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La décennie précédente s’est donc achevée par la définition des fonctions des

responsables des CDI et par l’affirmation de la primauté de leur rôle pédagogique. Cependant,

s’agissant des actions de formation en direction des élèves, aucun contenu n’a été précisé. Seule une ébauche en est esquissée par des chercheurs, comme Jean Hassenforder et Geneviève Lefort (1977) qui, rappelons-le, ont identifié six aptitudes requises dans toute activité de recherche documentaire.

Dans le prolongement de cet élan, quel a été le chemin parcouru au cours de cette nouvelle décennie ? Comment prend corps cette pédagogie nouvelle, trouve-t-elle une forme pérenne ? Est-elle appelée à se différencier des disciplines instituées, ou bien s’offre-t-elle en complémentarité à celles-ci ? Quelle place tend-elle à occuper dans ce paysage bouleversé par la massification scolaire et appelé dès lors à une profonde et urgente rénovation ?

Enfin, le chemin parcouru aura-t-il permis la clarification du rôle pédagogique de ceux qui sont appelés à devenir professeurs documentalistes ?

221. 1982-1991 : la recherche de contenus de formation

La décennie s’ouvre par les travaux d’élaboration d’un rapport de l’Institut national de recherche pédagogique (INRP) sur la formation des maîtres, rapport qui sera à l’origine de la création des MAFPEN. André de Peretti, alors directeur de programme à l’INRP, confie à

Brigitte Chevalier12 la rédaction du module III « Utilisation des ressources documentaires. Conseils méthodologiques » (B. Chevalier, 1982). Deux chapitres de ce module méritent d’être signalés ici : « Comment utiliser les ressources documentaires » et « Comment acquérir

des méthodes de travail : conseils méthodologiques ».

Le premier, faisant en cela écho aux propositions de J. Hassenforder et G. Lefort (1977), livre un nouvel agencement des compétences documentaires auquel fera référence (sans toujours le savoir !) la profession dans les deux décennies suivantes. Ces compétences sont regroupées en sept étapes, appelées « étapes de la recherche documentaire », et ordonnées de la définition de l’objectif de la recherche à la production du travail et à son évaluation finale (cf. Annexe I. 2). Ce modèle linéaire, s’il reçoit aujourd’hui nombre de critiques de la part, notamment, de la psychologie cognitive, a servi de contenu de formation à la pédagogie documentaire, même s’il n’est question, in fine, que de savoirs procéduraux. La circulaire de mission de 1986 lui donnera sa validation institutionnelle, tandis que le référentiel de la FADBEN de 1997, tout en l’enrichissant considérablement, en permettra l’opérationnalisation ainsi qu’une large diffusion dans le milieu.

Le second chapitre témoigne quant à lui de cette étroite relation existant entre les activités documentaires et les activités cognitives. L’identification des capacités repérées dans les étapes de la recherche documentaire, telles que « organiser son travail », « mobiliser ses

idées » ou « s’auto-évaluer » va servir de base à tout un argumentaire autour de l’idée que les

compétences info-documentaires ne sont en fait que des compétences transversales. Ce débat ne prendra sa véritable ampleur que dans les années 90 lorsque la question sera posée de la spécificité ou de la transversalité de la formation info-documentaire. Ici encore, le travail prolonge la réflexion des auteurs de « Pédagogie et documentation ».

Les stages MAFPEN de formation continue des documentalistes-bibliothécaires diffuseront ce modèle et contribueront largement à en faire une référence en matière de pratique pédagogique pour la profession.

Ce module INRP reçoit en outre un écho favorable et rapide, puisqu’une circulaire Vie scolaire datée du 2 juin 1982, « Objectifs pour la vie scolaire dans les collèges », préconise son application dans l’emploi du temps des élèves. Ce texte s’intéresse à définir les conditions propices à l’insertion des élèves de 6ème dans le collège, à l’apprentissage de la responsabilité et de l’autonomie. L’acquisition de l’autonomie est ainsi confiée en large part au « CDI », au

12

Brigitte Chevalier est la première à avoir proposé et publié des séquences de méthodologie documentaire :

travers justement de « l’initiation méthodique des élèves de Sixième aux techniques documentaires ; cette initiation serait conduite selon un programme et des techniques élaborées, à raison d’une heure ou d’une demi-heure par semaine ou par quinzaine ».

