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Contexte Européen

Dans le document TTHHÈÈSSEE En vue de l'obtention du (Page 78-84)

CHAPITRE 2 : TRANSGENESE VEGETALE

8. Comment la fabrication des PGM est-elle encadrée ?

8.1 Contexte Européen

Jusqu'en 1997, l'Europe autorise l'importation des PGM notamment à destination non alimentaire, mais elle interdit leur mise en culture. Ensuite, elle a fait le choix de n'accorder que des autorisations au cas par cas, en prenant en compte les caractéristiques du transgène construit. En fait, elle a opté pour une réglementation spécifique aux variétés transgéniques qui prend en considération les caractéristiques du produit commercialisé, "mais elle considère aussi son procédé d'obtention" (Gallais et al., 2006, p. 198), contrairement à la réglementation américaine que nous verrons par la suite.

8.1.1 Cadre européen de la réglementation

Jusqu'en 1996, les législations et les pratiques des Etats européens concernant les organismes génétiquement modifiés restent encore disparates. La directive européenne sur la dissémination volontaire des OGM a pris naissance suite au processus de conciliation entre les positions de la Commission Européenne et celles du Parlement Européen. La principale évolution concerne la reconnaissance de l'amendement 39 du Parlement Européen qui prévoit la mise en place d'un registre des implantations d'OGM en Europe.

La première autorisation de mise sur le marché est donnée en 1994. Il s'agit d'un tabac produit par la SEITA résistant à un herbicide (Raffin, 2001). À partir de 1996, les autorisations ont commencé à se multiplier avec diverses variétés de maïs, soja et colza. Jusqu'en 1998, des projets de révision de la directive 90-220 entre la Commission Européenne et le Parlement Européen sont entrepris sans qu'aucun accord ne puisse aboutir.

La réglementation était prononcée, au début, sur des microorganismes génétiquement modifiés (MGM), ensuite sur des PGM. L'expérimentation en milieu confiné constitue le premier objet de la réglementation sur les organismes génétiquement modifiés, puis la

"dissémination involontaire d'OGM" constitue le deuxième pan complémentaire de la réglementation. La réglementation sur l’utilisation des PGM (en particulier) a pour origine la directive 90/220 du 23 avril 1990 (Béranger & Reverbori, 1998) qui concerne l'utilisation des organismes génétiquement modifiés en milieu confiné ainsi que les plantes et les cellules dont elles sont issues. Ensuite, la mise sur le marché forme un troisième corps de règles.

En nous référant au rapport "Place de la biotechnologie en France et en Europe" (janvier 2005), nous constatons une succession de directives en fonction du développement des savoirs scientifiques et du perfectionnement des techniques mises en œuvre (transgénèse, clonage…). Nous notons la directive 90/219/CEE du Conseil, du 23 avril 1990, relative à l'utilisation confinée de microorganismes génétiquement modifiés (MGM), la directive 98/81/CE du Conseil modifiant la directive 90/219/CEE relative à l'utilisation confinée de MGM, etc.

Dans la directive 90/210/CEE, la Commission européenne souligne l'importance des dispositifs réglementaires en matière de PGM et qu'il est impératif que les progrès technologiques et les avancées scientifiques à venir soient pris en compte dans le processus de réglementation. En outre, la veille des experts et des citoyens a suscité en grande partie la progression des réglementations sur les OGM : la directive 90/220/CEE a été abrogée par la directive 2001/18/CE du parlement Européen du conseil du 12 mars 2001 relative à la dissémination volontaire d'organismes génétiquement modifiés dans l'environnement. Cette directive recommande la mise en place d'un système de surveillance afin d'encadrer la dissémination des PGM et minimiser les risques potentiels pour l'environnement. Dès lors, différentes mesures de protection étaient mises en place. Ces mesures se déclinent en la biovigilance, l'étiquetage, la traçabilité. Concernant la traçabilité, des problèmes d'échantillonnage, d'estimation de seuils de tolérance… se posent, car les quantités analysées sont minimes par rapport aux quantités à contrôler.

