d’accéder à de plus hautes fonctions ensuite. Être conservateur est avant tout une lourde responsabilité car il s’agit de « conserver en état », voire d’améliorer le bien de nos parents que nous avons à transmettre à nos enfants. Être conservateur ne peut donc se concevoir sans une vision à long terme de ce que l’aire protégée était, est et sera demain. Dans un monde en pleine évolution où la pression démographique est la cause d’une demande croissante d’espaces, les aires protégées font figures d’îlots de nature au sein de systèmes de plus en plus fortement anthropisés. Elles restent souvent les seuls garants de la préservation de la biodiversité.

On ne s’improvise pas conservateur, on a des aptitudes à l’être et on le devient véritablement au fil des années et des expériences acquises sur les aires protégées. Il est nécessaire de mettre les « apprentis » conservateurs au contact de conservateurs en poste et qui ont fait leurs preuves et non de les propulser directement sur des sites très difficiles à gérer, au prétexte que sur le papier, ils ont la formation pour occuper cette fonction.

Il existe de petits sites, réserves ou parcs nationaux de faibles dimensions, qui peuvent constituer un excellent terrain d’entrainement pour les nouvelles recrues.

Il faut enfin que le conservateur de demain suive des stages complémentaires à la formation qu’il a déjà acquis, à l’École de faune de Garoua ou ailleurs.

Ces stages doivent lui permettre de mieux cerner son travail de conservateur, et non être un moyen d’étoffer un curriculum vitaepermettant de changer d’orientation professionnelle ou de candidater à d’autres fonctions.

Par exemple, si un conservateur est formé pour la gestion des zones humides et les comptages d’oiseaux d’eau, il est nécessaire de rentabiliser cette formation en le laissant sur une aire protégée humide suffisamment d’années pour que son apport soit significatif. Cinq années semblent être la durée la plus appropriée.

Un conservateur n’est pas seulement un biologiste qui sait identifier ou compter les espèces animales et végétales ; il doit posséder des connaissances relatives à plusieurs champs disciplinaires (sociologie, économie, hydrologie, agronomie, zootechnie, droit,…). Il doit être aussi quelqu’un qui sait concilier la conservation des ressources naturelles et le développement socio-économique des populations qui vivent autour de son site.

Il doit encore avoir une parfaite connaissance du terrain ainsi que des structures et rapports sociaux des populations locales. Sur le terrain, il doit être perçu comme un agent de développement qui aime et protège la nature et ses ressources.

Le conservateur, ses fonctions

Le conservateur est le responsable officiel de l’aire protégée et veille à la bonne gestion de celle-ci.

Le conservateur est le chef d’une équipe. À ce titre, il doit constituer une équipe bien étoffée maîtrisant diverses disciplines et rechercher la complémentarité entre les membres de cette équipe.

Pour gérer son équipe, le conservateur doit toujours donner le bon exemple et ne pas confier des tâches insurmontables à son personnel. Il veille à parfaitement informer le personnel de ce qui se passe au niveau de l’aire protégée qu’il dirige, des objectifs poursuivis et de l’évolution des projets en cours. Il doit savoir déléguer des responsabilités et ne pas tout faire lui-même. Il doit être chef d’orchestre et non un homme-orchestre.

Il encourage également les initiatives individuelles favorables à l’aire protégée et surtout laisse les auteurs des initiatives positives les mener à bien sans interférer, ni tenter d’en récupérer les aspects positifs ou attribuer les échecs au personnel.

Il sait être toujours à l’écoute de son personnel et prend en considération l’expérience de terrain acquise par celui-ci, même si parfois il doit remettre en question ses propres conceptions.

Il sait être humble et ne s’attribue pas le travail de l’équipe, mais au contraire met en valeur celle-ci en soulignant bien que tous les succès sont dus à la qualité du travail fourni par l’ensemble des agents.

Il doit encore savoir récompenser ou punir avec la plus grande justice, sans préjuger de ses propres sentiments envers la personne. Seule l’attitude professionnelle compte.

Le conservateur assure le suivi écologique et la lutte anti-braconnage. Cependant, son intervention ne peut se limiter à cela, il doit encore être animé par le souci constant d’améliorer le bien-être des populations locales. À cet effet, le conservateur doit savoir impliquer la population locale dans la gestion quotidienne de son site.

Le conservateur est un homme d’action. Il doit savoir identifier les lacunes et contribuer à l’amélioration de l’efficacité de la gestion de son site.

Le conservateur coordonne des programmes d’études, de recherches et de publications. Pour mener à bien son action, le conservateur doit conduire des études sur le terrain, faire appel à des scientifiques, des consultants. En cela il contribue à l’approfondissement des connaissances de son site.

Gérer une aire protégée au quotidien

Le conservateur est le premier au travail le matin et souvent est le dernier le soir. Il est en contact permanent avec ses agents. Chaque jour, le conservateur doit inspecter au moins un poste si l’aire protégée dispose de plusieurs unités. Il doit faire des tournées, assister à des réunions en périphérie, accueillir des personnalités diverses.

