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Chapitre I : La lutte contre le bruit en France, approche technique et normative

1 La politique de lutte contre le bruit durant les trente dernières années

1.3 La politique de lutte contre le bruit depuis les années 90

1.3.2 Évaluation et gestion du bruit dans l'environnement

La directive 2002/49/CE relative au bruit ambiant vient complémenter la législation communautaire sur le bruit. Ses objectifs consistent à définir une approche commune à la gestion du bruit au niveau européen au moyen de cartes de bruit stratégiques ; prévenir et réduire les bruits excessifs au moyen des plans d’action ; protéger les zones calmes ; faire en sorte que l’information et la participation du public soient au cœur du processus.

Ces dispositions ont été transposées dans le droit français par l’ordonnance n°2004-1199 du 12 novembre 2004 ainsi que par la loi n° 251 du 27 octobre 2005 portant les diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de l’environnement. Ces textes ont mis l’accent sur les niveaux de bruit excessifs relatifs aux infrastructures routières, ferroviaires et aéroportuaires.

Le décret n° 2006-361 du 24 mars 2006 relatif à l’établissement des cartes de bruit et des plans de prévention du bruit dans l’environnement précise les conditions d'application des articles L572-1 à L572-11 du Code de l'environnement. Les mesures prévues par ce décret ont pour objet d'évaluer et de prévenir les nuisances sonores occasionnées par les activités humaines et notamment les différents modes de transports routiers, ferroviaires, et aériens, ainsi que les activités industrielles. En 2007, le ministère de l’Ecologie, du Développement durable et de l’Aménagement du territoire e a communiqué aux services préfectoraux une circulaire relative à l’élaboration des cartes de bruit et des plans de prévention du bruit dans l’environnement. Ce texte daté du 7 juin 2007 définit les modalités d’échange des données collectées entre les services de l’Etat et les collectivités chargées de réaliser leur cartographie sonore. La circulaire précise la mission des différents services de l’Etat et vient compléter les instructions qui leur avaient déjà été adressées.

Les cartes de bruit permettent d’effectuer une évaluation globale de l’exposition au bruit dans l’environnement et d’établir les prévisions générales de son évolution. Ces cartes comportent un ensemble de représentations graphiques et de données numériques. Elles sont élaborées sur la base d’indicateurs obtenus à partir de la modélisation des niveaux sonores fixés dans des conditions définies. Les cartes relatives aux villes tiennent compte du bruit routier, ferroviaire, aérien mais aussi du bruit des activités industrielles et, le cas échéant, des autres sources de bruit.

Le plan de prévention du bruit dans l’environnement (PPBE) s’inscrit dans une démarche de politique environnementale destinée à prévenir les effets du bruit, à réduire si nécessaire les

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niveaux sonores, et à protéger les zones calmes101. Il évalue le nombre de personnes exposées à des niveaux élevés du bruit et identifie les sources des bruits dont les niveaux devraient être réduits. Il recense également les mesures prévues par les autorités compétentes pour traiter les données relevées par les cartes de bruit.

A - Champ d’application et délais d’établissement

Les cartes de bruit et les plans de prévention sont établis en deux étapes :

- pour les agglomérations de plus de 250 000 habitants, les infrastructures routières dont le trafic dépasse 6 millions de véhicules par an, les voies ferrées comptant plus de 60 000 passages de train par an et les aéroports de plus de 50 000 mouvements par an. L’échéance est fixée au plus tard au 30 juin 2007 pour les cartes de bruit, au 18 juillet au plus tard pour les plans de prévention ;

- pour les agglomérations de plus de 100 000 habitants, les routes dont le trafic dépasse 3 millions de véhicules par an et les infrastructures routières comptant plus de 30 000 passages de train par an, l’échéance est fixée au 30 juin 2012 pour les cartes de bruit et au 18 juillet 2013 pour les plans de prévention.

