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IMPLANTES COCHLEAIRES

II.3.4. Cotation des tests développementaux validés et codage du test perceptif

II.3.4.1. Cotation du Brunet-Lézine

Pour chaque item la cotation est notée en termes de réussite ou d’échec sur une feuille de niveau (cf. Annexe 6), par tranche d’âge. Comme expliqué dans la partie « Passation », les épreuves présentées en premier sont celles correspondant à l’âge de l’enfant. En cas d’échec, les épreuves sont présentées jusqu’à la réussite complète de tous les items d’un âge donné. Cet âge est déterminé comme étant l’âge de base. Tous les items des âges inférieurs à cet âge de base sont considérés comme acquis.

Chaque niveau d’âge comporte 10 items, avec une répartition des secteurs de développement (posture, coordination oculo-manuelle, langage, sociabilité) différente en fonction des comportements attendus à chaque âge (e.g. le nombre d’items posturaux diminue à mesure que l’âge augmente, alors que le nombre d’items langagiers évalué pour chaque tranche d’âge augmente avec l’âge). Chaque niveau d’âge est crédité de 10 points. Cependant, les niveaux d’âge testés s’espacent à mesure que les enfants grandissent : le développement est évalué tous les mois jusqu’à dix mois, puis par paliers de deux mois

entre 10 et 14 mois, de trois mois ensuite jusqu’à 20 mois, de quatre mois entre 20 et 24 mois, et enfin de 6 mois entre 24 et 30 mois. « Les 10 items de chaque niveau reçoivent (donc) respectivement 10, 20, 30, 40 ou 60 points, suivant qu’il y a 1, 2, 3, 4, ou 6 mois d’intervalle entre deux niveaux successifs » (Josse, 1997, p.151). Ces points sont ensuite convertis en âges de développement partiels (en mois et en jours) pour chaque secteur de développement, à partir de tables de conversion présentes dans le manuel. La somme des points obtenus pour les quatre secteurs de développement peut-être lui aussi converti en âge de développement global. Ces âges de développement (partiels et global) peuvent ensuite être transformés en quotients de développement (QD) en faisant le rapport suivant :

Age de développement (en jours)

Age chronologique (en jours) x 100, en considérant qu’un mois est égal à 30 jours.

Un QD global et des QD partiels sont donc obtenus. Le QD global permet d’estimer l'écart entre l'âge de développement et l'âge réel, tandis que les QD partiels permettent d'établir un profil qui donne des indications plus précises sur la dispersion des résultats et le niveau obtenu dans chaque secteur. Notons néanmoins que les quotients de développement partiels ne permettent pas une comparaison rigoureuse et seront utilisés avec prudence.

Compte-tenu de notre population atypique, la cotation de cette échelle a soulevé plusieurs questions que nous aborderons ci-dessous.

II.3.4.1.1. L’âge de base

Le principe de cotation selon un âge de base, pour des populations atypiques dont le développement est hétérogène (chuté dans un seul domaine) pose question. En effet, les enfants peuvent réussir un item à un âge et échouer malgré tout, tous les précédents, alors même, qu’avec ce principe, ces items lui sont crédités. Prenons un exemple concret : l’item de langage de 7 mois « utilise des émissions vocales, des gestes, ou crie pour attirer l’attention » peut être obtenu par beaucoup d’enfants sourds âgés de plus de 7 mois, sans qu’ils soient forcément capables de réagir « immédiatement à l’appel de [leur] prénom », de « montrer de l’intérêt aux bruits extérieurs », ni même de « tourner la tête immédiatement pour regarder la personne qui parle », items de langage respectivement attendus à 6, 5 et 4 mois. Cette situation se répète à 9 mois. Les enfants sourds de notre population âgés de plus de 10 mois peuvent parfois « émettre des syllabes redoublées », et répondre à tous les autres items non-langagiers attendus à 9 mois, sans toutefois être capables de réagir à « certains mots familiers (à l’oral) » (item attendu à 8 mois).

Nos décisions de cotation :

Afin de ne pas modifier la construction de cette échelle, nous avons suivi la règle de l’âge de base à la lettre. Cependant, une analyse qualitative sera indispensable afin de comprendre les fonctionnements individuels et de nuancer les QD partiels et globaux, surcotés à cause de ce mode de cotation, non adapté pour les populations présentant des déficits dans un seul des domaines.

II.3.4.1.2. Adaptations liées aux caractéristiques de la surdité Un deuxième problème, concernant la passation elle-même a été abordé. Notre cohorte étant composée d’enfants sourds implantés, doit-on adapter le test (la passation et la cotation) à nos sujets? En effet, le peu d’outils concernant l’évaluation des enfants sans langage nous amène à utiliser des outils développés pour évaluer des enfants typiques, normo-entendants. Or, la comparaison d’une population dite atypique à une population d’étalonnage d’enfants dits typiques, avec des outils construits pour évaluer cette dernière, génère de fait une interprétation fondée sur un constat de retard (Tourrette, 1997). Ce constat serait très certainement réalisé à l’inverse si nous devions proposer un test en LSF à des enfants entendants. Pourrait-on à ce moment-là considérer qu’ils sont en retard dans leur développement du langage ?

