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1.2.3. Au niveau du discours

1.2.3.2 Les connecteurs en allemand

Une comparaison avec l’allemand permet de voir que ces trois connecteurs ont des équivalents en allemand : parce que se traduit par weil, car par denn et puisque par da. Il reste à savoir si les connecteurs en allemand produisent les mêmes effets de sens qu’en français.

De même qu’en français car et puisque possèdent des propriétés identiques, les connecteurs denn et da répondent à ces mêmes critères (Pit 2003, 17-19) :

 Ils ne peuvent pas répondre à la question « pourquoi ? » : 492) a) Warum lachst du ? *Denn ich finde das komisch.

b) Warum lachst du? *Da ich das komisch finde.

Pourquoi ris-ru? *Car/puisque je trouve ça comique.

 Ils ne peuvent pas être extraposés:

493) a) *Es ist denn er hat zu viel gegessen, dass er krank ist.

b) *Es ist da er zu viel gegessen hat, dass er krank ist.

*C’est car/puisqu’ il a trop mangé qu’il est malade.

 Ils ne tolèrent pas de modification par un adverbe :

494) a) *Er ist verunglückt, wahrscheinlich denn die Bremsen seines Autos versagten.

b) *Er ist verunglückt, wahrscheinlich da die Bremsen seines Autos versagten.

*Il a eu un accident, sans doute car/puisque les freins de sa voiture ont refusé de fonctionner.

 Ils ne peuvent pas être soumis à une négation (495), à une question (496), à un enchâssement (497) ou à un quantificateur (498), car ceci impliquerait d’avoir la possibilité de porter sur l’ensemble de la phrase. Or, ces formulations ne concernent que la première partie de la phrase :

495) a) Er weint nicht, denn er ist allein.

b) Er weint nicht, da er allein ist.

Il ne pleure pas, car/puisqu’ il est seul.

La paraphrase est la suivante : la négation porte uniquement sur le fait de ne pas pleurer et la raison pour laquelle il ne pleure pas. Ces phrases impliquent qu’il ne pleure jamais lorsqu’il est seul.

496) a) Wird er kommen, denn er hat es versprochen ? b) Wird er kommen, da er es versprochen hat?

Viendra-t-il, car/puisqu’ il l’a promis?

Ici, le locuteur pose une question, car la promesse donne de l’espoir quant à la venue du sujet.

497) a) Ich habe Angst, dass er sie heiratet, denn sie ist reich.

b) Ich habe Angst, dass er sie heiratet, da sie reich ist.

J’ai peur qu’il ne l’épouse, car/puisqu’ elle est très riche.

Là encore, le locuteur a peur que la richesse de la fiancée ne soit la cause du mariage.

498) a) Wenige Kunden werden kommen, denn es ist schönes Wetter.

b) Wenige Kunden werden kommen, da es schönes Wetter ist.

Peu de clients viendront, car/puisqu’ il fait beau.

C’est à cause du beau temps qu’il y a peu de clients. Les clients préfèrent faire autre chose quand il fait beau.

En revanche, dans le cas du connecteur weil, tous ces critères sont admis (Pit 2003, 17-19) :

Il répond à la question « pourquoi ? » :

499) Warum lachst du ? Weil ich das komisch finde.

Pourquoi ris-tu? Parce que je trouve ça comique.

 Il peut être extraposé :

500) Es ist weil er zu viel gegessen hat, dass er krank ist.

C’est parce qu’il a trop mangé qu’il est malade.

 Il tolère une modification par un adverbe :

501) Er ist verunglückt, wahrscheinlich weil die Bremsen seines Autos versagten.

Il a eu un accident, sans doute parce que les freins de sa voiture ont refusé de fonctionner.

 Il peut être soumis à une négation (502), à une question (503), à un enchâssement (504) ou à un quantificateur (505), car ces formulations peuvent porter soit sur l’ensemble de la phrase (a) soit sur la première partie de la phrase (b) :

502) Er weint nicht weil er allein ist.

Il ne pleure pas parce qu’il est seul.

a) Ce n’est pas parce qu’il est seul qu’il pleure, mais pour une autre raison.

b) Il ne pleure pas et le fait d’être seul en est la cause.

