• Aucun résultat trouvé

Approche socio historique de l’usage des pesticides et émergence du plan

2. L’approche socio-historique de la question de l’usage des pesticides dans l’agriculture

2.3. De 1945 à nos jours : de l’avènement de l’agriculture industrielle à la question de la transition agroécologique

2.3.5. Les années 90 et 2000, les logiques de production ne sont pas ébranlées malgré les critiques critiques

Des effet du sommet de Rio et de la Pac 1992

Ces années voient se développer une forme de résistance d’une grande partie du monde agricole aux critiques adressées aux systèmes intensifs (Lamine, Ricci, Meynard, Barzman, Bui, et Messéan, 2008). Ces derniers ont révélé leurs limites à l’aune des crises sanitaires successives qui ont secoué la profession agricole et soulevé des vagues de contestations (pollution des eaux par les nitrates et les produits phytosanitaires, déprise agricole, vache folle ESB, crise des OGM, fonds européens de la politique agricole de plus en plus captés par les coûts occasionnés par la nécessité de stockage des surproduction [blé, beurre, lait, …]). La société civile, des scientifiques, des associations de protection de l’environnement, des politiques ont dénoncé les impacts des pratiques agricoles responsables de dégradations du milieu et à l’origine d’une dérive des dépenses de l’Europe (Boinon, Gomez et Roux, 2008) «(…) Brice Lalonde, considère publiquement les agriculteurs comme des pollueurs qui

doivent payer pour réparer les dégâts causés par leur pratique de l’agriculture intensive. Cette attaque ministérielle contre un modèle de développement qui orientait la politique agricole depuis plus de 30 ans, fut vivement ressenti par les agriculteurs et leurs organisations professionnelles (…)» (Boinon et al., 2008, p. 8).

L’année 1992 a marqué les esprits avec la nouvelle politique agricole commune et les conclusions de la conférence de Rio. La réforme de la politique agricole a tenté de résorber les excédents chroniques de production par le gel d’une partie des surfaces en production121 et a amorcé le découplage des aides à la production. La conférence de Rio a fait émerger la notion de développement durable soulignant la nécessité de concilier à la fois les aspects sociaux,

121

économiques et environnementaux dans toute entreprise humaine. Une vague de travaux vont tenter de rechercher des voies alternatives au modèle dominant contesté. Par exemple, en avance sur le Sommet de Rio, et ce dès la fin des années 80, des recherches en agronomie ont été entreprises sur des alternatives à la course de l’intensification technologique. Elles ont débouché sur l’obtention de variétés multi résistantes de blé (blé rustique) et sur la mise au point d’itinéraires techniques à bas niveaux d’intrants (Meynard, 1985; Meynard et Girardin, 1993). Ces derniers travaux se sont révélés encourageants pour concevoir des alternatives aux systèmes intensifs conventionnels. En effet, sur la base de comparaisons d’itinéraires techniques, les uns conduits de manière intensive et les autres économes en intrants122, les chercheurs ont montré que la baisse de rendement observée pour les seconds ne se traduisait pas par une baisse de la marge… Ces études à l’initiative de l’Inra ont été reconduites dans les années 90 dans plusieurs régions dans le cadre de réseaux d’essais pluri partenaires (instituts de recherche et chambre d’agriculture). Nous pouvons aussi citer d‘autres initiatives:

- l’expérimentation avec les plans de développement durable (PDD) a tenté de décliner concrètement des nouvelles formes d’agriculture dans le développement durable123. - les opérations Ferti-mieux, toujours dans le cadre d’actions volontaires visaient elles l’amélioration de la qualité de l’eau en revisitant les pratiques agricoles sur un secteur avec l’appui de la profession, des agences de l’eau et d’aides publiques ciblées du développement agricole.

- un peu plus tard des actions locales de type Phyto-mieux à l’échelle de bassin de production et des départements ont permis à la profession et aux services déconcentrés de l’état de communiquer sur une meilleure utilisation des pesticides de synthèse.

