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Anomalies et irrationalité collective

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Section 1. Comportements et mécanismes

II. Les mécanismes d'évolution des prix

3. Anomalies et irrationalité collective

Les mécanismes par lesquels les transactions des investisseurs transmettent des informations reflétées par les prix ont été explicités dans le cas d'investisseurs rationnels. De nombreux chercheurs cependant ont voulu établir l'éventuel biais de cette théorie de l'efficience des marchés. LEROY (1989) souligne d'ailleurs le problème méthodologique qui consiste à publier surtout des travaux falsifiant, au sens poppérien du terme, une théorie établie plutôt que des travaux la confortant.

Malgré ce biais, il semble nécessaire d'effectuer une étude succincte de ces critiques qui, comme l'élaboration même de l'efficience, sont constructives (FAMA, 1991).

Ces anomalies par rapport au schéma idéal du marché efficient sont de deux types. Les premières s'appuient sur les variables économiques qui semblent ne pas être prises en compte par les investisseurs. Les secondes relatent les effets particuliers constatés dans l'évolution du prix des actifs et qui sont le symbole d'une imperfection du marché. Nous nous situons ici plus particulièrement dans ce que FAMA (1991) appelle les tests pour la prédictabilité des taux de rendements dans sa nouvelle classification des tests d'efficience. Nous verrons très rapidement un exemple de critiques de l'efficience basées sur l'étude événementielle.

Il est cependant difficile de conclure à partir de ces travaux car ils supposent qu'une information n'est pas prise en compte à partir du moment où elle provoque

un rendement anormal par rapport à un taux de rendement espéré. BROWN et WARNER (1980) définissent différentes “rentabilités anormales” en insistant sur les différentes formes existantes de rentabilités normales. Un tel test sera donc basé sur l'équation :

Rt = Et-1(Rt) + t (1.2)

Cette équation compare un taux de rentabilité espéré a priori à un taux effectif connu a posteriori. L'hypothèse de taux de rendement anticipé constant (Rt

= r + t) étant très peu utilisée, on définit un modèle d'évolution de ce taux.

Rentabilités ajustées au risque et au marché

L'espérance de rentabilité a priori est établie le plus souvent sur la base du MEDAF (Modèle d'Equilibre Des Actifs Financiers) de SHARPE (1964) et LINTNER (1965) qui est de la forme :

E(Rit) = rf +  [E(Rmt)-rf] (1.3) où

rf : taux sans risque

Rmt : taux de rentabilité du portefeuille de marché Rit : taux de rentabilité de l'actif i au temps t

 : Cœfficient de sensibilité

L'emploi de ce modèle suppose que le  est la seule mesure du risque nécessaire pour expliquer l'espérance de rentabilité6. Or STAMBAUGH (1982) sur le NYSE de 1953 à 1976 puis FAMA et FRENCH (1991) sur le NYSE, l'AMEX et le NASDAQ de 1963 à 1990 constatent un très faible pouvoir explicatif du  sur la rentabilité moyenne.

Rentabilités ajustées au marché

Cet ajustement est un cas particulier du précédent qui suppose que le , cœfficient de volatilité, est égal à un pour tous les actifs i.

E(Rit) = E(Rmt) (1.4)

Modèle APT (ROLL et ROSS, 1980)

6 FAMA (1991) donne un résumé fort complet des différents problèmes liés à l'utilisation du modèle de SHARPE et LINTNER.

E Rto+

p

i=1

γifi

(1.5) Dans le cas présent, l'espérance de rentabilité est fonction linéaire de plusieurs facteurs (fi) économiques et financiers notamment, et de i qui sont les poids du facteur i dans l'explication de l'espérance de rentabilité. Ces facteurs explicatifs de l'espérance de rentabilité peuvent prendre en compte le risque mais également d'autres informations déterminées par une analyse factorielle (critiquée par SHANKEN, 1982), une analyse de variance ou la théorie financière. Cependant FAMA (1991) souligne qu'il est impossible de déterminer a priori le nombre de facteurs à inclure dans le modèle.

