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LES AIRES PROTÉGÉES EN ZONES HUMIDES

Catégorie VI : aire protégée de ressources naturelles gérée

LES AIRES PROTÉGÉES EN ZONES HUMIDES

Samraoui BOUDJÉMAet Patrick TRIPLET

LES AIRES PROTÉGÉES EN ZONES HUMIDES

coutumes qui préservent l’eau et contribuent à la protection de la biodiversité. Le système des foggaras au Sahara est un exemple qui illustre à merveille l’utilisation rationnelle et équitable d’une ressource vitale, l’eau, dans un environnement à l’aridité extrême.

Le marécage à papyrus de 5,3 km2de Nakivubo, près de Kampala, en Ouganda, joue un rôle essentiel dans l’épuration des eaux du ruissellement urbain et de l’émissaire d’évacuation de la station d’épuration de Kampala, un service estimé à 1,5 millions de dollars par an.

Le bassin versant du lac Tchad concentre plus de 20 millions de personnes dont les principales activités sont la pêche, l’agriculture et l’élevage. Le rôle socio-économique du lac Tchad est menacé par des sécheresses plus fréquentes et par une contraction marquée de la taille de cette zone humide majeure (quatrième lac africain en superficie).

Mais au-delà de ce rôle local ou régional, les zones humides, pour peu qu’elles soient gérées de manière rationnelle afin de préserver leurs fonctions, peuvent jouer un rôle de moteur du développement économique, social et culturel, contribuant ainsi à la promotion du développement durable de l'Afrique.

Le problème de l’accès à l’eau par les populations peut illustrer un des rôles que les zones humides peuvent être amenées à jouer dans l’avenir. La caractéristique première de bon nombre de pays africains est la pénurie d’eau. Des millions de personnes n’ont toujours pas un accès direct à l’eau. Et la situation s’aggrave. Quatorze pays d’Afrique pâtissent déjà d’une raréfaction de leurs ressources en eau et on estime que 11 autres pays devraient connaître le même sort à l’horizon 2025. Les zones humides, et les aires protégées qui les sauvegardent, peuvent aider à assurer un meilleur ravitaillement en eau des populations.

Elles peuvent également aider à solutionner certains problèmes politiques liés à l’eau. Plus de 80 bassins fluviaux et lacustres du continent africain sont partagés entre deux ou plusieurs États, et de nombreux pays sont tributaires de l’eau apportée par des fleuves et rivières dont la source se situe hors des frontières nationales. La création d’aires protégées transfrontalières peut contribuer à une distribution équitable mais également à rapprocher les humains qui doivent partager cette denrée rare qu’est l’eau, tout en assurant une meilleure conservation de la nature.

Zones humides Surface totale (km2) Pourcentage

- les bassins fermés

- les plaines d’inondation, les marais, les lacs - les forêts inondées et les ruisseaux - les systèmes méditerranéens - les zones humides d’altitude - les rivières et les lacs - les grands lacs - les grands deltas - les grands torrents

- les savanes et les cours d’eau de forêts sèches - les cours d’eau souterrains et les sources - les systèmes xériques

Les principaux types de zones humides d’Afrique (d’après Thième et al., 2005)

Les menaces

- le pompage, le captage de source et toute autre modification du régime hydrologique, pouvant provoquer l’eutrophisation et toutes autres formes de dégradation de la qualité de l’eau,

- le surpâturage, les défrichements et la surexploitation des ressources,

- l’introduction d’espèces exogènes à des fins de production, telle l’introduction de poissons dans des habitats où ils provoquent la disparition des espèces indigènes,

- l’industrie, comme l’industrie touristique, très exigeante en eau,

- et plus généralement l’ensemble des activités liées à l’urbanisation.

D’autre part, la demande de terres et la déforestation, les demandes en eau, les barrages et la pollution sont autant de menaces qui pèsent sur les zones humides d’Afrique. À cela, s’ajoutent la pression croissante sur le poisson et la surpêche, l’arrivée et le développement d’espèces végétales et animales invasives.