503) Wird er kommen weil er es versprochen hat ? Viendra-t-il parce qu’il l’a promis?

a) La cause de la venue est-elle due à la promesse ?

b) Le locuteur pose la question, car la promesse donne de l’espoir quant à la venue de l’individu.

504) Ich habe Angst, dass er sie heiratet weil sie reich ist.

J’ai peur qu’il ne l’épouse parce qu’elle est riche.

a) Le locuteur craint que la cause du mariage soit motivée par la richesse de la fiancée.

b) Le locuteur craint que la richesse de la fiancée ne soit dangereuse pour l’individu.

505) Wenige Kunden werden kommen weil es schönes Wetter ist.

Peu de clients viendront parce qu’il fait beau.

a) Pour peu de clients, la raison de leur venue sera le beau temps. Les autres clients viendront pour une autre raison.

b) C’est à cause du beau temps qu’il y a peu de clients. Les clients préfèrent autre chose quand il fait beau.

Les connecteurs en allemand impliquent donc les mêmes conditions qu’en français et produisent les mêmes effets. Par ailleurs, weil correspond également à un opérateur, i.e. il opère sur des propositions qu’il lie en proposition complexe. De même, denn et da sont des marqueurs d’actes de parole, i.e. ils accomplissent un acte de parole (Pit 2003, 46).

Cependant, ce sont également des opérateurs selon Pasch, puisqu’ils opèrent sur des propositions qui correspondent à des actes de parole, alors que car et puisque ne sont pas considérés comme des opérateurs en français. On peut à présent proposer une description plus précise pour chacun de ces connecteurs.

1.2.3.2.1 Le connecteur weil

Tout comme en français, le connecteur weil relie deux propositions entre elles afin de produire une nouvelle proposition complexe. Cependant, le connecteur weil subit des restrictions de type syntaxiques, i.e. il ne peut pas être utilisé en position initiale comme l’illustre l’exemple suivant (Pit 2003, 49) :

506) *Weil du es unbedingt wissen willst, habe ich alles aufgegessen.

Parce que tu veux absolument le savoir, j’ai tout mangé.

Si l’acte de langage est séparé par une pause (507) ou s’il est expliqué (508), la phrase devient acceptable :

507) Weil du es unbedingt wissen willst Ŕ ich habe alles aufgegessen.

Parce que tu veux absolument le savoir Ŕ j’ai tout mangé.

508) Weil du es unbedingt wissen willst, sage ich dir, dass ich alles aufgegessen habe.

Parce que tu veux absolument le savoir, je te le dis, j’ai tout mangé.

Le français n’est pas sensible à cette restriction syntaxique, bien que le connecteur puisque serait plus approprié dans ce cas :

509) Parce que tu veux absolument le savoir, j’ai tout mangé.

510) Puisque tu veux absolument le savoir, j’ai tout mangé.

Ce n’est pas la position initiale qui bloque l’utilisation du connecteur parce que, mais plutôt le fait que l’on soit dans un seul acte de parole.

Par ailleurs, le connecteur weil nécessite un lien sémantique direct de cause à conséquence entre les deux propositions qu’il relie :

511) Die Heizungsröhren sind geplatzt, weil es Frost gegeben hat.

conséquence cause

Les tuyaux du chauffage ont éclaté, parce qu’il a fait froid.

L’exemple suivant est anormal, d’une part à cause de la relation cause Ŕ conséquence, où le connecteur weil introduit la conséquence et non la cause et d’autre part à cause de la position initiale de weil (Pit 2003, 46) :

512) *Weil die Heizungsröhren geplatzt sind, hat es Frost gegeben.

conséquence cause

Parce que les tuyaux du chauffage ont éclaté, il a fait froid44.

En revanche, dans le cas du connecteur da, la même phrase devient interprétable : 513) Da die Heizungsröhren geplatzt sind, hat es Frost gegeben.

conséquence cause

Puisque les tuyaux du chauffage ont éclaté, il a fait froid.

Le connecteur reliant deux actes de parole entre eux, le lien causal existe : puisque p, je conclus q. « La proposition introduite par puisque marque moins la cause proprement dite que le point de départ d’où le raisonnement tire une conclusion » (Fritsche 1981, 177).

Par ailleurs, on peut noter que le connecteur denn ne fonctionne pas comme le connecteur da.

