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AMP COMMUNAUTAIRE DES ÎLES DE L’UROK, archipel des Bijagós, Guinée Bissau

Catégorie VI : aire protégée de ressources naturelles gérée

AMP COMMUNAUTAIRE DES ÎLES DE L’UROK, archipel des Bijagós, Guinée Bissau

Le complexe des îles de Formosa, Nago et Chediã, ou îles Urok, fait partie d'une des zones centrales de la réserve de biosphère de l'archipel Bolama Bijagos. Cette vaste superficie de mangroves dans un espace quasi fermé, appelé le Ventre des îles, connue des pêcheurs pour être le lieu de reproduction de nombreuses espèces de poissons, est protégée par des règles traditionnelles de gestion précises.

La biodiversité associée est très importante puisqu'on y retrouve un tiers des limicoles de l'archipel, ainsi que la population de Lamantins la plus importante de la région. Parmi les espèces rares ou menacées, on rencontre des Perroquets gris du Gabon, des Loutres à joues blanches, des Hippopotames de mer et peut-être quelques individus de Poissons-scies.

L’objectif de ce projet, mis en œuvre par l’ONGbissau-guinéenne Tiniguena, a été de renforcer l’appropriation et la gestion participative et durable des ressources naturelles et de la diversité biologique de la zone côtière des îles d’Urok au bénéfice des populations résidentes. Il visait, pour la période 2007-2008, à :

- apporter un appui aux populations résidentes pour la mise en œuvre du plan de gestion de l’AMP

Urok,

- assurer un accroissement significatif des revenus et de la qualité de vie des communautés résidentes des îles d’Urok,

- permettre la mise en œuvre d’une animation culturelle pour accompagner les transformations sociales qui s’opèrent au sein des communautés, en particulier auprès des jeunes,

- permettre la capitalisation des leçons au profit de la dynamique engagée et des initiatives semblables menées dans la réserve de biosphère de l’archipel Bolama-Bijagós.

Dans le cadre de l’appui à la gestion participative de l’AMPcommunautaire des îles d’Urok, des avancées ont été réalisées notamment en termes de fonctionnement des structures locales de gestion, de diffusion des règles de gestion, d’appropriation par les jeunes dans les actions d’animation et

d’engagement de l’administration locale.

Cet exemple montre jusqu’à quel point l’accent peut être mis sur l’appropriation et l’aspect participatif de la gestion. La mise en œuvre du plan de gestion a été faite par les populations locales qui ont été appuyées dans le processus et concourent à sa réalisation.

Pêche à pied : Archipel des Bijagos, Guinée-Bissau(E RAMOS)

LES AIRES MARINES PROTÉGÉES

La gestion d’une AMP

La gestion d’une AMPvise à atteindre des objectifs qui peuvent être divers et adaptés aux conditions locales. Ces objectifs sont :

- la protection ou la reconstitution de ressources halieutiques,

- la protection de la biodiversité, la protection d’espèces ou d’habitats rares et menacés, - la préservation d’un ensemble d’habitats remarquables,

- le maintien des capacités d’écosystèmes clés pour les ressources halieutiques, conchylicoles ou pour des espèces patrimoniales,

- la gestion durable d’un milieu naturel soumis à de multiples usages, - la protection d’un cadre préservé à forte attractivité touristique, - La restauration de milieux dégradés,

- la mise en place de mesures écologiques compensatoires à des activités ou des installations destructrices,

- la réalisation d‘un espace de référence scientifique, - le développement durable et le bien-être des populations,

- le maintien des fonctionnalités écologiques des sites (notamment en termes de protection des côtes,…),

- l’information et la communication des valeurs de la biodiversité, - la préservation des savoirs et des cultures.

Pour atteindre un tel objectif, l’AMPdéfinit un plan de gestion. Cependant, la gestion d’une AMPne repose pas uniquement sur son plan de gestion. Des mesures traditionnelles comme les fermetures temporaires, les quotas, les contraintes d’équipement, etc. sont également des outils de gestion pertinents, qui peuvent être mis en œuvre sans attendre l’adoption d’un plan de gestion.

Les particularités des AMPimposent la prise en compte d’éléments spécifiques à ce type d’aire protégée, ce sont :

- des dépenses de surveillance importantes,

- une technicité particulière pour la surveillance et le suivi maritime,

- une grande complexité des relations institutionnelles (plusieurs juridictions, plusieurs droits, administrations et tutelles, communautés migrantes en pourtour),

- la nécessité d’une gestion « intégrée » dans le cadre du littoral (or les AMPfonctionnent souvent comme un espace fermé),

- une gouvernance juridique souvent « créative » en raison de la confusion et incohérence dans la tutelle administrative (pêche, environnement, eaux et forêts).

Toutefois, les AMP sont des espaces protégés et les mêmes outils que ceux des aires terrestres s’appliquent, citons :

- le suivi de l’efficacité de la gestion sur le site qui exige une sélection et un suivi des indicateurs de biodiversité,

- la gestion des activités d’usage/extraction et la gestion des activités indirectes ; cette gestion doit être fondée sur la précaution, l’anticipation, le suivi,

- la mise en place de mesures pour tenir compte des impacts présents et futurs et pour augmenter la résilience des écosystèmes,

- la gouvernance nécessairement pluridisciplinaire et complexe public/privé, - une approche participative et la mise en œuvre d’outils participatifs, - la mise en place de la gestion (plan de gestion, zonage,…).

Le concept de « débordement » [spillover]

Il est communément estimé que les AMP, bien gérées, doivent engendrer un phénomène de « dé-bordement » des espèces adultes et juvéniles à la périphérie du site. Les AMPcontribueraient à renouveler les stocks et à maintenir les pêcheries alentours.