- le réseau « Forum de l’Agriculture Raisonnée Respectueuse de l’Environnement » (FARRE) mis en place en 1993 à l’initiative de la FNSEA, des chambres de l’agriculture et de firmes de l’agro-industrie. Le réseau FARRE est d’abord un lieu de réflexion pour conduire des actions de communication sur les pratiques agricoles qui relèvent de l’agriculture raisonnée. C’est en quelque sorte tenter de renouer le dialogue entre la société et une frange des agriculteurs, c’est faire connaitre au public comment se conduit cette forme d’agriculture au quotidien. En toile de fond de ce réseau, des agriculteurs ont adhéré à la charte, qui n’a rien d’officiel, et s’engagent à mettre en œuvre les grands principes de l’agriculture raisonnée et à ouvrir leurs fermes pour le faire savoir.

Le Corpen124 s’est intéressé à partir de 1992 aux pratiques phytosanitaires en agriculture et a publié un ensemble de brochures de synthèse sur le thème (pollution de l’eau, bandes enherbés, dispositifs réglementaires…).

122

Il s’agit en fait d’une réduction équilibrée de différents intrants : réduire simultanément la fertilisation azotée, la densité du peuplement entrainaient une diminution de la pression de maladie générant ainsi une économie en fongicide. Plus tard à la fin des années 90, dans le cadre de la mise au point d’itinéraires de blé destinés à la production d’éthanol Loyce (1998) a mis au point des itinéraires économes combinant des « contraintes

environnementales fortes, les itinéraires techniques sélectionnés associent : (1) variétés multirésistantes aux maladies, (2) doses d'engrais réduites, (3) densité de semis plus faible, (4) suppression des traitements fongicides et (5) suppression des régulateurs de croissance ».

123 Il s’agissait d’une expérimentation conduite de 1993 à 1997, à laquelle des agriculteurs pouvaient adhérer sur la base du volontariat. L’objectif était de préciser des démarches, des formes d’accompagnement technique et les évolutions en termes de leviers réglementaires pour améliorer les performances des systèmes agricoles français sur les trois piliers de la durabilité.

124

Le Corpen (Comité d’Orientation pour des Pratiques agricoles respectueuses de l’Environnement) a été créé en 1984 sur décision ministériel. Son domaine d’action couvre la production d’informations et d’avis aux agriculteurs sur les pratiques agricoles respectueuses de l’environnement. Il a aussi construit des outils

méthodologiques pur aider concrètement la mise en œuvre d’action de préservation des milieux. En outre, il sert d’appui aux administrations et à l’enseignement agricole (brochures pédagogiques traitant de points techniques et/ou réglementaires). Il s’est d’abord intéressé à la pollution de l’eau par les nitrates et les phosphates d’origine

Ces résultats, signes d’une remise en question de la stratégie de modernisation de l’agriculture engagée depuis les lois d’orientation agricole de 1960 et 1962, n’ont cependant pas eu beaucoup d’échos dans la profession agricole (Lamine et al., 2008), au contraire. Une grande majorité d’agriculteurs intensifs a développé une stratégie d’adaptation pour pallier la baisse de la rentabilité des productions et pour éviter la baisse de revenus liées à la perspective de réduire leurs surfaces de production. On a observé un accroissement de la productivité par unité de surface. L’intensification s’est accrue en opérant un calcul au plus juste des besoins en consommations intermédiaires (recours aux outils d’aide à la décision) : produire autant avec une sole réduite. Cette stratégie a dévoyé les objectifs premiers de la réforme de la Pac. On a en fait assisté à un renforcement de l’ancrage technoscientifique pour résoudre les problèmes de conduite des productions. Par exemple, des stratégies de modulation des doses d’application ont été développées pour réduire la quantité de substances actives par unité de surface, associées à une mise à disposition de machines agricoles performantes équipées pour les applications de précision. Les agriculteurs ont aussi cherché à améliorer l’efficacité de leurs traitements phytosanitaires tout en réduisant les coûts en associant des spécialités commerciales. De son côté, le développement s’est attaché à proposer des conseils sur ces mélanges conformes à la réglementation. La consommation en pesticides s’est donc accrue d’une part pour contrôler le salissement des parcelles en gel annuel (dites en jachère) et d’autre part, pour limiter les pertes de rendement (lutte chimique).

