• Aucun résultat trouvé

La forme définitive du théâtre de type romain découle d’un long processus de réflexions architecturales, qui se fonde naturellement sur le théâtre de type grec. En d’autres termes, le théâtre de type romain peut être considéré comme un descendant indirect du théâtre grec237, puisqu’il conserve les trois éléments principaux de ce dernier : un koilon, dénommé

cavea, une orchestra et un bâtiment de scène. L’innovation majeure ne réside donc pas dans les composantes de l’édifice mais plutôt dans l’architectonique de ces composantes, associée à de nouvelles techniques de construction : la cavea, l’orchestra et le bâtiment de scène vont en effet être réunis en un monument unitaire et fermé. Cette modification de la forme de l’édifice va influer directement sur la scénographie et l’expérience visuelle des spectateurs ; le paysage extérieur n’étant plus visible, le regard se concentre exclusivement sur la scène. Le sentiment d’être coupé du monde extérieur, donc de la réalité, s’en trouve renforcé.

La conque des gradins, adoptant désormais une forme semi-circulaire, est associée structurellement au bâtiment de scène par les aditus maximi qu’elle couvre. Une substructure construite, dans laquelle sont aménagées des circulations, soutient les gradins. Les techniques de construction employées pour la réalisation de cette substructure constituent un élément essentiel : en effet, grâce à la maîtrise du petit appareil de moellons et de mortier, conjuguée à celle de la voûte en canonnière, en pierre de taille ou en maçonnerie coffrée, le théâtre n’est plus soumis aux contraintes topographiques238. Il peut désormais être édifié sur un terrain plat, permettant ainsi une plus grande liberté pour le choix du lieu d’implantation.

Concernant les autres composantes du monument, la réduction de l’orchestra en un demi-cercle témoigne également d’une évolution notable : l’orchestra, espace de performance du chœur à l’époque hellénistique, devient un lieu dévolu aux spectateurs de marque, qui prennent place sur des sièges de proédrie. L’action scénique se déplace vers une estrade profonde et peu élevée (1,20 m env.), le pulpitum, qui s’étend entre les retours du mur de scène, les versurae. À l’arrière du pulpitum, s’élève le front de scène ou scaenae frons, dont la hauteur équivaut généralement à celle de la cavea. Cette façade est généralement dotée

237 Il serait réducteur pour autant de considérer le théâtre romain uniquement comme un dérivé du théâtre grec,

une forme améliorée par la maîtrise technique romaine, car ce serait négliger les différences de conceptions scéniques et l’évolution de l’art dramatique entre l’époque hellénistique et l’époque impériale.

90

d’ordres superposés, de niches et de statues, formant un ensemble d’une grande richesse décorative. Le front de scène est également percé de portes (3 ou 5), servant ainsi d’intermédiaire entre la scène et le postscaenium, où se situent les coulisses. On trouve parfois des salles annexes contiguës au postscaenium, appelées foyers ou basiliques. Enfin, il arrive que le théâtre soit associé à une porticus post scaenam, portique joint au mur arrière du

postscaenium, ou à un quadriportique.

Les quatre théâtres identifiés en Égypte par des vestiges constituent un ensemble très hétérogène, aussi bien en termes d’état de conservation que de composantes architecturales. Ils offrent ainsi un état des lieux de la diversité des formes que peut adopter l’architecture théâtrale à l’époque romaine dans deux régions différentes : la Moyenne Égypte, avec les édifices d’Oxyrhynchos et d’Antinoopolis, et le Delta oriental, avec ceux de Péluse. La fiabilité des données archéologiques disponibles pour chacun de ces théâtres est également très variable : les deux monuments de Moyenne Égypte, aujourd’hui disparus, sont chacun attestés par un document à caractère scientifique, à savoir une étude entreprise par W. M. F. Petrie en 1922 sur le théâtre d’Oxyrhynchos et une description du théâtre d’Antinoopolis réalisée par E. F. Jomard et publiée au début du XIXe s. dans la Description de l’Égypte. Ces

deux sources anciennes doivent donc, sans négliger pour autant leur intérêt et leur qualité, être employées avec précaution. En revanche, les édifices situés à Péluse ont fait l’objet de fouilles archéologiques plus récentes et plus approfondies, permettant ainsi une meilleure connaissance de leurs caractéristiques techniques et stylistiques.

