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3 | Approche sémantico- sémantico-pragmatique

3.5 SDRT et relations causales

3.1.1 L’analyse du discours

3.1.2.1 Construction des DRS

Une drs-K est une boîte contenant deux types d’information : (i) des référents de discours (Uk), comme des individus (x, y, z), des événements (e1, e2, e3) et le temps de l’énonciation (m) ; (ii) des conditions sur la drs-K, c’est-à-dire des spécifications sur les référents et leurs relations. Les conditions sont des prédicats appliqués à des individus. Une drs est formellement un 2-uplet de référents de discours et de conditions :

Définition 3.1. DRS

Une drs K est un couple hUK, CKi où UK est l’ensemble des référents de discours, l’univers de la drs, et CK l’ensemble des conditions de la drs sur ces référents. Elle est généralement donnée sous forme de boîte :

K: UK CK

Kamp et Reyle (1993, p.86) donnent un algorithme de construction des drs :

Algorithme de Construction des DRS

Entrée : un discours D = P1, . . . , Pi, Pi+1, . . . , Pn et la drs vide K0

Pour i=1,. . .,n : répéter

(i) ajouter l’analyse syntaxique [Pi] de la phrase Pi aux conditions de Ki-1, ce qui donne une nouvelle drs K

i. Aller en (ii).

(ii) appliquer à l’entrée (à l’ensemble de conditions réductibles de K

i) les principes de construction jusqu’à l’obtention d’une drs Ki ne contenant plus que des conditions irréductibles ; recommencer (i).

La drs est une représentation sémantique qui est associée à un discours à l’aide de règles de construction. Un exemple simplifié, faisant abstraction desdites règles et des aspects temporels, serait :

(3.1) a. Pierre mange une glace.

b. K1 :

x, y

P ierre(x)

glace(y)

3.1 Le double héritage de la SDRT 71 La drs K1 a pour univers deux référents de discours x et y, et pour conditions un ensemble de propriétés et de relations attribuées à ces référents.

Chaque nouvelle phrase du discours participe à la construction de la drs du discours, en prenant en compte le contexte (gauche), comme en (3.1) : K1 se construit à partir de K0, qui représente le contexte vide initial. Une suite possible à (3.1), donnée en (3.2), sera intégrée à la drs :

(3.2) a. Pierre mange une glace. Elle coule sur son menton.

b. K0 : K1 : x, y P ierre(x) glace(y) manger(x, y) K2 : x, y, u, v P ierre(x) glace(y) manger(x, y) u= y v = x menton(v) couler− sur(u, v)

Une seule drs sera construite pour représenter un discours. Plus précisément, une drs sera construite pour chaque phrase, puis les référents et les conditions seront intégrés à la drs du discours en construction. Ainsi la niémephrase introduira les référents de UKn et les conditions UKn (cf. (3.3) où les anaphores n’étant pas encore résolues, les conditions sur le nouveaux référents sont de la forme u= ?), qui pourraient représenter l’apport de « elle coule sur son menton » à la drs du discours en construction), lesquels seront ajoutés à la drs du discours qui contient déjà les UKn-1 et les conditions UKn-1 des n-1 phrases précédentes. La drs Kn du discours composé de n phrases sera donc le couple h(UKn-1∪ UKn), (CKn-1∪ CKn)i, comme le montre l’exemple (3.2).

(3.3) Kn: u, v u=? v =? menton(v) couler− sur(u, v)

La traitement séquentiel des « phrases » et leur intégration dans la drs en cours fait que la question de la segmentation du discours dans cette approche sémantique

72 Chapitre 3 Approche sémantico-pragmatique n’est pas vraiment reconnue comme une difficulté.

3.1.2.2 Limites

Le passage de la sémantique « statique » des grammaires montagovienne à la sé-mantique « dynamique » de la drt, (ou d’autres approches contemporaines comme la File Change Semantics proposée par (Heim,1982)) a permis de répondre a cer-tains problèmes de l’interprétation des phénomènes anaphoriques en discours (les

donkey sentences par exemple). Cependant, les solutions apportées ne résolvent

pas toutes les difficultés, parmi lesquelles les anaphores, « [c]onstraints on ana-phora in dynamic semantics both overgenerat[ing] and undergenerat[ing] possible readings » (Asher et Lascarides,2003, section 2.5) ou le traitement de la tempora-lité, la structure temporelle du discours étant dans ce cadre trop dépendante des temps verbaux utilisés8.

