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Le bassin d’éducation et de formation d’Hayange Thionville Relevé d’expérience (1998-2002)

gestion, tout comme les autres ministères, quelques ingrédients de ce que devait être la réforme de l’Etat. Parallèlement à la plus grande attention accordée à l’usager, on a assisté à l’entrée en scène de l’acteur local. L’introduction de certaines mesures a marqué le recul de l’uniformité centralisatrice et reconnu le droit à la différence et à la diversité. Le particulier pouvait l’emporter sur le général, le local passer avant le national.

Dans le même ordre d’idées, on a encouragé les initiatives qui émanaient du niveau local et on s’est efforcé de responsabiliser les acteurs locaux en insistant sur les mérites du management participatif et de la concertation.

Sachant que l’Education nationale cultive parfois l’art du « splendide isolement », que ce soit vis-à-vis de l’extérieur ou à l’intérieur, entre ses différentes composantes, des dispositions ont été prises pour tenter de sortir de cette logique du repli sur soi éducatif, de la défense du pré carré scolaire.

Nombre de réformes ont eu la volonté de balayer les obstacles qui cloisonnaient le système éducatif, de parvenir à une construction plus intégrée en établissant des correspondances d’un ordre d’enseignement à l’autre (itinéraires de découverte, projets pluridisciplinaires à caractère professionnel, travaux personnels encadrés…), en créant des continuités entre les degrés d’enseignement (pour l’enseignement des langues vivantes, de l’éducation artistique et culturelle, de l’éducation à la citoyenneté…). Des brèches ont été ouvertes qui ont permis d’établir la liaison avec le monde environnant. Des tentatives de rapprochement des autres services de l’Etat ont été esquissées. Les bases d’une collaboration plus étroite et plus assidue avec les entreprises et les milieux économiques ont été jetées et des pas accomplis dans cette direction. Pour combattre les effets du cloisonnement, le levier des ressources humaines a également été utilisé. Au niveau des méthodes de travail, il y a eu des exhortations récurrentes à travailler en réseau ou en équipe ainsi qu’une invitation à la mutualisation des ressources.

Toutes ces mutations à l’œuvre, qui transfiguraient l’organisation scolaire, transparaissent également de l’analyse que l’on peut faire des missions confiées aux bassins d’éducation et de formation ainsi que des conditions de leur émergence.

1.3. La constitution des bassins d’éducation et de formation : une initiative laissée à l’échelon académique

La circulaire du 20 juin 2001, qui fixe les orientations relatives aux bassins d’éducation et de formation, est à cet égard révélatrice. Les options retenues dans le temps et dans l’espace donnent nettement la priorité à l’initiative locale et illustrent parfaitement l’effacement du niveau national. Dans le temps, la circulaire paraît après que les bassins d’éducation et de formation se soient mis en place dans les académies, inversant en quelque sorte l’ordre législatif. La rédaction du texte réglementaire est l’aboutissement du processus au lieu d’être son origine. Dans l’espace, l’académie est désignée comme étant le territoire privilégié pour la création des bassins dont on accepte qu’ils répondent à des appellations différentes.

Les concepts abordés dans le texte sont ceux développés dans le cadre de la réforme de l’Etat. Il est fait allusion « à la responsabilisation des centres de décision déconcentrés, à la mise en place de l’échelon d’animation de proximité, à la prise en compte des attentes des concitoyens, à la gestion plus qualitative des ressources humaines, à la mise en commun des pratiques, à la réalisation de projets communs, à la mutualisation des moyens, à la recherche d’une meilleure continuité, d’une plus grande ouverture de l’action éducative, au renforcement et au développement des partenariats locaux… ».

Dans l’académie de Nancy-Metz, la mise en place des bassins d’éducation et de formation est la résultante de transformations successives. En 1994, on a assisté à la création, dans chaque district, des comités locaux pour la formation professionnelle. Durant l’année scolaire 1998-1999, ils se sont mués en bassins d’éducation et de formation. Le territoire académique est alors découpé en 17 BEF calqués grosso modo sur les bassins d’emploi. Les BEF sont présentés comme étant des circonscriptions de proximité accrochées non pas au champ de l’organisationnel mais à celui du fonctionnel. Ils sont conçus comme un échelon d’animation et non comme un échelon administratif supplémentaire. Ils s’apparentent bien en cela à un outil du pilotage académique.

