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C’est vrai qu’actuellement on reconnait que les enseignants détiennent des connaissances vastes, bien structurées et amplement diversifiées ; cependant, si cette déclaration est un peu tardive, ce n’est pas que l’enseignant ne détenait pas ces qualifications, mais c’est tout juste que les recherches se sont attardées pour établir le socle de connaissances propre à l’enseignant ; et ce que Shulman considère comme un « paradigme manquant »101. Par ailleurs, les travaux menés sur la cognition ont affirmé, et ce depuis longtemps, que les actions des individus sont bien liées aux connaissances acquises en situations et répertoriées au sein du système cognitif préexistant ; « ces connaissances sont à la fois le

101 Marc Duran, L’enseignement en milieu scolaire, PUF, Paris. 1996, p. 173.

soubassement des actions et une mémoire émanant de ces mêmes actions. En d’autres termes, lorsque les enseignants travaillent, ils activent des connaissances particulières qui déterminent leur niveau d’efficience et leur style d’adaptation à la tâche. De façon complémentaire et étroitement intriquée, ils retirent de cette activité des informations qui contribuent, en association avec celle provenant d’autres sources, à alimenter et à structurer leur base de connaissances. »102

I.2.1.1. Les catégories de connaissances

Les travaux menés sur les pratiques enseignantes ont répertorié des catégories plus ou moins exhaustives des connaissances de l’enseignant. Dans son ouvrage, Marc Durant rapporte les catégories proposées par Tamir dont nous explicitons ici l’essentiel :

- Une catégorie concerne les connaissances fondamentales tels que lire, écrire, les capacités à raisonner,… ;

- Une autre catégorie renvoie aux connaissances liées à la profession et la font représentés au concerné qui renvoient aux dimensions : politique, culture et éthique éducative, approches et théories,… ;

- Une dernière catégorie qu’à travers la personne enseignante est identifier et statué, c’est-à-dire, son comportement en classe, devant et en groupe, l‘attribue de sa voix,… ;

Ces catégories sont en connivence avec d’autres volets de connaissances qui s’articulent en classe, ces dernières se composent généralement de savoirs déclaratifs et de savoirs procéduraux :

- Le premier volet recouvre : les théories développementales de Piaget, les objectifs éducatifs et planifications, les interactions avec les apprenants et les différents types d’évaluations.

- Le deuxième volet s’étend à la discipline : les concepts essentiels et les théories principales.

- Le troisième volet se présente en référence aux connaissances pédagogiques, c’est-à-dire, l’appréhension des éléments qui entravent le processus de l’apprentissage, l’identification des prérequis nécessaires pour l’apprenant afin d’acquérir de nouvelles connaissances.

En somme, nous pourrions déduire que des connaissances mises à l’épreuve du contexte, peuvent être plus significatives que d’autres, « c’est ainsi que les connaissances pédagogiques, les connaissances des contenus et les connaissances des contenus

102 Ibid. p. 173.

pédagogiques sont les fondements cognitifs de l’enseignement en système scolaire »103. Ces connaissances sont des repères pertinents à l’identification des compétences de l’enseignant, d’autant qu’elles déterminent son profil, « en d’autres termes, plus les enseignants sont compétents, plus leurs connaissances de la matière sont articulées selon des principes généraux de la discipline, et moins ils accordent d’attention aux trait de surface de ces contenus »104

En retour aux pratiques en situations, les enseignants expérimentés enrichissent leurs connaissances des modalités de fonctionnement de la discipline en rapport avec le comportement des apprenants lors de l’acquisition de contenus de la discipline enseignée.

Par contre, les novices s’octroient de connaissances superficielles de la discipline sur le plan de fonctionnement, de même qu’ils compartimentent les contenus d’un côté et les attitudes des bénéficiers (les apprenants) d’un autre. Nous supposons, comme fait allusion Marc Duran, que ce qui fait défaut à la deuxième catégorie d’enseignants, c’est les connaissances des contenus pédagogiques, qui se concrétise dans l’application à la lettre des manuels et des matières sans se préoccuper du rapport de l’apprenant au savoir, ni du contexte hétérogène de la classe.

