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COMMUNICATION INTRAPERSONNELLE L'AUTO-OBSERVATION Une question de très grande importance théorique et pratique dans le domaine de

Dans le document Td corrigé Gregory Bateson - Ma Pomme pdf (Page 134-137)

VII - Information et codage

COMMUNICATION INTRAPERSONNELLE L'AUTO-OBSERVATION Une question de très grande importance théorique et pratique dans le domaine de

la psychiatrie est celle de l'observation de soi-même et de l'autothérapie. Une question du même ordre s'impose aux anthropologues qui savent bien qu'il est particulièrement difficile à un étudiant de parvenir, de l'intérieur de sa propre culture, à comprendre celle-ci. Les anthropologues d'aujourd'hui s'accordent à penser qu'une compréhension intime et détaillée de sa propre culture ne peut être obtenue que par la méthode comparative. Quoi qu'il en soit, il est certain que l'homme n'est parvenu que tardivement au cours de son histoire à la compréhension de ses propres prémisses culturelles; ce qui l'y a aidé, c'est la comparaison des cultures. Il est naturel, en la matière, de trouver une analogie entre l'anthropologie et la psychiatrie. On suggère que la nécessité d'une approche comparative en anthropologie est comparable au besoin que l'on a en thérapie

d'une autre personne qui soit différente de soi-même; et en comparaison avec laquelle nos particularités puissent ressortir sur cet arrière-plan. Cette analogie, toutefois, ne peut pas être poussée trop loin. Ce qui est curieux, c'est que, alors que la question particulièrement importante de la formation d'un anthropologue est d'avoir une expérience directe d'une culture totalement étrangère, ce qui correspond à ceci dans la formation d'un psychiatre, c'est sa propre psychanalyse.

Il y a des divergences d'opinions quant à ce qu'un individu peut faire pour essayer de comprendre sa propre personnalité s'il n'est aidé par aucun thérapeute; et le problème se complique encore du fait que, à l'évidence, un progrès thérapeutique peut, 228 dans certaines circonstances, survenir sans qu'on le comprenne. Il est possible qu'un thérapeute soit nécessaire s'il faut que le patient arrive à comprendre, mais que d'autres types de progrès puissent intervenir sans cette compréhension.

Dans la présente étude, les problèmes de l'auto-observation ont leur place: ils font partie de la plate-forme à partir de laquelle nous pourrons continuer notre investigation de la communication interpersonnelle. En bref, la question est celle-ci:

quelles sont les limites de l'auto-observation comme processus par lequel un individu peut parvenir à une nouvelle compréhension, ou obtenir de l'information sur son propre système de codage-évaluation ?

Le problème a de nombreuses ramifications:

1. Il serait souhaitable de décrire les phénomènes d'auto-observation d'une façon qui ne personnifie pas un soi à l'intérieur du Soi.

2. La question appelle à définir ce que l'on entend par «nouvelle»

compréhension qui soit distincte de l'élucidation de contradictions préexistantes à l'intérieur du système de codage-évaluation de l'individu.

3. Il faut examiner d'une façon formelle les limites réelles de la découverte de soimême qui proviennent du fait qu'un individu ne peut obligatoirement -percevoir sa propre vie et ses propres actions que dans les termes de son propre système de codage et évaluation. 11 est en tout cas incapable de percevoir les caractéristiques du système en fonction duquel et à travers lequel il perçoit.

De ces problèmes, c'est le troisième qui présente un intérêt particulier du point de vue de la présente étude. Le problème épistémologique de la conscience et de la nature du soi à l'intérieur du Soi, nous proposons de le différer, car il est pour le moment hors de portée de l'investigation scientifique. On a effectivement suggéré que l'expérience subjective de la conscience est déterminée par le conflit ou par la contradiction interne. Une telle hypothèse ôterait partiellement du champ de l'épistémologie le problème de la conscience et le placerait dans le domaine de la seconde des questions que nous avons posées ci-dessus - celle de l'élucidation des contradictions internes préexistantes. Cette seconde question peut être renvoyée après la troisième qui présente l'avantage 229 heuristique d'une plus grande simplicité. Si nous pouvons repérer des limites aux possibilités de l'autoperception, dans un organisme qui n'a pas été rendu complexe par la contradiction interne, ces limites seront appropriées pour la prise en considération de cas dont la complexité est plus grande.

Nous considérons maintenant les possibilités d'autoperception d'un organisme non conflictuel. Ici encore, pour des raisons heuristiques, nous prenons d'abord le cas d'un organisme dans un environnement tel que les prémisses de

codage-évaluation internes à l'organisme sont justes et qu'elles sont suffisantes pour l'environnement dans lequel il vit. Un organisme hypothétique de ce genre parviendra toujours à ses buts, précisément au moyen des sortes de codage et d'autocorrection qui constituent les caractéristiques mêmes de cet organisme; et il ne s'attaquera à aucun objectif impossible. La question est de savoir si, à partir d'une telle automaticité séquentielle de réussites, l'organisme ne pourra jamais accéder à une nouvelle compréhension (insight) de ses propres processus automatiques d'autocorrection.