De nos jours, les espèces invasives se sont multipliées et leurs menaces pour la diversité se sont accrues. Pour y faire face, la convention sur la diversité biologique (CDB) a mis en place un vaste programme de sensibilisation avec un volet important consacré aux aires protégées et aux zones humides.

Les aires protégées sont parfois, dans un pays, les seuls territoires sur lesquels subsistent des habitats et des espèces de haute valeur patrimoniale. Elles doivent donc

faire l’objet d’une attention spéciale de la part des gestionnaires et des autorités pour éviter que des espèces invasives ne viennent concurrencer les espèces locales ou modifier durablement, voire définitivement les habitats. Les zones humides figurent parmi les écosystèmes les plus menacés par l’intrusion d’espèces exogènes, animales ou végétales. Les récentes publications de la CDB(Tu, 2009;

Secrétariat de la Convention sur la diversité biologique, 2009) constituent des outils de connaissance des espèces et des méthodes de lutte qui doivent orienter le travail des gestionnaires des aires protégées (voir également la fiche relative aux espèces invasives).

La nécessité de la mise en place d’une protection

Quand ces zones humides importantes pour la conservation sont trop exposées aux activités humaines, leur mise en protection s’avère être un moyen efficace de les gérer et d’apporter des solutions à leurs problèmes de gestion. La connaissance de nombreux sites est encore incomplète.

La caractérisation de leur richesse biologique concerne souvent les oiseaux, et les dénombrements de la mi-janvier constituent une source importante d’informations à partir de laquelle il est possible de désigner des sites à la convention de Ramsar et de leur appliquer un régime particulier de conservation, en parc national ou en réserve.

Mais le critère oiseau ne prend pas en compte les autres groupes animaux et végétaux alors que de nombreuses zones humides sont précieuses pour ces aspects de la biodiversité qui, étant ignorés, restent non protégées, avec le risque de disparaître ou d’être altérés, avec toutes les conséquences que cela peut avoir sur la biodiversité en elle-même mais également sur les services à long terme que peuvent rendre les zones humides protégées pour les populations locales (réservoir d’espèces pouvant être exploitées pour l’alimentation, développement des ressources économiques par l’écotourisme,…).

D’autre part, l’absence d’institutions chargées des zones humides au niveau national est une contrainte à leur préservation. Ceci constitue une triste réalité dans la plupart des pays francophones malgré les efforts déployés actuellement dans le domaine des renforcements des capacités par les États et certaines institutions partenaires locales et régionales.

L’absence d’une politique spécifique aux zones humides reste une cause majeure du recul de ce type d’écosystème en Afrique de l’Ouest pour 78,6 % des pays. Il est parfois préférable de disposer d’une stratégie de création d’aires protégées au cas par cas plutôt que d’attendre la mise en place d’une stratégie nationale qui se heurte à des intérêts contradictoires.

Le développement du concept de réserves communautaires, dans lesquelles la protection est voulue et

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appliquée par les populations, constitue une réponse immédiate et efficace au besoin de protéger un patrimoine vital pour la conservation des ressources.

Modes de gestion

Une bonne gestion des milieux se caractérise par des objectifs clairs, des moyens adéquats et de bons résultats, par l’intermédiaire d’un plan de gestion, par exemple. Le plan de gestion intégrée s’inscrit dans une démarche novatrice qui concilie la conservation et le développement. Il repose généralement sur deux axes stratégiques : l’intervention sur site et le renforcement des capacités des acteurs.

Les principales orientations du plan de gestion sont : - la conservation de la diversité biologique,

- l’application des principes de l’approche intégrée,

- la participation des populations à la gestion des ressources, - l’appui institutionnel.

