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Compétence accessoire du Parquet européen en ce qui concerne les infractions inextricablement liées à des infractions pénales portant atteinte aux intérêts financiers de

2.2. TITRE DEUXIÈME Configuration du Parquet européen afin qu’il soit assurée l’effectivitél’effectivité

2.2.2. CHAPITRE DEUXIÈME Compétence matérielle du Parquet européen

2.2.2.1.3 Compétence accessoire du Parquet européen en ce qui concerne les infractions inextricablement liées à des infractions pénales portant atteinte aux intérêts financiers de

l'Union

La perpétration d'une infraction portant atteinte aux intérêts financiers de l'Union implique souvent la commission d’autres infractions strictement liées aux premières. Il est nécessaire donc de déterminer quelles infractions relèvent de la compétence du Parquet européen. Dans le cas où le législateur européen décide d'étendre la compétence du Parquet européen aux infractions accessoires a celles portant atteinte aux intérêts financiers de l'Union, il est nécessaire d’établir des critères précis pour déterminer en avance quelles infractions entrent dans les compétences du Parquet européen et quelles doivent être poursuivies par les procureurs des États membres. Les critères nécessaires pour déterminer la compétence du Parquet européen doivent être précisément définis afin d'assurer le respect de droits fondamentaux des personnes concernées par les procédures du Parquet européen. En particulier, doivent être respectés le droit de défense et celui de chacun a ne pas être poursuivi ou puni pénalement en raison d'une infraction pour laquelle il a déjà été́ acquitté ou condamné dans l'Union par un jugement pénal définitif conformément à la loi244. De même, la séparation des deux procédures pénales liées entre elles compromet l'effectivité des enquêtes menées par le Parquet européen, même pour des raisons d'économie procédurale. En effet, si un seul procès a lieu le même témoin devra être étendu seulement une fois et le procureur chargé de l'affaire pourra poursuivre de manière plus efficace les infractions graves et complexes en ayant une vue d'ensemble des infractions commises et des preuves recueillies245.

La proposition de règlement de la Commission du 2013 prévoit que la compétence du Parquet européen « devrait également couvrir les infractions que le droit interne n’érige pas techniquement en infractions portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union lorsque leurs éléments constitutifs sont identiques et inextricablement liés à ceux des infractions portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union »246. Cette compétence accessoire est définie au moyen de critères cumulatifs : il devrait s'agir des infractions inextricablement liées à des infractions pénales relevant de la compétence principale du Parquet européen et il devrait être « dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice qu’elles fassent l’objet d’enquêtes et de poursuites conjointes ». La proposition de règlement spécifie également que devrait être satisfaite la double condition que les infractions pénales portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union « soient prépondérantes » et que « les autres infractions 244De l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne ces droits fondamentaux sont consacrés dans la Charte des droits

fondamentaux de l'Union européenne aux article 48 et 50.

245Voy. a cet égard N. BITZILEKIS, The Definition of Ancillary Competence According to the Proposal for an EPPO – regulation, in ASP, P. (éd.), The European Public Prosecutor's Office – Legal and Criminal Perspectives, Stockholm, Skrifter utgivna av Juridiska fakulteten vid Stockholms universitet, 2015 pp. 112-119.

pénales reposent sur des faits identiques »247.

Conformément a la proposition de règlement de la Commission du 2013, la compétence matérielle du Parquet européen est exclusive pour déclencher des enquêtes et engager des poursuites relatives à des infractions pénales portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union248. Toutefois, la compétence matérielle du Parquet européen est déterminée par la loi nationale applicable249 et le Parquet européen et les autorités nationales chargées des poursuites doivent se concerter afin de déterminer l’autorité́ compétente en vertu de l'article 13 relatif a la compétence accessoire du Parquet européen250. En cas de désaccord entre le Parquet européen et les autorités nationales chargées des poursuites a propos de la compétence accessoire du premier, la proposition de règlement de la Commission prévoit que « l’autorité́ judiciaire nationale compétente pour statuer sur la répartition des compétences concernant les poursuites a l’échelle nationale se prononce sur la compétence accessoire »251.

