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Identification des ressources distribuées au sein du système politique

Pour contribuer à mettre en évidence la structuration d’un champ d’action à partir des stratégies d’acteurs, il est important de tout d’abord identifier les ressources dont la distribution est clef pour le système, à savoir : les échanges, les contrôles et les solidarités qui le caractérisent (Lazega 2014, p. 17). Dans notre cas, les ressources prises en compte sont d’ordre relationnelle (ensemble du réseau), financier et d’expertise (conseil/financement), politique et formel (collaboration et rattachement institutionnel).

Identification des coalitions d’acteurs et de l’interconnectivité du réseau

La description de la structure relationnelle du système étudié passe ensuite par l’identification des sous-ensembles d’acteurs qui peuvent être reconstitués à partir d’une mesure de la « cohésion » ou de la « densité » des relations entre les membres ou bien de mesures comme celle de « l’équivalence structurale »42. Un autre niveau

42 Dans ce cas les acteurs sont regroupés parce qu’ils ont le même profil relationnel (position) – les mêmes

relations avec le reste du système et non nécessairement d’interactions entre eux. Cela peut impliquer, par exemple, les mêmes ennemis ou amis, les mêmes contraintes ou opportunités.

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d’analyse – le niveau relationnel – se focalise sur les caractéristiques des relations en elles-mêmes en se demandant, par exemple, la proportion de relations symétriques (bidirectionnelles) du réseau. Une autre mesure importante est celle de l’interconnectivité d’un réseau (ou sous-groupe d’un réseau)43, qui informe le niveau d’interconnections (et de stabilité) entre les membres des réseaux, ce qui favorise des comportements coopératifs.

Si dans le cadre d’analyse des coalitions de cause les coalitions sont définies par le

système de croyances de leurs acteurs, l’analyse de réseaux nous permet de confronter cette

définition aux interactions régulières entre les acteurs. Les sous-ensembles du réseau sont identifiés à travers la mesure de modularité44 (modularity class) et configurent cinq

coalitions de cause, ce qui implique que les coalitions sont définies par leurs systèmes de

croyances mais aussi par leur système d’interaction (densité des interactions).

Identification des acteurs les mieux positionnés

Au niveau individuel, la position relative des acteurs au sein d’un réseau est proposée par les classifications de centralité45, notamment la « centralité de degré », la « centralité de proximité » et « la centralité d’intermédiarité ». Ces mesures identifient, par exemple, les acteurs qui contrôlent l’allocation de ressources ou qui disposent d’une certaine autorité. Ces classifications permettent d’explorer la nature de la hiérarchie et les différences de statut entre les organisations composant le système étudié (Lazega 2014, p. 38–47). Plus les membres d’un collectif font appel à un acteur pour obtenir un type de ressource, plus ils accordent du statut à ce dernier (Favre 2014, p. 99). Un individu est

43 Cette mesure utilise comme paramètre de visualisation le nombre de triades fermées (triangles).

44 Le partitionnement des nœuds (organisations) en différentes coalitions (représentés par chaque couleur) dans le

graphique est obtenu avec le logiciel Gephi à partir de la modularité (modularity class) des interactions entre les différents acteurs. Cette mesure statistique détecte automatiquement si les organisations du réseau semblent liées entre elles afin d’identifier les communautés fortement reliées à l’intérieur du graphe. Elle définit le nombre de liens dans chaque groupe, auquel est soustrait le nombre de liens dans les mêmes groupes, dans un graphique où les liens auraient été redistribués de façon aléatoire. Autrement dit, elle comptabilise le nombre de liens à l’intérieur de chaque sous-groupe de nœuds moins la valeur qu’aurait été cette même proportion si les liens étaient disposés de façon aléatoire entre les nœuds du graphe. La modularité implique ainsi un nombre de liens intra-groupes important et un nombre faible de liens inter-groupes.

45 Trois types de centralité sont particulièrement importants : i) la centralité de degré (degree centrality) ou le

nombre de liens d’un acteur particulier avec d’autres dans le réseau ; la centralité de degré peut être interprétée comme une mesure du prestige ou de l’autorité d’un acteur ; ii) la centralité de proximité (closeness centrality) ou nombre minimum de pas qu’il doit effectuer pour entrer en contact avec d’autres acteurs (par exemple, dans le réseau X le nombre de pas minimums entre A et D = 2) ; cette mesure peut être interprétée comme une mesure d’autonomie ou d’indépendance d’un acteur ; et iii) la centralité d’intermédiarité (betweeness centrality) ou le contrôle exercé par un acteur sur les interactions entre deux autres (par exemple le point D du réseau X est le plus central en termes d’intermédiarité).

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central s’il est fortement connecté aux autres. Plus un acteur est central, plus il est actif (Maurel et al. 2014, p. 190). La coordination de l’action publique dans ce cas est rendue possible par l’intensité des interactions au sein du système d’action, qui peuvent gagner en durée et en épaisseur.

Représentation graphique

Le graphique qui en résulte est constitué de sommets (nœuds) et d’arcs reliant certains de ces sommets (liens), et il peut être représenté par une matrice de relations. Les relations entre deux sommets peuvent être orientées (→, ←, ↔) ou non-orientées (––). Par exemple, le graphique ci-dessous (Figure 2.3) présente des relations non-orientées d’un réseau hypothétique X et renvoie aux informations dégagées de sa représentation matricielle (Figure 2.2).

Figure 2.3 : Représentation en graphe de la structure d’un réseau X

A B C D E F G Source : Lazega (2007)

Figure 2.2 : Représentation matricielle du réseau X A B C D E F G A 0 1 1 0 0 0 0 B 1 0 1 0 0 0 0 C 1 1 0 1 0 0 0 D 0 0 1 0 1 0 0 E 0 0 0 1 0 1 1 F 0 0 0 0 1 0 1 G 0 0 0 0 1 1 0 Source : Lazega (2007)

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La Figure 2.4 illustre les interactions entre les acteurs organisationnels du système politique que nous envisageons de comprendre dans cette thèse.

Ce schéma comprend les 340 organisations, classées en termes de centralité de

degré, ainsi que les liens ou les relations entre ces organisations (collaboration, soutien/conseil/financement, rattachement institutionnel). Le réseau est subdivisé en sous-

groupes qui identifient les principales coalitions. Cette image fournit un aperçu du type d’analyse que nous souhaitons mener, mais son explication détaillée sera traitée dans les

Figure 2.4 : Représentation du système d’interactions des organisations directement ou indirectement liées à la circulation internationale d’instruments brésiliens de politiques publiques

(Mesure de centralité de degré, modularité 1.2)

*Les acronymes se réfèrent aux noms des institutions, détaillés dans la liste d’acronyme au début de ce document

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prochains chapitres. Nous présenterons, étape par étape, comment ce schéma a été construit et arriverons à cette même image dans le Chapitre 7. Cette cartographie et cette analyse des interdépendances entre les membres d’un réseau sont essentiellement descriptives, inductives et exploratoires. Il est à noter que notre étude ne porte pas sur une série de techniques d’analyse et de représentation des données relationnelles, ni sur des approches statistiques fondées sur une dimension plus déductive et analytique46. L’utilisation seule de l’analyse des réseaux constitue un exercice purement formel et son utilisation en complément à des méthodes qualitatives peut contribuer à renforcer cette dernière (Lazega 2014, p. 14).

Application empirique

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