Il n’accepte pas la proposition suivante tout comme le connecteur weil :

514) *Denn die Heizungsröhren sind geplatzt, hat es Frost gegeben.

conséquence cause

*Car les tuyaux du chauffage ont éclaté, il a fait froid.

Par contre, il accepte la phrase suivante, à nouveau comme le connecteur weil : 515) Die Heizungsröhren sind geplatzt, denn es hat Frost gegeben.

conséquence cause

Les tuyaux du chauffage ont éclaté, car il a fait froid.

En principe, la conséquence ne peut donc pas être introduite par les connecteurs weil ou denn, car ils ne décrivent que la cause. En revanche, le connecteur da peut tout aussi bien introduire la cause que la conséquence.

44 Cette phrase peut être interprétée sous forme de lecture inférentielle : le lien de cause à conséquence est tout à fait compréhensible, malgré le fait que le connecteur parce que introduise la conséquence. Le fait que les tuyaux du chauffage ont éclaté justifie l’affirmation il a fait froid. Ce n’est plus la relation causale qui est mise en évidence, mais le lien inférentiel entre les propositions.

Cependant, le connecteur weil peut accepter d’introduire une conséquence lors d’un emploi inférentiel :

516) Es hat Frost gegeben, weil die Heizungsröhren geplatzt sind.

cause conséquence

Il a fait froid, parce que les tuyaux du chauffage ont éclaté.

Pit (2003, 46) développe les arguments de Pasch (1983) selon laquelle, dans le cas du connecteur weil, il s’agit d’un unique acte de parole (dans lequel le locuteur exprime qu’il croit qu’il y a un lien causal entre les deux propositions), à l’inverse des deux autres connecteurs qui impliquent deux actes de parole (le locuteur exprime qu’il croit que la première proposition est un fait, qu’il croit que la deuxième proposition est un fait et qu’il croit qu’il y a un lien causal entre ces deux croyances). Pasch explique l’acceptabilité de cette phrase, qui est semblable à l’exemple (512), par le fait d’une structure elliptique sous-entendue (Pit 2003, 47) : il y a deux actes de parole, le premier est une assertion du contenu de la première proposition (es hat Frost gegeben) et fonctionne comme une proposition implicite dans le deuxième acte, alors que ce dernier asserte qu’il existe un lien causal entre la première assertion (es hat Frost gegeben) et la deuxième (die Heizungsröhren sind geplatzt).

Selon Pasch, la distinction sémantique entre les trois connecteurs est minime dans l’usage de weil en tant que structure elliptique.

La structure elliptique du connecteur weil qui sous-entend la présence de deux actes de parole est également présente en français : le connecteur parce que est en général producteur d’un unique acte de parole, mais il peut aussi en produire deux45.

Cependant, si l’explication de Pasch s’axe sur la présence d’un ou deux actes de parole, il faut également prendre en compte le rôle de la cause et de la conséquence. Le connecteur weil a généralement une valeur explicative, puisqu’il introduit la cause. Mais il peut également être interprété par une lecture inférentielle ; dans l’exemple (516), le fait que les tuyaux du chauffage ont éclaté ne cause pas le froid, mais justifie son affirmation : c’est parce que les tuyaux du chauffage ont éclaté que l’on peut dire qu’il a fait froid. Dans ce cas, le connecteur weil a une valeur argumentative (introduit une conséquence). Ce raisonnement inférentiel permet d’interpréter correctement l’énoncé tant en allemand qu’en français.

45 Les deux exemples qui ont été cités sont tu es malade parce que tu as trop mangé et il est malade parce qu’il a de la fièvre, où dans le premier cas il s’agit d’une cause (valeur explicative) et dans le deuxième cas d’une preuve (valeur argumentative). On peut noter que l’exemple donné en (511) renvoie à une cause (le froid cause l’éclatement des tuyaux du chauffage) et que l’exemple (516) est une preuve (le fait que les tuyaux du chauffage ont éclaté justifie le fait d’affirmer qu’il a fait froid).

Par ailleurs, l’emploi inférentiel en allemand a souvent recours à une propriété syntaxique particulière : le verbe ne se place pas à la fin de la proposition introduite par weil, mais après le sujet. L’énoncé (516) peut être modifié comme suit :

517) Es hat Frost gegeben, weil die Heizungsröhren sind geplatzt.

cause conséquence

Il a fait froid, parce que les tuyaux du chauffage ont éclaté.