Dans le cas où les autorités judiciaires nationales décident que la compétence en matière d’infractions est inextricablement liée a celles afférentes aux intérêts financiers de l'Union mais ne relèvent pas de la compétence du Parquet européen, l’État membre compétent a l’égard des autres infractions est également compétent a l’égard des infractions relevant de la compétence principale du Parquet européen252.

Le législateur européen privilégie donc la solution permettant de réunir dans un seul procès deux procédures liées entre elles, dans un souci d’économie de procédure et afin d’éviter une éventuelle violation du principe ne bis in idem. Les intérêts spécifiques de l'Union et le droit a l'égalité de traitement n'ont pas été tenus en considération. La détermination de la loi applicable et de l'autorité judiciaire compétente dépendra donc de l'interprétation des conditions énumérées de façon imprécise a l'article 13 de la proposition de règlement253. Il demeure impossible de connaître le moment a partir duquel les infractions sont considérées comme « inextricablement liées » ni quand 247Voy. article 13 de la proposition de règlement de la Commission du 2013.

248Voy. article 11, al. 4 de la proposition de règlement de la Commission du 2013. Les Considérant 23 explique que « les competences du Parquet europeen à l’egard des infractions portant atteinte aux interets financiers de l’Union

devraient primer les revendications nationales de competence, de sorte que le Parquet europeen puisse assurer la coherence des enquetes et des poursuites et piloter les unes et les autres à l’echelle de l’Union. En ce qui concerne ces infractions, les autorites des Etats membres ne devraient agir qu’à la demande du Parquet europeen, à moins que des mesures urgentes ne s’imposent ».

249Le considérant 24 de la proposition de règlement de la Commission du 2013 établit que « Puisque le Parquet

europeen devrait engager des poursuites devant les juridictions nationales, il conviendrait de definir ses competences par renvoi au droit penal des Etats membres, qui reprime les actes ou omissions portant atteinte aux interets financiers de l’Union et determine les peines applicables en transposant et en mettant en œuvre dans les systèmes juridiques nationaux la legislation pertinente de l’Union, notamment la [directive 2013/xx/UE] ».

250L'article 13, al. 2 prévoit également que « Lorsqu’il y a lieu de faciliter la determination de cette competence,

Eurojust peut etre associe conformement à l’article 57 ».

251Voy. article 13, al. 3 de la proposition de règlement de la Commission du 2013. 252Voy. article 13, al. 1 de la proposition de règlement de la Commission du 2013.

253Voy. a cet égard N. BITZILEKIS, The Definition of Ancillary Competence According to the Proposal for an EPPO – regulation, in ASP, P. (éd.), The European Public Prosecutor's Office – Legal and Criminal Perspectives, Stockholm, Skrifter utgivna av Juridiska fakulteten vid Stockholms universitet, 2015, p. 112 et seq..

une bonne administration de la justice imposerait qu'un ensemble d'infractions soit traité conjointement254.

La proposition de règlement du Conseil du 31 janvier 2017 n’explicite pas les conditions nécessaires fixant le lien étroit entre infractions pénales permettant d’emporter la compétence principale du Parquet européen. La modification des dispositions n’a pas contribué a fier des critères précises pour déterminer la compétence du Parquet européen.