La structuration des bassins d’éducation et de formation est volontairement lâche. Des registres d’activités hérités des missions des comités locaux pour la formation professionnelle sont conservés :

1/ l’information et l’orientation,

2/ l’offre de formation et la carte scolaire,

3/ l’insertion professionnelle et les relations avec les entreprises.

D’autres surgissent, plus allusifs que précis, pour autoriser toutes les expériences : questions éducatives et problèmes pédagogiques, formation continue des personnels, gestion des ressources humaines…

Au niveau de l’organisation interne, aucun modèle n’est imposé, si ce n’est pour chaque bassin d’éducation et de formation la désignation de trois animateurs dont les activités sont centrées sur les anciennes missions héritées des comités locaux pour la formation professionnelle. Mais, dans l’esprit, les recommandations relatives au travail d’animation à conduire reprennent à leur compte les concepts relatifs au nouveau mode de pilotage du système éducatif : affirmation du principe de diversité, reconnaissance du droit à l’initiative locale, travail en réseau autour des notions de partage et de concertation, appui sur le contexte local et échanges avec les partenaires locaux…

La démarche retenue repose sur l’empirisme. Afin de ne pas briser les élans du terrain, ni oblitérer les spécificités locales, le bassin d’éducation et de formation ne se conçoit pas comme un paradigme. Il est en devenir permanent, se construisant au fur et à mesure des expériences, selon des formes qui varient elles aussi. La décision a été prise d’accepter l’existence des écarts et même de les accentuer en désignant certains bassins d’éducation et de formation comme pilotes pour la réalisation d’un diagnostic partagé de bassin. Ce fut le cas de celui d’Hayange Thionville.

2. La structuration du bassin d’éducation et

de formation d’Hayange Thionville

Comme l’autorité académique les y engageait, les membres du bassin d’éducation et de formation d’Hayange Thionville se sont attachés à structurer leur action à partir des particularités locales.

2.1. Des modalités de fonctionnement adaptées à la situation propre du bassin d’éducation et de formation d’Hayange Thionville

Le bassin, résultat de la fusion de deux anciens districts, a eu à lutter dès sa naissance contre une série de forces centrifuges s’opposant par nature à la dynamique exigée par un travail en réseau. La géographie, même si le territoire du bassin d’éducation et de formation coïncidait avec celui du bassin d’emploi de Thionville, renvoyait dos à dos le secteur de Thionville, situé sur le sillon mosellan, aspiré par le dynamisme de son voisin luxembourgeois, ayant rompu avec la tradition de l’acier, connaissant une démographie plus favorable et le secteur d’Hayange, resté en marge du couloir de circulation mosellan, se remettant difficilement de la crise de la sidérurgie, possédant toujours un pied dans ce secteur d’activité, accueillant une population vieillissante et plus affaiblie économiquement.

Les habitudes de travail en commun d’un district à l’autre n’avaient été qu’épisodiques, réunissant les chefs d’établissements une fois par an à l’occasion des opérations d’affectation ; et encore, les relations étaient-elles empreintes de méfiance dans la mesure où l’attractivité des deux districts n’était pas équivalente.

L’addition du district de la Fensch et de celui d’Hayange conférait au nouveau bassin une dimension imposante qui rassemblait pour le public cinq circonscriptions du primaire, vingt et un collèges, huit lycées professionnels, six lycées, trois C.F.A., deux Greta et deux C.I.O. et abritait une population scolaire totale de plus de 18 000 élèves dans le second degré. Le nombre d’intervenants, plus de quarante personnes, quatre-vingts si on décidait d’associer les adjoints, transformait l’animation du bassin en une lourde manœuvre de porte-avions. L’animation avait également à souffrir de l’appartenance des membres du BEF à différents ordres d’enseignement qui les séparaient plus qu’ils ne les rapprochaient. La culture du système éducatif portait spontanément au repli sur soi et les relations entre lycées voisins se lisaient plus sous le chapitre de la concurrence que sous celui de la complémentarité. L’émergence de la notion de réseau et de travail en réseau semait le désordre dans les consciences professionnelles, introduisant de ce qui s’apparentait à une révolution épistémologique.