8.1.2 Quelques mesures de protection

Nous nous limiterons au problème de fixation d'un seuil "raisonnable" de tolérance selon l'expression de Gallais et al. (2006) et à l'idée de création de fonds d'indemnisation27.

8.1.2.1 Estimation du seuil de tolérance fortuit

Il convient de noter qu'il est impossible d'éviter toute dispersion involontaire de PGM dans l'environnement, "tout projet de mise en place des filières sans aucune trace d'OGM est voué à l'échec - sauf à interdire totalement l'utilisation de cette technologie nouvelle dans l'environnement" (Rapport Les enjeux des essais et de l'utilisation des organismes génétiquement modifiés, 2005, p. 63). Qu'il s'agisse de semences ou d'aliment, il est important de définir des seuils de tolérance fortuite d'OGM.

Depuis l'année 1998, une réelle clarification de la réglementation sur les OGM notamment en France a eu lieu. Un seuil de tolérance de contamination des cultures est identifié. Le règlement n°1829/2003/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 septembre 2003 sur

27 Dans l'expérimentation proposée, la situation-problème II (épisode 3) porte sur les enjeux de ces mesures de

les denrées alimentaires et aliments pour animaux génétiquement modifiés, entré en vigueur le 18 avril 2004, introduit de nouvelles règles en matière d’étiquetage et de traçabilité. En effet, une contamination fortuite est tolérée jusqu’au seuil de 0,9% (0,5% si l’OGM est en cours d’autorisation).

Pour les aliments génétiquement modifiés pour les animaux, le seuil de présence fortuite est de 1%. Une procédure est en cours d’étude pour fixer les seuils de présence différenciés suivant les espèces végétales (Rapport du Sénat : Place de la biotechnologie en France et en Europe, janvier 2005).

La définition du seuil de tolérance fortuit ainsi que la définition des règles de distance (entre culture OGM et non-OGM) permettraient de limiter les risques de présence fortuite d'OGM, mais ces dispositifs sont objet de débat. En effet, la définition d'une distance minimale de séparation entre parcelles OGM et non-OGM diffère d'une étude à une autre. Selon le rapport sur Les enjeux des essais et de l'utilisation des organismes génétiquement modifiés (2005, p.

66) "les règles de distance entre parcelles OGM et non OGM adoptées pour le maïs sont très diverses selon les pays et ne sont pas toujours en phase avec ces résultats :

- selon les informations recueillies par la mission au ministère espagnol de l'environnement, un projet de décret prévoirait une séparation de 25 à 50 mètres (nécessairement plantés en maïs conventionnel) ;

- de même, aux Pays-Bas, un accord conclu le 2 novembre 2004 entre les organisations agricoles et le ministère chargé de l'agriculture prévoit une séparation de 25 mètres (250 mètres pour le maïs biologique ;

- les distances de séparation s'élèvent, en revanche, à 200 mètres au Danemark (premier pays de l'Union européenne à avoir adopté, le 9 juin 2004, une loi sur la coexistence des cultures OGM et non-OGM) et 250 mètres en Argentine.

8.1.2.2 Projet de création de fonds d’indemnisation

Le projet consiste à prévoir une indemnisation des agriculteurs dont les parcelles de culture non-OGM contiendraient plus de 0,9 % d'OGM. "Il convient donc de mettre en place un régime de responsabilité et de solidarité permettant une indemnisation systématique des producteurs dont les parcelles de culture non-OGM contiendraient plus de 0,9 % d'OGM"

(Rapport sur Les enjeux des essais et de l'utilisation des organismes génétiquement modifiés, 2005, p. 69).

Dans le cadre de la gestion de la coexistence entre cultures génétiquement modifiées et cultures conventionnelles, la Commission européenne a autorisé, le 23 novembre 2005, le Danemark à constituer un fonds d’indemnisation qui couvrira les pertes économiques liées à la contamination des récoltes lorsque la contamination dépasse 0,9 %. Les procédures d’autorisation de la mise en culture des PGM, la création de fonds d’indemnisation sont objets de débat au sein même des décideurs de ces projets.