En premier lieu, contrairement a la proposition de règlement de la Commission, celle du Conseil de 31 janvier 2017 prévoit un partage de compétence relative aux intérêts financiers de l'Union entre le Parquet européen et les États membres, ce qui écarte l’hypothèse d’une compétence exclusive255. En deuxième lieu, a la différence de la proposition de règlement de la Commission, il a été prévu que le Parquet européen est compétent « a l'égard de toute autre infraction pénale inextricablement liée à un comportement délictueux relevant du champ d'application du paragraphe 1 du présent article » relative a la compétence du Parquet européen en ce qui concerne les infractions portant atteinte aux intérêts financiers de l'Union, aux conditions établies par l'article 20, paragraphe 3256. L'article 20, al. 3 liste les cas où le Parquet européen doit s'abstenir d'exercer sa compétence a l'égard de toute infraction relevant de sa compétence principale et, après consultation des autorités nationales compétentes, doit renvoyer l'affaire a ces dernières dans un délai raisonnable257. En particulier, le Parquet européen doit s'abstenir d'exercer sa compétence si la peine maximale, prévue par le droit national pour une infraction portant atteinte aux intérêts financiers de l'Union, est moins sévère que la peine maximale encourue pour une infraction inextricablement liée aux infractions relevant de la compétence principale du Parquet européen. La peine maximale prévue par le droit national pour une infraction portant atteinte aux intérêts financiers de l'Union est équivalente a la peine maximale encourue pour une infraction inextricablement liée aux infractions relevant de la compétence principale du Parquet européen a moins que cette dernière infraction ait contribué a la commission de l'infraction portant atteinte aux intérêts financiers de l'Union. S'il y a lieu de supposer que le préjudice causé ou susceptible d'être causé aux intérêts financiers de l'Union par une infraction visée a l'article 17 n'excède pas le préjudice causé ou susceptible d'être causé a une autre victime.

Les critères déterminant quelle infraction est prépondérante révèlent deux conditions distinctes : le préjudice causé ou susceptible d'être causé par l'infraction et l'ampleur de la peine maximale258. En 254Voy. C. HAGUENAU-MOIZARD, F. GAZIN, J. LEBLOYS-HAPPE, Les fondements du droit pénal de l'Union

européenne, Bruxelles, Larcier, Collection Paradigme, 2016, p. 182.

255Voy. le considérant 7 et l'article 20 de la proposition de règlement portant création du Parquet européen – Projet de règlement, 31 janvier 2017, cit..

256Voy. article 17, al. 2 de la proposition de règlement du Conseil du 31 janvier 2017. 257Voy, article 20, al. 3 de la proposition de règlement du Conseil du 31 janvier 2017.

258Voy. le Considérant 49 ter della de la proposition de règlement portant création du Parquet européen – Projet de règlement, 31 janvier 2017, cit..

l'absence d'une législation uniforme a l’échelle européenne, les deux conditions dépendent de la législation nationale fixant le niveau de sanctions pénales a appliquer où le préjudice causé ou susceptible d'être causé a l’État membre concerné. Les critères permettant de déterminer la compétence du Parquet européen ne relèvent pas d’une définition fixée au niveau européen mais de la législation nationale des différents États membres et entraînant des variations d'un État a l'autre259.

La proposition de règlement du Conseil du 31 janvier 2017 a également supprimé la possibilité de consulter Eurojust pour résoudre le conflit de compétence. Conformément a ladite proposition, « en cas de désaccord entre le Parquet européen et les autorités nationales chargées des poursuites sur la question de savoir si le comportement délictueux relève ou non de l'article 17, paragraphe 1 bis ou 2, ou de l'article 20, paragraphe 2 ou 3, ce sont les autorités nationales compétentes pour statuer sur la répartition des compétences en cas de poursuites a l'échelle nationale qui déterminent qui doit être compétent pour instruire l'affaire. Les États membres désignent l'autorité́ nationale appelée à statuer sur la répartition des compétences »260.

La seule solution, assurant efficacité des enquêtes du Parquet européen et protection des droits fondamentaux des personnes concernées par les procédures dudit Parquet européen, consiste au recours d’une réglementation précise au niveau européen, prévoyant les critères en vertu desquels est déterminée la compétence du Parquet européen et d'attribuer a la Cour de justice la compétence de décider en cas de désaccord entre le Parquet européen et les autorités nationales. De même, devrait être prévue la possibilité d'exercer un recours devant la Cour de justice dans le cas de désaccord entre le Parquet européen et les autorités nationales sur la répartition des compétences.

2.2.2.2. SECTION DEUXIÈME Extension de la compétence du Parquet européens aux