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Collin de Plancy, soutien indéfectible malgré des aléas

PREMIÈRE PARTIE : DÉCOUVRIR LA CORÉE, UN PAYS MÉCONNU : 1887-1894

II.3. Le pavillon coréen à l’exposition universelle de 1900

II.3.1.3. Collin de Plancy, soutien indéfectible malgré des aléas

Ce projet ne voit jamais le jour. En novembre 1899, quelques mois avant l’ouverture de l’exposition, le baron Delort de Gléon décède. Le projet perd son « sponsor ». Mais, Collin de Plancy convainc le gouvernement coréen de maintenir sa participation malgré les difficultés. Les Coréens espèrent que le pavillon pourra être

484 Mercedes Volait, "La rue du Caire", op.cit., 2005, p.133 485

Mercedes Volait, "La rue du Caire", op.cit., 2005, p. 134 486

Delort de Gléon, L'Architecture arabe des khalifes d'Égypte à l'Exposition universelle de Paris en 1889 : la rue du Caire, Paris: Plon, 1889, p. 9

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Elisabeth Chabanol, « Le pavillon de la Corée à l’exposition universelle de 1900 à Paris », op.cit., 2006, p.139 488

AMAE, Affaires diverses commerciales, 1894-1901. Exposition de 1900, Corée, Shanghai, 1e février 1900. Lettre du commandant Vidal, attaché militaire, au ministre de la Guerre.

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construit comme prévu. Mais en janvier 1900, une entente intervient entre les héritiers du Baron et l’administration de l’exposition. La caution versée par le baron à la signature du contrat de location de l’espace leur est retournée, à charge pour eux de faire disparaître les bâtiments déjà construits et de remettre le terrain en état489. A quelques mois du début de l’exposition, la Corée n’a plus ni mécène, ni projet…

Les rapports entre Collin et le Baron étaient amicaux. Ce dernier ne tarit pas d’éloge sur le consul français : « Cette exposition pour laquelle nous savons pouvoir compter sur le concours très actif de notre Ministre à Séoul, Monsieur Collin de Plancy, promet d’être très importante, très curieuse et très complète490. » Il semble que les rapports entre Collin de Plancy et les héritiers du Baron Delort de Gléon aient été tout aussi cordiaux. En témoigne une statuette figurant dans les collections léguées par Collin de Plancy à la société académique de l’Aube491. Elle représente une jeune Coréenne, dans un costume traditionnel, robe nouée sous la poitrine laissée nue. Le socle porte une inscription « A M. Victor Collin de Plancy. En souvenir du Baron Delort de Gléon. Baronne D. de G. Octobre 1903 ». La figurine témoigne autant de la vision pittoresque que le baron aurait voulu donner à la participation coréenne à l’exposition universelle de 1900 que de la reconnaissance de sa famille pour le soutien apporté par Collin de Plancy au projet du Baron.

Suite au décès de Delort de Gléon, le flambeau est repris par le Comte Armand Mimerel (1867-1928). Cet avocat et industriel français, propriétaire de concessions au Congo français492, assume le commissariat général du pavillon coréen en France espérant recevoir du gouvernement coréen une concession minière en Corée493. Mimerel s'investit financièrement dans la réalisation d'un pavillon plus modeste, réplique de la salle du trône de l'ancien palais des rois de la dynastie Yi, réalisé par

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Elisabeth Chabanol, « Le pavillon de la Corée à l’exposition universelle de 1900 à Paris », op.cit., 2006, p. 136 490

Archives Nationales, série F/12/4357, Courrier du 25 novembre 1898 491 Musée Saint Loup, Troyes, 16.6.23

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Archives Nationales. Dossier personnel de légionnaire d'Armand Florimond Joseph Auguste MIMEREL, LH/1882/51

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l'architecte Eugène Ferret, architecte de l’opéra de Saïgon et familier de l’Asie494. L’architecture du pavillon s’inspire – d’après des plans et des photos – de la salle du trône du palais Kyongbok à Séoul. Elle est décrite par Maurice Courant qui en loue la simplicité.