Les dispositifs réglementaires concernant les OGM sont très variables d'un endroit à un autre (notamment entre l'Europe et les Etats-Unis). Bien que la réglementation américaine se soit emparée en 1984 des organismes génétiquement modifiés, elle semble moins stricte vis-à-vis de l'estimation et de la gestion des risques environnementaux que la réglementation européenne. Au niveau de l'Europe, ce sont les directives (Parlement européen, Commission européenne) qui fixent les mesures obligatoires prises afin de limiter la dissémination volontaire des OGM alors qu'en Amérique ce sont les agences qui sont impliquées dans

l'encadrement réglementaire et dans le processus de développement de variétés transgéniques.

Parmi ces agences, nous citons l'USDA (US department of agriculture), de la FDA (Food and Drug Agency) et de l'EPA (Environmental Protection Agency).

Jusqu'en 2004, la réglementation américaine ne couvre que les stades de fabrication des PGM qui devancent la commercialisation. Elle n'est pas responsable de la phase post-commercialisation des PGM. Nous présentons ci-après un aperçu sur l'approche réglementaire américaine en matière de PGM.

8.2 Aperçu sur l'approche réglementaire américaine

8.2.1 Principes de la réglementation américaine sur les OGM

Le premier dispositif réglementaire a été mis au point en 1984. En effet, l'Office of Science and Technology Policy (OSTP) a publié le texte fondateur "Coordinated framework for regulation of Biotechnology". Selon l'approche réglementaire américaine, les OGM sont des produits comme les autres (non génétiquement modifiés). Deux principes dirigent la réglementation américaine concernant l'autorisation d'expérimentation en champ ou de mise en marché des OGM28 :

"- les risques liés à l'utilisation des OGM sont de même nature que ceux qui résultent de l'introduction dans l'environnement de nombreux organismes non génétiquement modifiés ; - L'évaluation des risques relatifs à l'introduction d'un OGM dans l'environnement ne doit prendre en compte que la nature de l'organisme et de l'environnement dans lequel il est introduit, et non la méthode selon laquelle il a été modifié." (Fiche 1).

L'Animal plant Health Inspection Service (APHIS) est une agence qui s'occupe des problèmes phytosanitaires des cultures selon le Federal Plant Protection act. La création de PGM peut utiliser des agents pathogènes (par exemple, certains transgènes sont construits à partir d'un activateur (séquence d'ADN) du virus du chou-fleur). Dès lors, toute PGM est considérée comme un "regulated article" qui désigne :"tout organisme considéré comme agent pathogène des plantes ou qui contient du matériel génétique d'un agent pathogène" (fiche 2). Le principe de "regulated article" constitue la base juridique qui justifie le suivi et la réglementation de la dissémination des PGM dans l'environnement. L'APHIS contrôle, actuellement, toutes les plantes génétiquement modifiées en délivrant les notifications pour l'introduction des

"regulated articles" dans l'environnement.

L'EPA (Environmental Protection Agency), par contre, a l'autorité de réglementer la vente et la distribution des pesticides selon le Federal Insecticide Fungicide and Rhodentidide act.

Ceci constitue la base juridique de L'EPA pour contrôler les plantes transgéniques ayant la potentialité de résister aux insectes (cas du maïs Bt résistant à la pyrale). Il s'agit de "plant-incroprtated protectant" ou PIP qui désigne un "élément pesticide, produit par une plante vivante dans un de ses tissus…il était autrefois appelé plant-pesticide" (Fiche 3). l'EPA est responsable de la délivrance des autorisations avant tout essai en champ des PIP.