Les connaissances des contenus pédagogiques sont la production et le produit de la pratique enseignante, elles sont la pierre angulaire qui structure les connaissances professionnelles. Quant à ces derniers se composent des modules de la discipline, des outils et des méthodes de transmission, ainsi que les stratégies d’acquisitions par les apprenants.

I.2.1.2. Les connaissances opératoires

En revenant à ses connaissances opératoires, l’enseignant peut œuvrer dans les situations professionnelles qui se présentent à lui. Ce type de connaissances lui assure la possibilité de concevoir des stratégies et techniques d’enseignement fiables, qui peuvent être adaptés aux contraintes variés. En outre, c’est sur la base de ce savoir-faire, que l’enseignant peut confronter les situations incertaines, complexes et même ceux les plus singuliers des moments d’enseignements.

I.2.1.3. La compréhension (l’appréhension)

En rapprochant le processus élaboré par Shulman avec nos recherches sur les ressources de l’enseignant, nous pouvons déduire que ; la compréhension se dessine en amont à toute

103 Ibid. p. 181.

104 Ibid. p. 183.

activité professionnelle. Force de croire qu’il est indispensable d’avoir une représentation claire et bien définie des concepts de la discipline à enseigner, de maitriser ces règles et les relations préétablies entre elles. En complément, l’enseignant consulte les manuels, le programme scolaire, en somme toutes les ressources pédagogiques disponibles afin de bénéficier d’amples connaissances pouvant rendre sa pratique plus rentable. Sachant que :

« Les connaissances constituant les disciplines scolaires sont disponibles (généralement sous forme de textes), préalablement à l’activité d’enseignement. Le propre de cette activité est de les rendre « enseignables », c’est çà dire présentables aux élèves et assimilables par eux. Pour ce faire, il ne suffit pas de mettre ces élèves en contact avec ces connaissances. Il faut opérer sur elles au traitement qu’à la suite de Shulman, on peut caractériser comme suit : compréhension de la matière, puis transformation, instruction, évaluation réflexion. »105

I.2.1.4. La transformation

Cette étape est subdivisée en plusieurs phases successives, la première est caractérisée par la sélection séquentielle et hiérarchique des connaissances qui seront adaptées à l’acquisition de l’apprenant. Cette mise au service de l’apprenant des connaissances se fait par des modalités telles l’usage : des images, d’exemples, ainsi que d’autres procédés et outils pédagogiques facilitateurs.

I.2.1.5. L’implication

Il consiste en cette phase de progression dans la pratique enseignante, à l’exposition aux apprenants des connaissances exploitées lors de la phase précédente. Ainsi que la mise en scène des contenus des savoirs savants abordés en contexte.

I.2.1.6. L’évaluation

Les difficultés d’apprentissage, le manque de réhabilité de la part de l’apprenant, les lacunes perçus lors des activités en classe, ..etc, sont tous des repères d’usage à l’enseignant. Ils lui accordent la possibilité de réguler les activités en instruction, et lui en fournissent au même temps des informations sur les méthodes déployées et le degré de leurs efficacités à faciliter l’acquisition des savoirs faires.

I.2.1.7. La réflexion

Cette phase est très pertinente et peut être considéré comme la principale de toutes les phases qui la précèdent. Elle vient en aval, en post activité, ou après une séance de classe.

À ce niveau l’enseignant procède à un feedback des actions faites en salle, ramenant toutes

105 Ibid. p. 176.

les interactions recensées entre les partenaires du contexte pédagogique, en faisant d’elle une base de données sur les contenus et les modes de transmissions et d’intervention de l’enseignant. En somme, ces données sont indispensables à la formation des connaissances professionnelles.

