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Chapitre 2 - Repères épistémologiques et méthodologiques méthodologiques

6. Choix méthodologiques et procédures effectives

6.4. Stratégie d'étude

6.5.2. Les CoP approchées, vraiment des CoP ?

Mon mode d'approche ne se soucie pas de savoir si j’ai affaire réellement à une CoP ou pas, ce qui m’importe est de rencontrer des personnes qui se qualifient comme animatrices de CoP, ou qui se reconnaissent dans la définition transmise. Cependant, je me suis interrogé à maintes reprises sur la présence des CoP : ai-je affaire à une CoP ? À partir de quand un groupe devient-il une CoP ? Comment distinguer une CoP des autres formes de regroupement qui émergent de la littérature et dans les entreprises contemporaines ? Quels moyens pour les identifier ? Quand le doute s'installait sur la présence ou non d'une CoP, j’ai soumis une grille aux personnes après l'entretien pour évaluer cette présence. Pour ce faire, je me suis inspiré de Cappe (2005) qui pour sa recherche a élaboré un instrument pour détecter des CoP émergentes sur la base des définitions de Wenger :

- le concept de CoP est fondé sur un principe de collaboration ;

- « L’engagement mutuel est caractérisé par la volonté de chaque membre de mettre à disposition de la communauté ses savoirs et savoir-faire » (p.5). Il est marqué par une relation d'entraide, une appréhension commune (manière de s'engager, vision commune, discours partagé) et une connaissance mutuelle de qui fait quoi ;

- « L'entreprise commune est une implication volontaire et spontanée des membres de la communauté dans une action collective » (p.6). Elle résulte de la participation et de la réification débouchant sur un répertoire partagé : outils et autres artefacts issus de l'expérience ;

- la pratique est le savoir spécifique que la communauté développe, partage et conserve. Cela se traduit par des besoins de savoirs et des pratiques similaires.

Cappe rassemble ensuite les concepts-clés et les composantes des CoP dans une grille afin d'obtenir des critères d'identification de ses « graines de CoP ».

Table 9 : critères d’identification des graines de CoP (Cappe, 2005, p.8)

CoP de CP

Domaine Sujet d’intérêt commun

Communauté Entreprise commune Action volontaire

Engagement mutuel Entraide

Appréhension commune Connaissance mutuelle

Répertoire partagé Outils partagés

Histoires

Pratique Besoin de savoirs similaire

Pratique similaire

À partir des travaux de Wenger (1998) et de Cappe (2005), tout en distinguant ce qui caractérise une CoP des autres structures relationnelles ou formelles de l'entreprise (groupe fonctionnel ou équipe projet), j’ai légèrement adapté la grille de Cappe pour m’aider à évaluer la présence d'une CoP lors des entretiens ou à leur suite. Les critères recherchés s'accompagnent d'indicateurs qui ont pu servir à questionner leur présence.

Table 10 : indicateurs de présence de CoP

Critères Axe de questionnement

Sujet d’intérêt Il existe un réseau informel de personnes s’intéressant à un sujet spécifique sur le long terme, en dehors d'un projet, d'une tâche liée à un objectif ou une mission formelle.

Moteur des relations

Les personnes se mettent en relation pour partager des ressources, des expériences, des savoirs, apprendre, s’intégrer, faciliter le travail, bénéficier de liens affectifs…

Action volontaire

Les membres s’impliquent régulièrement dans des actions communes, non contrôlées par le management, non obligatoires, mais nécessaires.

Entraide Plusieurs personnes s’entraident systématiquement (conseil, partage, collaboration).

Appréhension commune

Plusieurs personnes ont développé ensemble une même vision de leur activité (ce qui est utile / ce qui ne l'est pas, comment le travail doit être fait, par qui, pourquoi).

Connaissance mutuelle

Les personnes savent qui sait quoi, ou le font savoir (compétences, connaissances, centres d'intérêt...)

Outils / Répertoires partagés

Il existe un répertoire partagé, des outils adoptés par l’ensemble du groupe, des (nouvelles) façons de faire singulières...

Pratiques similaires / Histoires

Il existe un partage régulier d’histoires, de la pratique, de retours d’expérience.

Besoin de savoirs similaires

Plusieurs personnes œuvrent régulièrement à obtenir les savoirs dont elles ont un besoin commun.

À cette grille, j’ai ajouté des indicateurs secondaires susceptibles d'être repérés, que j’ai pu questionner ou auxquels je suis resté sensible dans les discours (issus de Wenger, 1998), bien qu'une grande partie d'entre eux soient des comportements essentiellement observables :

- un fort sentiment d'identité lié à la communauté (par exemple « nous, les techniciens », « entre vendeurs, nous... ») ;

- la pratique elle-même non entièrement formalisée. Les gens apprennent à faire ce qu'ils font et deviennent perçus comme compétents (ou non) au cours de leur pratique de concert avec d'autres ;

- la présence de relations mutuelles continues - harmonieuses ou conflictuelles (telles que des interactions régulières liées au travail, des débats) ;

- des façons communes de voir ou de faire des choses ensemble (telles que des croyances communes sur les meilleures pratiques) ;

- une diffusion rapide de l'innovation entre les membres (telle que la circulation d'une bonne pratique, d'un artefact) ;

- des conversations directes, des raccourcis, pour aller à l'essentiel ;

- une saisie rapide des problèmes (telle qu’une compréhension commune du problème, de l'environnement) ;

- un consensus parmi les membres au sujet de qui est "in" et qui est "out" ;

- une prise de conscience généralisée et partagée des compétences de chacun, les forces, les faiblesses et les contributions ;

- une capacité, concentrée ou distribuée, pour évaluer l'efficacité des mesures prises et l'utilité des productions (produits, artefacts, processus...) ;

- des outils communs, des méthodes, des techniques et des objets tels que des formulaires, des outils de travail, etc. ;

- des histoires communes, des légendes, des coutumes, des blagues « internes », etc. ;

- un langage partagé et évolutif (tel que des termes spécifiques, un jargon, des acronymes...) ;

- des perspectives traduites dans un langage qui propose une façon commune de voir le monde (tel que des analogies partagées, des exemples, des explications, etc.).