Que doit-on alors faire ? Est-il pertinent de supprimer de la cotation les items faisant intervenir l’audition ? Doit-on les remplacer par des items visuels ? Concernant le mode de communication à employer, doit-on proposer, lors de la passation, toutes les situations à l’oral seul en première instance puis ajouter du signe ou du code si nécessaire, puisque la validation de l’échelle a été réalisée à l’oral seul ? Cela ne va-t-il pas alourdir voire entraver les interactions ?

Ce problème en entraine un troisième : celui de la cotation elle-même. Ne doit-on coter alors que les items réussis en langue orale seule pour ne pas biaiser les résultats basés sur une validation à l’oral ? Ou peut-on considérer comme acquis des items qui, au lieu d’être réussis en langue orale, l’ont été en Langue des Signes Française ou à l’aide de la LPC ? Enfin, doit-on préférer comparer ces enfants entre eux, sans faire de référence à la « norme » ?

Nos décisions de cotation :

Nous avons choisi de dissocier les résultats avec et sans LSF. En effet, pour ne pas perdre la validité intrinsèque du test, et pouvoir réaliser une comparaison par rapport à la norme, nous avons décidé de réaliser une cotation du test à l’oral seul. Cependant une cotation en prenant en compte les capacités des enfants tous modes de communication confondus en production comme en réception (utilisation de la langue des signes et/ou de clés de la LPC), a également été réalisée afin de mieux décrire les capacités réelles des enfants. Ainsi, dans cette deuxième cotation, l’item « dit cinq mots » attendu à 17 mois est considéré comme acquis si l’enfant a cinq signes ou plus, alors même qu’il peut échouer tous les items inférieurs relatifs à la langue orale (émet des syllabes redoublées, dit un mot de deux syllabes…).

Ces items auraient pu être également être observés en langue des signes, puisqu’un babillage en LSF existe au même titre que le babillage vocal, et qu’une structure syllabique spécifique peut en être dégagée (Miller, 2000). Cependant, nos compétences en Langue des Signes ne permettant pas de les observer, nous ne sommes pas descendus en-dessous de l’unité-mot pour coter les capacités en Langue des Signes. Par ailleurs, la LSF n’étant pas la langue maternelle des enfants, le babillage signé n’est forcément présent chez eux.

En revanche, comme à l’oral où l’on accepte les mots « déformés pourvus qu’ils aient une signification nette » (Josse, 1997, p.145), les ébauches de signes ont été prises en compte comme étant un mot-signe acceptable (e.g. « encore » fait avec l’index droit, et non la main droite, tapé deux fois sur la paume de la main opposée).

Ces deux cotations seront présentées dans nos résultats et les dimensions individuelles de l’évolution communicative des enfants sourds porteurs d’un implant cochléaire pourront ainsi être mises en évidence.

II.3.4.1.3. Âge des enfants de notre cohorte

Certains enfants de notre échantillon dépassent l’âge de 30 mois. Cependant, les épreuves complémentaires du Brunet-Lézine (adressées aux enfants âgés de 2 à 6 ans), ne permettant pas de faire une analyse fine des compétences par domaine comme le propose le BL-R, nous avons choisi de ne pas l’utiliser. De fait, il se peut que des enfants plafonnent aux items de posture et de coordination oculo-manuelle, mais soient loin des 30 mois d’âge au test pour le langage. Comment faire dans ces situations ? Pour les quotients de développement, doit-on diviser leur âge par leur âge réel ou par 900, âge plafond du test, étant donné que les compétences ultérieures n’ont pas été évaluées ?

Nos décisions de cotation :

Nous avons considéré que l’utilisation de ce test pouvait être intéressante, y compris avec les enfants de notre cohorte âgés de plus de 30 mois, afin d’observer finement leur développement langagier au regard de leur développement global. Cependant étant bien conscients du risque de plafonnement des performances des enfants, notamment dans les domaines de posture et de coordination oculo-manuelle, nous avons pris la décision de ne suivre, chez ces enfants, que l’évolution des domaines ne plafonnant pas. En effet, ne pouvant pas affirmer que les capacités des enfants sont égales à leur âge dans les sous- échelles où ils ont atteint le plafond de 30 mois, nous ne pouvons pas leur créditer un QD de 100. Il serait également faux de calculer un QD par rapport à leur âge réel pour ces domaines.

En revanche, les QD partiels pour les items n’ayant pas atteint le plafond seront calculés à partir de l’âge réel des enfants. En effet, nous considérons que s’ils n’ont pas acquis les compétences attendues avant 30 mois, ils n’auront probablement pas non plus acquis des capacités attendues à leur âge réel dans ces domaines.

II.3.4.1.4. Fiabilité des données inter-observateurs

Nous n’avons pas jugé nécessaire, pour cette épreuve, de réaliser de cotation inter- juges. En effet, les épreuves proposées évaluent des comportements facilement observables (nombres de cubes empilés, marche,…) qui laissent peu de place au jugement subjectif de l’observateur.