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Premier chapitre. Le territoire et le rural :

1.4. En conclusion : les territoires ruraux sont l’expression du développement développement

Si le concept de territoire suscite un grand intérêt auprès des chercheurs, les acteurs institutionnels se sont depuis largement appropriés, sinon le concept, du moins la notion. Le territoire évoque le support de nouvelles modalités de développement et d’aménagement socio-économique de l’espace, s’appuyant sur des valeurs et des principes collectivement partagés. En se référant aux études théoriques précédentes, le territoire constitue pour le rural un vecteur de développement en réponse aux demandes sociales actuelles envers les territoires ruraux. Dans ce sens, l’étude du développement des territoires ruraux permet, d’une part, de chercher le sens de ces territoires, d’autre part, de situer le « référentiel habitant » (GUMUCHIAN, 1991)1 au cœur de la démarche de réflexion.

Selon BERRIET-SOLLIEC (2007), « le territoire peut être considéré comme un espace donné, institué, souvent issu d’un héritage historique et culturel », c’est le cas du territoire administratif. Puis, il « peut être conçu comme un espace d’action, construit, révélé par l’action des acteurs et qui peut constituer un cadre collectif pour l’intervention publique ». Dans ce sens, c’est un « espace socialement et historiquement construit qui donne un sens à l’action des acteurs ». BERRIET-SOLLIEC explique que du point de vue :

« de l’objet d’étude, les politiques agricoles voient leur cible d’intervention élargie aux autres activités rurales. Les objectifs des politiques intègrent de plus en plus une dimension spatiale tant dans la définition des enjeux que dans celle des modalités d’intervention. Les contours entre politique agricole et politique de développement rural se redéfinissent. Cette évolution est observable à différentes échelles géographiques (Union Européenne, Etat, Collectivités locales) ;

conceptuel, les outils d’analyse (secteur, territoire, régulation) méritent d’être repensés pour mieux analyser et interpréter ces transformations »2.

1 GUMUCHIAN H., 1991, Op. cit.

2 BERRIET-SOLLIEC M., 2007, Reconfiguration de l’intervention publique en agriculture. Dossier pour

l’obtention du diplôme d’habilitation à diriger des recherches, Université de Paris 7, ENESAD, CESAER, soutenu publiquement le 25 mai 2007, p. 18.

Ainsi, le développement territorial repose donc sur deux aspects. Le premier est l’importance des discours d’acteurs. En effet, les territoires sont investis et se développent par les discours et les aménagements, et c’est par l’étude de ce discours que l’on pourra légitimer l’existence du territoire auprès des individus concernés. Le second aspect consiste à s’interroger sur la façon dont les individus vivent et investissent un territoire. Cela revient à inscrire les acteurs au centre des préoccupations de développement et d’aménagement territorial.

De ce fait, le système territorial se caractérise par la capacité de ses acteurs à définir et réaliser des projets. Ces projets résultent d’un diagnostic global qui permet d’identifier les forces et faiblesses d’un territoire, d’en connaître ses ressources et les attentes des sociétés qui l’utilisent. Bien entendu chaque groupe d’utilisateurs construit sa propre représentation de l’espace. Il peut donc y avoir plusieurs territorialités sur un même espace, correspondant aux sens et valeurs que les individus lui confèrent. En ce sens, le territoire est donc un enjeu du développement, et il peut abriter des intentions variées et différentes, parfois sources de tensions entre les groupes. Ainsi pour qu’un territoire soit légitimé, il doit être reconnu, identifié et investi par les acteurs, afin que le partenariat entre le territoire, les acteurs fonctionne et qu’il soit le siège d’un développement équilibré.

Les rapports « urbains et ruraux », « villes et campagnes » comme ceux entre « agriculture et campagnes ont, depuis plusieurs décennies évolué. En 1994, Jean-Pierre CHARVET évoquait une « France agricole en Etat de choc »1. En 2005, les ondes de ce choc continuent à se propager. La mondialisation et les réformes de la PAC, en cours ou à venir, vont, à plus ou moins court terme, avoir de nouveaux impacts sur le monde rural.

La promotion, à partir des années quatre-vingt, de la notion de développement durable, invitait à repenser la place et les missions des agriculteurs dans les campagnes françaises. A côté de la seule production de biens alimentaires, la gestion « raisonnée » des territoires ruraux et de leurs ressources pouvait être reconnue par les pouvoirs publics. C’est dans cet esprit que les Contrats Territoriaux d’Exploitation (CTE), rebaptisés en 2004 en Contrat d’Agriculture Durable (CAD) sont apparus. Le principe est simple, l’Etat rémunère les exploitants agricoles pour les fonctions qui ne sont pas prises en compte par le marché. S’ouvre alors un débat puisque certains exploitants qualifient de rétrogrades ces nouvelles missions de « paysagistes » assignées à la profession.

Dans un rapport de la DATAR, en date de 2003, Quelle France rurale pour 2020 ?2, la DATAR proposait une typologie du rural. On y trouve tout d’abord, les « campagnes des villes », denses, aux dynamiques démographiques positives, à la ruralité choisie. Puis, les « campagnes fragiles » qui cumulent les handicaps d’une faible densité de population, du déclin démographique, des activités menacées, à la

1 CHARVET J-P., 1994, France agricole en Etat de choc. Paris, Ed. Liris, 223 p.

2 DATAR, 2003, Quelle France rurale pour 2020 - contribution à une nouvelle politique de développement rural

durable. Etude prospective de la DATAR, CIADT du 3 septembre 2003, Paris, La Documentation française, 70 p.

ruralité subie. Enfin, les « nouvelles campagnes », multifonctionnelles, bénéficiant d’aménités climatiques, paysagères, au potentiel touristique, en recherche d’équilibre. L’usage agricole des sols a diminué de 5% entre 1984 et 2004 au profit des terrains urbanisés et des infrastructures, du défrichement, des sols sans usages, et surtout du reboisement, en réponse à la déprise agricole. Mais il faut remarquer que le nombre d’actifs agricoles a diminué beaucoup plus que la Superficie Agricole Utilisée (SAU).

Du découpage administratif aux politiques publiques, le territoire est largement employé dans un grand nombre de documents officiels. Nous allons le constater, l’approche du développement des territoires ruraux a évolué pour tenir compte des processus d’urbanisation et de métropolisation, pour prendre en compte les aspirations au développement des territoires et des populations. Les oppositions entre Paris et la province, tout comme le rural et l’urbain ne sont plus pertinentes pour orienter les stratégies adoptées. Au demeurant, les projets d’aménagement et de développement des territoires, inspirés des logiques d’agglomération, de réseaux, de pays, de dépassement de maillages sont hérités de découpages anciens. De plus, fait intéressant, c’est en définissant l’urbain que l’on a défini les territoires ruraux.

Ainsi, les définitions anciennes et nouvelles utilisées pour le Zonage en Aires Urbaines et son Complément rural (ZAU-R) sont présentées dans le chapitre suivant où il sera exposé les différentes typologies employées afin de circonscrire les catégories d’espaces urbains et ruraux en France. Ceci, dans l’objectif de comprendre comment s’articule le programme français de développement rural sur le maillage existant et de quelle façon ce programme oriente vers une cohabitation entre les territoires urbains et ruraux.

Second chapitre.

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