« Regardez, avant d'entrer, le pavillon même, copie d'une de ces salles royales qui sont les appartements d'apparat des palais, les chapelles du culte des anciens souverains. Un soubassement rectangulaire en pierre avec balustrades et degrés d'accès; au centre, ménageant un large promenoir tout autour, le bâtiment rectangulaire; un toit en tuiles grises alternativement convexes et concaves, qui assurent l'écoulement de l'eau, et dont les jours et les ombres rompent la teinte uniforme ; le toit est élevé, fort incliné, l'arête faîtière horizontale ; les quatre arêtes d'angle descendant en courbe gracieuse, parfois avec une cassure au tiers de la longueur, sont relevées par des figurines fantastiques en terre cuite; ce toit, un peu lourd, est porté sur des colonnes cylindriques d'un rouge vif, l'affleurement des poutres de la charpente est sculpté, peint de blanc, noir, bleu, vert, de toutes couleurs voyantes qui, je ne sais comment, et surtout sous la splendide lumière de Corée, s'harmonisent et soutiennent, enlèvent ce toit un peu massif, lui donnant une légèreté qui étonne quand on y regarde de près. C'est là toute la construction, car les murs, quand il y en a, ne sont que du remplissage, et toujours, sur les deux façades antérieure et postérieure, sont remplacés par de hautes portes en bois plein dans le bas, en une sorte de moucharabiyeh à un mètre et demi du sol. A l'intérieur, la construction s'accuse avec autant de simplicité : le sol dallé ou tapissé de papier huilé, les colonnes rouges et les moucharabiyeh du pourtour, le plafond à caissons peints et sculptés : on peut voir la photographie d'un beau plafond de ce genre dans cette publication. Ce style architectural est

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Elisabeth Chabanol, “Korean collections kept overseas : The Case of the Korean Pavillion at the Paris Exposition of 1900" in 5th World Congress of Korean Studies de l'Academy of Korea Studies, « Korean Studies for the Advancement of Global Civilization », 2010, p.2

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chinois d'origine (…) la Corée a conservé à ce style une austérité, un bon goût qui ne sont pas sans grâce. »

Pendant toute la phase de préparation du pavillon, Collin de Plancy joue les intermédiaires et presse tant le gouvernement coréen que le gouvernement français afin d’accélérer les procédures et de favoriser l’érection d’un pavillon coréen. Le rôle de Collin de Plancy est d’ailleurs reconnu par les observateurs de l’époque puisqu’il est régulièrement cité dans les articles de presse comme un des artisans de la participation coréenne à l’exposition495.

II.3.2. Les collections exposées : entre présentation de la Corée ancienne et volonté de faire preuve de modernité

Le rôle de Collin de Plancy ne s’est en effet pas limité à l’organisation diplomatique et administrative de la participation de la Corée à l’exposition universelle de 1900. Il est également en grande partie à l’origine de l’exposition qui y est présentée, dont il fournit les objets aux côtés de ceux prêtés par d’autres collectionneurs français, ainsi que par le gouvernement coréen. A Séoul, il est assisté de Charles Alévêque496, professeur de français et délégué au Bureau des mines de la Maison impériale de Corée qui rédige en français et en hangul les étiquettes explicatives jointes aux œuvres rassemblées par le gouvernement coréen avant leur expédition vers le France497.

Le diplomate demande ensuite un congé exceptionnel afin d’être présent pour la mise en place de l’exposition au sein du pavillon coréen, assister à l’exposition et veiller à la répartition des œuvres dans les musées français498. Sa propre collection est présentée au pavillon comme en témoigne la liste d’admission à l’exposition : collection de livres et d’albums, médailles, soies brodées, meubles, céramiques,

495 Société de Géographie, Fonds Collin de Plancy, Dossier de presse sur le pavillon de la Corée avec des articles des journaux suivants : Petit Temps, Figaro, Libertés

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Marc Orange, « Victor Collin de Plancy et les conseillers français », dans Elisabeth Chabanol, Souvenirs de Séoul, op.cit., 2006, p. 106

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Elisabeth Chabanol, “Korean collections kept overseas : The Case of the Korean Pavillion at the Paris Exposition of 1900", op.cit., 2010, p.4

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armes… et peaux de panthères499. D’autres amateurs apportent leur concours à cette présentation : Vidal, attaché militaire français en Chine, proche de Collin de Plancy qui met à disposition un casque en fer damasquiné et incrusté, ou encore Arnold Vissière (une grande armoire)500.

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