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Il n'existe malheureusement pas pour la période de répertoire des membres nommés par le préfet, ce qui aurait pour avantage de faciliter considérablement la tâche. Malgré cette lacune, nous avons pris comme support les listes et tableaux contenus dans la série 2/M. Les documents collectés sont parcellaires et si l'on se réfère plus précisément aux trajectoires municipales commune par commune (2/M/31 à 35 et 2/M/39 à 49 concernant la période impériale, 2/M/53 à 66 et 2/M67 à 2/M80 concernant la période monarchique), on observe de même des absences qui empêchent la reconstitution période par période des municipalités brétiliennes. Si nous ne visons pas l'exhaustivité, loin s'en faut, nous avons entre nos mains suffisamment de matière pour déceler les 1 GEORGE Jocelyne, Histoire des maires de 1789 à 1939, Paris, Bartillat, 1990, p. 54.

grandes tendances au rythme des changements de régime.

Au commencement de la première Restauration, un premier travail est réalisé par les sous-préfets qui doivent renseigner Bonnaire sur les hommes qui dirigent les communes de leur arrondissement et proposer, au besoin, leur remplacement. Issus du terreau impérial et encore en place à cette période (mai-juin 1814)2, qu'écrivent les sous-préfets sur les maires et leurs adjoints ?

Dans l'arrondissement de Montfort, les 46 communes rassemblent 45 maires (une place est vacante) et 52 adjoints. Le sous-préfet Gengoult est globalement très favorable à tous ces hommes. S'il émet des réserves sur quelques-uns, il avoue ne pas avoir sous la main de successeurs fiables, empêchant tout remplacement. Au final, il ne demande que 3 remplacements, le maire de Landijuan, « deux fois cité au tribunal de simple police pour injures et mauvais traitements, il a d'ailleurs abusé plusieurs fois de ses fonctions, en favorisant quelques-uns des ses administrés au préjudice d'autres, et on assure que ce n'était pas dans l'intérêt »3 ; le maire de Maxent dont l'intelligence fait défaut

mais que le sous-préfet propose de rétrograder à la place d'adjoint et enfin celui d'Iroudouër qui démissionne et appuie la candidature de son fils.

Sur les 115 maires et adjoints des 56 communes de l'arrondissement de Fougères (chef-lieu non inclus), le sous-préfet Baron ne demande le remplacement que de 8 individus, quatre maires (Rimou, Gosné, La Chapelle Janson et Saint-Aubin-du-Cormier) et quatre adjoints (Rimou, Parcé, Javené, Parigné). Le maire de Gosné, est un bon administrateur mais dans le village duquel on dispose d'un prétendant plus instruit, la maladie de celui de Saint-Aubin-du-Cormier l'a laissé paralytique, tout le reste est frappé d'incapacité. Pour aucun d'entre-eux il n'est question d'une quelconque animosité envers le roi.

Des rapports aussi favorables ne sont pas la norme partout. À Vitré, le sous-préfet par intérim propose le remplacement de 32 individus sur les 130 maires et adjoints des 62 communes, soit 25% du total4. Plus critique encore est Dupetit-Thouars, sous-préfet de Saint-Malo, qui regarde comme

impropre à leur fonction un tiers (42 personnes) des 128 maires et adjoints qui siègent dans les 61 communes de l'arrondissement5. Là encore, ce n'est pas le motif politique qui intervient dans la 2 Pour le cas de Vitré, faute de date et d'auteur précis, nous ne savons pas qui est l'auteur du tableau mais il est

probable que ce soit de Vergennes, revenu de congé.

3 ADIEV 2/M/64 : tableau des maires et adjoints de l'arrondissement de Montfort, dressé par le sous-préfet Gengoult, 31 mai 1814, 1er juin 1814.

4 ADIEV 2/M/38 : tableau des maires et adjoints de l'arrondissement de Vitré, anonyme, sans date.

5 ADIEV 2/M/65 : tableau des maires et adjoints de l'arrondissement de Saint-Malo, pas de mention d'auteur (le sous- préfet Dupetit-Thouars), 27 mai 1814.

décision, ainsi que le montre, sous la forme d'un tableau, les résultats comparés des quatre arrondissements6 .