B - Finalités

Les cartes de bruit et les plans de prévention peuvent permettre aux autorités compétentes de limiter l’augmentation du bruit à travers notamment la gestion des projets d’aménagement, des politiques urbaines, les déplacements, et les rapports avec les habitants.

101 Les zones calmes sont les espaces extérieurs remarquables par une faible exposition au bruit et dans lesquels l’autorité compétente tend à maîtriser l’évolution de cette exposition.

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Champs d’intervention Objectifs

Le transport routier - Intégrer la réduction des niveaux de bruit dans les Plans de Déplacements Urbains (PDU) et réduire de la densité du trafic ;

- Diminuer les vitesses (par exemple zones 30, aménagement de ralentisseurs et de chicanes, rétrécissement de la chaussée) ;

- Favoriser l’utilisation des modes de transports en commun ; - Organiser et gérer le trafic des poids lourds et des livraisons ;

- Réaliser des écrans acoustiques et couvrir des traçons des grandes infrastructures routières ;

- Utiliser des revêtements routiers peu bruyants,

Le transport aérien - Négocier de nouvelles mesures sur les aéroports pour restreindre d’usage des avions les plus bruyants et renforcer le contrôle des règles aéroportuaires ;

- Organiser la prévention de l’urbanisme au voisinage des aérodromes, avec les plans d’exposition au bruit et l’aide à l’insonorisation des logements.

L’urbanisme - Intégrer la problématique du bruit dans les procédures d’urbanisme et de planification urbaine (SCOT, PLU, PADD) de façon à en tenir compte lors de l’instruction du permis à construire ;

- Choisir les secteurs d’implantation des activités bruyantes et des activités sensibles ;

- Imposer un retrait des constructions par rapport à l’alignement des voies de circulation ;

- Adapter la hauteur des bâtiments aux conditions de propagation du bruit (bâtiments-écrans ou épannelage) ;

- Orienter les bâtiments et les équipements bruyants de façon à réduire la propagation du bruit aux zones sensibles ;

- Favoriser la continuité des façades dans les secteurs urbains tout en créant des poches calmes dans les îlots ;

- Agir sur la construction des bâtiments (isolation de façade).

La relation avec les habitants

- Informer et consulter le public pendant et après l’élaboration du PPBE ;

- Sensibiliser les habitants, améliorer l’efficacité du traitement des plaintes et des médiations.

Source : M. Abou Warda sur la base d’un travail de recherche bibliographique et les textes réglementaires portant la question.

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Tab. 4 - Objectifs des cartes de bruit et des PPBE selon les domaines d’intervention

C - Autorités compétentes

Les cartes de bruit et les PPBE sont arrêtés :

- 1° Par le représentant de l'Etat dans le département pour les infrastructures ferroviaires et les infrastructures routières et autoroutières d'intérêt national ou européen faisant partie du domaine routier national ;

- 2° Par l'organe délibérant de la collectivité territoriale gestionnaire pour les infrastructures routières autres que celles mentionnées à l'alinéa précédent ;

- 3° Par les conseils municipaux ou, s’il en existe, par les organes délibérants des établissements publics de coopération intercommunale compétents en matière de lutte contre les nuisances sonores, pour les agglomérations de plus de 100 000 habitants.

D - Contenu

Le PPBE comprend :

un rapport de présentation formulant d’une part, une synthèse des résultats de la cartographie de bruit faisant apparaître le nombre de personnes exposées dans leurs habitations ou leurs lieux d’activités à un niveau de bruit excessif, et d’autre part, le descriptif des infrastructures des agglomérations concernées ;

s’il y a lieu, les critères de détermination des zones calmes, leurs localisations et les objectifs de leur préservation ;

les objectifs de réduction du bruit dans les zones exposées à un bruit dépassant les seuils limites mentionnés à l’article L. 572-6 du Code de l’environnement et précisés par l’article 7 de l’arrêté du 4 avril 2006 ;

les mesures permettant de prévenir ou réduire le bruit, prévues pour les cinq années à venir par les autorités compétentes et les gestionnaires des infrastructures y compris les mesures prévues pour préserver les zones calmes ;

s’ils sont disponibles, les financements et échéances prévus pour mettre en œuvre les mesures définies ;

les motifs de choix des mesures et l’analyse des coûts et avantages attendus des différentes mesures envisageables ;

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une estimation de la diminution du nombre de personnes exposées au bruit à l’issue de la mise en œuvre des mesures prévues ;

un résumé non technique du plan.