CHEN, ROLL et ROSS (1986) comparent les deux approches et constatent que l'inclusion du  dans un modèle à plusieurs facteurs n'apporte pas beaucoup et que le poids explicatif du  reste très faible. Cependant FAMA (1991, page 1595) s'interroge sur la fiabilité du modèle à plusieurs facteurs développé par CHEN, ROLL et ROSS et qui n'a malheureusement pas été testé hors de son échantillon d'estimation.

Efficience faible

Pour un test d'efficience faible, il faut supposer implicitement que l'espérance de rentabilité est nulle donc que E(Rt)=0. Le test porte sur la nature du résidu d'un modèle qui s'écrit alors Pt = Pt-1 + t7 où Pt est le prix de l'actif.

L'analyse des séries financières et plus particulièrement le test d'efficience semi-forte consiste en l'étude du comportement des prix comparativement à un modèle censé donner une représentation exhaustive de l'information publique. Cela permet d'étudier l'évolution du cours de l'actif une fois retirés les effets communs à toutes les actions. Nous sommes donc en présence d'un test joint qui, lorsqu'il réagit négativement, rejette soit l'efficience, soit le modèle d'évaluation, soit les deux.

Toute conclusion est alors sujette à caution, et ne permet pas véritablement de clore le débat.

7 C'est depuis SAMUELSON (1965) que les travaux sur l'efficience portent sur la nature de la rentabilité plutôt que sur la nature du prix.

Jusqu'en 1970 les critiques portées à la théorie des marchés efficients cherchaient surtout à mettre à jour la possibilité de prévoir les cours futurs sur la base des cours passés de l'actif. Depuis, de nombreux travaux tentent de prouver l'inefficience des marchés financiers par la non intégration dans les cours d'une information liée à certaines variables économiques ou par l'existence de saisonnalités qui ne semblent pas arbitrées puisque toujours présentes. Nous donnons ici quelques exemples de ces travaux contredisant l'efficience et les débats qu'ils ont créés. Ces exemples sont issus d'une littérature très riche sur le sujet qui nous empêche toute tentative d'exhaustivité.

Le ratio prix/bénéfice (PER).

BASU (1977) constate sur le NYSE que les actions d'entreprises présentant un ratio PER faible ont un rendement significativement supérieur aux actions d'entreprises ayant un ratio élevé. Il conclut à une imperfection du marché qui n'intègre l'information liée au ratio que progressivement. Cela est vrai même lorsque les rentabilités sont ajustées au risque par un modèle d'évaluation de type MEDAF ou APT. DEBONDT et THALER (1985) confirment ces résultats et développent l'idée selon laquelle cet effet serait en grande partie le résultat d'un effet Janvier. Nous avons également déjà envisagé les travaux de OU et PENMAN pour lesquels le bénéfice (et les informations qui y sont liées) permettent d'obtenir de meilleures prévisions sur l'évolution du prix de l'actif.

HAMON et JACQUILLAT (1992) réalisent, entre autres, des tests pour mesurer cet effet PER sur le marché boursier parisien. Ils constatent un effet Bénéfice/Prix8 quel que soit le niveau de la capitalisation de l'actif. Des portefeuilles constitués d'actifs à ratio B/P important ont une rentabilité plus élevée que des portefeuilles à faible ratio B/P.

La taille de l'entreprise.

8 HAMON et JACQUILLAT utilisent l'EPR le rapport bénéfice/capitalisation plutôt que le PER afin de ne pas biaiser les calculs en cas de bénéfices presque nuls.

BANZ (1981) montre que les petites firmes ont des taux de rentabilité ajustés au risque plus élevés que les grandes firmes. Il constate un problème de spécification car l'effet taille n'est pas linéaire. Pour lui, l'effet P/B ne signale en fait rien d'autre que l'effet taille. En effet, les firmes de petite taille génèrent moins d'information donc plus d'incertitude. Il s'ensuit un risque plus grand, donc une meilleure rentabilité. REINGANUM (1981) confirme cette dernière hypothèse et pense que les deux effets sont le signal d'un même ensemble de variables oubliées.

