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Activité collective, activité métafonctionnelle, conception collective conception collective

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 135-139)

Articulation des modèles ergonomiques 4.3. présentés

4.3.2. Activité collective, activité métafonctionnelle, conception collective conception collective

Activité collective et activité métafonctionnelle collective

Comme nous l’avons noté supra (4.2.5), Caroly (2010) considère que le travail collectif ne renvoie pas automatiquement à l’activité collective. Pour elle, l’activité collective est une interface, un système de régulation entre le collectif de travail et le travail collectif.

Caroly (2010, p. 98) considère qu’il y a « collectif de travail lorsque plusieurs travailleurs concourent à une œuvre commune dans le respect des règles (Cru, 1988, p. 44), leurs propres règles d’action et les règles de métier » et que « le collectif de travail se constitue dans et par cette activité de production de règles ». Or l’un des principaux objectifs et résultats possibles de l’activité métafonctionnelle collective est justement la production de nouvelles règles par les acteurs impliqués (Falzon et al., 1997). Ainsi, de notre point de vue, une fraction de l’activité métafonctionnelle collective renvoie de fait à une activité collective dans le sens de Caroly (2010). Cette dernière souligne d’ailleurs que :

l’activité collective, qui porte sur des processus de réélaboration des règles, est une ressource pour l’activité individuelle, en donnant des marges de

131 manœuvre pour réaliser le travail et des possibilités de

maintien/construction de la santé. En retour, l’activité individuelle en se développant, devient elle-même une ressource pour l’activité collective. Les réélaborations individuelles des règles peuvent faciliter le fonctionnement du collectif de travail. (ibid., p. 113)

Nous retrouvons dans les propos de Caroly une dynamique proche de celle que nous avons évoquée supra (figure 12). La distinction entre « l’activité métafonctionnelle collective » telle que définie par Falzon et al. (1997) et « l’activité collective » telle définie par Caroly (2010) nous paraît donc ténue.

Cependant, Falzon et al. (1997) ne centrent pas l’activité métafonctionnelle collective uniquement sur la réélaboration des règles. Pour eux, cette activité peut également permettre de reconcevoir le système technique et de développer des compétences par le partage des savoirs, des expériences, et par l’enseignement mutuel. Si l’activité collective de Caroly participe à l’ensemble de ces développements, elle est surtout entendue comme une « activité de réélaboration des règles ». Chez Caroly (2010), la question de la conception du système technique n’est pas centrale.

Ainsi, au risque de réduire excessivement le concept d’activité collective de Caroly (2010), afin de lever certaines ambiguïtés, nous proposons de considérer ici que l’activité collective de réélaboration des règles est une partie d’un plus grand ensemble qu’est l’activité métafonctionnelle collective, qui pour nous correspond à une approche plus généraliste de l’activité collective.

Activité collective et conception du système technique

Plus généralement en ergonomie, la conception, même lorsqu’elle est collective, est souvent envisagée en termes de « synchronisation », de « processus »,

« d’activité cognitive » (Darses et Falzon, 1996 ; Garrigou, 1992 ; Garrigou et al., 2001 ; Visser, 2002), mais rarement dans les termes précis « d’activité collective ».

Pourtant, tout en nous inscrivant dans l’approche de Caroly, il nous semble que la conception du système de travail peut, dans certaines conditions, être posée comme une activité collective. D’une part, comme le souligne Béguin (2010, p. 55), « la conception est un travail collectif : quel que soit l'objet à concevoir (situation de travail, ouvrage d'art, objet divers...), celui-ci est trop complexe pour qu'une seule personne dispose d'une représentation de tous les problèmes à résoudre, et possède les compétences pour les résoudre tous ». D’autre part, le travail de conception peut être mené par un collectif de travail, qui peut se développer dans une activité de conception. S’ils ne parlent pas précisément de « collectif de travail », Barcellini et al. (2013, p. 198), montrent par exemple que, dans certaines conditions, la conduite d’un projet de conception peut renforcer les relations professionnelles entre les fonctions « tant au cours du projet (coopération dans le projet) qu’après sa mise en œuvre opérationnelle (coopération dans le travail) ». En ce sens, la conduite de projet peut renforcer le collectif de travail.