Il veille à l'entretien des pistes, au fonctionnement des véhicules, des moteurs de bateaux, au budget et au versement des recettes. Pour cela, il distribue le travail à son personnel et veille à récupérer d’eux le bilan des tâches accomplies.

Des horaires de travail doivent être définis, même s'ils sont sujets à d'importantes modifications en fonction des nécessités du service. Dans différents sites, la levée des couleurs précède l'organisation de la journée. En temps normal, le conservateur (ou le chef de poste dans le cas d'une aire protégée de grande surface) doit réunir son équipe à une heure déterminée et définir le travail de chacun au cours de la journée. Il doit gérer les permissions du personnel et les problèmes de celui-ci.

Chaque jour, le conservateur doit montrer sa présence dans l’aire protégée, de préférence là où on l'attend le moins, en accompagnant un scientifique, des visiteurs particuliers…

Le conservateur d’une aire protégée doit être en liaison régulière avec sa direction. Le but est de rendre compte et tenir informé le directeur de tout ce qui se passe, de la situation du personnel, jusqu’au résultat des patrouilles.

DÉFINIR LE MÉTIER DE CONSERVATEUR

Le conservateur organise des patrouilles. Les tournées se font à pied ou en vélo parfois avec l'appui de l'armée. Dans les aires marines protégées, cela se fait en bateau, ce qui nécessite des équipements et du carburant. Dans certains cas, comme au parc du Djoudj, des patrouilles se faisaient autrefois à cheval. Mais cette méthode ne s'est pas poursuivie. Elle offre cependant l’avantage de permettre aux agents d’aller pratiquement n’importe où, avec un coût de fonctionnement peu élevé, ce qui n’est pas sans intérêt, compte tenu du prix du carburant. Par contre, la surveillance à cheval peut constituer un facteur limitant lorsque, par exemple, il s’agit de poursuivre un braconnier motorisé. De plus, elle requiert une bonne formation de l’agent à la monte et à l’entretien de sa monture.

Le conservateur doit être également en contact permanent avec la population locale à travers un mécanisme de concertation fonctionnel et opérationnel.

L’objectif de ce cadre de concertation est d’initier un dialogue visant à obtenir l’engagement de la population locale à respecter toutes les règles de gestion des ressources naturelles de l’aire protégée éditées par ses organes de gestion.

La concertation doit aussi permettre d’identifier des mesures incitatives qui soutiennent l’intégrité et le maintien de l’aire protégée et peuvent concourir au bien-être des populations.

Les responsabilités du conservateur Les responsabilités du conservateur sont multiples, il doit :

- contribuer à l’élaboration du plan d’aménagement et de gestion de son site,

- assurer l’intégrité de l’aire protégée contre toutes sortes de braconnage et d’empiétement, - appliquer le plan d’aménagement et de gestion de l’aire protégée,

- préparer les programmes annuels, - planifier les activités de l’aire protégée,

- préparer et signer les conventions et les contrats programmes, - gérer les aspects administratifs et comptables et préparer le budget, - assurer l’intégrité financière et comptable de l’aire protégée, - rédiger les rapports d’activités,

- assurer le secrétariat de tous les organes consultatifs (comité de direction de l’aire protégée, comité d’orientation, comité scientifique),

- s’assurer qu’un personnel compétent et motivé est disponible, - assurer des infrastructures appropriées dans les limites du budget,

- s’assurer que toutes les activités menées à l’intérieur de l’aire protégée sont conformes aux lois et réglementations,

- s’assurer de la satisfaction optimale des visiteurs,

- mettre en place un dispositif de miradors et assurer la fonctionnalité des pistes de visite,

- s’assurer que les programmes d’intervention approuvés (par exemple, la lutte contre les animaux posant des problèmes, la mise à feu précoce) sont exécutés dans les limites de temps et de budget, - assurer des relations harmonieuses avec les communautés environnantes,

- être informé des activités de recherche et de l’avancement des travaux par rapport aux prévisions, - représenter l’aire protégée et ses intérêts aux réunions publiques,

- assurer un bon équilibre entre la conservation et l’utilisation des ressources dans l’aire protégée.

Les qualités générales d’un conservateur

• Désir d'assumer des responsabilités et de réaliser des choses,

• Esprit d'initiative, audace et originalité dans le choix des objectifs et des moyens,

Deux conservateurs de parcs nationaux de Tunisie : Messieur Mohamed Sayeh Khenissi et Habib Ghazouani

Colonel Ibrahima Diop, conservateur emblématique du Parc national des Oiseaux du Djoudj (Sénégal)

• Énergie et persévérance au niveau de la réalisation des objectifs,

• Confiance en soi,

• Capacité à résister au « stress » et aux frustrations,

• Volonté de prendre des décisions et d'en assumer les conséquences,

• Capacité à agir avec discernement en fonction des circonstances en ménageant les susceptibilités,

• Aptitude à s'exprimer verbalement et sens des contacts humains.

Pour aller plus loin :

HERRERAJ. (2001) Gestion participative, travail en équipe et aptitude à diriger, conditions indispensables du succès des entreprises du XXIesiècle. Document multicopié trouvé sur internet, 7 p.

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