I.2.1.8. La représentativité

Dans l’un de ses articles, Thierry Piot a traité le sujet des représentations des enseignants débutants vis-à-vis de leurs pratiques. Justement, à propos de l’émergence des représentations, il était très persuasif en disant qu’elles « se construisent via le schéma ternaire sujet individuel/sujet social/objet, dans l'interaction entre l'univers symbolique et l'univers pratique. »106. Ensuite, il revient sur leurs conceptions, en précisant qu’ils

« restent un concept en cours de consolidation »107. Puis un peu plus loin, dans ses explications des faits, il argumente sa thèse sur les représentations par une citation d’Evelyne CHARLIER, en insistant sur le fait qu’elles sont « des entités hypothétiques, chargées affectivement, qui cristallisent des significations particulières, classificatoires ou structurales chez un individu ou chez un group à un moment donné, dans un projet.

Multidimensionnelles,... elles sont à la fois processus et produit,... et ont un pôle cognitif et un pôle affectif. » 108

De cause à effet, les représentations interviennent d’une manière significative dans le raisonnement de l’individu. Elles sont responsables du mécanisme de prise de décision et gèrent son savoir agir. Voulant connaitre l’effet qu’induisent les représentations, Thierry Plot a effectué une analyse sur les interactions des enseignants novices avec leurs apprenants, les résultats obtenus étaient pertinents, le chercheur a pu démontrer que les représentations orientent la pratique de l’enseignant vers deux pôles décisifs : « l'inertie non intégratrice et la dynamique intégratrice. »109

I.2.1.8.1. La dynamique excentrique ou non intégratrice

Le comportement en rapport avec la dynamique excentrique caractérise le quart du nombre d’enseignants faisant objet d’une expérimentation. Ainsi, l’enseignant prit parmi ces cas, éprouve une démotivation et se focalise beaucoup plus sur le problème soulevé que sur les outils nécessaires à le surmonter. Les situations lui paraissent confuses et isolées, sans

106 Thierry PlOT, Les représentations des enseignants débutants sur leurs pratiques : une clef pour comprendre la construction de la professionnalité enseignante, In, L’identité professionnelle : entre formation et activité professionnelle, RECHERCHE ET FORMATION, (N°25), INRP, France, 1997, p.115.

107 Ibid. p.115.

108 CHARLIER Evelyne, Planifier, c'est prendre des décisions, In, Thierry PlOT, Ibid. p.115.

109 Ibid. p.118.

rapport avec sa formation. Il s’embrouille dans la confusion de sa personne avec son statut professionnel. Il se laisse faire et se fige devant les situations pour les moins dramatiques.

Il s’angoisse vite et se bloque, ce qui provoque en lui « une illusion et un aveuglement qui le limitent à une proto-analyse ou une pseudo-analyse de ses pratiques pédagogiques. De fait, la pratique pédagogique est déconnectée d'un travail cognitif. Elle se borne à mettre en œuvre des savoir-faire routines, imités ou stéréotypés, mais généralement décalés du réel.[…]. Les représentations des pratiques pédagogiques sont construites autour d'un noyau fragmenté (juxtaposition et cloisonnement d'éléments négatifs) ou fermé (pas de relation entre la pratique et la variabilité des situations d'enseignement).»110.

Le plus important de ces caractéristiques dévalorisantes de ses pratiques, c’est que ce modèle de futur enseignant rend responsable les apprenants ainsi que le système de ses échecs.

I.2.1.8.2. La dynamique concentrique ou intégratrice

Elle caractérise la majorité des enseignants observés, l’individu qui en fait partie à une vision claire de sa profession et de sa pratique en classe. Réflexif de nature, il revient sur sa pratique afin de la perfectionner. Il donne une impression active et se comporte généralement en récepteur rationnel des critiques, en les considérant comme des outils de rénovation et des repères d’évolution. « Il est alors producteur de sa propre professionnalité enseignante. Cette professionnalité ne s'inscrit pas dans une dynamique linéaire, mais se construit dans un mouvement récursif entre le pôle affectif et le pôle cognitif des représentations de l'enseignant sur ses pratiques. Ces deux versants, distingués ici ne sont pas indépendants ni étrangers l'un à l'autre mais sont dialogiquement liés. »111. Nous trouvons que ce modèle d’enseignant ne manque pas de caractère ; au fait, il n’hésite pas à demander appui de ses pairs, et leur faire part de ses soucis. Son statut la bien conçu sur un socle rigoureux de connaissances.