A partir de la loi d’orientation agricole de 1999, un nouveau contrat social ?

Mais progressivement les pressions sociétales et réglementaires vont infléchir la trajectoire de l’intensification. La loi d’orientation agricole de 1999 a remis en cause la cristallisation du modèle de développement de l’agriculture fondée sur la survalorisation de la fonction de production. Vedel (2006) résume bien la stratégie des agriculteurs durant cette période : « il

ne s’agit plus seulement d’accroitre la productivité, mais de raisonner compétitivité et maitrise des coûts, gestion de l’environnement, complémentarité des activités au sein des territoires, différenciation des produits et offre de nouveaux services, transparence des manières de produire au regard du consommateur et du citoyen. » (Vedel, 2006, p. 38).

Elle a introduit la multifonctionnalité de l’agriculture et le CTE125. Ce dernier a permis de soutenir financièrement par des aides publiques un projet agricole affichant et conciliant des dimensions socio-économiques et la protection de l’environnement. Cette nouvelle orientation du soutien aux agricultures a généré des démarches duales. D’un côté, des systèmes financés se sont tournés vers l’agriculture biologique, représentant déjà une remise en cause de la dépendance. De l’autre, des financements ont servi la cause d’un usage toujours plus fin et plus précis des pesticides (pulvérisateurs équipés pour une agriculture de précision et GPS) : il s’agit de la réduction des usages via l’amélioration de l’efficacité. Certains systèmes ont mis en place des techniques alternatives : la substitution a été acceptée si elle était financée. Les CAD126 (Contrat d’Agriculture Durable) ont remplacé les CTE. La politique agricole de 2005 amenant un découplage plus poussé des aides et les DPU127, invitent une nouvelle fois à revoir les façons de produire. Le discours politique invite ostensiblement à promouvoir une

agricole et seulement en 1992, il a élargi son champ d’action à la prévention des effets des pollutions par les produits phytosanitaires.

125

CTE : Contrats Territoriaux d’Exploitation

126 Les CAD prennent la suite des CTE, mais ils sont moins ambitieux avec un volet financier moins élevé et ils ne permettent de financer qu’un seul volet agroenvironnemental traduisant une volonté gouvernemental de cibler les aides sur des problématiques environnementales prioritaires.

127

agriculture moins dépendante des pesticides, les soutiens à l’agriculture biologique et des MAET128 visant la réduction des produits phytosanitaires en sont des signes.

Progressivement, le modèle dominant conventionnel a fondé sa stratégie de protection des cultures sur les démarches de la lutte raisonnée. Le référentiel de l’agriculture raisonnée129 a émergé en avril 2002. L’approche technique est au cœur de ce référentiel, la protection phytosanitaire n’y échappe pas : si nécessaire, le traitement phytosanitaire est pertinent avec la juste dose au bon moment avec un produit conforme à la réglementation en vigueur (efficacité et risques mesurés), mais ce ne sont pas les fondements des systèmes qui sont révisés. Les démarches de la lutte raisonnée ont mobilisé de plus en plus d’outils d’aide à la décision et des conseils fins d’application des produits : « Raisonner ses pratiques de

protection des cultures, en utilisant les méthodes culturales et biologiques disponibles, en choisissant les variétés les plus adaptées, en ne faisant usage des produits phytosanitaires que lorsque cela est nécessaire et justifié et en fractionnant, de manière adaptée, les traitements, de façon à minimiser les quantités de produits phytosanitaires utilisées » (référentiel

agriculture raisonnée). Là encore, pour conduire la protection des cultures des apprentissages-clés sont très liés à la perspective d’utiliser in fine des pesticides de synthèse :

- reconnaitre des bioagresseurs en culture par une observation rigoureuse,

- évaluer la nuisibilité à partir de seuils préétablis pour faire une évaluation du risque,

- rassembler des informations sur les conditions fines d’application des pesticides pour garantir efficacité et sélectivité,

- s’appuyer ensuite sur des références technico-économiques et réglementaires pour finalement agir…

En fait, le référentiel s’apparente davantage à une liste de « bonnes pratiques phytosanitaires » préconisées, codifiées à suivre quel que soit le contexte. L’éco conditionnalité des aides de la Pac 2005 sous tend elle-aussi un code des bonnes pratiques phytosanitaires qui reprend les fondements de l’agriculture raisonnée.