Plus encore que dans les milieux terrestres, la conjugaison de la connaissance et de l’évaluation des mesures est, en zones humides, la condition essentielle pour assurer une parfaite conservation de leur fonctions. La discussion, l’élaboration et l’observation par les communautés intéressées de règles communes d’utilisation des ressources accessibles et de codes de conduite, doivent permettre d’impliquer toutes les populations dans la préservation des zones humides.

La formulation et la mise en œuvre de plans de gestion doivent contribuer à : - créer ou restaurer des aires protégées,

- créer des mécanismes participatifs pour l’aménagement et la gestion des ressources (comité de gestion),

- associer la recherche aux différentes étapes du plan de gestion : élaboration, mise en œuvre, suivi-évaluation.

Le dénombrement des oiseaux d’eau qui intervient le 15 janvier de chaque année est un dispositif intégré dans la gestion des aires protégées. Il fournit aux gestionnaires des informations essentielles pour constituer une base de donnée sur la migration des populations d’avifaune (effectifs, composition spécifique, variation, etc.) et des indicateurs sur les rapports entre la santé de l’écosystème et la dynamique de la migration.

Toutefois, les dénombrements de la mi-janvier sont irréguliers sur de nombreux sites, ce qui empêche souvent le calcul de tendances qui peuvent apporter des informations sur l’état de santé des espèces au plan local.

Mesures pouvant être prises

Afin d’arrêter la perte et la dégradation des zones humides, il est impératif de disposer d’un système permettant de suivre :

- les modifications de la superficie de la zone humide, - les modifications du régime hydrologique,

- les modifications de la qualité de l’eau, - l’exploitation des produits de la zone humide,

- l’introduction d’espèces exogènes et des espèces invasives, - le suivi des actions de gestion et de restauration.

En matière d’actions, chaque gestionnaire d’aire protégée doit :

- mobiliser les compétences et les ressources financières en faveur des zones humides, - encourager l'inventaire, l'évaluation écologique des zones humides,

- encourager la préservation des zones humides vulnérables,

- recenser et vulgariser les pratiques locales d'utilisation rationnelle des zones humides, - identifier et maîtriser les facteurs qui provoquent la dégradation des écosystèmes aquatiques, - renforcer et promouvoir les capacités en matière de gestion des zones humides,

- former les spécialistes des zones humides, - sensibiliser les utilisateurs des zones humides.

Pour en savoir plus

Secrétariat de la Convention sur la diversité biologique (2009) Espèces exotiques envahissantes, une menace à la diversité biologique. CDB, PNUD, 26 p., www.cbd.int

SINNER J., BEAUMONDN., PIROTJ.-Y. (1994) Manuel de formation à la gestion des zones humides tropicales. Programme Zones humides de L’UICN, 272 p.

THIEMEM. L., ABELLR., STIASSNYM. L. J., SKELTONP., LEHNERB., TEUGELS G. G., DINERSTEIN

E., THOAMA. K., BURGESSN., OLSOND. (2005) Freshwater ecoregions of Africa and Madagascar.

Island Press, Washington, Covelo, London, 431 p.

TU, M. (2009) Assessing and Managing Invasive Species within Protected Areas. Protected Area Quick Guide Series, Editor, J. Ervin. Arlington, VA, The Nature Conservancy, 40 p.

Wetlands International (2003) Stratégie régionale en Education et Sensibilisation du Public sur les Zones humides. Wetlands International ISBN910 5882 9677, Wageningen

VANDEWEGHEJ.-P. (2003) Les milieux humides côtiers du Gabon : les rias du nordet le Bas-Ogooué Canopée25. 3-8

ZELLAL. & SMADHID. (2006) Gestion de l’eau dans le milieu aride, le cas des oasis algériennes. dans ELHADJIM., SENEM., THIAWI. & LAMIZANA-DIALLOB. Gestion des zones humides en milieux arides:

leçons d’expérience. Gland, Suisse et Cambridge, Royaume-Uni, UICN, XVIII + 86 p.

http://www.tourduvalat.org/la_tour_du_valat/les_zones_humides/differents_types_de_zones_humides

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