B.IV. Demandes de remplacements formulées par les sous-préfets (1ère Restauration)

Raison de la demande de

remplacement Vitré Fougères Montfort Saint-Malo Total

Incapacité /négligent /peu estimé 17 6 1 22 46 Déménagement 4 0 0 2 6 Démissionnaire 1 0 2 2 5 Proposé ailleurs 4 0 0 1 5

Santé (âge, infirmité) 4 1 0 0 5

Meilleur choix ailleurs 0 1 0 3 4

Influençable 0 0 0 4 4 Partial 0 0 0 3 3 Incompatibilité (fonction, humeur) 0 0 0 3 3 Décédé 2 0 0 0 2 Suspect politiquement 0 0 0 2 2

Remplacements demandés sur

le total de l'arrondissement 32/130 8/115 3/97 42/128 85/473

7

% des remplacés potentiels sur le total

-de l'arrondissement

-du département 25% 7% 3% 33% 18%

Dans le détail, le facteur politique est infime. Seules trois personnes, toutes issues du pays malouin (les maires de Cancale, Combourg et Baguer-Pican), sont à exclure pour ce motif. Le premier est attaché à la Révolution, le second est en opposition avec l'autorité actuelle ; quant au troisième il s'avère influencé par des réfractaires au royalisme (compris dans la catégorie influençable). On peut éventuellement y ajouter l'édile de Miniac-Morvan qui est dénoncé pour ses choix lors des nominations de conscrits et de gardes nationaux à l'époque précédente (catégorie partial). Les autres hommes influençables, les démissionnaires et les partiaux ne le sont pas pour des raisons strictement politiques, du moins cette cause n'apparaît pas spécifiée.

6 Nous ne détenons pas de tableau semblable pour l'arrondissement de Redon mais si l'on se penche sur les propositions de candidats au poste de conseiller municipal, on apprend que sur les 37 conseillers à remplacer dans 13 communes entre les mois de mai et septembre 1814, 30 sont morts, 4 ont déménagé, 2 ont démissionné et 1 est infirme. Tableaux de propositions aux places de conseillers municipaux de l'arrondissement de Redon des 26 mai, 9 juin, 28 juillet et 3 septembre 1814, dressés par le sous-préfet Bayme, ADIEV 2/M/51.

7 470 + le maire de Fougères le Moine et ses deux adjoints Mesnard et Lefebvre qui n'étaient pas inclus dans la liste fougeraise.

Confrontés à des individus défaillants (par leur instruction, leur considération, leur capacité), les sous-préfets n'ont parfois d'autre choix que de les laisser en place, faute de candidats dans la commune. Outre ce problème d'offre limitée, le contraste remarqué entre les arrondissements de Vitré et Saint-Malo d'une part, Montfort et Fougères d'autre part, est lié au renouvellement de février 1813, inégal d'un arrondissement à l'autre. C'est ainsi que s'en explique le sous-préfet Baron :

« Le sous-préfet propose peu de changemens, parce qu'à l'époque du renouvellement des maires, il s'était attaché à indiquer les personnes qu'il croyait sous tous les rapports les plus propres aux fonctions et sa confiance, en général, n'a pas été trompée. D'ailleurs il n'y a pas à choisir dans la majeure partie des communes qui n'ont aucuns hommes instruits. On présente donc ceux qu'on croit les plus convenables et qui ayant bien servi sous un gouvernement difficile, ne manqueront pas, à coup sûr, de donner à un Roi juste et bienfaisant de nouvelles preuves de zèle, de dévouement et d'amour. L'expérience et les connaissances administratives qu'ils ont acquises dans leurs fonctions semblent aussi devoir mériter quelque considération »8.

Dans cet arrondissement, 26 individus (27% du total) ont été remplacés en 1813, à Montfort, ils sont 20 (20%) quand ils ne sont que 10 (8%) à Vitré. À Saint-Malo ils sont 36 (29%) mais 7 d'entre- eux sont proposés au remplacement lors du changement de régime, ce qui explique en partie le score supérieur aux autres de cet arrondissement (à Montfort, tous les nommés de 1813 donnent satisfaction l'année suivante; à Vitré, un seul sur les 8 n'est pas dans ce cas)9 .

La vision peu politique des sous-préfets persiste durant toute la période. Quand bien même la capacité des magistrats municipaux est en cause, les sous-préfets sont soucieux de les présenter en dignes royalistes, tout autant que le sont les nouveaux candidats lorsqu'ils existent. Et le serment prêté entre août et janvier par tous ne donne lieu qu'à des absences infimes et plus rarement encore quelques refus dérisoires noyés sous la masse des acceptants. De plus, les communications des sous-préfets ne consistent qu'en des propositions que l'autorité examine. Bonnaire n'a pas de raison d'aller plus avant que ses collaborateurs, en qui, on l'a vu, il a confiance. En l'occurrence, il semble que lui et de Ferrières soient allés en-deçà des recommandations. Dans l'arrondissement de Saint- Malo, les maires identifiés comme politiquement douteux passent tous le cap de l'année 1815. Alvice à Cancale demande sa démission en janvier car son âge le rend inapte à la tâche mais il doit rester à son poste, faute de successeur. Lui, Lodin à Combourg, Mouezan à Baguer-Pican et Roger à Miniac-Morvan voient tous le retour de Napoléon en tant qu'édiles.

8 ADIEV 2/M/37 : tableau des maires et adjoints de l'arrondissement de Fougères, dressé par le sous-préfet de Fougères Baron, 31 mai 1814.

9 On ne compte ici que les raisons de capacité et non les hommes qui partent de leur propre chef, décèdent ou déménagent.

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