• Aucun résultat trouvé

Accès maritimes et terrestres

Dans le document La Béotie et la mer (Page 61-65)

La plaine de Dhrosia

3) Accès maritimes et terrestres

Dans la mesure où l’on ne sait pas avec certitude où se trouvait Salganeus, il est difficile de parler de son port, si tant est qu’elle en ait eu un. En admettant que Salganeus se soit trouvée en bord de mer, il ne s’agissait que d’un petit village qui ne devait pas disposer d’un port bâti et les pêcheurs devaient se contenter de tirer leurs embarcations sur la plage.

Il en va tout autrement pour Aulis qui est au contraire « bien connue par la grande capacité de son port » selon les mots de Pline274. Ce port est en réalité double, deux baies séparées par le

Vesalas appelées respectivement Mikro Vathy et Bathys Limen. Aulis se situe sur le Mikro Vathy qui constitue son port régulier275. Celui-ci ne peut contenir que 50 navires selon Strabon et il

propose donc que la flotte des Achéens se soit plutôt réunie dans le Bathys Limen276. Si ce dernier

ne permet en aucun cas de stationner une flotte de plus de mille vaisseaux telle que présentée dans le Catalogue des Vaisseaux, le Bathys Limen n’en reste pas moins un excellent port, qui, associé aux bonnes capacités du Mikro Vathy, fait d’Aulis la meilleure place maritime de Béotie.

Aucun vestige d’un port en dur n’a été découvert à Aulis même s’il faudrait entreprendre de plus importantes fouilles sur cet aspect-là du site277. Sur la base de carottages, il a été déterminé

que les deux baies antiques étaient bien plus étendues que ce qu’elles sont aujourd’hui, prenant

273 C’est ce que traduirait le témoignage de Strabon (IX, 2, 8) qui indique qu’il s’agit d’une possession des

Tanagréens : « Ταναγραίων πολίχνιον Αὐλίδος ». Voir FISSORE E., Tanagra de Béotie, p. 126.

274Histoire Naturelle, IV, 7, 26 : « Aulis capaci nobilis portu ». 275 Strabon, IX, 2, 8.

276Ibid.

277 GHILARDI M., « Geoarchaeology of Ancient Aulis », p. 2080, les fouilles archéologiques entreprises à Aulis

60

alors la forme de lagunes dont la profondeur n’excédait pas 2 à 3 mètres sur leurs bords278. La forme

des baies permet de protéger naturellement les navires des tempêtes et courants puissants que l’on trouve à proximité de l’Euripe279. Par deux fois on a mention de flottes importantes stationnant à

Aulis : une première fois en 313, lorsque Polémaios, s’y rend avec 160 navires280 et une deuxième

fois en 304, avec Démétrios Poliorcète et toute sa flotte281.

D’un point de vue maritime, Salganeus comme Aulis sont très bien reliées aux différentes voies navigables du canal d’Eubée, intégrées respectivement dans les bassins au nord et au sud de l’Euripe. Il devait ainsi être facile de rejoindre depuis leurs ports des cités eubéennes telles que Érétrie ou Chalcis, comme le fit Hésiode282.

Pour ce qui est des accès terrestres, les deux villes sont inégalement desservies. Depuis Aulis, on devait aisément pouvoir atteindre Thèbes en contournant le Megalo Vouno par le sud pour rejoindre Mykalessos, trajet adapté aux véhicules283 comme il était facile aussi de longer la côte

pour rejoindre Tanagra ou Délion284.

Salganeus semble plus isolée. La seule route naturelle pour sortir de la plaine de Dhrosia va droit au sud vers Mykalessos, traversant les montagnes par le col d’Aniforitis, un chemin difficile285.

Deux routes modernes, taillées dans la roche, permettent de quitter la plaine en longeant la côte et sont également attestées dans l’Antiquité286. La première permet de rejoindre Aulis comme l’a fait

Paul Émile en 167287, tandis que la seconde suit la plage vers l’ouest jusqu’à Anthédon, route que

prit Hérakleides le Critique288. Le trajet pouvait être fait en un peu plus d’une heure de marche289.

Il est impossible de savoir quand ces routes ont été créées mais il se peut qu’elles soient devenues nécessaires après la construction du pont sur l’Euripe en 410290. En effet, même si ce n’était pas

son objectif premier291, l’installation de ce pont dut créer une nouvelle route commerciale

278 GHILARDI M., « Geoarchaeology of Ancient Aulis », p. 2079-80. 279Ibid. p. 2080.

280 Diodore, XIX, 77, 2-3.

281 Diodore, XX, 100, 5, flotte qui devait assurément être considérable dans la mesure où Diodore indique que

Démétrios s’y rend avec toute son armée après le siège de Rhodes, siège qu’il avait entrepris avec 200 vaisseaux longs et 170 vaisseaux de transport (XX, 82, 4).