I – Oxyrhynchos

Aujourd’hui entièrement recouvert par les sables (pl. XXXII), le théâtre d’Oxyrhynchos est un monument délicat à analyser, puisque les connaissances sur ses composantes architecturales se limitent seulement à l’étude réalisée par Petrie en 1922, publiée en 1925239. Bien que cette unique source ait le mérite d’offrir une grande précision grâce à la prise de mesures systématique, elle doit être abordée avec prudence, ce que Petrie reconnaît lui- même : en effet, il souligne dès le début de son étude qu’il a du faire face à des contraintes de temps et d’argent ne lui permettant pas d’entreprendre un dégagement complet du théâtre240.

239 PETRIE 1925, p. 14-16. 240 Ibid., p. 14.

91

Il a donc opté pour des sondages ponctuels à divers endroits de la zone afin de déterminer le plan général de l’édifice.

De plus, Petrie précise que le théâtre est connu depuis longtemps pour servir de carrière de pierre, phénomène très fréquent en Moyenne Égypte où la plupart des édifices publics antiques ont disparu dans les fours à chaux. Il est donc nécessaire de tenir compte de ce contexte archéologique afin de mesurer le degré de fiabilité des travaux réalisés par Petrie.

Il s’agit donc ici d’étudier les caractéristiques architecturales du théâtre d’Oxyrhynchos à travers une réinterprétation des données fournies par Petrie, non seulement dans sa publication, mais également dans ses cahiers de notes241. Nous nous appuierons également sur l’article de D.M. Bailey242, paru en 2007, qui reprend l’étude de Petrie en la complétant par une description des éléments architecturaux conservés au British Museum243.

1 – Composantes architecturales

D’après le plan dessiné par Petrie (pl. XXXIII)244, les vestiges se rapportant à la cavea du théâtre se limitent à quelques portions de gradins et de murs, appartenant respectivement à la substructure de l’édifice et à la partie orientale du mur de soutènement ; le bâtiment de scène est quant à lui révélé par des portions de murs associées au front de scène, aux versurae et au postscaenium. Un portique a également été dégagé dans l’angle nord-est du monument245. Le théâtre a vraisemblablement été élevé sur terrain plat.

a – La cavea

Le diamètre de la cavea a été estimé à 123 m environ, ce qui placerait d’ores et déjà le monument parmi les plus grands théâtres répertoriés ; bien que ses extrémités ne soient pas clairement définies, la conque des gradins semble dépasser légèrement le demi-cercle sur le plan dessiné par Petrie, ce qui la distinguerait du type romain occidental. Le mur de soutènement, partiellement préservé à l’est, présente une épaisseur de 4 m ; il semble que la

241 Les cahiers 5a et 76, conservés aux archives du Petrie Museum et non publiés, contiennent un grand nombre

de croquis et mesures réalisées par Petrie en 1922. Nous remercions vivement Mr Stephen Quirke, alors conservateur du Petrie Museum, pour nous avoir envoyé la version numérisée de ces cahiers de notes.

242 BAILEY 2007, p. 70-90. 243 Cf. annexe 3.

244 PETRIE 1925, pl. XXXVIII.

92

partie sommitale de ce mur ait été décorée, si l’on en juge par la présence de trois pierres de couronnement photographiées par Petrie dans sa publication (pl. xxxv)246 : deux d’entre elles présentent une frise végétale composée de rinceaux alors que la troisième se définit par trois rosettes de formes différentes. Cette dernière est la seule des trois à avoir été ramenée en Angleterre. Elle est détaillée dans l’annexe 3, qui correspond à la description des éléments architecturaux conservés au British Museum.

La question du nombre de rangées de gradins et de leur composition demeure incertaine : en se fondant sur la présence de deux portions conservées de cinq rangées de gradins chacune et séparées par un couloir d’1,22 m de large, Petrie suggère que la cavea était peut-être composée de 35 rangées de gradins247, le nombre moyen de gradins par rangée étant estimé à 320. D’après Petrie, ces 35 rangées de gradins seraient divisées horizontalement par 6 couloirs concentriques (praecinctiones) en 7 cunéi de 5 rangées de gradins. Cette hypothèse demeure hautement improbable, car aucun théâtre antique connu ne possède plus de deux