Le retard de la France dans l’application de la directive

Avec la loi de ratification du 27 octobre 2005, La France figure parmi les "retardataires" en matière de transposition de la directive européenne. Ce pays est parmi les Etats ayant reçu un dernier avertissement écrit de la part de la commission européenne (l’Autriche, la Belgique, la Finlande, la Grèce, l’Irlande, l’Italie, le Luxembourg, le Portugal, la République Tchèque et le Royaume-Uni. Mais quelques villes pionnières dont Paris, Londres, Birmingham, Bruxelles ont élaboré leurs cartographies du bruit dans les délais fixés.

Mais Paris est en avance

La mairie de Paris a publié le 22 mai 2003 un outil de présentation du bruit routier diurne. Cette "cartographie dynamique"102 comporte 315 cartes permettant de visualiser le bruit routier moyen et journalier (entre 6h00 et 22h00) sur l’ensemble de la ville. La mairie de Paris se met, quatre ans avant l’échéance, en conformité avec la réglementation européenne. Sa nouveauté par rapport aux cartes existant en Europe (Birmingham, Madrid et Bruxelles) est le traitement de l’exposition de la population au bruit. Il est désormais possible de connaître, bâtiment par bâtiment, le niveau sonore d’une zone.

Ces documents devraient constituer un outil d’aide à la décision, grâce aux simulations qui permettent d’évaluer l’impact des nouveaux aménagements sur les niveaux sonores (couverture du boulevard périphérique, tramway, espaces verts, couloirs de bus, changement de revêtement routier, mur antibruit…). « Grâce à ce document, on apprend que des actions sont à entreprendre

d’urgence. », souligne Yves Contassot, adjoint au Maire de Paris chargé de l’environnement. Mais

il est néanmoins regrettable, selon l’association SOS Bruit Paris, que certaines données prévisibles (activités commerciales, sorties d’écoles, etc.) n’aient pas été intégrées. Les pics de bruit provoqués par les démarrages, avertisseurs, klaxons, sirènes, antivols, ne sont pas encore pris en considération dans le calcul.

En 2006, la ville de Paris a rendu public son plan de lutte contre le bruit. Ce plan comprend une cinquantaine de mesures dont certaines sont en cours de réalisation. Parmi les actions importantes

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proposées : la réduction de la vitesse automobile par l’extension des zones 30 km/h à l’ensemble de la capitale. D’autres actions sont d’ores et déjà opérationnelles. Elles concernent l’encouragement des transports en commun, l’aménagement des quartiers verts, le renouvellement de chaussée par des produits moins bruyants…

La Ville met également en place, en partenariat avec l’Agence nationale de l’amélioration de l’habitat (ANAH), un programme d’aide financière à la réalisation de travaux d’isolation acoustique et thermique des logements. La mairie a annoncé des mesures pour l’amélioration de la qualité acoustique des locaux municipaux recevant du jeune public (restaurants scolaires, crèches, salles de repos des maternelles, locaux de sport et centres d’animation). D’ici 2009, le projet de partenariat avec l’Etat et la Région, prévoit l’aménagement acoustique de 70 équipements municipaux.

Concernant le bruit des activités municipales, la Mairie de Paris intègre le bruit en tant que critère dans l’achat de matériels, d’engins et de véhicules : colonnes à verre insonorisées, bacs à ordures ménagères, bennes électriques ou fonctionnant au gaz naturel…

En matière de bruit de voisinage, la Ville prévoit la mise en place de « relais bruit » au niveau des mairies d’arrondissement pour régler autant que possible, les litiges à l’amiable