L’objectif visé est simple : « que l’élève soit pleinement autonome au CDI, donc capable de

travailler seul, dès la fin de la Cinquième, si ce n’est dès la fin de la Sixième ». Cet exemple

montre assez combien les apprentissages documentaires balancent entre des finalités cognitives (méthodologie du travail intellectuel) et des finalités éducatives (autonomie, responsabilisation). Il inaugure en outre, dans un contexte de découverte de l’hétérogénéité des élèves et de recherche de solutions pour réduire les difficultés scolaires, la mobilisation des espoirs investis dans le CDI et la confusion consécutive entre compétences info- documentaires et aide au travail des élèves.

En 1986, la circulaire du 13 mars, « Missions des personnels exerçant dans les centres

de documentation et d’information », institutionnalise l’initiation et la formation des élèves à

la recherche documentaire ainsi que les sept étapes définies par le module INRP13. Elle appelle de plus le documentaliste-bibliothécaire et les enseignants de discipline à travailler en étroite liaison. Elle prolonge en cela la circulaire de fonctions de 1977 qui insistait déjà sur les nécessaires collaborations à établir (cf. Annexe I. 3).

Fin 1988, le ministère crée une commission de réflexion sur les contenus d’enseignement, présidée par Pierre Bourdieu et François Gros. Le rapport, appelé rapport Bourdieu-Gros, sera publié en 1989, année de la publication de la Loi d’orientation sur

l’éducation. Parmi les sept principes retenus par les auteurs du rapport, le deuxième donne

priorité, avant l’enseignement des savoirs, à l’apprentissage des modes de pensées

fondamentaux tels la pensée déductive, la pensée critique ou la pensée expérimentale.

S’agissant des technologies du travail intellectuel au rang desquelles est rangée la recherche documentaire, le rapport souligne le risque qu’au prétexte « qu’ils sont censés être enseignés

par tout le monde, [ces savoir faire fondamentaux] finissent par n’être enseignés par personne ». Voici posée la problématique de l’attribution de la responsabilité pédagogique

relative à l’acquisition des compétences dites transversales. En matière documentaire, les années 90 n’apporteront aucune réponse à ce problème.

Trois années après la parution de la circulaire de mission, le ministre de l’Education nationale, Lionel Jospin, annonce la création du CAPES de Sciences et techniques

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France, Ministère de l’Education nationale, « Missions des personnels exerçant dans les centres de documentation et d’information », circulaire n°86-123 du 13 mars 1986, Bulletin officiel de l’Education

documentaires14. Dans le discours qu’il tient au premier congrès de la FADBEN à cette occasion, et dont les principaux éléments feront l’objet d’une note en 1991, il s’appuie sur le rapport Bourdieu-Gros pour rappeler à son tour l’importance qu’il y aurait à faire acquérir aux élèves des méthodes de travail intellectuel et de faire du CDI un lieu d’apprentissage de la responsabilité. Les fonctions des CDI et les missions de ses personnels sont repositionnées dans le double cadre de la Loi d’orientation sur l’éducation et de la rénovation pédagogique des collèges et des lycées. S’y ajoute un ingrédient nouveau, à savoir l’intégration des TIC dans les CDI, et dont l’importance ne cessera d’augmenter tant sur le plan de la gestion que sur celui de la formation des élèves.

Mais s’il est réaffirmé à cette occasion le rôle pédagogique important que joue le CDI au sein de l’établissement, il n’est encore précisé aucun contenu qui servirait à orienter la formation des élèves, alors que s’ouvre la première session du CAPES en 1990. Il faut s’en tenir à des propos généraux qui ne font que reprendre les termes de la circulaire de 1986 :

« [Les CDI] sont l’occasion de s’initier à des activités pédagogiques

originales (travail en équipes, pratiques transdisciplinaires et concertation accrue entre les professeurs…) ou de développer des aptitudes différentes (esprit d’initiative, exercices de recherche et de maîtrise de l’information…). Les CDI doivent être aussi un lieu d’entraînement à l’autodocumentation et au travail autonome. Dans cette optique, ils doivent apporter à l’élève une aide méthodologique »15.