De fait, tout dépend des espèces, de leur mobilité, de leur densité à l’intérieur du site. S’il existe peu d’évidence scientifique attestant que ce phénomène aura des impacts positifs sur les pêcheries environnantes, Callum et al.soulignent que la preuve la plus irréfutable est certainement le nombre croissant des embarcations de pêche qui convergent vers les alentours de la zone protégée ! Par contre, il y a maintenant de nombreuses évidences attestant que la mise en place d’une réglementation de la pêche sur un site peut rapidement amener une augmentation de l’abondance, de la taille, de la biomasse et de la diversité des animaux et donc la restauration du site en lui-même.

Les grands enjeux des AMP

Cinq grands enjeux peuvent être cités :

augmenter le nombre des AMP,

Si le nombre d’aires protégées terrestres a augmenté de façon significative lors des dix dernières années (12 % des terres émergées sont désormais classées en plus de 100 000 aires protégées dans le monde), la mer, qui recouvre 70 % de la surface du globe, ne comptait en 2005 que 5 127 aires marines protégées dont 965 de niveau international et dont la surface représente à peine 0,6 % des océans. On est loin de la cible des 10 % recherchée par l’accord de Durban et la convention sur la diversité biologique.

établir des AMPen haute mer,

Selon les experts, la répartition des aires protégées en milieu marin et côtier est, à l’heure actuelle, non représentative, que ce soient en termes de diversité des écosystèmes marins, de mode de gestion et d’utilisation, de climats, de courant, d’espèces critiques, etc. En particulier, à la dernière conférence des parties de la convention sur la diversité biologique, en mai 2008, la haute mer a fait une entrée remarquée sur la scène des négociations. Ainsi les États ont-ils franchi une première étape vers la mise en place d'aires marines protégées sur cet espace qui représente près des deux tiers de la surface totale des mers et océans. Jusqu'à ce jour, la haute mer n’était pratiquement soumise à aucune prescription dans les conventions internationales. Elle apparaissait comme un espace convoité, les États cherchant sans cesse à repousser les limites de leur souveraineté sur l’espace maritime et à promouvoir une exploitation de l'ensemble des ressources disponibles. Elle était également un espace de plus en plus livré aux activités humaines comme en témoignent la croissance exponentielle de la navigation maritime internationale liée au commerce ou à la pêche industrielle. Aujourd’hui, l’ensemble de la communauté des experts et gestionnaires d’AMPse penche sur les processus de désignation d’AMPen haute mer.

En Afrique de l’Ouest, le RAMPAOs’emploie pour identifier des sites remarquables en haute mer, monts sous-marins, etc.

améliorer la gestion des AMP,

La gestion de ces espaces est loin d’être entièrement fonctionnelle. Des efforts importants sont en cours pour améliorer l’efficacité de gestion des AMP.

assurer la connectivité des AMPet la résilience,

Les sites isolés ne suffiront pas à protéger les écosystèmes marins sur le long terme et encore moins à contrecarrer les effets des changements climatiques. Il s’agit de mettre en place des systèmes cohérents

LES AIRES MARINES PROTÉGÉES

et connectés de sites protégés, aux fins de renforcer la résilience des écosystèmes et réduire l’isolation et la discontinuité des AMP.

combler les vides de connaissances,

Si la liste rouge de l’UICNs’intéresse de plus en plus aux espèces marines, les chercheurs sont encore peu nombreux à s’intéresser aux écosystèmes marins, seule la ressource halieutique a fait jusqu’alors d’importants travaux. Les choix de gestion d’un site doivent être fondés sur les connaissances apportées par l’ensemble des savoirs. Dans l’immédiat, une meilleure considération et capitalisation des savoirs locaux est préconisée.

Conclusion

Les AMPcontribuent à protéger les espèces et les habitats vulnérables, à protéger les stades biologiques fragiles (lieux de ponte et d’alevinage) et à améliorer la productivité de la pêche dans la région, tout en assurant des retombés socio-économiques pour les communautés locales.

L’intérêt ou la nécessité d’une aire marine protégée s’apprécie à plusieurs échelles (internationale, nationale, régionale, locale) qui sont toutes aussi légitimes. Pour être pertinent, un réseau national d’aires marines protégées doit pouvoir répondre aux besoins de ces différentes échelles d’analyse.

Une aire marine protégée établit un régime spécial localement en fonction de la finalité qui est mis en œuvrepar des moyens et selon un mode opératoire qui associe aux prises de décisions des représentants des acteurs locaux. Parmi les moyens figurent, le cas échéant, des réglementations spécifiques au titre de la protection de la nature ou d’une autre législation.

En Afrique, les zones côtières en général sont le support de nombreux aménagements : ports, aéroports, aménagements touristiques formels ou informels, industries, parcs de vente de véhicules d’occasion, plantations.

Ces différentes activités influent négativement sur l’état environnemental des écosystèmes de la région côtière devant abriter les différentes aires marines à protéger. L’application effective des réglementations pourrait renforcer la protection de ces écosystèmes et leur utilisation pour l’aménagement des AMP

des côtes africaines.

L’usage inadéquat de cet espace conduit irrémédiablement à des dégradations irréversibles. Selon Bamisso (2006), environ 38 % des écosystèmes côtiers tels que les mangroves se trouvent sous la menace des aménagements divers et des rejets de déchets. La destruction continue de ces écosystèmes constitue une catastrophe écologique majeure.

La garantie de préservation de la valeur universelle des AMPsur le long terme passe par une évolution significative des conditions d’exploitation et de gestion de l’environnement. À cet égard, l’engagement de tous les acteurs est indispensable.

Pour aller plus loin

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Eléments de doctrine. MEDAD-Agence des Aires Marines Protégées. Présentation Power point.

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Le mauvais état de certains bateaux est un danger pour les AMP

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