Des effets d’une remise en cause de la procédure d’autorisation des produits phytosanitaires

Si au cours des années 90, les produits phytosanitaires n’étaient pas encore visés par des mesures spécifiques comme l’ont été les nitrates, une nouvelle procédure de mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques destinés à la protection des végétaux et des produits végétaux, (91/414/C.E.E. 19 août 1991) a fait évoluer le secteur. Les substances actives sont inscrites sur une liste positive européenne130. L’évaluation des substances actives et l’autorisation des préparations commerciales se sont durcies conduisant au retrait des substances actives les plus toxiques (en termes de santé publique, de protection de l’environnement, de préservation de la faune en particulier des abeilles). Les substances

actives préoccupantes ont du être substituées si des alternatives moins nocives existaient. Ce

durcissement et les coûts liés à la constitution du dossier d’homologation ou une

128 Les Mesures Agri-Environnementales Territorialisées (MAET) sont des mesures spécifiques d’aides déclinées dans chaque région en fonction de problèmes de protection de l’environnement repérés, moyennant le respect d’un cahier des charges. En particulier dans le cadre de la protection de l’eau, des mesures visent la réduction de l’usage des pesticides dans les systèmes de culture.

129 Le décret n° 2002-631 du 25 avril 2002 propose un référentiel technique, c’est-à-dire une liste de techniques, de modus operandi, à réaliser. L’approche reste technocentrée alors que ce sont les aspects techniques de l’agriculture intensive qui de plus en plus sont disqualifiée.

130 En fait, les substances actives sont autorisées au niveau européen et elles sont référencées sur une liste, dite liste positive. Les pays membres autorisent la mise sur le marché des produits contenant ces substances actives selon des règlements qui leur sont propres.

homologation131 ont accéléré la diminution du nombre des substances actives inscrites : les plus dangereuses n’ont plus été autorisées et ont été retirées. Ainsi, depuis 1991, le nombre de produits autorisés en Europe a fortement baissé, soit parce que certaines substances actives ne répondaient pas aux nouvelles normes d’homologation, ou soit parce que les industriels n’ont pas forcément souhaité engager des procédures longues et coûteuses pour ré-homologuer des produits dont les brevet arrivaient à terme (passant dans le domaine public). Un ensemble de « nouveaux produits » correspondent à des mélanges ou à de nouvelles formulations. Les substances actives autorisées en Europe sont ainsi passées de 800 en 1990 à 489 en 2004. En 2012, 416 substances actives sont autorisées en Europe dont 309 pour la France (Aubertot et

al., 2005a ; INSERM, 2013). Le potentiel d’innovation de l'agrochimie à moyen terme

apparait faible. « Pour les fongicides, la sortie de quelques nouvelles molécules, dont

plusieurs anti-oïdium, est prévue, mais aucune nouvelle famille à large spectre d'action n'est annoncée à moyen terme. Concernant les herbicides, aucun nouveau mode d'action n'a été identifié depuis plusieurs années ; quelques nouveaux produits appartenant à des familles déjà connues sont annoncés » (Inra & Cemagref, 2005, p. 23). Cet état des lieux laisse

présager un risque de pression de sélection de souches de bioagresseurs résistantes avec un emploi de pesticides issus d’une panoplie toujours plus réduite.

En guise de synthèse pour cette partie

L’intensification de l’agriculture française pour les grandes cultures a été conduite selon la voie « capital-intensive » (employant beaucoup d’intrants et de capital fixe par ha) » (Bonny, 2010, p. 2). L’emploi des pesticides a été un des facteurs structurants de cette intensification associé à l’amélioration de la productivité de la terre (augmentation des surfaces moyennes des exploitations) et l’amélioration du facteur travail (mécanisation des opérations).