HAMON et JACQUILLAT mettent en évidence la présence d'un effet taille sur le marché français. Les entreprises de petite taille (faible capitalisation) ont une rentabilité plus forte que les entreprises de grande taille : est-ce la rémunération du risque ? Il faut souligner que contrairement à ce qui se passe sur le marché américain ce rapport est inversé en début d'année en France. Les entreprises à forte capitalisation présentent une plus forte rentabilité sur les cinq premières séances de l'année.

Les dividendes.

Une manière de tester le manque de réaction du marché à une information est l'étude événementielle (FAMA, 1991). Il s'agit d'observer la réaction des cours à une annonce ou un événement particulier. C'est dans cette classe que se situe l'article de CHAREST (1978). Son étude révèle une réaction étalée dans le temps à l'annonce des dividendes par la société cotée en bourse. Il rejette l'efficience sur le New-York Stock Exchange pour la période 1947-1967. D'autres travaux utilisant différentes mesures du risque confortent la lenteur du NYSE à assimiler l'information liée aux dividendes. FAMA et FRENCH (1988a) travaillent aussi sur cette idée en insistant sur le fait que le ratio de dividende (Div(t)/Prix(t) ou Div(t)/Prix(t-1)) a une influence croissante sur les cours au fur et à mesure que l'horizon augmente. Ils vérifient que les dividendes aident à prévoir, sur le NYSE de 1927 à 1986, 20 à 25 % du taux de rendement de l'indice pour un horizon de quatre ans. Or ce taux n'est que de 2 à 3 % pour la prévision mensuelle.

HAMON et JACQUILLAT constatent également la présence de cet effet sur le marché français par une étude événementielle. Le jour du paiement du dividende la rentabilité est “en excès de 0,548 % en règlement mensuel et de 0,467 % au comptant”. Ils réalisent ce calcul sur la base de 4812 versements de dividendes et ces rentabilités en excès sont significativement non nulles.

Les saisonnalités.

Nous passons ici rapidement en revue quelques uns des nombreux effets saisonniers présents dans la littérature financière. Le plus important est sans doute l'effet janvier mis en avant par KEIM (1983) et ROLL (1983). Les actions d'entreprises à faible capitalisation ont un rendement plus fort en janvier que les autres mois. DEBONDT et THALER (1985) confirment cela et le lient à l'effet taille. Citons également l'effet lundi (FRENCH, 1980) à cause duquel les rentabilités sont négatives le lundi et positives les autres jours.

Sur le marché français HAMON et JACQUILLAT montrent que la probabilité d'un détachement de coupon le lundi est supérieure à celle des autres jours (38,5 % contre 17,37 % en moyenne les autres jours). En mesurant l'effet lundi sur un indice avec dividendes réinvestis, l'effet lundi s'il n'est pas annulé est fortement réduit. Dans le cas de l'indice équipondéré il serait nécessaire d'effectuer un test supplémentaire afin de s'assurer que cet effet est bien significatif. En effet, dans le tableau de la page 173 de leur livre, HAMON et JACQUILLAT donnent comme cœfficient 0,083 au lundi et 0,117 au mardi dans l'équation ayant les rentabilités de l'indice équipondéré avec réinvestissement de dividendes comme variable expliquée. Ces cœfficients sont certes significativement non nuls mais aucun test ne précise s'ils sont significativement différents l'un de l'autre.

Ces effets, pour autant qu'ils soient présents dans la littérature financière, ne proposent pas réellement de justifications théoriques à ce qu'ils mettent à jour. Il s'agit de critiques d'un modèle établi sans que des modèles théoriques alternatifs soient présentés.

Dans le document Td corrigé intro géné - TEL (thèses pdf (Page 41-47)