Cette distinction met en évidence l’usage inférentiel de weil, i.e. son emploi épistémique.

Le connecteur weil, tout comme parce que, a donc la propriété d’introduire une cause (emploi le plus fréquent qui a une valeur d’explication lors d’un unique acte de parole), mais aussi une conséquence (emploi inférentiel qui introduit une argumentation ou une justification lors de deux actes de parole).

1.2.3.2.2 Le connecteur denn

Le connecteur denn, tout comme da, s’oppose au connecteur weil, car il implique deux actes de parole, alors que weil en implique un seul en principe46. Pasch propose de distinguer denn et da sur la base des deux exemples suivants (Pit 2003, 47-48) :

518) Diese Brille gehört mir nicht, denn die ist ja ganz zerkratzt ! Ces lunettes ne m’appartiennent pas, car elles sont toutes rayées!

519) Sie kann den Artikel nicht in 20 Tagen schreiben Ŕ denn das wollen ihre Auftraggeber.

Elle ne peut pas écrire l’article en 20 jours Ŕ car ses éditeurs veulent cela.

Selon Pasch, le connecteur da ne peut pas être utilisé dans ces deux phrases, car la seconde proposition contient une espèce de révélation, de découverte (entdeckende Festellungen). Ce connecteur aurait une fonction subordonnée dans un texte, comme une présupposition ou une parenthèse. En revanche, denn aurait un statut rhétorique plus important.

46 Il peut être intéressant de noter que dans la grammaire allemande, notamment dans le Duden, les connecteurs weil et da sont interchangeables, i.e. ils possèdent une interprétation et des usages semblables. Ce point renvoie à l’analyse grammaticale du français qui souligne que les connecteurs parce que et puisque en tant que conjonctions de subordination sont plus proches entre eux que de car, qui est une conjonction de coordination.

Or, ce point contredit clairement l’analyse proposée jusqu’ici. Il en est de même avec l’allemand, où denn et da présentent davantage de ressemblances syntaxiques que ne le font weil et da. Fritsche (1981, 181) propose de distinguer ces deux connecteurs sur la base de plusieurs critères tirés de la grammaire : weil renvoie à la cause, alors que da réfère à la raison ; weil représente un fait réel, alors que da incarne un fait logique ; weil implique un événement important qui doit être nouveau et inconnu, alors que da introduit un événement sans poids particulier qui doit être connu ; weil souligne la motivation, alors que da mentionne sans insistance la motivation ; weil produit une relation causale restreinte, alors que da exprime une relation causale large. Tous ces points se retrouvent bien dans l’analyse des deux connecteurs.

Une autre explication à l’impossibilité d’insérer da dans cet énoncé serait de souligner l’opposition entre l’aspect de révélation produite par la seconde proposition et le caractère indiscutable du connecteur da qui implique un motif évident et une raison connue.

Pit (2003, 48) reprend également les arguments de Küper (1984) qui fait l’hypothèse que les trois connecteurs ont une même valeur causale, mais un usage différent selon des restrictions syntaxiques, sémantiques et pragmatiques47. Il postule tout comme Pasch une différence entre un usage propositionnel et un usage d’acte de langage, mais il distingue également deux types d’usages propositionnels : un usage avec parenthèses (parenthetical use) et un usage symptomatique (symptomatic use). L’usage avec parenthèses permet de justifier l’utilisation d’un terme (520) et l’usage symptomatique de construire une conclusion réductrice (521) :

520) Wenn er nach draussen noch ein bisschen mehr Lächeln lernt (denn in kleinem Kreis wird es ihm nicht schwer), sollte er der Unterstützung einer starken Mehrheit sicher sein können.

S’il apprend encore un peu à sourire en public (car dans un cercle restreint ce n’est pas difficile), il devrait pouvoir compter sur le soutien d’une grande majorité.

521) Er muss zu Hause sein, denn das Licht brennt.

Il doit être à la maison, car la lumière est allumée.