Si les élans des débuts se sont beaucoup émoussés, les thèmes principaux demeurent au travers du lexique : appel à la différence, à l’originalité et à la transdisciplinarité. Cependant, les finalités générales, telles l’autonomie et l’esprit d’initiative sont contraintes par des moyens spécifiques à la pédagogie documentaire dessinée dans les années 80 : méthodologie, initiation, exercices de recherche. Un nouveau thème majeur apparaît, qui deviendra un générique des compétences à faire acquérir aux élèves, celui de maîtrise de

l’information.

Parallèlement aux textes officiels, la Direction des lycées et des collèges (DLC) conduit, de 1989 à 1992, une innovation pédagogique nationale relative à la recherche documentaire dans onze collèges de cinq académies (M.E.N., 1994). L’objectif est d’élaborer,

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France, Ministère de l’Education nationale, « Discours de M. Lionel Jospin, ministre de l’Education nationale, prononcé au congrès de la FADBEN le 19 mai 1989 », Bulletin officiel de l’Education nationale n°26 du 19 juin 1989

15

France, Ministère de l’Education nationale, “Développer les Centres de documentation et d’information (CDI)”, note du 10 avril 1991

à partir d’expériences menées sur le terrain, des démarches et des outils transférables sur le plan national. Les travaux exposés entendent ainsi proposer des solutions à la problématique des apprentissages documentaires. Cette problématique est présentée comme devant concilier trois contraintes : privilégier l’intégration des ressources documentaires dans les pratiques pédagogiques, faire valoir le caractère interdisciplinaire et transférable de la recherche d'information et enfin, prendre en compte les modifications pédagogiques induites par l’introduction des TIC. Le but de cette pédagogie documentaire consiste à développer des apprentissages documentaires transversaux, c'est-à-dire « des savoirs et des savoir faire qui

anticipent ou prolongent les apprentissages spécifiques des disciplines et font apparaître les convergences entre elles ». Pour y parvenir, cette pédagogie s’appuie sur les contenus de ces

disciplines, en tenant compte de deux nécessités : le travail en équipe entre enseignants documentaliste et de disciplines, et l’élaboration d’un projet documentaire.

Que retirer de cette décennie qui aura marqué les dernières avancées institutionnelles significatives sur la voie de la professionnalisations des enseignants documentalistes ?

La perception des acquis enregistrés pendant cette décennie est en partie masquée par les deux événements majeurs que sont la parution de la circulaire de missions et l’instauration du CAPES de Documentation, lesquels répondent à des attentes formulées par la profession en apportant une définition des rôles et une clarification du statut. Cependant, à la suite de la période 1952-1979 qui a vu la légitimation d’une pédagogie de la documentation et sa matérialisation dans l’espace de l’établissement, cette décennie structure et développe les contenus de cette pédagogie. La structuration vient de la définition des étapes de la recherche documentaire et de leur institutionnalisation en 1986 .

S’agissant de l’enseignant documentaliste, nous avons observé comment l’accroissement du rôle joué par la pédagogie de la documentation avait contribué à matérialiser un espace d’une part, et à concevoir une fonction d’autre part. Ce faisant, positionné en marge du cours tout d’abord, puis bientôt au « centre », le documentaliste avait trouvé une certaine consistance pédagogique, au moins suffisante pour qu’on lui consacre des fonctions de « nature essentiellement pédagogique ».

Un processus analogue se produit dans la période suivante lorsque la pédagogie documentaire, en se structurant, trouve une spécificité qui la rend distincte de la pédagogie de la documentation conduite par le professeur de discipline. Ainsi se profile une nouvelle pratique et, partant, un nouvel acteur pédagogique, quitte à ce que celui-ci devienne un

spécialiste de la méthodologie, et de ces savoir faire fondamentaux qui, sans lui, finiraient « par n’être enseignés par personne » (Bourdieu-Gros, 1989).