282Les Travaux et les Jours, v. 650-655.

283 GHILARDI M., « Geoarchaeology of Ancient Aulis », p. 2074.

284 C’est cette route qu’empruntèrent les Romains en 192 dont le but était de rejoindre Chalcis en passant par

Délion et Aulis (Tite-Live, XXXV, 50, 11).

285 BAKHUIZEN S. C., Salganeus¸ p. 20. 286Ibid.

287 Tite-Live, XLV, 27, 9. 288 I, 26.

289 LEAKE W. M., Travels in North Greece vol. II, p. 270-271. 290 BAKHUIZEN S. C., Salganeus, p. 20.

291 C’est Diodore de Sicile, XIII, 47, 3-6, qui rapporte l’épisode de la construction de ce pont en plein cœur de

61

importante entre Chalcis et l’intérieur de la Béotie, route passant obligatoirement par Salganeus. Si la plaine de Dhrosia s’en trouve bien reliée à l’intérieur des terres par ces routes, il faut noter qu’elles sont faciles à défendre par qui contrôle la plaine, et donc bien intégrées dans le système défensif autour de Salganeus292.

La région autour de l’Euripe apparaît au centre des contacts que pouvaient avoir les Béotiens avec l’extérieur. Probablement en raison de sa proximité avec la grande cité de Chalcis, située sur la rive eubéenne du détroit, le versant béotien n’a jamais compté aucune cité importante mais plusieurs villages, tirant au mieux parti de leur situation géographique. Aulis constitue un cas particulier en raison de la renommée de l’épisode mythique dont elle est le théâtre tout en étant, d’autre part, un excellent port béotien. Les qualités maritimes des ports cumulées à l’intérêt stratégique de l’Euripe ont à de nombreuses reprises été la source de tourments pour les populations locales qui eurent à subir le passage de puissances étrangères. Ces épisodes violents sont visibles dès la guerre du Péloponnèse293 mais c’est surtout à l’époque hellénistique, au moment

où Chalcis est perçue comme un « verrou de Grèce-Centrale » que la région fut le plus touchée. Ces villages béotiens ne semblent néanmoins ne jamais avoir connu de fin brutale, perdurant continuellement jusqu’à l’époque romaine.

292 BAKHUIZEN S. C., Salganeus, p. 137.

293 Où l’on voit les habitants d’Aulis se réfugier à Thèbes de peur d’une attaque athénienne au début du conflit

(Helléniques d’Oxyrynchos, 17, 3) ou en 413 lorsque des mercenaires thraces débarquent et pillent Mykalessos (Thuc., VII, 29, 1-2).

62

Anthédon

En longeant la côte septentrionale béotienne d’est en ouest, le dernier port rencontré est Anthédon, comme l’indiquait déjà Homère dans son Catalogue des Vaisseaux par la mention d’ « Ἀνθηδόνα τ’ἐσχατόωσαν »294, « Anthédon, tout au bout du pays ».

1) Description générale

Anthédon apparaît comme une petite ville côtière sur une étroite plaine coincée entre la mer au nord et la chaîne du Messapion au sud tandis qu’à l’ouest, la plaine est fermée par le mont Ptoion295. Une vallée entre les deux massifs permet de rejoindre le lac Paralimni au sud-ouest. La

ville se situe elle-même sur le versant nord du Messapion dont la pente, tournée vers la mer, forme deux terrasses qui servaient d’acropole296. Aucun village moderne ne couvre le site antique297 si bien

que sont encore facilement visibles des vestiges de la muraille sur le côté nord de l’acropole298. Ce

mur d’enceinte devait englober soit l’acropole seule, soit la ville entière et le port compris, ce dernier étant un peu à l’ouest299.

294Iliade, II, v. 508.

295 FARINETTI E., Boiotian Landscapes, p. 201.

296 MOGGI M., OSANNA M., Pausania Guida della Grecia Libro IX, La Beozia, p. 342. 297 Le village moderne le plus proche étant Lukisia, à environ deux kilomètres. 298 MOGGI M., OSANNA M., Ibid.

63 Œuvre non reproduite par respect du droit d’auteur

Dans le document La Béotie et la mer (Page 61-65)