La réponse est certainement tout à fait négative. De tout ce que l'on sait sur l'apprentissage, il découlerait que, dans l'hypothèse d'un cas de ce genre, non seulement aucune compréhension nouvelle ne se produirait, mais en outre aucun apprentissage de quelque sorte que ce soit ne surviendrait non plus. En fait, ce cas hypothétique dont nous discutons ici est précisément celui du joueur abstrait de la théorie de von Neumann. Si, au contraire, il y a des contradictions non pas internes à l'organisme mais entre les prémisses de l'organisme et celles qu'il obtient de l'environnement, alors la position est entièrement différente. Nous savons, à la suite des expérimentations des comportementalistes, que, dans des cas de ce genre, un organisme qui se trouvait antérieurement agir en fonction d'un certain système de prémisses pourra, après une période d'essais et d'erreurs, commencer graduellement ou soudainement à agir comme si c'était en fonction d'un autre système, différent et plus pertinent. En outre, nous savons, par les rapports introspectifs, qu'un apprentissage de ce genre peut être accompagné d'un changement dans la perception consciente que l'organisme a de l'environnement.

Ceci, à nouveau, est un problème d'erreurs et de correction d'erreurs semblable à celui dont nous avons parlé dans le passage précédent. L'organisme a été «induit en erreur» par l'environnement 230 et la question est maintenant: Quel ordre d'information nouvelle l'organisme peut-il obtenir comme résultat de son passage à travers toute l'expérience de frustration et d'autocorrection et étant parvenu à ce nouveau système de codage et d'évaluation grâce auquel la frustration est réduite ? Ayant été mis dans l'erreur, l'organisme se corrige, non seulement en modifiant ses actions, mais en modifiant - plus ou moins profondément - les processus et les mécanismes de base par lesquels les actions sont reliées aux indices de l'environnement. L'erreur corrigée dans cette séquence est d'un ordre très différent de l'acte d'autocorrection qui caractérisait l'organisme à l'issue de l'expérience.

L'organisme a maintenant modifié son système d'autocorrection. Les considérations suivantes sont applicables si l'on compare le processus thérapeutique et les modifications du système auxquelles peut parvenir un organisme isolément.

1. Le changement dans un organisme isolé, dans la mesure où c'est une amélioration de l'adaptation, peut être considéré comme thérapeutique.

2. On sait par expérience que, si l'organisme ne réussit pas à ajuster ses prémisses aux conditions de l'environnement, ce peut être antithérapeutique, et ceci peut conduire à la névrose expérimentale. C'est-à-dire que l'organisme peut être affecté du fait de l'échec - il peut, dans ce sens, avoir de l'information sur l'échec.

3. Il est peu probable que les anciennes prémisses soient totalement oblitérées à l'occasion de ce changement. Il est plutôt probable qu'elles survivent sous une forme modifiée ou «réprimée». Il est possible, en fait, que l'organisme, à un certain stade du processus d'apprentissage - et peut-être définitivement par la suite -, entretienne des prémisses conflictuelles avec toutes les complications qui peuvent s'ensuivre.

4. Il se peut que l'organisme acquière une nouvelle compréhension de l'environnement, mais il est douteux qu'il obtienne une nouvelle

compréhension de lui-même. Il se peut qu'il y ait un apprentissage secondaire, c'est-à-dire un apprentissage de l'apprendre ou un apprentissage sur l'apprentissage (cf. chapitre VIII) - de sorte que l'organisme, lorsqu'il sera à nouveau mis dans l'erreur, sera, par exemple, moins inquiet en raison d'une confiance accrue en son aptitude à traiter de telles infortunes. Mais il est problématique que ceci soit une augmentation 231 de la compréhension de soi. En effet, il est très douteux qu'un tel développement puisse survenir comme résultat des changements qui ont été considérés ici.

Avant l'expérience, l'organisme percevait ses propres actions d'une certaine manière déterminée par les prémisses qui existaient alors; après l'expérience, il se percevra lui-même et il percevra ses propres actions en fonction des nouvelles prémisses. Mais ce n'est pas un changement dans l'ordre de l'autoperception tel que nous puissions crier: «Eurêka.» L'étape suivante - voir le soi comme une entité qui a manifestement accompli ce changement - ne se produit pas obligatoirement. Un changement dans les prémisses de codage-évaluation ne dénote pas nécessairement une plus grande compréhension de ces prémisses, à moins que l'individu puisse voir ce changement comme un contraste, se comparant lui-même avec ce qu'il était précédemment. En faisant ce genre de comparaison, il agit essentiellement comme deux personnes entre lesquelles on peut opérer une distinction, et une méthode comparative est appliquée, qui mène à une compréhension accrue: il est en train de faire quelque chose qui, normalement, se produit dans un système de deux personnes.

Il apparaît donc que, d'une façon ou d'une autre, quelque sorte de système de deux personnes sera toujours nécessaire pour une thérapie de compréhension, mais peut-être pas pour d'autres types d'apprentissage. Il nous faut cependant aussi nous attendre à ce que d'autres types d'apprentissage, souvent eux-mêmes thérapeutiques, surviennent dans la situation à deux personnes, même si la présence de la seconde personne peut ne pas être nécessaire. Nous avons maintenant une base suffisante pour porter notre attention sur un système de deux personnes.

COMMUNICATION ENTRE DEUX PERSONNES ET

Dans le document Td corrigé Gregory Bateson - Ma Pomme pdf (Page 134-137)