Pour dépasser l’approche économique classique qui traite de l’intensification, Bonny (2010) rappelle que d’autres facteurs combinés par unité de surface entrent aussi en ligne de compte comme les savoirs, l’information, les services écosystémiques entre autres.

Comment expliquer que le modèle intensif fondé sur un pilotage de la protection des cultures par la lutte chimique ne cède pas face aux critiques, aux preuves des effets délétères y compris pour les agriculteurs, aux preuves de réussite des voies alternatives aux pesticides ?

Rappelons que le rendement et la marge économique ont été deux indicateurs qui ont servi à valider la logique de l’intensification. Or, ils révèlent des signes de faiblesses des systèmes intensifs conventionnels : d’un côté les rendements stagnent et les marges économiques se réduisent pour les grandes cultures entre autres et la volatilité des prix ne permet plus de compter sur des cours couvrants les couts de production dans un contexte de réduction des soutiens directs à la production.

Pour ce qui concerne les connaissances, nous avons vu que les savoirs traditionnels et les savoirs locaux ont été disqualifiés au profit des savoirs scientifiques et techniques (Jas, 2005). La prévalence de ces derniers s’explique à la fois par la conception du progrès dont ils étaient considérés des moteurs et parce qu’ils ont été incorporés dans des biens et des services (conseils, outils d’aide à la décision,…). Les agriculteurs ont étoffé leurs connaissances sur les besoins des plantes, sur la reconnaissance de bioagresseurs, sur la conduite des traitements phytosanitaires au cours de la campagne de culture. Leurs connaissances sont devenues de plus en plus fines sur la conduite de la lutte chimique, mettant de côté les savoirs sur les

131 Le déclin des capacités innovatrices des grandes firmes agrochimiques a débuté dès la fin des années 70. Il fallait déjà 40 à 70 millions de dollars à la fin des années 80 pour conduire le processus de la recherche au dépôt de la substance active (Assouline, 1989).

techniques alternatives aux pesticides et la dynamique des écosystèmes. Cette dérive a été renforcée par le type d’informations132 disponibles et accessibles :

- d’un côté, les informations sur la conduite de la lutte chimique des données sur les produits phytosanitaires comme leur mode d’action pour des groupes de cibles et par culture ont été largement diffusées par les firmes et des techniciens de l’agrofourniture ;

- de l’autre, les informations sur les services écosystémiques, en particulier ceux permettant de contribuer à la gestion des bioagresseurs ont été très pauvres pour les grandes cultures (action des auxiliaires, processus d’interactions, …). Les informations sur les systèmes alternatifs sont restées confinées dans des réseaux spécifiques (i.e. les systèmes conduits en bio). L’information sur les systèmes économes en intrants a elle-aussi eu du mal à percoler dans le milieu professionnel.

Or nous le développerons dans le chapitre 2, dans la conduite des processus de production végétal, une partie des intrants est substituable, les pesticides font partie de ceux-là (Inra & Cemagref, 2005). Ainsi avec l’information disponible et facilement accessible au cours de la période étudiée, il était difficile de valoriser les interactions dans les agroécosystèmes pour réduire l’usage des pesticides sur la base des informations accessibles.

Le modèle a résisté malgré le trouble semé par les pesticides dans l’opinion publique. Au milieu des années 2000, des études donnent des éléments convergents sur les risques de cette dépendance (Aubertot et al., 2005 ; IFEN, 2006 ; Inra, 2008 ; Gatignol et Etienne, 2010) : la pollution de l’eau, la mortalité des abeilles, les troubles pathologiques chez les agriculteurs, les résidus dans les aliments pointent les pesticides. Les services écosystémiques rendus par l’agriculture en lien avec son activité de production se dégradent (Aznar, Jeanneaux et Déprés, 2009). De plus en plus de résistances de bioagresseurs sont observées. Pour les céréales un certain nombre d’adventices ont développé des résistances à au moins trois familles d’antigraminée. (Aubertot et al., 2005a). Depuis 2008, les mesures incitatives ou coercitives comme le plan Ecophyto, les mesures réglementaires du « paquet pesticides » en 2009 ont du mal à infléchir la tendance, l’usage des pesticides ne montre pas de net repli. La consommation augmente même au niveau national.