Il n’en reste pas moins que les textes, ainsi que la littérature professionnelle de l’époque, ne cessent de rappeler la nécessité de travailler en étroite liaison avec les professeurs de discipline. Dans les faits, le travail sur documents reste, comme en 1977, sous la responsabilité du professeur qui conduit les travaux, et dont l’enseignant documentaliste dépend, ne serait-ce que parce qu’il n’a ni horaire ni classe attribuées, et que la formation qu’il peut dispenser demeure somme toute facultative.

Toutefois des contenus sont peu à peu affirmés qui donnent une certaine consistance et une certaine légitimité aux activités documentaires. Mais ces contenus se révèlent être des connaissances de nature comportementale et non déclarative (M. Develay, 1992). Aussi sont- ils souvent assimilés à des savoir faire transférables dans les disciplines et venant opportunément en renfort de celles-ci. Cette position consensuelle, du moins encore à cette époque, va servir de postulat fondateur d’une pédagogie documentaire comprise, dans le prolongement des origines, comme auxiliaire du cours disciplinaire. Si, aux origines, en l’absence d’enseignant documentaliste, c’était la documentation qui venait en appui du cours, alors il faut voir dans la pédagogie documentaire le prolongement d’une fonction identique de subsidiarité aux disciplines.

Il est cependant possible de se demander si cette subsidiarité est exclusive aux champs disciplinaires ou bien si elle admet des apprentissages spécifiques au champ documentaire. Dans ce cas, que peut-on dire de la relation entre les enseignants de discipline et les enseignants documentalistes ? Mais tout d’abord, sur quelles assises se fonde et s’édifie la pédagogie documentaire ?

222. Les fondements de la pédagogie documentaire

Si l’usage se réfère aisément à l’expression de pédagogie documentaire, il est pour le moins difficile, dans la littérature, de trouver des entrées à ce terme. Il y est alors plutôt question de l’initiation à la recherche documentaire, des apprentissages documentaires, de la formation à la maîtrise de l’information ou de l’acquisition des techniques documentaires.

Ceci peut s’expliquer en partie par l’absence de référence nationale, vu qu’il n’existe aucun texte de cadrage précisant les buts, les objectifs, les moyens et les modalités d’une telle pédagogie. Ou bien faudrait-il, par prudence, n’évoquer que la seule « dimension

documentaire des situations d’apprentissages scolaires » (F. Morandi, 2003) si tant est qu’il

ne saurait exister de pédagogie documentaire en dehors des cours des disciplines.

S’agit-il d’ailleurs d’une pédagogie ? Certainement si nous pensons, avec Marguerite Altet (1994), que la pédagogie est « ce champ de la transformation de l’information en savoir

par la médiation de l’enseignant ». Nous pouvons encore l’inférer si nous la prenons au sens

plus fonctionnel d’activité conduite par le maître pour développer des apprentissages précis chez l’élève. Cette activité, dans le cas présent, repose principalement sur une méthode, qui est celle de la recherche documentaire. René La Borderie souligne que, dans cette éventualité, le mot est alors suivi d’un nom ou d’un adjectif, comme dans « pédagogie de l’autonomie », pédagogie traditionnelle », etc. (R. La Borderie, 2001). Dans le cas présent, le complément adjectival précise les moyens employés, qui sont donc de nature documentaire.

Il n’en reste pas moins que toute pédagogie – toujours au sens d’activité visant à développer des apprentissages - comme le rappelle Jean Houssaye, résulte d’une dialectique entre pratique et théorie, et qu’elle se fabrique dans cet écart béant entre ces deux pôles (J. Houssaye, 2002). Aussi faut-il, au delà des « comment » et des « ce qu’il faut faire » des quelques ouvrages professionnels publiés à cette époque sur ce sujet, tenter de la définir, même succinctement, à partir de son fondement théorique.

Le but visé par la pédagogie documentaire qui se met en œuvre dans cette décennie est, au delà de l’acquisition de compétences documentaires, la construction des savoirs disciplinaires. La note d’avril 1991 précise ainsi que « les CDI sont des éléments indispensables pour permettre à tous les élèves d’accéder à des savoirs nouveaux et de se les approprier ». Cette pédagogie adjuvante qui est ainsi mise en œuvre dans les CDI repose sur

un postulat, celui de l’efficacité de la médiation documentaire, et sur une théorie de la connaissance selon laquelle l’information peut être transformée en savoir par l’activité de l’apprenant.