praecinctiones. Selon Bailey248, le secteur inférieur que Petrie associe à une portion de gradins serait en réalité une tribune, soit une loge séparée des gradins principaux et réservée aux spectateurs de marque. Au vu de ses dimensions imposantes, il semble plus plausible d’attribuer à la cavea deux praecinctiones, comme dans les théâtres d’Éphèse ou de Milet. Le nombre total de rangées de gradins peut être quant à lui déterminé grâce aux dimensions de ces derniers et à la distance entre la première rangée de gradins et la paroi interne du mur de soutènement : d’après les données de Petrie249, un gradin (soit le dossier et la partie repose- pieds) mesure en tout 45,7 cm de hauteur et est séparé du gradin supérieur par une distance de 83,8 cm. Sachant que la rangée la plus basse des gradins se situe à 36 m du mur de soutènement, il est possible d’inclure 43 rangées de gradins dans la cavea. En tenant compte des praecinctiones, le nombre de rangées pourrait être évalué entre 38 et 40, et non à 35 comme Petrie le suggère. Ceci nous amène par conséquent à reconsidérer à la hausse la capacité d’accueil du théâtre : Petrie l’avait évalué à 11200 personnes250 en multipliant le nombre total de rangées de gradins par le nombre moyen de gradins par rangée, soit 35 x 320 = 11200. D’après les récents calculs proposés par Bailey251, qui prennent en compte

246PETRIE 1925, pl. XXXVII, 6-8, planche reproduite pl. xxxv. 247 Ibid., p. 14.

248 BAILEY 2007, p. 72. 249 PETRIE 1925, p. 14. 250 Ibid.

93

davantage de facteurs, la cavea pouvait probablement contenir environ 12500 spectateurs, répartis sur une quarantaine de rangées de gradins.

La substructure de la cavea est révélée par des restes de murs de fondation, préservés jusqu’à une hauteur de 7,39 m au-dessus du niveau de l’orchestra ; cette mesure est indiquée sur le plan de Petrie en pouces (« TOP + 291 »)252. Si Petrie interprète ces portions de murs comme des vestiges de vomitoria253, il paraît plus probable qu’il s’agisse des murs radiaux supportant les gradins254. D’après le plan, il est possible d’émettre l’hypothèse d’une substructure constituée de chambres voûtées rayonnantes255.

En outre, la découverte de colonnes en granit rouge de 55,9 cm de diamètre, disposées en bordure de la cavea, semble indiquer l’existence d’un portique sommital, élément relativement fréquent dans les théâtres de type romain. D’après Bailey256, la hauteur de ces colonnes peut être déterminée grâce à celle des colonnes conservées du front de scène, qui seront abordées plus bas. En effet, étant donné que les colonnes du portique sommital possèdent un diamètre de 55,9 cm et que celles du front de scène ont un diamètre de 68,6 cm, cela signifie que les colonnes du portique ont un diamètre inférieur de 18,5% par rapport aux colonnes du front de scène. Sachant que ces dernières mesurent 5,2 m, Bailey en déduit que les colonnes du portique ont également une hauteur inférieure de 18,5%, soit 4,24 m. Si l’on prend en compte la présence d’un entablement (non conservé), il est possible d’émettre l’hypothèse d’un portique sommital de hauteur équivalente à celui du théâtre d’Aspendos par exemple, soit environ 7 m257.

Enfin, nous émettons l’hypothèse que la cavea du théâtre était peut-être équipée d’un

velum, afin de procurer de l’ombre aux spectateurs ; en effet, le P.Oxy XVII 2128, daté de la

fin du IIe s. apr. J.-C., précise l. 7-8 qu’une somme de 3500 drachmes a été allouée à

Callinicus, fils d’Epimachus, et à ses entrepreneurs associés pour l’achat d’un οὐήλων: […]

7 ΚαλλινίκῳἘπιµάχου καὶ τοῖς σὺν α(ὐτῷ) 8 ἐγλήµπτορσι οὐήλων (δραχµαὶ) Γφ.