Une organisation en négatif a été échafaudée pour compenser les effets centrifuges. Elle contenait en filigrane les matériaux pour bâtir une communauté de travail cohérente et homogène (cf. schéma ci- dessous). Pour annuler les effets des nombreuses segmentations qui compartimentaient en différents endroits le système, la mixité a été privilégiée dans la constitution des commissions de travail et du comité de pilotage du bassin. Aux représentants du premier degré ont été associés des représentants du second degré ; aux collègues originaires du district de la Fensch, d’autres originaires du district de Thionville ; aux membres des équipes de direction des collèges, des membres des équipes de direction des lycées professionnels ou des lycées.

Pour se prémunir de l’apparition de chapelles et de l’émergence de petits chefs par dérive de la fonction d’animateur, il a été posé comme postulat que le travail en réseau resterait un travail entre pairs

et que le cadre de l’action conduite par le bassin ne déborderait pas d’un strict rôle d’animation, ni ne se substituerait à la fonction de décision appartenant exclusivement à l’autorité académique.

Au risque de voir se développer de nouvelles discontinuités le long des domaines d’intervention des trois animateurs désignés par le Recteur, l’idée de transversalité du travail a été imposée au moment de circonscrire les thèmes d’études soumis à l’examen et à la réflexion du bassin. Il fallait considérer que les trois champs d’action étaient intriqués l’un dans l’autre et correspondaient entre eux. La décision a alors été prise de leur superposer huit priorités liées entre elles et reflétant des problématiques propres au bassin.

La thématique de l’offre de formation occupait la place centrale et se déclinait en suivi d’effectifs, carte des langues, carte des options, carte

Formation animation des ressources humaines Information orientation Offre de formation Liaisons inter-cycles Relations avec les partenaires locaux Publics en difficulte Réseau nouvelles chances Insertion - Effectifs - Langues - Options - Formations professionnelles - Actions de formation continue - Actions de la MGI

des formations professionnelles, carte des actions de formation continue, carte des actions conjoncturelles. Les options prises la modifiant nécessitaient en aval un travail sur l’information et l’orientation, qui transitait par l’animation des ressources humaines et la mise en place de liaisons inter cycles. En amont, elles agissaient sur l’insertion et la prise en charge des publics en difficulté et passait par les relations avec les partenaires extérieurs.

Si l’existence d’une assemblée plénière et de huit commissions de travail permanentes garantissait la participation de tout l’encadrement à l’œuvre commune, elle n’assurait pas la continuité dans le temps, ni entre les thèmes de travail. La continuité a été rendue possible par la création d’un comité de pilotage du bassin, dont la composition s’attachait à préserver les équilibres du bassin cités précédemment (entre les degrés d’enseignement, entre les districts, entre les établissements ).

La continuité s’est trouvée également assurée par la structuration des échanges d’information et la formalisation de leur circulation interne et externe (cf. encadré n° 1).

2.2. Points d’appui et limites de la forme donnée au fonctionnement du bassin

La recherche de cohésion qui a modelé tout le travail de définition des modalités de fonctionnement du bassin d’éducation et de formation d’Hayange Thionville a été servie par l’évolution négative de la démographie scolaire. Les prévisions, qui annonçaient un resserrement important des effectifs sur le bassin, ont permis le développement de réflexes solidaires. Face à une baisse déjà ressentie avec plus ou moins d’acuité dans certains établissements scolaires (collèges et lycées professionnels, plutôt dans le secteur de la Fensch que dans celui de Thionville) et face à une amplification attendue de ce mouvement à moyen terme, les établissements ont mieux compris l’intérêt de la complémentarité et davantage adhéré au jeu du travail collectif. A la lumière des analyses prédictives réalisées par le service de la DEEP du rectorat, ils ont ressenti la nécessité d’anticiper sur les effets néfastes à venir et d’agir sur l’évolution de la carte des formations avant d’avoir à la subir.

Encadré n° 1. Rôle du comité de pilotage

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