En 2004, plus de 60 cultures génétiquement modifiées étaient commercialisées sur le territoire américain et plusieurs milliers étaient en cours d'essais en champs. Dans le cadre de la mise

28 Fiche de synthèse : les principes de la réglementation américaine des OGM. (janvier, 2003). MINEFI – DREE/TRÉSOR. Rapport sur la place des biotechnologies en France et en Europe. Annexe 1 : La réglementation des biotechnologies végétales aux Etats-Unis, (janvier 2003) publication de la mission économique de

en place des mesures de protection en matière de dissémination de transgènes, l'agence l'USDA et l'APHIS sont chargées de suivre les problèmes environnementaux liés à l'emploi des pesticides et à la mise en culture des PGM productrices d'insecticides.

Depuis 1993, l'APHIS propose une simplification dans les démarches d'autorisation à conditions que la plante réponde aux critères suivants :

"La plante doit appartenir à une espèce dont l'introduction en champ est considéré comme peu dangereuse par l'APHIS ;

Le gène intégré est stable dans le génome ;

La fonction du gène introduit est bien définie et son expression ne peut aboutir à une maladie

;

Le gène introduit ne produit pas de substances toxiques pour les organismes non cibles ou de produit destiné à des fins thérapeutiques ;

Si le gène introduit provient de séquences de virus végétaux, il ne doit pas être en mesure de créer de nouveaux virus ;

La plante ne doit pas être modifiée en vue d'intégrer du matériel génétique issu de pathogènes humains ou animaux" (Fiches 1 et 2).

Si la PGM ne répond pas à tous ces critères, elle fait l'objet d'un permis spécial délivré par l'APHIS comme c'est le cas des plantes pharmaceutiques. La commercialisation des PGM est faite suite à une estimation des risques environnementaux. Ensuite, un rapport des essais en champ fait partie du dossier de "dérèglement". La dérèglement est une demande préparée par le producteur des PGM afin de pouvoir commercialiser librement la plante génétiquement modifiée et qu'elle ne soit plus considérée comme un "regulated article". La demande de dérèglement comporte les éléments que la PGM "ne peut significativement être la cause de problèmes phytosanitaires pour les cultures, et environnementaux" (fiche 2).

8.2.2 Les failles du système réglementaire américain

Par rapport au système réglementaire Européen, le système américain comporte certaines failles. Selon le rapport de "Pew Initiative on Food and Biotechnology", association reconnue d'intérêt public, l'évaluation des risques environnementaux liés à la dissémination des OGM dans le milieu naturel n'est suivie presque qu'avant la commercialisation du produit. "… Le gouvernement considère en effet que lorsque la déréglementation du produit a pris effet, il n'en est plus responsable. Les mesures de prévention sont alors laissées à la libre appréciation des producteurs de semences OGM ou des choix des consommateurs" (Fiche 4).

L'APHIS n'a aucun pouvoir sur les cultures après la phase post-commercialisation. Seule l'EPA dispose d'un pouvoir en aval pour la gestion des risques environnementaux. Cependant, sa fonction reste limitée aux pesticides et aux plantes pesticides (PIP).

En 2002, le rapport du National Research Coucil (NRC) met au point la nécessité d'améliorer le système de gestion des risques environnementaux par l'APHIS. Plus récemment, le rapport du NRC (janvier, 2004) invite à améliorer les mesures de prévention après la mise en culture.

Dans ce même rapport, le NRC reproche l'absence totale d'autorité des agences gouvernementales qui surveillent les risques après la déréglementation des PGM. De même, elle souligne l'importance de l'intervention des experts et du public et que l'APHIS seule n'est plus au mesure d'assurer une prévention environnementale efficace. A partir de 2005, l'APHIS se concentre sur la préparation des rapports sur les répercussions environnementales des cultures transgéniques suite à leur implantation croissante en Amérique.

En continuité avec le débat OGM, nous proposons, dans le prochain chapitre, une analyse de la controverse autour de l'impact éventuel des PGM sur la biodiversité (l'interrelation biodiversité-PGM) en s'appuyant sur l'analyse des "faits" et des enjeux reliés à la biodiversité et à la transgénèse développés dans les deux chapitres précédents.

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