[…]

252 PETRIE 1925, pl. XXXVIII, cf. pl. XXXIII. 253 Ibid., p. 14.

254 SEAR 2006, p. 299.

255 ROSSETTO, SARTORIO 1994 p. 321. 256 BAILEY 2007, p. 72.

94

La traduction du terme οὐήλων est cependant discutable : seule occurrence trouvée dans les papyrus, nous ne pouvons affirmer qu’il s’agit bien de l’équivalent grec du mot latin

velum258 et qu’il est associé au théâtre d’Oxyrhynchos, ce dernier n’étant pas mentionné dans le texte. Le terme οὐήλων pourrait également faire simplement référence à des rideaux ou à des tentures. Ce document pose néanmoins la question de la présence d’un velum au-dessus de la cavea, ce qui ne semble pas incongru au vu de la taille importante du monument et de la chaleur du climat égyptien.

b – L’orchestra et les aditus maximi

L’orchestra, que Petrie appelle de manière impropre la konistra259, demeure quasiment inconnue. Son diamètre est estimé à 1200 pouces260, soit environ 30 m, ce qui correspond à la moitié de la longueur du bâtiment de scène et au quart du diamètre de la cavea261.

Concernant les aditus maximi, c’est-à-dire les passages voûtés permettant d’accéder à l’orchestra et aux premières rangées de gradins, Petrie pensait avoir identifié le passage oriental ; celui-ci est visible en gras sur le plan262, auquel il adjoint le nombre « -19 », ce qui signifie que le niveau de sol de ce passage se situe à 19 pouces en-dessous du niveau de l’orchestra, soit 48,3 cm. Il précise dans sa publication que sa hauteur atteint 205 pouces, soit 5,2 m263. Or, le plan de Petrie comporte une anomalie notable : s’il s’agit bien d’un aditus

maximus, soit il est placé au mauvais endroit, soit ce sont les gradins et la tribune à l’ouest qui sont mal situés. En effet, il n’est pas possible que les deux éléments soient disposés l’un en face de l’autre, car cela ne laisse aucun espace pour le passage occidental ; même si l’aditus

maximus oriental est situé à 48,3 cm en-dessous du niveau de l’orchestra, sa hauteur demeure supérieure à celle des gradins conservés à l’ouest. Il ne peut donc y avoir un passage correspondant en-dessous des gradins. Si l’on admet que Petrie n’a pas fait d’erreur dans la disposition des vestiges sur son plan, l’explication la plus plausible serait que le passage voûté

258 Cf. sur ce sujet MORETTI J.-Ch., «Étude sur la nomenclature grecque de l'architecture théâtrale : πέτασος et la

dénomination grecque des vélums», Anatolia Antiqua, 2, 1993, p. 133-158.

259 BAILEY 2007, p. 71-72, note 13 ; SEAR 2006, p. 7; POLIAKOFF M.B., « The Greek Term Konistra », JRA 3,

1990, p. 382-383. Le terme konistra est généralement employé dans un contexte athlétique, où il fait référence au sable ou à la poussière servant de cadre aux lutteurs. Dans le cas d’un théâtre, il désignerait donc plus spécifiquement une orchestra recouverte de sable pour accueillir des combats de gladiateurs et non une

orchestra classique.

260 PETRIE 1925, p. 14.

261 Le théâtre d’Aspendos présente le même rapport de proportions. Cf. SEAR 2006, p. 27. 262 PETRIE 1925, pl. XXXVIII. Cf. pl. XXXIII.

95

dégagé ne serait pas un aditus maximus, mais un couloir appartenant à la substructure de la

cavea264.

c – Le bâtiment de scène

Grâce au dégagement des angles formés par le front de scène et les versurae, Petrie a pu estimer la longueur du pulpitum à 61,66 m, soit la moitié du diamètre de la cavea. L’archéologue précise également que la scène se situe à 2,69 m (106 pouces) au-dessus de l’orchestra, mais mesure 2,92 m (115 pouces) de haut près du front de scène ; cette différence de niveau pourrait s’expliquer par la présence d’un pavement265.

*Le front de scène : la composition du mur de scène est révélée uniquement par quelques

éléments de pilastres et de colonnes ; le plan de Petrie indique la présence de trois bases de pilastres en marbre situées à l’est le long du mur de scène, correspondant donc vraisemblablement à l’ordre inférieur de la scaenae frons. Si ces bases apparaissent alignées sur le plan266, les mesures accompagnant les croquis de ces bases dans le cahier 76 signalent un écart de distance avec le mur de scène267 : la base la plus occidentale se situait à 7,7 m du mur de scène alors que la base la plus orientale se trouvait à 4,6 m du mur. Il est fort probable que ces bases aient été déplacées268 ; en effet, dans la plupart des théâtres de type romain, l’ordre inférieur de la scaenae frons présente une série de colonnes ou pilastres dressés sur de hauts podiums (podia), encadrant les portes menant au postscaenium. Nous pouvons supposer que le théâtre d’Oxyrhynchos adoptait un agencement semblable, bien qu’aucune trace de ces hauts podiums n’ait été mise au jour ; peut-être ont-ils été détruits pour cause de réemploi des matériaux, les trois bases de pilastres ayant été épargnées pour une raison inconnue et laissées sur place. Des vestiges de pilastres et de colonnes en granit rouge d’Assouan ont également été retrouvés dans ce secteur, les pilastres étant séparés de 2,5 m et les colonnes d’1,25 m.