Dans l’exemple (520), le locuteur justifie le terme nach draussen (en public) à l’aide d’une parenthèse. L’exemple (521) propose une conclusion qui est basée sur un lien causal entre être à la maison et la lumière est allumée. Le symptôme du résultat (la lumière est allumée) est utilisé comme un argument pour prouver que la cause est vraie (être à la maison). En d’autres termes, le résultat du monde réel (la lumière est allumée) devient la cause (l’argument), alors que la cause du monde réel (être à la maison) devient le résultat (la conclusion) (Pit 2003, 49). Cet exemple renvoie à un usage épistémique du connecteur denn en tant que justification ou argumentation, tout comme l’exemple en français il est malade car il a de la fièvre.

En français, le connecteur car peut avoir une valeur argumentative, comme ci-dessus, ou explicative comme dans l’exemple j’ai mal à la tête, car j’ai trop travaillé. En allemand, le connecteur denn recouvre ces mêmes valeurs :

522) Argumentatif : er muss zu Hause sein, denn das Licht brennt.

Il doit être à la maison, car la lumière est allumée.

523) Explicatif : ich habe Kopfschmerzen, denn ich habe zu viel gearbeitet.

J’ai mal à la tête, car j’ai trop travaillé.

Küper propose de distinguer l’usage symptomatique, qui se base sur le monde (521), de l’usage d’acte de langage (524) (Pit 2003, 49) :

524) Lebt er noch ? Denn in meiner Einsamkeit höre ich nichts von ihm.

Vit-il encore? Car dans ma solitude, je n’entends rien de lui.

Le connecteur relie une question et une justification, et non pas des faits dans le monde. Ce point a notamment été traité par Sweetser (1990, 77), qui définit trois niveaux principaux d’interprétation des phrases : le niveau du contenu, le niveau épistémique et le niveau des actes de langage. Le niveau du contenu fait référence au monde réel (525), le niveau épistémique renvoie aux états mentaux (526) et le niveau des actes de langage décrit l’acte de communication (527) :

525) Jean est revenu, parce qu’il l’aime.

526) Jean l’aime, parce qu’il est revenu.

527) Que fais-tu ce soir ? Parce qu’il y a un bon film.

Selon Sweetser (1990, 81), la conjonction causale présente ainsi la causalité de l’événement inscrit dans le monde réel au niveau du contenu ; elle marque la croyance ou la conclusion au niveau épistémique ; enfin, elle indique l’explication causale au niveau des actes de langage.

Sweetser rejoint ainsi le point de vue de Küper, qui distingue l’usage symptomatique (monde réel) de l’usage d’acte de langage (croyance).

A l’inverse du connecteur denn, le connecteur weil ne peut pas être utilisé dans cette phrase : 528) *Lebt er noch ? Weil ich in meiner Einsamkeit nichts von ihm höre.

Vit-il encore? Parce que dans ma solitude, je n’entends rien de lui.

En effet, le connecteur weil ne peut pas être utilisé après une question (528) ou un ordre (529) (Pit 2003, 50) :

529) *Bring mir ein Bier, weil ich Durst habe.

Amène-moi une bière, parce que j’ai soif.

47 Fritsche (1981, 187) propose sur ce point une distinction importante entre les trois connecteurs : s’ils peuvent relier tous trois des phrases entre elles, denn est l’unique connecteur qui permet de relier des unités plus grandes (allant de trois propositions à beaucoup plus).

En revanche, le connecteur denn est tout à fait toléré dans ces phrases. Küper s’oppose sur ce point à Pasch, qui accepte les deux exemples suivants, l’un étant une question (530) et l’autre un ordre (531) (Pit 2003, 50) :

530) Ist sie Wirtschaftswissenschaftlerin ? Weil sie sich so gut in Investitionsfragen auskennt.

Est-elle une scientifique en économie? Parce qu’elle s’y connaît si bien en question d’investissement.

531) Gib mit mal Salz, weil die Sosse noch zu fade ist.

Donne-moi le sel, parce que la sauce est encore trop fade.

Küper explique ces divergences de point de vue par des utilisations syntaxiques différentes entre weil et denn : la subordination associée à weil peut manquer pour combiner deux types différents de phrases, i.e. une question ou un ordre avec une assertion.

Küper explique ces divergences de point de vue par des utilisations syntaxiques différentes entre weil et denn : la subordination associée à weil peut manquer pour combiner deux types différents de phrases, i.e. une question ou un ordre avec une assertion.