La solution proposée par la sdrt de (Asher, 1993; Asher et Lascarides, 2003) pour résoudre ces difficultés est de combiner la sémantique dynamique et les ap-proches travaillant sur la « cohérence » discursive.

3.1.3 Intégration

La Segmented Discourse Representation Theory de (Asher et Lascarides, 2003) est donc l’héritière de deux approches, la sémantique dynamique et l’analyse du discours. L’analyse en sdrt produit une sdrs, une structure (récursive) où des représentations d’unités discursives sont liées par des relations rhétoriques. Ce processus est incrémental (figure 3.1) :

A Il commence par la segmentation du discours en unités minimales, typiquement

en « propositions ».

8. En drt, des règles fixent la contribution des temps verbaux à la drs en construction. La règle pour l’imparfait est donnée ici, où « ≺ » indique la précédence et « ⊆ » l’inclusion temporelle, « s » un état :

R-IMP : une phrase Pi à l’imparfait introduit dans la drs courante un nouveau référent d’état si et les conditions sj ≺n () et R ⊆si; R est le point de référence courant, il coïncide avec le dernier événement e introduit par la dernière phrase au passé simple.

(i) Marie arriva en retard au cinéma. Elle attendait son mari à la maison.

Dans cet exemple, tiré de (Bras, 2008, p. 31), la drt « prédit e1 ⊆ s2 [. . . ] au lieu de s2 e1». Si la règle est ici inopérante, c’est parce qu’une relation de discours s’établit entre ces deux propositions (une relation d’Explication en l’occurrence), et qu’elle vient accompagnée de contraintes temporelles (cf. axiome3.8).

3.1 Le double héritage de la SDRT 73 A. Segmentation B. Module DRT Construction des DRS élémentaires C. Attachement

Choix de la (des) RD et de son (leur) point(s) d’attachement

D. Mise à jour de la SDRS

Glue Logic

Règles d’inférence des RD

Logic of infor-mation content

Règles des effets sémantiques

Figure 3.1 – Étapes de la construction de la représentation du discours en sdrt

B Chaque proposition est ensuite représentée par une drs (un niveau

intermé-diaire entre la structure syntaxique de l’énoncé et son interprétation dans un mo-dèle du monde, une description de ce que devrait être le monde pour que l’énoncé soit vrai. Cette représentation est définie, comme nous l’avons signalé plus haut, par un couple hU, Ci d’ensembles de référents et de conditions).

C Ensuite, il faut déterminer les points d’attachement possibles (sauf, bien sûr,

pour le premier segment) dans la sdrs en cours, puis, à l’aide des règles de déclen-chement, identifier les relations de discours, pour chacun des points d’attachement possibles, et conserver la ou les relations qui construise(nt) la sdrs la plus cohé-rente (Asher et Lascarides, 2003, p.233s). Ces relations de discours, coordonnantes ou subordonnantes, organisent hiérarchiquement les segments.

D Enfin, la sdrs est mise à jour. Cette procédure d’insertion « se subdivise en

plusieurs sous-procédures suivant le contexte (situation du point d’attachement dans la structure et type de relation avec ses antécédents) et le type de relation

74 Chapitre 3 Approche sémantico-pragmatique réalisant l’attachement » (Busquets, Vieu et Asher,2001, p. 96). Après l’insertion, les sous-spécifications présentes dans la DRS nouvellement intégrée sont résolues. Nous détaillerons dans les prochaines sections les différentes étapes sommaire-ment présentées ci-dessus.

3.2 Unités de discours

La drt construit des drs, plus ou moins complexes, pour représenter des pro-ductions langagières qui vont de la phrase au texte/discours. La question de la segmentation du discours en unités n’est donc pas cruciale pour cette approche. La sdrt, comme son nom l’indique, segmente ces représentations. Néanmoins, dans la littérature, l’identification des segments de discours élémentaires (ude) semble être, au mieux, un préalable9 à la théorie, voire un corollaire10 de l’identi-fication des relations de discours. Le travail théorique sur des exemples construits et/ou choisis pour illustrer certains problèmes (présupposition, anaphore, etc.) que les relations de discours auront à résoudre se satisfait d’une théorisation plus ru-dimentaire de la segmentation. Le travail d’analyse en relation de discours sur corpus, comme le remarque (Prévot, 2014, p.5), est grandement facilité par une segmentation préalable. De fait, des manuels d’annotation pour la segmentation de l’écrit (Muller et al.,2012; Reese et al.,2007) ou plus particulièrement de l’oral (Prévot, 2012), ont été proposés aux participants des campagnes d’annotations en relations de discours.