D’après leur disposition, Petrie restitue l’ordre inférieur du front de scène de la manière suivante269 : une série de pilastres en faible saillie était doublée par une série de colonnes, une colonne intermédiaire venant se placer entre deux pilastres. Les fûts de colonnes mis au jour mesurent 68,6 cm de diamètre et 4,1 m de haut, et s’élevaient sur des

264 BAILEY 2007, p. 73. 265 PETRIE 1925, p. 14. 266 PETRIE 1925, pl. XXXVIII.

267 PETRIE 1922; Petrie’s notebook n°76, p. 35. 268 BAILEY 2007, p. 73.

96

bases en marbre de 30,7 cm de haut ; ces colonnes possédaient enfin des chapiteaux en marbre d’ordre corinthien de 83,1 cm de haut. Un chapiteau de pilastre, également en marbre et d’ordre corinthien, a été retrouvé, mesurant 55,9 cm de large à la base et 59,7 cm de haut ; la différence de hauteur entre ce chapiteau (59,7 cm) et ceux des colonnes (83,1 cm) associée à une différence de style tend à indiquer qu’il s’agit peut-être d’un élément appartenant à un ordre supérieur du front de scène.

Il est impossible de déterminer le nombre de portes que comportait le mur de scène du théâtre. D’après Petrie, « il y avait probablement une porte au milieu, mais il n’y avait certainement pas deux portes sur les côtés »270. Cette remarque nous paraît très douteuse, étant donné que tous les théâtres de type romain possédaient au moins trois portes, voire cinq pour les plus grands. Néanmoins, aucune trace architecturale ne permet d’aller au-delà de la simple hypothèse. Il en est de même pour le nombre de niveaux de la scaenae frons, l’absence d’élévation conservée empêchant de savoir si elle comportait deux ou trois étages.

En ce qui concerne les autres vestiges appartenant au front de scène, neuf éléments décoratifs ont été rapportés au British Museum. Ils sont décrits dans l’annexe 3.

*Les versurae, les escaliers et le postscaenium : les retours du mur de scène, les versurae,

laissent supposer la présence de deux annexes disposées à chaque extrémité, selon le modèle romain. Deux éléments retiennent cependant l’attention, situés aux angles formés entre le mur de scène et les versurae : il s’agit d’escaliers en spirale, desservant vraisemblablement la partie supérieure de l’édifice (pl. xxxv)271. D’après Petrie, on y accède depuis le mur de scène par une porte menant à un passage bas et voûté272. Si l’existence de tels escaliers est connue dans plusieurs théâtres de type romain, la forme en colimaçon adoptée par ceux du théâtre d’Oxyrhynchos apparaît originale : à notre connaissance, seuls les théâtres de Scythopolis en Israël et d’Aezani en Turquie possèdent des escaliers disposés autour d’un noyau circulaire273. Les autres exemples de tours à escaliers sont définis par des volées de marches se développant autour d’un pilier rectangulaire, comme à Aspendos, Bostra ou encore Philippopolis274. Dans le cas d’Oxyrhynchos, non seulement les escaliers sont en colimaçon, mais ils s’inscrivent

270 PETRIE 1925, p. 14. 271 PETRIE 1925, pl. XXXVII-4. 272 Ibid., p. 14-15.

273 SEAR 2006, p. 306 (Scythopolis) et 325-326 (Aezani) ; sur le théâtre de Scythopolis, voir le chap. III-2 de

cette partie, ainsi que APPLEBAUM 1978, p. 77-103 et SEGAL 1995, p. 58, fig. 54. Cf. annexe 4.

274 SEAR 2006, p. 366 (Aspendos), p. 308 (Bosra) et p. 316 (Philippopolis) ; sur les escaliers du théâtre de