La médiation documentaire, si elle n’a pas de théoricien pour la conceptualiser, peut être cependant approchée au regard de quelques travaux publiés16. Elle s’appuie sur l’idée que si le document peut aider l’élève à apprendre, il est d’abord un média entre l’élève et le savoir. Comme tel, il peut aussi bien conduire au savoir qu’entraver son accès à cause de son opacité. Ces deux positions correspondent, de manière schématique, à celles tenues par l’enseignant de discipline et par l’enseignant documentaliste. Pour le premier, en tant que prescripteur de

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Notamment par les travaux de Séraphin Alava, Maître de conférences et directeur du département des Sciences de l'éducation, Université Toulouse II.

recherche documentaire, la localisation de la donnée dans un document peut constituer le gage d’un accès à la connaissance, ou du moins apporter la preuve ou l’illustration suffisante aux besoins du cours. Pour le second, la vocation de ce type de recherche est avant tout technique et nécessite l’appropriation par l’élève de certaines compétences qui vont devoir s’apprendre par une pratique méthodologique éprouvée dans l’action.

Selon Séraphin Alava (1996), la médiation documentaire proprement dite se produit à partir du moment où les données récoltées par cueillette dans des documents divers vont être transformées en information par l’élève. Dans cette approche constructiviste de l’apprentissage, les opérations de relation, de confrontation et de catégorisation sur ces données entrent en interrelations avec les connaissances antérieures du sujet et les consignes du maître. Les données sont alors mises en forme tout en intégrant et en faisant évoluer le capital cognitif de l’élève, ce que J.-P. Astolfi (2002) nomme adjonction oblitérante. La production documentaire demandée à l’élève à l’issue de ce travail sur documents constitue un moment fort de ce processus de construction du savoir.

De ce point de vue, ces pratiques d’élaboration du sens ne s’opèrent plus tant à partir d’un matériau documentaire qu’à partir d’un matériau informationnel. C’est parce que toute information possède un élément de connaissance qu’elle participe d’activités cognitives et intéresse les enseignements17. Elle peut être déjà didactisée en amont, pour les besoins du cours, et dans ce cas, elle intéresse le professeur pour le lien très étroit qu’elle entretient avec les contenus visés par la séance, mais elle peut aussi ne pas l’être. C’est le cas de toute information extérieure tirée par exemple des réseaux en ligne, et dont la production n’a pas spécifiquement ciblé l’école, ses programmes et ses élèves. Elle intéresse de fait plus particulièrement l’enseignant documentaliste qui voit là, par la situation-problème qu’offre son opacité, matière à faire apparaître des savoirs spécifiquement info-documentaires.

Dans les deux cas toutefois, la médiation documentaire concrétise ce qui se joue de la relation de l’information à la connaissance. Cette conception cognitiviste de la construction de la connaissance par l’information repose sur un modèle théorique exploré par Jacques Legroux (1981), puis repris et diffusé par Jean-Pierre Astolfi (2002). J. Legroux distingue information, connaissance et savoir, et étudie les passages des uns aux autres.

L’information est extérieure au sujet, elle est quantifiable. Mise en forme, elle n’est en fait qu’une donnée destinée à circuler et à être transmise.

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L’information est une connaissance structurée et mise en forme : « Toute information se caractérise par un contenu (signifiant), un signifié et une forme » (A. Boulogne, 2005).

La connaissance, avec laquelle l’information est souvent confondue, est au contraire intérieure au sujet. Citant John Dewey et Olivier Reboul, il rappelle que c’est à partir du moment où l’information s’est intégrée à la vie psychologique de l’individu qu’elle devient connaissance. C’est ce moment cognitif de l’intégration d’une donnée informationnelle en connaissance par le sujet auquel se réfère particulièrement le modèle de la médiation documentaire. Le fait que toute connaissance, dès lors, n’est que le résultat d’une expérience