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Par ailleurs, la frontière entre réélaboration des règles et reconception du système technique n’est pas toujours tangible lorsque la conception concerne « des dispositifs symboliques ou abstraits » (Darses et Falzon, 1996) tels que les plannings, les procédures, les systèmes de workflow. Cette remarque est d’autant plus importante lorsqu’il s’agit d’analyser le travail de professionnels des ressources humaines, pour qui le système de travail est souvent dématérialisé.

Ajoutons, comme l’a souvent rappelé Daniellou (notamment 2004, 2013), que pour que les processus de conception aboutissent à des systèmes opérationnels, le système technique doit être pensé en articulation avec le système organisationnel, les règles de l’organisation.

Pour ces multiples raisons, il nous semble nécessaire de considérer dans un même ensemble les activités de réélaboration des règles et les activités de conception. C’est pourquoi plutôt que de parler de « l’activité collective de réélaboration des règles », nous parlerons le plus souvent « d’activité collective de réélaboration des règles et de reconception du système », ou encore « d’activité de régulation de l’organisation et du système technique de travail », que nous abrégerons le plus souvent par

« ACR »1.

Cette activité de réélaboration des règles et de reconception est une activité collective dans le sens de Caroly et s’inscrit dans un plus grand ensemble qui est l’activité métafonctionnelle collective. Contrairement à l’ACR, l’activité métafonctionnelle collective (AMC) n’est pas conditionnée par l’existence d’un collectif de travail, et elle intègre les échanges collectifs (informations, méthode, logique d’action, logique d’organisation, expériences) qui ne conduisent pas systématiquement à une transformation à court terme des règles (règles de structures, métarègles, règles de métier), ni à une reconception du système de travail.

1 Pour agrémenter la lecture, nous utiliserons aussi par la suite l’expression « activité collective », dans le sens d’ACR.

133 Figure 13 – L'activité collective de régulation, comme partie de l'activité

métafonctionnelle collective

Activité collective et encadrement

Nous l’avons déjà évoqué, Falzon et al. (1997) et Caroly (2010) ont souligné le rôle déterminant des encadrants dans la réalisation et le développement des activités collectives. Ils peuvent en effet favoriser l’activité métafonctionnelle, individuelle et collective, en octroyant des temps utiles à la réflexivité, en proposant des espaces et des supports d’échange sur le travail, en stimulant l’expression des savoirs, des savoir-faire, des expériences et des logiques d’action. Ils peuvent également contribuer à l’activité collective de réélaboration des règles et de reconception du système en favorisant la reconnaissance des compétences, en s’ouvrant dans leur activité de prescription et de conception à une « prise en compte des régulations opératives et collectives mises en œuvre par les opérateurs » (Caroly, 2010, p. 110) ou en construisant des espaces de débat permettant de partager des critères sur la qualité du travail et le sens du travail.

L’engagement de l’encadrant dans l’activité métafonctionnelle collective de ses subordonnés et dans l’ACR se joue essentiellement dans son activité fonctionnelle.

S’il peut occasionnellement faire part de ses propres réflexions métafonctionnelles

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concernant son travail, son rôle est avant tout d’animer, cadrer, contrôler les activités collectives, et de négocier de nouvelles règles, un nouveau cadre.

Figure 14 – Le rôle de l'encadrant dans les activités collectives

Néanmoins, face à ses pairs et son propre encadrement, l’encadrant peut lui aussi s’engager dans une activité métafonctionnelle collective voire une activité collective de réélaboration de son propre système de règles et de son propre système technique, et ainsi développer un autre collectif de travail et ses propres ressources.

4.3.3. Pouvoir d’agir et marges de manœuvre : une

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